Coronavirus : salons virtuels pour entreprises privées de voyages

Cela a tout l’air d’un jeu vidéo. A l’écran, la caméra surplombe un centre de conférences puis file vers l’entrée d’un hall, où des invités se pressent à travers leur « avatar ». Dans la salle plénière, virtuellement assis les uns à côté des autres, des patrons, banquiers, consultants suivent parfois à des milliers de kilomètres de distance les mêmes conférences. Sur scène, ce sont deux hommes d’affaires imaginaires qui conversent, laissant tour à tour apparaître leur vrai visage à l’image quand ils activent leur caméra.

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Pandémie oblige, cette année, l’université d’été de l’internationalisation des entreprises a investi un nouvel univers, celui de la 3D. Ce procédé, déjà utilisé dans bien des domaines – galeries, showrooms ou foires –, pourrait bien apporter un peu de répit à ce secteur de l’export fortement chahuté par la crise actuelle. « Les voyages, les salons, tout ou presque est annulé. Résultat, en l’espace de trois mois, certains commerciaux n’ont pas pu voir un seul nouveau client, raconte Etienne Vauchez, président du think tank La Fabrique de l’exportation. C’est difficile. Comment voulez-vous réussir à convaincre un Russe, un Chinois ou un Turc d’acheter un nouveau produit en ne passant que par Zoom ? »

Des « agents de liaison »

Dans l’urgence, les entreprises qui pouvaient se le permettre n’ont eu d’autre choix que de renouer avec les bonnes vieilles méthodes. A savoir le recours à des « agents de liaison » présents dans le pays pour remplacer les négociateurs habituels. Un chamboulement pour ces acteurs de terrain qui, faute de pouvoir voguer d’un continent à l’autre, se retrouvent à manager des intermédiaires à distance. Entre retour en arrière et innovations dignes d’un roman de science-fiction, le tâtonnement bat donc encore son plein.

« De nouveaux outils plus puissants que LinkedIn vont sans doute émerger pour offrir des mises en relation bien plus efficaces entre professionnels, espère cependant Etienne Vauchez. Voyez par exemple Alibaba. Sans le 11-Septembre, le SRAS et l’anthrax, cette plate-forme de commerce international chinoise n’aurait peut-être jamais connu son envol. Le point de départ de son succès tient au fait que, pendant plus de deux ans, entre 2001 et 2003, en raison de ces crises successives, les acheteurs américains ont moins voyagé en Chine, et qu’il leur a fallu trouver un autre moyen pour faire des affaires ! »

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Numériques ou pas, ces solutions auront sans doute de l’avenir au-delà de la crise sanitaire. Selon un récent sondage réalisé par la revue Fortune, plus de la moitié des 500 plus grands groupes américains estiment que le niveau du nombre de voyages ne sera plus jamais le même qu’avant la pandémie.

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Le travail chamboulé par le Covid-19

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Publié aujourd’hui à 16h00

A Sochaux, chez PSA Groupe, la rentrée n’est assurément pas comme les autres. Situé dans le Doubs, ce site est un des huit du constructeur automobile à mener jusqu’en octobre une expérience de grande ampleur en matière de télétravail. Les salariés ne sont sur site qu’en moyenne 1,5 jour par semaine. « Comme nous avons ici à la fois des activités tertiaires, de production et de R & D, c’est un véritable cas d’école ! », soulignent des syndicalistes. Eux aimeraient prolonger l’expérience jusqu’en décembre au moins, avant de conclure un accord global. « Cela fait partie de la négociation », expliquent-ils.

Mais la direction, elle, veut aller vite. Pour une multinationale comme PSA, la crise sanitaire n’a fait qu’accélérer des transformations déjà engagées depuis des années. Et, pourtant, même chez ce pionnier français, cette mutation est loin d’aller de soi. Après le tourbillon des derniers mois, nombre de sociétés se voient contraintes de repenser leur organisation et, a fortiori, de réfléchir aux multiples défis que cette évolution culturelle suppose. « Le télétravail est tout sauf une petite affaire, confirme l’Association nationale des DRH (ANDRH). Pas moins de 93 % des DRH sont bien conscients que ces évolutions vont engendrer une mutation des pratiques managériales et sociales. »

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Dans un contexte d’éparpillement des salariés, préserver la cohésion de l’entreprise est une gageure, que le futur ambigu des sièges sociaux pourrait bien à lui seul symboliser. Incontournables par le passé, ces centres névralgiques, aujourd’hui vidés de leurs salariés, voient en effet leurs murs réagencés, et leur rôle questionné. « Cette période semble prendre acte de la fin du “principe d’unicité du lieu de travail”, concède Jawad Lemniaï, directeur chez EY People Consulting. Le phénomène est massif et sans doute irréversible. Plus encore qu’avant la crise, on continuera de diversifier les lieux d’exercice de son activité professionnelle en travaillant chez soi, chez un client, dans des espaces mixtes ou partagés, de type coworking ou tiers-lieu. »

Mobilités accrues

Avec l’essor du numérique, les mobilités se sont accrues au sein même des entreprises, tandis que les salariés, ces « nouveaux Touaregs du tertiaire », selon l’expression du philosophe Bruno Latour, élisent domicile toujours plus loin du lieu de travail. « On s’attend encore à ce que nombre de nos collègues déménagent en banlieue », anticipe Constance Herbeau, directrice des ressources humaines de Becoming. Basé à Paris, Lille et Bruxelles, ce groupe de communication et de conseil, déjà adepte du télétravail, a décidé de le généraliser à la rentrée.

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La longue attente des ouvrières du nettoyage harcelées à la gare du Nord

A la gare du Nord, à Paris, le 1er avril.

Aujourd’hui, à la gare du Nord, à Paris, au sein de la société H. Reinier, prestataire de nettoyage, filiale du groupe Onet, « les femmes sont respectées », affirme Ramouna (tous les prénoms ont été modifiés), ouvrière « nettoyeuse » de trains, qui a été victime de violences sexuelles de la part d’un chef. C’est « ce qui a changé, dit-elle, depuis qu’on a gagné aux prud’hommes. Les hommes savent que, s’il y a de l’irrespect, la femme ira aux prud’hommes ».

Le 17 novembre 2017, le conseil de prud’hommes de Paris avait condamné H. Reinier pour harcèlement et agressions sexuels, harcèlement moral et discrimination syndicale subis pendant plusieurs années par quatre plaignantes, dont Ramouna, et un plaignant, Rachid. Tous étaient soutenus par l’Association européenne contre les violences faites aux femmes (AVFT). Les mesures pour protéger ces femmes et cet homme avaient été « totalement inexistantes », et l’employeur avait « pris le parti délibéré de ne leur accorder aucun crédit de bonne foi et de les sanctionner », après la dénonciation des faits, lisait-on dans le jugement, reprenant les conclusions du défenseur des droits.

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Mais, jeudi 10 septembre, au Palais de justice de Paris, en attendant l’audience en appel interjeté par H. Reinier, on pouvait encore lire dans le regard de Ramouna, qui travaille toujours sur le site, les souffrances qu’elle a endurées. « Je ne peux pas avoir d’enfants. Avec ces histoires de harcèlement, j’ai fait une dépression, je prends des médicaments. » Elle a aussi fait plusieurs fausses couches. « J’espère qu’on va gagner en appel, mais j’ai perdu ma santé. » Ses trois collègues – l’une a été licenciée après sa dénonciation et les deux autres sont en arrêt-maladie de longue durée – sont présentes aussi, ainsi que Rachid, ex-délégué, licencié pour les avoir soutenues. « L’argent, disent-elles, ne rachète pas la santé ni le moral perdus. Ils nous ont humiliées d’une façon incroyable. »

Deux nouvelles victoires aux prud’hommes

Cette affaire avait commencé avec la dénonciation, début 2012, par un élu CFDT, Rachid, de racket à l’embauche impliquant un chef, par ailleurs délégué de SUD-Rail à l’époque, qui sera rapidement démandaté. Rachid, parce qu’il avait soutenu des femmes victimes de racket, a fait l’objet de multiples sanctions et tentatives de licenciement, dont la dernière a abouti, en 2016, ainsi que d’une menace de mort. Quant aux femmes, parce qu’elles avaient refusé de signer une pétition demandant le départ de Rachid, l’accusant d’exhibitionnisme, elles ont eu des représailles sous forme de changement de poste ou d’horaires, de harcèlement sexuel et moral, voire d’agression sexuelle. Le conseil de prud’hommes avait annulé les sanctions et le licenciement infligés à Rachid, qui demande sa réintégration, de même que l’une des femmes victimes.

Que s’est-il passé depuis ce jugement ? Les responsables ou complices de ces faits « ont été reclassés à des postes à responsabilité », voire promus, constate Nazima Benbabaali, déléguée syndicale SUD-Rail SNCF, chargée du suivi des salariés de H. Reinier sur ce site. Et si personne n’est plus venu solliciter SUD pour de tels faits, elle affirme avoir encore « vu des gestes déplacés en 2018 et il y a quelques semaines », notamment envers « une femme victime qui n’a pas osé déposer plainte, mais qui a témoigné anonymement auprès de l’AFVT ».

Il y a aussi eu deux nouvelles victoires aux prud’hommes : le 12 mai, une salariée victime de viol avait fini par dénoncer les faits avant d’être licenciée deux mois plus tard. L’employeur a fait appel. Et un autre délégué, licencié après avoir témoigné pour une victime et pour Rachid, voit reconnaître, dans un jugement du 26 juin, la discrimination et le harcèlement moral qu’il a subis ainsi que son licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il n’y a pas d’appel.

Lors de l’audience, qui s’est déroulée en présence de Slim Ben Achour, avocat et représentant du Défenseur des droits, Virginie Monteil, avocate de l’employeur, a estimé, que « les salariés n’établissent pas les faits » et, en résumé, qu’« il n’y a rien dans le dossier ». Délibéré le 28 octobre.

Mode enfantine : les 1 600 salariés de Kidiliz dans l’expectative

Patrick Puy enchaîne les procédures judiciaires. Le spécialiste de la restructuration d’entreprises est au chevet du groupe Kidiliz depuis début juillet. A la demande de son propriétaire, le groupe chinois Zhejiang Semir Garment, et sous « la pression de ses créanciers », celui qui a bouclé le démantèlement de Vivarte, lors de la liquidation de sa principale filiale, La Halle, début juillet, remplace Francis Srun, représentant de l’actionnaire.

Deux mois après son arrivée en tant que président, le groupe, qui, entre autres, détient les enseignes de mode enfantine Z et Catimini et la marque de layette Absorba, a été placé en redressement judiciaire, jeudi 10 septembre, par le tribunal de commerce de Paris.

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La restructuration de cette entreprise fondée en 1962 par Roger Zannier et sa sœur Josette, à Saint-Chamond (Loire), exigeait « 50 millions d’euros », évalue M. Puy. L’obtention d’un prêt garanti par l’Etat de ce montant était conditionnée à l’apport en capital de 30 millions d’euros par son actionnaire. Bien que puissant, côté à la Bourse de Shenzhen, le groupe, qui revendique être l’un des plus grands détaillants de mode enfantine en Chine, a refusé d’y procéder.

Le déficit devrait plonger à « près de 80 millions d’euros »

Deux ans après son rachat en grande pompe par Semir à la famille Zannier, Kidiliz est donc au bord du gouffre. Il est confronté à une forte baisse d’activité et à une aggravation de ses pertes opérationnelles. Le chiffre d’affaires pour l’année 2020 devrait s’établir à 260 millions d’euros, contre 380 millions d’euros en 2019. Le déficit devrait plonger à « près de 80 millions d’euros », estime M. Puy, contre 23 millions d’euros l’an dernier.

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La crise économique due à la pandémie de Covid-19 et aux mesures de confinement en Europe n’explique pas toutes les difficultés de l’entreprise. « Le groupe a été géré de manière patrimoniale pendant des années », affirme M. Puy. Et son actionnaire – le chinois Semir en a pris le contrôle en 2018 – n’aurait pas « pris la mesure des restructurations nécessaires ». Les représentants du personnel ont également souligné « l’inertie » du nouveau propriétaire, qui, « jamais, ne s’est investi à la hauteur de son projet ». Ce dernier avait cependant lancé la cession de la chaîne Z, en 2019. En vain.

Une liste qui s’allonge

L’ancien sponsor de l’équipe de Greg Lemond, vainqueur du Tour de France en 1990, ses 187 boutiques en France et ses 198 magasins à l’étranger n’ont pas trouvé preneur. Et, à en croire M. Puy, cet actif serait toujours le moins attrayant de l’ensemble des filiales du groupe.

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General Electric s’apprête à de nouvelles suppressions d’emplois en France

Des salariés de General Electric, à Belfort, en octobre 2019.

L’annonce ne pouvait tomber plus mal, alors que le gouvernement détaille, jour après jour, son plan de relance de 100 milliards d’euros et soutient des relocalisations industrielles pour contenir la déferlante attendue du chômage et créer 160 000 emplois. En grande difficulté dans plusieurs de ses métiers, dont l’activité plus que centenaire de l’énergie, General Electric (GE) a annoncé, mercredi 9 septembre, la restructuration de deux divisions : les équipements pour barrages hydroélectriques (GE Hydro) en France et les lignes à haute tension (GE Grid Solutions) en Europe.

Ces opérations risquent, selon les syndicats, d’entraîner la suppression de 753 postes dans l’Hexagone. Sans démentir de telles coupes dans les effectifs, le conglomérat américain annonce la présentation au comité d’entreprise européen de deux « projets de transformation », qui doivent lui permettre de « retrouver une situation financière viable ». Les négociations commenceront le 15 septembre dans la branche Hydro et à la fin du mois dans la branche Grid Solutions.

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L’annonce a immédiatement réveillé les tensions avec l’Etat. « Il y a des difficultés et cela peut amener certaines décisions, mais certainement pas des décisions d’aubaine », qui sont « inacceptables », a déclaré le ministre de l’économie, des finances et de la relance, jeudi 10 septembre, devant des sénateurs. Des propos qui ne visaient pas spécialement GE, affirme l’entourage de Bruno Le Maire, qui n’en a pas moins demandé à ce que « les choses soient claires » avec GE. En octobre 2019, il était parvenu – avec la forte pression des syndicats – à réduire le plan de 1 044 suppressions d’emplois annoncé au printemps : sur les 792 prévus à Belfort, 307 avaient pu être sauvés moyennant des efforts des salariés.

13 000 salariés en France

GE, qui emploie un peu plus de 13 000 salariés en France, souligne qu’il veut y rester un « acteur fort ». Et que « toute référence selon laquelle [leurs] propositions de transformation ont un caractère opportuniste est totalement inexacte et infondée ». Une source proche du groupe se veut plus explicite : « Il ne faudrait pas que GE, qui a toujours bien travaillé avec l’Etat dans ses précédents plans de transformation pour garantir de bonnes conditions pour les salariés impactés, devienne le bouc émissaire de la situation sociale actuelle. »

Le dossier est politiquement sensible pour Emmanuel Macron. Les syndicats et l’opposition ne manquent jamais de lui rappeler qu’en 2014, alors secrétaire général adjoint de l’Elysée puis ministre de l’économie, il ne s’était pas opposé à la vente d’Alstom Power à GE pour 12 milliards d’euros – de laquelle une partie du produit de cession a permis de renforcer Alstom Transport. De plus, son ancien conseiller industriel à Bercy, Hugh Bailey, est aujourd’hui patron de GE France. Or, les engagements pris par les Américains lors du rachat d’Alstom (1 000 créations d’emplois en France) n’ont pas été tenus. Et, comme prévu, le groupe a dû verser une pénalité de 50 millions, utilisés pour accompagner les salariés.

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Bénéteau réduit ses effectifs pour passer la crise liée au coronavirus

Au port de La Rochelle, en septembre 2016.

Le choc est rude pour toute une région. Le numéro un français et l’un des leaders mondiaux de la plaisance, le groupe Bénéteau, a annoncé, mardi 8 septembre, la mise en place d’un plan social mondial pouvant aboutir, dans la pire des situations, à la réduction d’effectifs de 1 390 salariés, soit un sixième de ses emplois. Pour rappel : Bénéteau, ce sont 8 400 salariés dans le monde, dont 5 600 en France et 4 400 en Pays de la Loire. En Vendée, son berceau industriel, l’entreprise est le premier employeur privé.

Le plan prévoit la cession ou la mise en sommeil de quatre sites industriels dans son activité bateaux, dont deux usines françaises : sur l’île de Noirmoutier (bateaux à moteur) et à Challans (petites séries sur des modèles anciens). Les deux sites vendéens emploient 395 personnes. Deux autres usines vont fermer hors de France : l’une aux Etats-Unis, en Caroline du Sud (production de voiliers monocoques, 180 salariés), l’autre à Ljubljana, en Slovénie (petits voiliers, 40 salariés).

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Dans la production de mobil-homes, activité marginale de Bénéteau(15 % des effectifs), le site de logistique de Luçon (Vendée), qui emploie 15 personnes, sera également fermé. Enfin, trois sites voient leur activité ralentie et une partie des personnels mis au chômage partiel : en Vendée de nouveau (Le Poiré-sur-Vie), en Pologne (Olecko) et en Italie (Montefalcone), où sont fabriqués les yachts de luxe du groupe. Au total – et au maximum –, 760 personnes pourraient, en France, quitter l’entreprise, et 630 à l’étranger.

Incompréhension des syndicats

« Tous les opérateurs de production des sites cédés ou mis en sommeil se verront proposer une solution de reclassement dans la région, explique un porte-parole du groupe. C’est pourquoi nous indiquons une fourchette de réduction d’effectifs allant de 710 à 1 390 emplois supprimés. » Le résultat final dépendra du nombre de salariés qui auront accepté leur relocalisation. « Nous avons bon espoir de nous trouver dans la fourchette basse », poursuit-on chez Bénéteau. Le groupe précise également que les outillages des sites fermés (y compris hors de France) et une partie de leur activité seront réimplantés dans la vingtaine d’autres usines du groupe.

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Du côté syndical, c’est l’incompréhension. « Des licenciements, c’est inacceptable », s’indigne Emmanuel Landreau, représentant CFDT, syndicat majoritaire dans les sites vendéens de Bénéteau. Car, si l’industriel promet une offre de reclassement aux ouvriers touchés par le plan, les personnels des fonctions support et des bureaux d’études (de 380 à 460 salariés) n’auront pas une solution systématique de repli. A la CFDT, on estime qu’au moins 300 personnes hors production risquent d’être licenciées dans l’Hexagone, auxquelles on peut ajouter « environ 400 opérateurs de production, s’ils refusent une mobilité de lieu de travail ».

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Trois candidats pour reprendre Phildar

Le tribunal de commerce de Lille Métropole a examiné, mardi 8 septembre, les trois offres de reprise de Phildar présentées par PP Yarns, Mondial Tissus, et Kindy. L’enseigne de fil à tricoter nordiste a été placée en redressement judiciaire en juillet. Car la crise du Covid-19 a accéléré la chute de cette marque septuagénaire à l’origine de l’empire Mulliez (Auchan, Boulanger, Leroy Merlin…). Le quatrième candidat, une filiale de Krief Consulting (groupe de conseil et de prise de participation en « business développement »), s’est retiré quelques jours avant l’audience.

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Même si ces trois dernières années, les actionnaires de l’AFM (Association familiale Mulliez) ont remis près de 7,5 millions d’euros pour maintenir à flot l’entreprise qui compte encore 211 salariés, dont 131 dans les 115 magasins, aucune stratégie n’a été mise en place pour sauver l’entreprise. Du moins, pas assez rapidement pour sauver Phildar.

Un nouveau directeur général a, en effet, été nommé en décembre 2019. Eric Vandendriessche devait présenter son plan de redressement le 19 mars, mais l’épidémie due au coronavirus l’a contraint à reporter. C’est finalement devant le tribunal de commerce sis à Tourcoing, mardi, que M. Vandendriessche a présenté son plan, devenu offre de reprise. Représentant la société PP Yarns (PP, pour Phildar Pingouin, et Yarns, pour « fils textiles » en anglais), Eric Vandendriessche s’est associé à 24 autres actionnaires individuels, dont 20 membres de la galaxie Mulliez, pour proposer la reprise de 86 salariés, 8 succursales et 7 boutiques affiliées. PP Yarns souhaite abandonner le prêt-à-porter pour se recentrer sur l’offre de fils à tricoter, la laine et le savoir-faire de Phildar et Pingouin à travers une « web company ».

« Manipulation »

Cette offre, qui n’est pourtant pas celle qui propose de maintenir le plus d’emplois ni le plus de magasins, a reçu, lundi, un avis favorable à l’unanimité du comité social et économique (CSE, anciennement comité d’entreprise ou CE). « On a choisi nos dirigeants actuels car Eric Vandendriessche est fédérateur, et il a une stratégie pour l’avenir, expliquent Bernard Fovez, délégué CFDT Phildar, et Dominique Vanwildermeersch, secrétaire du CSE. D’ailleurs, on n’en veut pas à l’AFM. »

Difficile à comprendre pour les deux autres repreneurs potentiels. « Il y a un vrai problème de manipulation, avance Salih Halassi, PDG de Kindy. Comment se fait-il que le comité d’entreprise valorise l’offre de PP Yarns contre la nôtre alors qu’on propose de reprendre presque le double d’emplois ? » Kindy reprendrait 139 salariés et 27 magasins pour faire muter l’activité prêt-à-porter vers le homewear et le cocooning. Mondial Tissus garderait 93 salariés et 16 magasins et propose de reclasser les autres salariés dans les Mondial Tissus. Partenaire de Salih Halassi dans son offre de reprise de Phildar, Jérémie Nathan, ex-directeur général de Phildar, ajoute : « Notre offre a été commentée dans l’entreprise par le dirigeant actuel. Or, on ne peut pas être juge et partie. »

Dans le cadre de l’urgence sanitaire, une ordonnance d’Emmanuel Macron du 20 mai facilite pourtant les reprises des entreprises par leurs propriétaires. Ce n’était possible auparavant qu’à condition d’avoir reçu une autorisation préalable du parquet. « Cette ordonnance est un vrai problème qui change les règles du jeu, puisque, aujourd’hui, on peut organiser sa propre reprise, son propre défaut de paiement et mettre en jeu l’avenir des fournisseurs », estime Salih Halassi.

Le tribunal a mis l’affaire en délibéré au 22 septembre.

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Salaires 2021 : « Une rupture qui n’épargnera quasiment personne »

Carnet de bureau. En 2021, le niveau des salaires bénéficiera-t-il du plan de relance ? Rien ne permet de le dire aujourd’hui. Pourtant, il en aurait eu bien besoin. L’étude annuelle du cabinet de conseils Deloitte annonce une rupture qui n’épargnera quasiment personne. C’est la première fois depuis plusieurs années que la hausse du budget prévu par les entreprises pour augmenter les salaires est inférieure à 2 %. Les non-cadres (ouvriers, employés, techniciens, agents de maîtrise) devraient au mieux profiter d’une hausse de 1,5 %, et les cadres de 1,7 %, contre 2,1 % pour les deux catégories en 2020.

Les 300 entreprises qui se sont exprimées sur leurs prévisions budgétaires représentent plus d’un million de salariés. « Elles ont été interrogées au cours du premier trimestre 2020. La réalité de 2021 ne pourra être que moins-disante », analyse Franck Chéron, associé capital humain chez Deloitte.

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En effet, selon trois scénarios construits par le cabinet de conseils sur la base des prévisions macroéconomiques de l’Insee et de la Banque de France (inflation, croissance du PIB, taux de chômage), les hausses devraient plutôt s’inscrire entre 0,3 et 1 % pour les non-cadres, et entre 0,5 et 1,1 % pour les cadres. Pas de quoi soutenir la consommation et accompagner la relance. Le contexte a profondément changé depuis le début de l’année : « Tandis que les entreprises envisageaient alors un retour à la normale dans un délai de six mois, on ne l’attend pas avant 2023 », indique-t-il.

Les non-cadres devraient au mieux profiter d’une hausse de 1,5 %, et les cadres de 1,7 %, contre 2,1 % pour les deux catégories en 2020

Pour entrer plus en avant dans les détails : la part variable devrait subir une perte significative ne serait-ce qu’à cause de la non-tenue des objectifs et la baisse des performances des entreprises. « Avec une participation et un intéressement très faibles, 2021 devrait être une des plus mauvaises années sur l’épargne salariale », note M. Chéron. Les bonus des cadres devraient être sacrifiés, tout comme l’égalité salariale entre les femmes et les hommes. « En l’état actuel des choses, rien n’est prévu pour en réduire l’écart », affirme-t-il.

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Mais ce paysage recèle une grande diversité de situations. Les secteurs ont été inégalement impactés par la crise du Covid-19. Dans la fourchette haute des projections Deloitte pour les hausses de salaires 2021, s’inscrivent l’énergie, la grande consommation, l’industrie de la santé et la bancassurance, tandis que le BTP, les transports, les médias et les télécommunications joueront plutôt dans le scénario moins-disant.

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Qu’est-ce que la concurrence ?

« La Fabrique de la concurrence », « Regards croisés sur l’économie », La Découverte, 244 pages, 16 euros.

La revue. Maximisation du profit, réduction des prix à la consommation, incitation à l’innovation… si elle compte de nombreux mérites, la concurrence est aujourd’hui questionnée en son royaume : les marchés. Aux Etats-Unis et en Chine, les niveaux de concentration des grandes entreprises atteignent des sommets.

Au sein de l’Union européenne, le modèle de la concurrence libre et non faussée se heurte au défi du numérique, de l’internationalisation accrue et, comme l’a montré la crise sanitaire du Covid-19, pose la question de sa souveraineté. Alors que le cadre institutionnel de la concurrence marchande est en cause, économistes, sociologues et historiens renouvellent son analyse dans Fabrique de la concurrence, le n° 25 de Regards croisés sur l’économie.

La revue mobilise l’histoire de la pensée économique afin de montrer comment le concept de concurrence a évolué sous la plume d’économistes tels qu’Adam Smith, Edward Chamberlin, Walter Eucken ou Friedrich Hayek. Cette mise en perspective est complétée par un encadré sur la concurrence parfaite, afin de mieux mettre en lumière à quel point elle s’éloigne des visions habituelles, intuitives de la concurrence.

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Les économistes n’ayant pas le monopole de l’étude de la concurrence, le maître de conférences à l’université de Lille Fabien Eloire se penche sur ses définitions sociologiques, tandis que Laurent Warlouzet et Marie-Françoise Renard proposent un éclairage sur les politiques de la concurrence des autorités publiques. Laurent Warlouzet, professeur d’histoire à Paris-Sorbonne Université, s’intéresse au cas de la politique de concurrence en France depuis la seconde guerre mondiale, en dévoilant sa montée en puissance au cours du temps.

Les règles et le droit

Quant à Marie-Françoise Renard, responsable de l’Institut de recherche sur l’économie de la Chine (Idrec), elle montre comment les lois sur la concurrence en Chine ont évolué ces dernières décennies, à la fois pour assurer un meilleur fonctionnement des marchés mais aussi en soutien des objectifs industriels nationaux. Parce que la concurrence est aussi un objet d’enseignement, l’enseignant Erwan Lehoux analyse les réformes des programmes de sciences économiques et sociales, la place occupée par la concurrence, ainsi que les conséquences potentielles sur les représentations des élèves.

La revue s’intéresse également aux institutions de la concurrence, en mettant en évidence son articulation avec le droit, les outils sur lesquels elle s’appuie, la question de sa mesure et cela sur différents marchés.

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Coronavirus : le casse-tête de la prise en charge « des salariés dits vulnérables »

« Les personnes obèses ou diabétiques de moins de 65 ans ne peuvent plus depuis le 1er septembre demander le bénéfice du dispositif d’activité partielle. »

Droit social. Les règles exceptionnelles élaborées en réponse à la crise sanitaire due au Covid-19 débouchent parfois, de par leur mode d’élaboration et leur caractère temporaire, sur des situations ubuesques.

Tel est le cas des salariés dit « vulnérables », c’est-à-dire ceux qui sont susceptibles de développer une forme grave de Covid-19 et qui ne peuvent télétravailler. Ceux-ci ont, à partir de mars 2020, d’abord bénéficié du dispositif simplifié de prise en charge par l’assurance-maladie et le cas échéant d’un « maintien de salaire » complémentaire de l’employeur.

L’article 20-III de la loi du 25 avril 2020 a conduit, à partir du 1er mai, à ce que ces salariés soient indemnisés au titre du « chômage partiel ». Une partie de leur rémunération est alors prise en charge par l’Etat et par l’assurance-chômage.

Les règles de ce dispositif n’ont cessé de changer depuis lors.

Incertitudes

Le législateur avait annoncé un décret qui fixerait la date de fin de cette indemnisation. En même temps, la loi indiquait qu’en l’absence de publication d’un tel décret, et en tout état de cause, cette forme d’indemnisation prendrait fin le 31 décembre 2020. Il a, de ce fait, été créé une première incertitude : le décret annoncé pouvant intervenir à tout moment et mettre fin à la mesure de façon anticipée.

La situation s’est encore compliquée avec la publication de circulaires successives sur l’activité partielle, dites « questions-réponses », qui à plusieurs reprises ont annoncé une date anticipée de fin du dispositif d’activité partielle pour cette catégorie de salariés. A la question 17 d’une version du 21 juillet 2020, le ministère annonçait une fin du dispositif hors Mayotte et Guyane, au 31 juillet 2020.

Trois jours plus tard (!), le même document révisé mentionnait la date du 31 août 2020. Puis, dans une version diffusée le 27 juillet 2020, le document ne précisait plus rien. Toutefois, l’échéance du 31 août se trouvait encore à la page 4 d’un autre texte ministériel daté du 3 août 2020, intitulé « Protocole national de déconfinement pour les entreprises pour assurer la sécurité des salariés ». La confusion aura duré tout l’été.

Le décret n° 2020-1098 du 30 août a finalement abandonné une réduction de la durée d’application du dispositif. On en revient, sous l’effet de l’augmentation des infections et pour l’instant, au 31 décembre !

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