La société Sonia Rykiel menacée de liquidation judiciaire

Les juges doivent statuer, ce jeudi, sur le sort de la marque, en redressement judiciaire depuis avril. La liquidation pourrait être décidée.

Par Publié aujourd’hui à 11h08, mis à jour à 11h22

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Une mannequin défile avec une création de la collection printemps-été de la marque Sonia Rykiel, à Paris, le 29 septembre 2018.
Une mannequin défile avec une création de la collection printemps-été de la marque Sonia Rykiel, à Paris, le 29 septembre 2018. ANNE-CHRISTINE POUJOULAT / AFP

Le tribunal de commerce de Paris doit se prononcer, jeudi 25 juillet dans l’après-midi, sur l’avenir de la marque de mode Sonia Rykiel, placée en redressement judiciaire depuis le 18 avril. Ses 135 salariés craignent une mise en liquidation de la société que détient, depuis 2012, le groupe First Heritage Brands, holding de la famille Fung, originaire de Hongkong.

Sauf coup de théâtre de dernière minute, les juges réunis en audience ne devraient avoir à se prononcer que sur un seul dossier de reprise. Nicole Lévy et son fils, Julien Sedbon, entrepreneurs du secteur immobilier, ont proposé de reprendre l’entreprise et 39 de ses salariés, selon nos informations, et de la relancer sur Internet. C’est l’unique proposition de reprise faite aux administrateurs. Et, lors de sa présentation devant les juges, ces derniers devraient émettre un avis défavorable.

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Un montant de reprise jugé faible

Les cabinets d’administration judiciaire avaient lancé un appel d’offres dont la date limite, d’abord fixée au 31 mai, avait été repoussée au 12 juin, puis au 18 juillet. Début juillet, la presse avait évoqué une dizaine de marques d’intérêt pour l’entreprise fondée en 1968 à Paris. Emmanuel Diemoz, un ancien dirigeant de Balmain qui s’était aussi porté candidat à la reprise de la marque Carven il y a un an, avait ainsi rencontré les représentants du personnel. Faute d’accord avec la famille Rykiel, propriétaire de l’immeuble du boulevard Saint-Germain à Paris dans le 6arrondissement où la marque a son siège historique, il a finalement jeté l’éponge.

Les candidats repreneurs, Mme Lévy et M. Sedbon, se disent prêts à relancer sur Internet la marque, dont le chiffre d’affaires s’est effondré depuis la mort de la créatrice parisienne en 2016. Or, faute de garanties financières, leur dossier de reprise n’a ni le soutien des deux administrateurs judiciaires, le cabinet Abitbol & Rousselet et FHB, celui d’Hélène Bourbouloux, figure de la profession, ni celui des représentants du personnel de la société Sonia Rykiel, d’après nos informations. Ces candidats proposent 200 000 euros pour reprendre l’entreprise, ses fonds de commerce et ses stocks. Un montant jugé faible. Le projet de relance de la marque sur Internet grâce à la blockchain n’aurait pas non plus convaincu.

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30 millions d’euros de pertes nettes

Dès lors, « il est probable que les juges prononcent la mise en liquidation judiciaire de l’entreprise Sonia Rykiel », avancent des sources proches de l’entreprise. Cette décision entraînerait le licenciement de l’ensemble des salariés. Lors de la mise en redressement judiciaire de la société, le comité d’entreprise de Sonia Rykiel avait souligné « la gestion hasardeuse et dispendieuse » de son actionnaire. Les représentants de First Heritage Brands assurent pourtant avoir injecté « 200 millions d’euros en sept ans » dans l’entreprise pour relancer ses ventes. Les pertes nettes de la marque s’élevaient à 30 millions d’euros, fin 2018, pour un chiffre d’affaires de 35 millions d’euros, d’après les proches du dossier.

La liquidation judiciaire de Sonia Rykiel devrait accélérer les négociations entre les salariés et les actionnaires hongkongais de l’entreprise pour que ces derniers financent le plan social et le reclassement des licenciés. En 2017, ils avaient procédé à un premier plan social, portant sur 40 % des effectifs.

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« Parfois on pleure, tellement nous sommes fatiguées » : avec les femmes de chambre grévistes de l’hôtel Ibis

Le hall de l’Hôtel Ibis Batignolles a des airs de salle des fêtes, mardi 23 juillet. Une trentaine de femmes de chambre danse sur de la musique africaine ; elles ont revêtu leurs boubous les plus élégants. Mais sous la liesse apparente, c’est un combat salarial qui s’est installé depuis le 17 juillet « pour une durée illimitée », lâche le directeur de l’établissement, propriété du groupe Accor, Emmanuel Estrem.

A l’appel de la CGT, vingt-huit femmes de chambre de cet hôtel – le plus grand de France avec ses 700 chambres – ont posé leur préavis de grève pour dénoncer la sous-traitance de la société STN . Celle-ci les « exploite en les poussant à faire jusqu’à 50 chambres par jour pour un salaire misérable », dénonce au mégaphone leur collègue équipier Aboubakar Traoré. Leurs revendications : que STN ralentisse la cadence pour passer à deux chambres par heure contre plus de trois en temps normal et surtout « que la sous-traitance s’arrête ».

Le slogan CGT du jour, « Du vol des salarié.e.s au viol d’une femme de chambre », interpelle les syndiqués. Ils se battent aussi contre la maltraitance au travail. « Nous ne venons pas travailler pour être esclaves et nous faire violer ! », renchérit dans le porte-voix Rachel, elle aussi en grève, avant de raconter le drame vécu par une de ses collègues deux ans plus tôt. En mars 2017, Beby, une des femmes de chambre de l’hôtel, travaillant en sous-traitance pour STN, a été agressée sexuellement par l’ancien directeur de cet établissement Ibis, alors qu’elle préparait une chambre. L’affaire est en cours d’instruction, l’homme a été mis en examen.

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Harcèlement moral

« Ça suffit ! », « Plus jamais ! », lancent les grévistes indignés. « Je ne comprends pas qu’il n’y ait pas eu de suivi de la victime de la part de l’hôtel après », réagit Aboubakar Traoré. Le drame dont a été victime Beby, ses collègues ne l’ont pas vécu, mais certains d’entre eux dénoncent des faits de harcèlement de la part de l’entreprise de sous-traitance. En particulier Aboubakar Traoré, que l’on a essayé de « licencier à trois reprises » depuis qu’il se mobilise pour revendiquer ses droits. « J’ai eu pleins de courriers », souffle-t-il. « Quand ce n’était pas pour une mutation non désirée, c’était pour m’accuser de mal faire mon boulot », explique l’homme qui est équipier depuis sept ans. Pour lui, il s’agit de harcèlement moral. « Parfois STN vous prête de l’argent puis le déduit d’une prochaine paie en prenant 20 % d’intérêt », dénonce-t-il.

Sur des banquettes au milieu des confettis qui jonchent le sol, un groupe de cinq femmes de chambre abordent leurs conditions de travail. « Moi je dois faire jusqu’à cinquante chambres en sept heures et demie ! », se révolte Blanche-Parfaite, sous-traitée par STN depuis dix ans au groupe Accor. En moyenne, la trentenaire est payée entre 800 et 900 euros brut par mois. « Parfois on pleure, tellement nous sommes fatiguées ou à cause du mal de dos », murmure-t-elle en regardant sa collègue Maryam.

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Cette dernière s’apprête à accoucher de son troisième enfant. Dans son état, STN lui permet de « faire 21 chambres par jour contre 35 à 40 en temps normal ». Un groupe de grévistes avance à côté en criant à tue-tête « Ibis complice ! » Une autre femme de chambre, Aminata, trouve déjà que 21 chambres c’est trop, « quand on ne m’en fait pas faire 30 ou 40 » en quatre heures de travail.

Courriers d’avertissement

Outre, les conséquences physiques et les répercussions familiales – « on est tellement fatiguées que lorsqu’on rentre chez nous on n’a plus d’énergie pour rien » –, la sous-traitance précarise ces femmes. « Il m’est arrivé de ne pas être payée même quand je le réclamais à la société », se révolte Aminata. Elle dénonce aussi « la pression et l’infantilisation » de la société STN, du fait de leurs courriers intempestifs qui, sous forme d’avertissements, lui « rappellent de ne pas mâcher de chewing-gum ou de ne plus oublier sa blouse ».

Aminata dénonce les courriers intempestifs de la société STN qui sous forme d’avertissements lui « rappellent de ne pas mâcher de chewing-gum ou de ne plus oublier sa blouse ».

Malgré la chaleur extérieure, le cortège de grévistes sort en dansant dans la cour de l’hôtel, sous le regard médusé des clients. Ils sont déterminés à poursuivre leur mouvement social : « Notre combat on va le gagner contre les violeurs, les harceleurs, contre le système mafieux de sous-traitance », s’exclame Aboubakar Traoré. Au milieu des drapeaux rouges de la CGT, la sénatrice Laurence Cohen (Val-de-Marne) est venue apporter son soutien. L’élue communiste l’assure : « Ce conflit doit être entendu jusque dans l’Hémicycle, je ferai une question écrite à la ministre du travail, Muriel Pénicaud. Et on va secouer Marlène Schiappa ! »

Dans une interview le 23 juin au Parisien, la secrétaire d’Etat chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes s’est engagée à améliorer les conditions de travail des femmes de chambre. Elle a annoncé qu’elle confierait en septembre une mission au Conseil supérieur de l’égalité professionnelle qui devra lui faire des propositions avant la fin de l’année.

Un directeur d’hôtel accusé d’agression sexuelle par une employée

Recluse dans son appartement parisien, Beby n’a pas souhaité participer à la grève des femmes de chambre à l’hôtel Ibis des Batignolles, où elle travaillait il y a encore quelques années. Elle refuse que son histoire personnelle illustre une cause syndicale. La femme de chambre, en « arrêt pour accident de travail », sursaute au moindre bruit, elle souffre d’un lourd stress post-traumatique. Sous antidépresseurs depuis près de deux ans, elle se réveille chaque nuit.

Pendant plus de quinze ans, Beby a été femme de chambre et travaillait en sous-traitance pour la société STN dans cet hôtel du 17e arrondissement de Paris. Mais son quotidien de mère de famille a basculé en mars 2017, lorsqu’elle a été agressée sexuellement alors qu’elle faisait le ménage dans une chambre.

La vidéosurveillance de l’hôtel montre « le directeur rôder dans le couloir et rentrer dans la chambre », puis en ressortir, indique son avocate, Me Durrieu Diebolt. Après les faits, elle sort en hurlant de la chambre mais ne pense qu’à une chose : « Rentrer chez elle pour s’occuper de son fils. » Ses collègues appellent immédiatement la police qui la conduit à l’Hôtel-Dieu où les médecins constatent les blessures, « hématomes, déchirure vaginale et traces de contrainte ». Beby porte plainte dans la foulée.

Le directeur de l’hôtel a été licencié. Mis en examen pour agression sexuelle, il nie les faits. « Il a dit qu’elle l’avait attaqué », s’insurge Me Durrieu-Diebolt. L’homme présentait des traces de griffures qui correspondaient davantage « à des traces de défense ». « Mon client proclame son innocence face aux faits dont on l’accuse et espère un non-lieu », précise Me Doumic, qui le représente. L’affaire n’est pas sans rappeler celle qui avait secoué le Sofitel de New York en 2011. Elle embarrasse le groupe Accor, qui assure être « très réactif dans ce type d’affaire », et « travailler sur un panic button [dispositif permettant d’alerter immédiatement les secours en cas de problème] pour les femmes de chambre » pour leur sécurité. La société de sous-traitance, STN, n’a pas souhaité s’exprimer sur l’affaire.

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Femmes de chambre : « Nous ne travaillons pas pour être esclaves »

Le hall de l’Hôtel Ibis Batignolles, a des airs de salle des fêtes ce mardi 23 juillet, une trentaine de femmes de chambre danse sur de la musique africaine, elles ont revêtu leurs boubous les plus élégants. Mais sous la liesse apparente, c’est un combat salarial qui s’est installé depuis mercredi 17 juillet « pour une durée illimitée », lâche le directeur de l’établissement, propriété du groupe Accor, Emmanuel Estrem.

A l’appel de la CGT, vingt-huit femmes de chambre de cet hôtel – le plus grand de France avec ses 700 chambres – ont posé leur préavis de grève pour dénoncer la sous-traitance de la société STN qui les « exploite en les poussant à faire jusqu’à 50 chambres par jour pour un salaire misérable », dénonce au mégaphone leur collègue équipier Aboubakar Traoré. Leurs revendications : que STN ralentisse la cadence pour passer à deux chambres par heure contre plus de trois en temps normal et surtout « que la sous-traitance s’arrête ».

Le slogan CGT du jour, « Du vol des salarié.e.s au viol d’une femme de chambre », interpelle les syndiqués. Ils se battent aussi contre la maltraitance au travail. « Nous ne venons pas travailler pour être esclaves et nous faire violer ! », renchérit dans le porte-voix Rachel, elle aussi en grève, avant de raconter le drame vécu par une de ses collègues deux ans plus tôt. En mars 2017, Beby une des femmes de chambre de l’hôtel, travaillant en sous-traitance pour STN, a été agressée sexuellement par l’ancien directeur de cet établissement Ibis, alors qu’elle préparait une chambre. L’affaire est en cours d’instruction, l’homme a été mis en examen.

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Harcèlement moral

« Ça suffit ! », « Plus jamais ! », lancent les grévistes indignés. « Je ne comprends pas qu’il n’y ait pas eu de suivi de la victime de la part de l’hôtel après », réagit Aboubakar Traoré. Le drame dont a été victime Beby, ses collègues ne l’ont pas vécu, mais certains d’entre eux dénoncent des faits de harcèlement de la part de l’entreprise de sous-traitance. En particulier Aboubakar Traoré, que l’on a essayé de « licencier à trois reprises », depuis qu’il se mobilise pour revendiquer ses droits. « J’ai eu pleins de courriers », souffle-t-il. « Quand ce n’était pas pour une mutation non désirée, c’était pour m’accuser de mal faire mon boulot », explique l’homme qui est équipier depuis sept ans. Pour lui, il s’agit de harcèlement moral. « Parfois STN vous prête de l’argent puis le déduit d’une prochaine paie en prenant 20 % d’intérêt », dénonce-t-il.

Sur des banquettes au milieu des confettis qui jonchent le sol, un groupe de cinq femmes de chambre abordent leurs conditions de travail. « Moi je dois faire jusqu’à cinquante chambres en sept heures et demie ! », se révolte Blanche-Parfaite, sous-traitée par STN depuis dix ans au groupe Accor. En moyenne, la trentenaire est payée entre 800 et 900 euros brut par mois. « Parfois on pleure, tellement nous sommes fatiguées ou à cause du mal de dos », murmure-t-elle en regardant sa collègue Maryam.

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Cette dernière s’apprête à accoucher de son troisième enfant. Dans son état, STN lui permet de « faire 21 chambres par jour contre 35 à 40 en temps normal ». Un groupe de grévistes avance à côté criant à tue-tête « Ibis complice ! » Une autre femme de chambre, Aminata trouve déjà que 21 chambres c’est trop, « quand on ne m’en fait pas faire 30 ou 40 » en quatre heures de travail.

Courriers d’avertissement

Outre, les conséquences physiques et les répercussions familiales – « on est tellement fatiguées que lorsqu’on rentre chez nous on n’a plus d’énergie pour rien » –, la sous-traitance précarise ces femmes. « Il m’est arrivé de ne pas être payée même quand je le réclamais à la société », se révolte Aminata. Elle dénonce aussi « la pression et l’infantilisation » de la société STN, du fait de leurs courriers intempestifs qui sous forme d’avertissements lui « rappellent de ne pas mâcher de chewing-gum ou de ne plus oublier sa blouse ».

Aminata dénonce les courriers intempestifs de la société STN qui sous forme d’avertissements lui « rappellent de ne pas mâcher de chewing-gum ou de ne plus oublier sa blouse ».

Malgré la chaleur extérieure, le cortège de grévistes sort en dansant dans la cour de l’hôtel, sous le regard médusé des clients. Ils sont déterminés à poursuivre leur mouvement social : « Notre combat on va le gagner contre les violeurs, les harceleurs, contre le système mafieux de sous-traitance », s’exclame Aboubakar Traoré. Au milieu des drapeaux rouges de la CGT, la sénatrice communiste Laurence Cohen (Val-de-Marne) est venue apporter son soutien. L’élue communiste l’assure : « Ce conflit doit être entendu jusque dans l’Hémicycle, je ferai une question écrite à la ministre du travail, Muriel Pénicaud. Et on va secouer Marlène Schiappa ! »

Dans une interview le 23 juin au Parisien, la secrétaire d’Etat chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes s’est engagée à améliorer les conditions de travail des femmes de chambre. Elle a annoncé qu’elle confierait en septembre une mission au Conseil supérieur de l’égalité professionnelle qui devra lui faire des propositions avant la fin de l’année.

Un directeur d’hôtel accusé d’agression sexuelle par une employée

Recluse dans son appartement parisien, Beby n’a pas souhaité participer à la grève des femmes de chambre à l’hôtel Ibis des Batignolles, où elle travaillait il y a encore quelques années. Elle refuse que son histoire personnelle illustre une cause syndicale. La femme de chambre, en « arrêt pour accident de travail », sursaute au moindre bruit, elle souffre d’un lourd stress post-traumatique. Sous antidépresseurs depuis près de deux ans, elle se réveille chaque nuit.

Pendant plus de quinze ans, Beby a été femme de chambre et travaillait en sous-traitance pour la société STN dans cet hôtel du 17e arrondissement de Paris. Mais son quotidien de mère de famille a basculé en mars 2017, lorsqu’elle a été agressée sexuellement alors qu’elle faisait le ménage dans une chambre.

La vidéosurveillance de l’hôtel montre « le directeur rôder dans le couloir et rentrer dans la chambre », puis en ressortir, indique son avocate, Me Durrieu Diebolt. Après les faits, elle sort en hurlant de la chambre mais ne pense qu’à une chose : « Rentrer chez elle pour s’occuper de son fils. » Ses collègues appellent immédiatement la police qui la conduit à l’Hôtel-Dieu où les médecins constatent les blessures, « hématomes, déchirure vaginale et traces de contrainte ». Beby porte plainte dans la foulée.

Le directeur de l’hôtel a été licencié. Mis en examen pour agression sexuelle, il nie les faits. « Il a dit qu’elle l’avait attaqué », s’insurge Me Durrieu-Diebolt. L’homme présentait des traces de griffures qui correspondaient davantage « à des traces de défense ». « Mon client proclame son innocence face aux faits dont on l’accuse et espère un non-lieu », précise Me Doumic, qui le représente. L’affaire n’est pas sans rappeler celle qui avait secoué le Sofitel de New York en 2011. Elle embarrasse le groupe Accor, qui assure être « très réactif dans ce type d’affaire », et « travailler sur un panic button [dispositif permettant d’alerter immédiatement les secours en cas de problème] pour les femmes de chambre » pour leur sécurité. La société de sous-traitance, STN, n’a pas souhaité s’exprimer sur l’affaire.

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Faut-il réformer les prud’hommes ?

Alors que les saisines des conseils des prud’hommes sont en chute libre, ces juridictions restent engorgées. Une mission du Sénat formule quelques propositions pour améliorer leur fonctionnement.

Par Publié aujourd’hui à 06h00

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Les mesures mises en place par la loi Macron de 2015 pour désengorger les CPH, comme le passage obligatoire devant un bureau de conciliation, restent inexploitées.
Les mesures mises en place par la loi Macron de 2015 pour désengorger les CPH, comme le passage obligatoire devant un bureau de conciliation, restent inexploitées. Alain Le Bot / Photononstop

En pleine polémique sur le plafonnement des indemnités accordées aux salariés en cas de licenciement abusif et alors que les saisines des conseils des prud’hommes (CPH), chargés d’arbitrer les conflits entre salariés et employeurs, dégringolent, une mission du Sénat s’est penchée sur la situation de ces juridictions. Elle a rendu ses conclusions le 16 juillet. Son constat est sans appel : bien que les saisines des conseils des prud’hommes aient régressé de 43 % entre 2005 et 2018, ces juridictions demeurent, contre toute attente, fortement engorgées.

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« En 2018, la durée moyenne des affaires terminées devant les CPH (hors référés) était de 16,3 mois, soit un délai nettement supérieur aux autres juridictions civiles de premier ressort », notent les auteurs du rapport, s’étonnant en parallèle du « nombre relativement important de conseillers prud’hommes », que la réforme de la carte judiciaire de 2008 n’a pas entamé : un conseiller traite en moyenne 8,2 affaires par an, contre 44,4 pour un juge consulaire.

Trois ans en moyenne pour un dossier à Vannes

La mission sénatoriale fait état de « réalités très différentes d’un CPH à l’autre », la palme de la rapidité revenant à celui de Saint-Omer, dans le Pas-de-Calais (4,9 mois en moyenne pour le traitement d’un dossier), et celle de la lenteur à celui de Vannes, dans le Morbihan (35,9 mois en moyenne). « Il semble donc que les délais de jugement de chaque CPH dépendent davantage de facteurs liés à son bon fonctionnement interne qu’au volume du contentieux qu’il a à traiter ou au nombre de conseillers prud’hommes en leur sein », font valoir les auteurs du rapport.

Autre problème : les jugements rendus par les prud’hommes sont pour les deux tiers (66,7 % en 2016) frappés du recours en appel. Si cette donnée s’explique en partie par le fait que seuls les cas les plus complexes sont soumis aux CPH, le taux élevé de recours en appel serait aussi le signe d’un « déficit d’acceptabilité des jugements rendus par les conseillers ».

Des réformes « qui n’ont pas réellement atteint leurs objectifs »

Le rapport se penche sur les réformes engagées depuis 2015, réformes « qui n’ont pas réellement atteint leurs objectifs », tranchent ses auteurs. Tout en estimant que « les obligations déontologiques d’impartialité et d’indépendance ne sont pas toujours respectées » par les prud’hommes, ils pointent l’insuffisante formation des conseillers. Les mesures mises en place par la loi Macron de 2015 pour désengorger les CPH, comme le passage obligatoire devant un bureau de conciliation ou la possibilité de renvoyer directement l’affaire en formation de départage (avec un juge professionnel), restent inexploitées.

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Quant au barème prud’homal, le rapport sénatorial en dresse un bilan mitigé : il « pourrait conduire, en réduisant l’espérance de gain, à dissuader un certain nombre de justiciables d’engager des procédures devant le conseil de prud’hommes », mais favoriserait l’explosion des dossiers pour discrimination ou harcèlement (pour lesquels le plafonnement des indemnités ne s’applique pas).

Bureau d’orientation

La mission énonce une série de propositions visant à accélérer le traitement des dossiers. Un bureau d’orientation déciderait si l’affaire doit passer devant un bureau de conciliation, une médiation extérieure ou un bureau de jugement. Pour les affaires les plus importantes, le passage devant une formation de départage deviendrait obligatoire. Afin de favoriser la conciliation, la mission propose de rétablir l’obligation pour les parties de comparaître personnellement. Elle recommande aussi d’expérimenter des formations de jugement « mixtes » composées de conseillers prud’hommes et de magistrats professionnels, tant en première instance qu’en appel, et de permettre au président et au vice-président du conseil de modifier la structure des sections afin de l’adapter aux réalités locales.

La mission prône aussi une « revalorisation » de la fonction prud’homale, passant notamment par une formation renforcée et une déclaration d’intérêts, comme c’est déjà le cas pour les magistrats professionnels. Plus symboliquement, la mission propose de changer la dénomination de « conseil de prud’hommes » en « tribunal de prud’hommes » et de rattacher cette juridiction au seul ministère de la justice.

Pas de remise en question des conditions de saisine

Plus secondairement, la mission formule quelques propositions pour faciliter l’accès des justiciables aux prud’hommes. Concentrée sur la question du désengorgement, elle ne remet pas en cause le durcissement des conditions de saisine introduites par la loi Macron de 2015, qui, selon certains observateurs, a largement contribué à leur baisse. Les justiciables seraient découragés par la complexité de la procédure.

Lire aussi Moins de recours aux prud’hommes, un effet de la réforme du code du travail ?

« Plutôt que de revenir sur cette réforme, dont les objectifs demeurent valables au regard de l’exigence de bon fonctionnement de la justice prud’homale, il convient d’accompagner les justiciables dans leurs démarches », estime la mission, pour qui la baisse des recours aux prud’hommes est à mettre principalement sur le compte de l’explosion des ruptures conventionnelles. Les salariés « doivent pouvoir s’appuyer sur les structures d’accès au droit » comme les maisons de la justice ou des permanences gratuites d’avocats, affirment les auteurs du rapport. Mais ils ne s’attardent pas sur la situation des travailleurs hors des radars des organisations syndicales et pas toujours informés de l’existence de ces structures – quand elles sont réellement présentes sur leur territoire.

Pour garantir l’accès de tous aux prud’hommes, la mission recommande « d’adapter le barème de l’aide juridictionnelle pour rendre la conciliation financièrement plus attractive pour les avocats » et de « favoriser l’organisation d’audiences foraines de conseils de prud’hommes ». Reste à voir si ces recommandations seront suivies d’effets.

Les solutions du Sénat pour améliorer la justice prud’homale

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Manque de moyens, manque de reconnaissance, manque d’efficacité… Les quelque 210 conseils de prud’hommes, chargés de trancher les litiges entre salariés et employeurs, sont en toute petite forme, malgré les réformes adoptées au cours des dernières années dans le but d’améliorer leur fonctionnement.

Pour tenter de résoudre ces difficultés, une mission conduite par quatre sénatrices vient de formuler une cinquantaine de préconisations, balayant un spectre extrêmement large. Leur principal objectif est de faire en sorte que la justice du travail cesse d’être « au milieu au gué », selon la formule employée par les corapporteuses Agnès Canayer (LR), Nathalie Delattre (RDSE), Corinne Féret (PS) et Pascale Gruny (LR).

Les conseils de prud’hommes (CPH) font « figure d’exception en Europe ». Ils sont composés de juges non professionnels représentant, à parité, les salariés et les employeurs. Dans les Etats voisins, la situation est très différente puisque les magistrats de carrière sont beaucoup plus présents au sein des tribunaux habilités à traiter les différends relatifs à l’exécution du contrat de travail.

Autre singularité forte, comme le rappelle le rapport : « La fonction première du CPH est la conciliation, le jugement n’intervenant en principe qu’à titre subsidiaire. » Mais dans les faits, il est rare que les parties en présence parviennent à trouver un terrain d’entente. En moyenne, seules 8 % des affaires sont résolues de cette manière – certains CPH parvenant à faire mieux (26 % au maximum) tandis que dans d’autres, le taux est nul.

Des délais « relativement longs »

Bien que le flux de contentieux nouveaux décroissent (– 43 % entre 2005 et 2018), les conseillers prud’homaux continuent de rendre des jugements dans des délais « relativement longs » : 16,3 mois en moyenne (en dehors des actions en référé) et presque deux fois plus si le dossier remonte en « départage », c’est-à-dire devant une formation présidée par un magistrat professionnel (avec la présence de conseillers salariés et employeurs).

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Derrière ces statistiques se cachent de profondes disparités. Certains conseils se prononcent en moins de six mois en moyenne (Saint-Omer, Louviers), d’autres en deux ans ou plus (Bobigny, Lyon, Créteil, Nanterre…). Ceux qui statuent promptement sont « généralement de petite taille, [avec] peu d’affaires nouvelles », mais il n’en va pas toujours ainsi : Vannes, par exemple, détient le record de lenteur (près de trois ans), alors que le nombre des saisines y est modeste (222 en 2017).

« Il semble donc que les délais de jugement de chaque CPH dépendent davantage de facteurs liés à son bon fonctionnement interne qu’au volume du contentieux qu’il a à traiter ou [aux effectifs] de conseillers prud’hommes en leur sein », estiment les auteures du rapport.

Lire le reportage : Aux prud’hommes de Bobigny, petites réalités du monde du travail

« Manque d’acceptabilité des jugements »

Pour ne rien arranger, les recours tendent d’autant plus à s’éterniser que les décisions prud’homales sont, aux deux tiers, frappées d’appel. Ce ratio très élevé est imputable à plusieurs facteurs, dont l’un « pourrait » tenir au « manque d’acceptabilité des jugements », du fait de « l’insuffisance de leur motivation ». Bon nombre de magistrats professionnels trouvent, en effet, que la rédaction des décisions prud’homales « est trop souvent lacunaire », rapporte la mission sénatoriale.

Une partie de ces problèmes résulte de l’inadaptation des ressources accordées aux CPH. « Les équipes de greffes sont parfois très réduites », tout comme les outils informatiques mis à la disposition des juridictions. Dans plusieurs endroits, la salle d’audience ne permet pas de « rendre la justice dans les conditions de solennité qui seraient souhaitables ». Mais d’autres éléments jouent, en particulier la formation des conseillers prud’homaux, qui peut s’avérer « insuffisante ». Et les relations « souvent difficiles » que ceux-ci entretiennent avec les juges professionnels compliquent singulièrement la donne, quand il s’agit de juger des dossiers en départage.

Tous ces constats « appellent des évolutions nécessaires », conclut la mission sénatoriale, en égrenant 46 propositions, d’importance inégale. Certaines d’entre elles relèvent du symbole, comme celle recommandant le port de la robe pour les juges prud’homaux (en lieu et place de la médaille). Trois des quatre sénatrices plaident, par ailleurs, pour que l’institution change de dénomination et s’appelle, à l’avenir, « tribunal de prud’hommes », afin de renforcer sa « dimension juridictionnelle ».

Des solutions nouvelles

Les auteures insistent beaucoup sur la nécessité d’étoffer les compétences des conseillers prud’homaux. C’est pourquoi elles suggèrent de les soumettre à une « obligation de formation continue », assurée par l’Ecole nationale de la magistrature, et de leur ouvrir certains des cursus proposés par cet établissement.

Plusieurs idées sont également défendues pour que les CPH exercent leur office dans de meilleures conditions. Ainsi, ils doivent bénéficier de l’accroissement des crédits du ministère de la justice, afin que leurs moyens soient mis à niveau (locaux, matériel informatique, dépenses de fonctionnement courant, effectifs de greffe, etc.). Dans cette même optique, l’indemnisation des juges prud’homaux mériterait d’être revue à la hausse, de manière à ce qu’ils préparent mieux les audiences en amont et participent à des réunions de travail leur permettant de s’aguerrir.

Enfin, des solutions nouvelles sont mises en avant afin que les procédures soient plus performantes. Exemple : renvoyer directement l’affaire en départage (donc devant une formation présidée par un juge professionnel) si les parties le demandent. Par ailleurs, la conciliation ne devrait plus être une étape obligatoire, puisque celle-ci « s’effectue (…) bien souvent en dehors des CPH » (transactions, rupture conventionnelle qui permet à un salarié et à un patron de se séparer d’un commun accord).

Désigner des magistrats professionnels

Il conviendrait aussi d’expérimenter des réformes plus profondes, à l’échelle de quelques juridictions : confier systématiquement les dossiers complexes à la formation de départage, désigner des magistrats professionnels dans les CPH et des conseillers prud’homaux dans les cours d’appel…

L’une des questions, maintenant, est de connaître le sort qui sera réservé à ces préconisations. Elles seront portées à la connaissance de la chancellerie afin de voir dans quelle mesure elles peuvent s’intégrer dans son agenda. Elles pourraient aussi servir de base à des amendements ou à une proposition de loi.

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Indemnités prud’homales : « Discutable sur le fond, l’avis de la Cour de cassation qui conforte le barème Macron ne lie pas les juges »

Le juriste Julien Icard analyse dans une tribune au « Monde » le raisonnement qui a conduit la Cour de cassation à conforter le barème d’indemnisation pour les licenciements injustifiés, contenus dans les ordonnances Macron.

Publié aujourd’hui à 10h17, mis à jour à 10h29 Temps de Lecture 5 min.

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« Une fois la Charte sociale européenne écartée, la Cour de cassation se prononçait  sur la compatibilité du barème français au seul article 10 de la Convention 158 de l’OIT » Photo :  Cour de Cassation, Ile de la Cité, La Conciergerie , Paris.
« Une fois la Charte sociale européenne écartée, la Cour de cassation se prononçait  sur la compatibilité du barème français au seul article 10 de la Convention 158 de l’OIT » Photo :  Cour de Cassation, Ile de la Cité, La Conciergerie , Paris. Tibor Bognar / Photononstop

Tribune. L’assemblée plénière de la Cour de cassation a tranché, mercredi 17 juillet 2019, la plus sensible et la plus politique des questions juridiques liée aux ordonnances Macron. En adoptant en totalité les conclusions de l’avocate générale, elle a conforté le barème d’indemnisation pour les licenciements injustifiés, jugeant qu’il est compatible avec le droit international du travail.

Ceci s’est passé par la procédure d’avis, qui permet aux juges judiciaires de demander à la Cour de cassation de statuer sur une question de droit nouvelle, sérieuse et se posant dans de nombreux litiges. Sensible, la question dite « de la conventionnalité du barème » l’était sans aucun doute, le barème d’indemnisation ayant été présenté comme le cœur de la réforme Macron du marché du travail.

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La mise en œuvre d’un système de plafond-plancher, dépendant uniquement de l’ancienneté et encadrant la détermination de l’indemnisation versée à un salarié en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, répondait à plusieurs objectifs officiels : traiter de manière plus égalitaire les salariés licenciés injustement ; faciliter les licenciements en permettant aux employeurs de connaître par avance les risques auxquels ils s’exposent ; faire baisser le chômage, la facilitation du licenciement favorisant l’embauche.

Un débat juridique et judiciaire

Le débat sur l’opportunité économique ou sociale du dispositif a pourtant laissé place à un débat juridique et judiciaire. La conformité de cette mesure emblématique était en effet contestée au regard des normes internationales. Avant même la publication des ordonnances Macron, plusieurs juristes spécialistes avaient d’ailleurs souligné le risque de contrariété du dispositif aux normes internationales de l’Organisation internationale du travail (OIT), notamment la Convention nº 158 portant sur le licenciement, et de la Charte sociale européenne, adoptée au sein du Conseil de l’Europe.

Les deux textes internationaux prévoient, en effet, le droit pour le salarié injustement licencié à une indemnité adéquate. Non définie par les textes internationaux, cette notion d’indemnité adéquate pouvait s’interpréter comme excluant toute limitation du pouvoir du juge dans la détermination du montant du préjudice. Prenant appui sur ces réflexions doctrinales, la contestation judiciaire s’est amorcée avec la diffusion par le Syndicat des avocats de France d’un document destiné à faciliter la contestation judiciaire du barème.

Ex-Whirlpool d’Amiens : le gouvernement annonce un audit sur l’utilisation de l’argent public

Des salariés de WN, le repreneur de Whirlpool, ont manifesté la semaine dernière à Amiens leur « colère » et leurs « inquiétudes » quant à leur avenir professionnel.

Le Monde avec AFP Publié aujourd’hui à 19h40

Temps de Lecture 1 min.

En mai 2018, l’industriel picard Nicolas Decayeux avait repris 162 des 282 ex-salariés de Whirlpool.
En mai 2018, l’industriel picard Nicolas Decayeux avait repris 162 des 282 ex-salariés de Whirlpool. PASCAL ROSSIGNOL / REUTERS

Le gouvernement va mener un audit afin de vérifier « la manière » dont WN, le repreneur de l’ancienne usine Whirlpool d’Amiens, a « utilisé l’argent public » alloué il y a un an, a annoncé jeudi 18 juillet Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’économie.

« Il y a des interrogations sur la manière dont l’argent public a été utilisé () Nous avons décidé de lancer un audit sur cet argent public et nous ferons une restitution aux salariés en priorité en plénière le 25 juillet prochain », a-t-elle déclaré en sortant d’une « réunion de suivi » à la préfecture de la Somme, à Amiens, avec notamment des représentants des salariés et des élus locaux. Et d’ajouter :

« Je n’ai pas d’idées préconçues sur ce que l’on trouvera », mais « justifier cet argent, ce sera une façon pour l’ensemble des salariés de passer à autre chose. Parce qu’aujourd’hui il y a de la défiance, il y a du soupçon () Si cet argent a été employé de manière tout à fait normale, c’est bien de le savoir () et si cet argent a été utilisé à des choses qui ne sont pas correctes, c’est bien de le savoir aussi » et qu’il y ait « des suites ».

« Vous avez quand même des salaires à payer. La masse salariale, c’est 550 000 euros par mois grosso modo, donc, en dix mois vous avez déjà 5 millions et demi qui sont expliqués. Après, les investissements, les stocks, la recherche, la prospection commerciale, ce sont ces éléments-là que l’on doit mettre en visibilité », a-t-elle détaillé.

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Redressement judiciaire

Des salariés de WN, le repreneur de Whirlpool, placé en redressement judiciaire, ont manifesté la semaine dernière à Amiens leur « colère » et leurs « inquiétudes » quant à leur avenir professionnel.

En mai 2018, l’industriel picard Nicolas Decayeux avait repris 162 des 282 ex-salariés de Whirlpool. Son entreprise, la société WN, devait alors se lancer notamment dans la production de casiers réfrigérés connectés et la fabrication de chargeurs de batteries pour vélos et voitures, mais elle se trouve aujourd’hui dans une impasse de trésorerie, faute de débouchés commerciaux concrets.

Elle a été placée en redressement judiciaire le 3 juin, avec une période d’observation de six mois. Les candidats à la reprise du site ont jusqu’au 23 juillet pour déposer leur offre.

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« J’ai commencé à 16 ans, je pensais pouvoir profiter de ma retraite… je suis condamnée à travailler »

Par nécessité ou par envie, certains retraités reprennent un emploi. Le haut-commissaire Jean-Paul Delevoye doit rendre jeudi ses conclusions sur le futur système de retraites.

Par Publié le 17 juillet 2019 à 18h18 – Mis à jour le 18 juillet 2019 à 09h18

Temps de Lecture 4 min.

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Jeanine Belleperche, 63 ans, rentre chez elle à Flixecourt (Somme) après une journée de travail, le 3 juin.
Jeanine Belleperche, 63 ans, rentre chez elle à Flixecourt (Somme) après une journée de travail, le 3 juin. DIANE GRIMONET / HANS LUCAS POUR « LE MONDE »

Gérard Gomès n’a pas hésité longtemps quand a sonné l’heure de la retraite. Pas question pour cet ancien marin de rester assis dans son canapé à ne rien faire : « Regarder la télé toute la journée, ce n’était pas mon choix », dit-il. Après des missions de consulting pour des multinationales maritimes, il s’est lancé en 2008 dans l’immobilier pour le compte d’un ami promoteur. Pas tant par besoin d’argent – le Rochelais, aujourd’hui âgé de 85 ans, jouit d’une confortable retraite, « environ 3 500 euros par mois » – que pour maintenir son train de vie. Et, aussi, pour pouvoir contribuer avec son frère aux dépenses liées à l’hébergement de leur mère, âgée de 107 ans, dans un Ehpad, et gâter ses arrière-petits-enfants.

« Je me sentais encore utile dans mon travail. C’est là, quand on s’arrête, qu’on commence à vieillir »

Lorsque Yves Chassefaire, 67 ans, a arrêté de travailler, il a eu, lui, le sentiment de se retrouver « au bord de la falaise ». « Un vide immense m’entourait, c’était le début de la fin », se rappelle ce médecin du travail domicilié à Arles (Bouches-du-Rhône). Rappelé par son ancien employeur, il n’est « resté que vingt-cinq jours sans activité ». Aujourd’hui, il vient de « resigner » pour cinq ans. Et d’expliquer : « Je continue à faire quelque chose qui me plaît et qui apporte à l’autre, c’est très gratifiant. Et ça me permet de conserver une activité intellectuelle. »

Farida Harrag a commencé à travailler à 14 ans comme apprentie employée de bureau, pour finir conseillère clientèle dans la télésurveillance. Quarante-cinq années de travail, et « seulement onze mois de chômage ». Alors, la retraite, en juillet 2018, fut synonyme d’« horreur » pour cette Strasbourgeoise de 61 ans. « Je me sentais encore utile dans mon travail, se souvient-elle. C’est là, quand on s’arrête, qu’on commence à vieillir. » Six mois plus tard, son employeur la reprenait en CDI, quatre jours par semaine.

Les femmes cumulent par nécessité économique

Comme Gérard Gomès, Yves Chassefaire ou Farida Harrag, quelque 3 % des retraités du régime général – environ 377 000 personnes – cumulent une pension de retraite et un emploi salarié, le plus souvent à temps partiel, selon une étude de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV). Plus de 500 000 personnes sont concernées, si l’on tient compte de l’ensemble des régimes (général, fonction publique, agricole, indépendants). Et bien plus encore avec le travail au noir, par nature difficile à évaluer. « Il y aurait au moins un à deux millions de personnes qui essaient de compenser des petites retraites avec des activités non déclarées », estime Serge Guérin, sociologue spécialiste du vieillissement.

« Je pensais profiter de ma retraite… je suis condamnée à travailler »

Par nécessité ou par envie, certains retraités reprennent un emploi. Le haut-commissaire Jean-Paul Delevoye doit rendre jeudi ses conclusions sur le cumul emploi-retraite au gouvernement.

Publié aujourd’hui à 18h18

Temps de Lecture 4 min.

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Jeanine Belleperche, 63 ans, rentre chez elle à Flixecourt (Somme) après une journée de travail, le 3 juin.
Jeanine Belleperche, 63 ans, rentre chez elle à Flixecourt (Somme) après une journée de travail, le 3 juin. DIANE GRIMONET / HANS LUCAS POUR « LE MONDE »

Gérard Gomès n’a pas hésité longtemps quand a sonné l’heure de la retraite. Pas question pour cet ancien marin de rester assis dans son canapé à ne rien faire : « Regarder la télé toute la journée, ce n’était pas mon choix », dit-il. Après des missions de consulting pour des multinationales maritimes, il s’est lancé en 2008 dans l’immobilier pour le compte d’un ami promoteur. Pas tant par besoin d’argent – le Rochelais, aujourd’hui âgé de 85 ans, jouit d’une confortable retraite, « environ 3 500 euros par mois » – que pour maintenir son train de vie. Et, aussi, pour pouvoir contribuer avec son frère aux dépenses liées à l’hébergement de leur mère, âgée de 107 ans, dans un Ehpad, et gâter ses arrière-petits-enfants.

« Je me sentais encore utile dans mon travail. C’est là, quand on s’arrête, qu’on commence à vieillir »

Lorsque Yves Chassefaire, 67 ans, a arrêté de travailler, il a eu, lui, le sentiment de se retrouver « au bord de la falaise ». « Un vide immense m’entourait, c’était le début de la fin », se rappelle ce médecin du travail domicilié à Arles (Bouches-du-Rhône). Rappelé par son ancien employeur, il n’est « resté que vingt-cinq jours sans activité ». Aujourd’hui, il vient de « resigner » pour cinq ans. Et d’expliquer : « Je continue à faire quelque chose qui me plaît et qui apporte à l’autre, c’est très gratifiant. Et ça me permet de conserver une activité intellectuelle. »

Farida Harrag a commencé à travailler à 14 ans comme apprentie employée de bureau, pour finir conseillère clientèle dans la télésurveillance. Quarante-cinq années de travail, et « seulement onze mois de chômage ». Alors, la retraite, en juillet 2018, fut synonyme d’« horreur » pour cette Strasbourgeoise de 61 ans. « Je me sentais encore utile dans mon travail, se souvient-elle. C’est là, quand on s’arrête, qu’on commence à vieillir. » Six mois plus tard, son employeur la reprenait en CDI, quatre jours par semaine.

Les femmes cumulent par nécessité économique

Comme Gérard Gomès, Yves Chassefaire ou Farida Harrag, quelque 3 % des retraités du régime général – environ 377 000 personnes – cumulent une pension de retraite et un emploi salarié, le plus souvent à temps partiel, selon une étude de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV). Plus de 500 000 personnes sont concernées, si l’on tient compte de l’ensemble des régimes (général, fonction publique, agricole, indépendants). Et bien plus encore avec le travail au noir, par nature difficile à évaluer. « Il y aurait au moins un à deux millions de personnes qui essaient de compenser des petites retraites avec des activités non déclarées », estime Serge Guérin, sociologue spécialiste du vieillissement.