Les salariés de la protection de l’enfance dans la rue pour dénoncer l’état de « délabrement inédit » du secteur

Educateurs spécialisés, chefs de service, psychologues, directeurs de foyers de l’enfance… Malgré la pluie battante, ils étaient quelques centaines, mercredi 25 septembre, à s’élancer de l’esplanade des Invalides, à Paris, en direction de la place du Panthéon, afin d’alerter sur l’état de « délabrement inédit » de la protection de l’enfance. Une mobilisation rare pour ce secteur, dont la mission est d’accompagner les enfants maltraités, avec un éventail d’actions allant du soutien aux familles au placement.

Signe de la gravité de la crise actuelle, environ soixante-dix organisations se sont rassemblées à l’appel de la Convention nationale des acteurs de la protection de l’enfance (Cnape) au sein d’un nouveau collectif, Les 400 000, en référence au nombre de jeunes concernés par une prise en charge à l’aide sociale à l’enfance (ASE) – ils sont 380 000. « Nous partageons tous un diagnostic commun, celui que nous ne sommes plus en mesure de répondre aux besoins croissants des enfants suivis en protection de l’enfance », résume Pierre-Alain Sarthou, le directeur général de la Cnape. Il évoque pêle-mêle « la pénurie de professionnels », la non-exécution des mesures judiciaires ordonnées par des juges des enfants « chargés chacun de 350 à 400 dossiers », ainsi que le défaut d’application des lois sur la protection de l’enfance, en particulier ce qui touche au suivi des jeunes majeurs, très aléatoire malgré une obligation formulée dans une loi de 2022.

Des défaillances qui résonnent avec les récits de travailleurs sociaux croisés dans le cortège, hérissé de banderoles sur lesquelles on pouvait lire « Educateurs au rabais, enfants en danger ». « Aujourd’hui, les foyers censés accueillir les enfants en danger dans leurs familles n’arrivent plus à recruter des éducateurs. Il y a un turn-over énorme, plus personne ne veut faire ce boulot, qui est difficile, mal payé, mal considéré », explique Laurence Chanclud, éducatrice spécialisée dans un service de milieu ouvert à Paris, venue manifester. Sa collègue Vanessa Stainvurcel, à ses côtés, en quinze années d’exercice, observe « l’impact de la dégradation terrible de la psychiatrie » sur les enfants et les familles qu’elle accompagne, « de plus en plus nombreux à avoir des problèmes psychiatriques lourds, ce qui nous met en grande difficulté dans nos accompagnements ».

« On ne laissera pas faire »

Mourad (il n’a pas souhaité donner son nom), éducateur dans une maison d’enfants à caractère social – un autre nom pour les foyers –, « change de collègues sans arrêt ». « Les jeunes ne veulent pas rester, alors on a des intérimaires qui viennent, qui repartent… Comment voulez-vous créer un lien avec les gamins dans ces conditions ? », s’inquiète-t-il.

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Alors que l’Inde se rêve en usine du monde, un mouvement social secoue un site Samsung

Les ouvriers grévistes de l’usine Samsung, le 11 septembre 2024.

Rarement, ces dernières années, une multinationale étrangère en Inde avait dû faire face à un mouvement social d’une telle ampleur. Environ un millier d’ouvriers d’une usine Samsung située à Sriperumbudur, près de Chennai, dans l’Etat du Tamil Nadu (Sud-Est), sont en grève depuis le 9 septembre. Ils réclament que leur syndicat nouvellement formé, le Samsung India Labour Welfare Union (Silwu), soit reconnu officiellement par l’entreprise. Ils demandent aussi une hausse des salaires, ainsi qu’une amélioration du temps de travail.

Les employés du géant sud-coréen campent sous une grande tente devant l’usine qui fabrique réfrigérateurs, machines à laver et téléviseurs. Leur mobilisation a causé des interruptions de production sur ce site qui génère à lui seul un tiers du chiffre d’affaires annuel de plus de 10 milliards d’euros de Samsung en Inde. Ici, les ouvriers gagnent en moyenne 25 000 roupies par mois, soit quelque 270 euros.

En Inde, beaucoup craignent que ces protestations ne découragent les investisseurs, alors que le premier ministre, Narendra Modi, veut faire de son pays une option crédible face à la Chine, la nouvelle usine du monde. L’objectif fixé : tripler la production électronique d’ici à 2030, pour atteindre 500 milliards de dollars (450 milliards d’euros). Les géants du secteur sont attirés par de nouvelles politiques favorables et par une main-d’œuvre bon marché.

« Les entreprises ont confiance dans le gouvernement pour améliorer la facilité à faire des affaires, mais l’Inde doit s’assurer que les droits des salariés sont respectés, et la liberté d’association ne devrait pas être un problème, d’autant que dans le cas de Samsung, les demandes des salariés sont parfaitement légitimes », fait remarquer Anand Parappadi Krishnan, chercheur au Centre of Excellence for Himalayan Studies, de la Shiv Nadar University, dans la banlieue de New Delhi.

Soutenus par le syndicat CITU

Les grévistes de Samsung sont soutenus par le Centre for Indian Trade Unions (CITU), un syndicat d’obédience communiste créé en 1970, qui veut renforcer sa présence dans le secteur en plein développement de l’électronique. « Le plus important à nos yeux, c’est la reconnaissance officielle de leur syndicat et la possibilité de mener des négociations collectives dans le futur. Samsung est installé en Inde depuis 2007, et en dix-sept ans, aucun syndicat n’a jamais été créé », regrette K. C. Gopi Kumar, du comité régional du CITU dans le Tamil Nadu.

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Les négociations tripartites entre les salariés, Samsung et des représentants de l’Etat du Tamil Nadu ont jusque-là échoué. Samsung serait réticent à reconnaître un syndicat soutenu par une organisation syndicale nationale comme le CITU. « Sans notre soutien, les salariés seraient plus vulnérables aux pressions de l’entreprise, et leur pouvoir de négociation se verrait affaibli », dénonce M. Gopi Kumar, qui rappelle que la liberté d’association est garantie par la Constitution indienne.

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Gouvernement Barnier : Astrid Panosyan-Bouvet, une macroniste à la fibre plus sociale au ministère du travail

Astrid Panosyan-Bouvet, le 20 juin 2022 à Paris.

Cette fois, c’est la bonne. Déjà pressentie pour occuper le poste lors du remaniement de janvier, Astrid Panosyan-Bouvet a été nommée ministre du travail et de l’emploi, samedi 21 septembre. Députée (Renaissance) de Paris depuis 2022, elle suivait particulièrement ces thématiques à l’Assemblée nationale. Elle succède à Catherine Vautrin, qui devient ministre des partenariats avec les territoires. Mais, contrairement à sa prédécesseure, Astrid Panosyan-Bouvet ne s’occupera pas de la santé et des solidarités en même temps.

C’est une première expérience gouvernementale pour cette proche d’Emmanuel Macron, âgée de 53 ans, et diplômée de HEC, Sciences Po et de la Harvard Kennedy School of Government, à Boston. Ancienne adhérente du Parti socialiste, elle a cofondé En marche ! en 2016, le mouvement d’Emmanuel Macron, dont elle avait été la conseillère à Bercy en 2014. Son engagement politique suit une longue carrière dans le privé, notamment chez Groupama, où elle a été secrétaire générale de 2011 à 2014.

Alors que de gros dossiers l’attendent Rue de Grenelle, ses positions vont être scrutées. Car c’est aussi une voix qui a su se faire dissonante au sein de la Macronie sur l’orientation de la politique menée depuis plusieurs mois. Elle devra tout d’abord s’occuper de l’assurance-chômage. Alors qu’une réforme avait été amorcée par l’ancien premier ministre Gabriel Attal, au printemps, celle-ci a été suspendue lors de l’entre-deux-tours des élections législatives. Prolongées plusieurs fois, les règles d’indemnisation des demandeurs d’emploi actuellement en vigueur arrivent à échéance le 31 octobre.

« L’exemple de la Finlande »

D’ici là, Astrid Panosyan-Bouvet a plusieurs options sur la table. Relancer la réforme du précédent gouvernement, qui augmentait la durée de travail nécessaire pour ouvrir des droits au chômage et réduisait la durée d’indemnisation maximale. Un projet auquel elle s’était clairement opposée lorsqu’elle était députée. « La question du travail et de l’emploi doit être vue dans son ensemble. Si un seul levier, celui de l’assurance-chômage, est activé, on rate la cible », expliquait-elle au Monde en avril.

Elle avait aussi récusé les propos répétés du ministre de l’économie d’alors, Bruno Le Maire, qui jugeait que la « générosité » du modèle français empêchait le pays d’atteindre le plein-emploi – autour de 5 % de chômage, contre 7,5 % aujourd’hui. La membre de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale avait rappelé que d’autres pays en Europe versaient une allocation-chômage plus élevée que dans l’Hexagone et que les régimes d’indemnisation moins avantageux n’empêchaient pas les tensions de recrutement.

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La réforme du RSA, entre expérimentation encourageante et menace budgétaire

Les critiques sont de moins en moins véhémentes. Pourtant, lors de son examen à l’Assemblée nationale, à l’automne 2023, la réforme du revenu de solidarité active (RSA) avait suscité la polémique. Point central des reproches de la gauche, des organisations syndicales et des associations de lutte contre la pauvreté : « l’accompagnement rénové » mis en place pour les bénéficiaires, qui doivent désormais s’acquitter d’au moins quinze heures d’activité par semaine pour toucher les 607,75 euros mensuels (pour une personne seule). Les députés macronistes avaient eu besoin du renfort de leurs homologues des Républicains pour inscrire cette promesse de campagne d’Emmanuel Macron, en 2022, dans la loi relative au plein-emploi, visant à réduire de 7,3 % à 5 % le taux de chômage, d’ici à 2027.

Depuis mars 2023, la réforme fait l’objet d’une expérimentation dans dix-huit territoires. Et, après un peu plus d’un an, les premiers résultats de ce projet qui obligent également tous les allocataires à être inscrits à France Travail (ex-Pôle emploi) se révèlent plutôt encourageants. Il convient toutefois d’être prudent, tant cette phase de test se concentre sur un petit nombre de personnes, un peu plus de 35 000 personnes sur près de 2 millions d’allocataires recensés en France. Tout juste nommé premier ministre, Gabriel Attal, lui, ne s’était pas embarrassé de précautions, en mars, pour annoncer l’extension de cette expérimentation à vingt-neuf nouveaux bassins d’emploi, sans attendre un vrai bilan.

Après son enregistrement auprès de l’opérateur public, un diagnostic est établi, puis trois types de parcours sont proposés à l’allocataire. Un parcours professionnel pour les personnes les plus proches de l’emploi, un parcours social pour ceux qui en sont le plus éloignés et un parcours socioprofessionnel pour les profils intermédiaires. Au 1er septembre, 43 % des bénéficiaires concernés par les expérimentations ont été orientés vers le premier type de parcours. De bons chiffres qui s’expliquent notamment par le fait que ces territoires pilotes se concentrent souvent sur les nouveaux allocataires du RSA, ceux qui sont le plus proches de l’emploi.

Meilleure connaissance des inscrits

Les chiffres les plus encourageants proviennent du retour à l’emploi. Dans les six mois suivant leur entrée dans l’expérimentation, 40 % des allocataires ont trouvé un emploi, dont 18 % avec un contrat durable (CDD de six mois et plus ou CDI). Le fruit d’une meilleure connaissance des inscrits et surtout d’une plus grande coopération entre tous les acteurs (département, Etat, caisse d’allocations familiales, régies de transport, etc.).

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Grève des agents EDF à la Guadeloupe : un nouveau moteur remis en service alors que les négociations sont suspendues

Alors que la Guadeloupe subit d’importantes coupures d’électricité en raison d’une grève des agents EDF, les négociations dans l’archipel entre la branche énergie de la CGTG et la direction d’EDF Production électrique insulaire (PEI) ont été suspendues. Mais un « quatrième moteur » de la centrale diesel de Jarry sera démarré « aux heures de pointe pour inhiber les délestages sur le territoire », a fait savoir sur X le secrétaire général FE-CGTG Jimmy Thelemaque.

La grève chez EDF-PEI, la filiale de production d’électricité d’EDF, a démarré lundi 16 septembre. Les négociations, qui avaient repris jeudi, ont été interrompues vendredi en milieu d’après-midi. La grève a conduit à l’arrêt des moteurs de la centrale, et l’opérateur dit procéder à des « délestages tournants » pour « éviter l’accident généralisé (black-out) ». Les conséquences de ces coupures sont nombreuses : coupures d’eau, fermetures d’écoles ou activité des entreprises au ralenti.

Le conflit social porte sur la mise en œuvre d’un accord signé début 2023, après soixante et un jours de grève des mêmes agents, qui réclamaient une mise en conformité de leurs contrats et de leur rémunération avec le droit du travail, notamment cinq ans d’arriérés de salaires non versés.

« La FE-CGTG a demandé sous dix jours » la présence d’un dirigeant de l’entreprise venu de Paris, a déclaré le syndicat dans un communiqué arguant que « la directrice en Guadeloupe ne dispose pas du niveau de responsabilité suffisant afin d’engager EDF-PEI ». De son côté, l’entreprise a regretté, dans un communiqué, « cette rupture des négociations » et a fait valoir « avoir réalisé à cette date tous les versements » liés au protocole.

A l’issue des échanges, qui se déroulent sous la houlette des services de l’Etat, Ludovic De Gaillande, directeur de la direction du travail de Guadeloupe, a confirmé, sur la radio publique Guadeloupe La 1ère, des délestages bien moindres. Et ce, malgré « la décision de la CGTG de quitter la table des négociations », selon lui.

Le Monde avec AFP

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Grève chez Boeing : le patron menace les salariés de chômage partiel non rémunéré

Des machinistes en grève de Boeing manifestent à Renton (Washington, Etats-Unis), le 16 septembre 2024.

Le conflit social se durcit chez Boeing. Kelly Ortberg, le nouveau directeur général de l’avionneur américain, a annoncé, mercredi 18 septembre, que des dizaines de milliers de salariés seraient placés en chômage technique partiel « dans les prochains jours ». Depuis le 13 septembre, 33 000 des quelque 171 000 employés de Boeing sont en grève pour obtenir des augmentations de salaires. Avant de cesser le travail, les salariés syndiqués de l’avionneur avaient rejeté à plus de 95 % l’accord négocié entre les organisations syndicales et la direction.

Selon cet accord conclu avec, notamment, l’International Association of Machinists and Aerospace Workers (IAM), les salariés auraient pu bénéficier d’une hausse immédiate de 11 % de leur rémunération et de 25 % étalée sur quatre ans. Ils auraient aussi pu percevoir un bonus de 3 000 dollars (environ 2 694 euros). En outre, la direction avait consenti d’autres avantages, comme l’encadrement des heures supplémentaires, une baisse de 9 % des cotisations d’assurance-santé, et un congé parental porté à douze semaines.

Surtout, Boeing s’était engagé à produire son prochain appareil dans la région de Seattle (Etat de Washington), où sont installés ses sites historiques de production d’Everett et de Renton et dans l’Oregon. Des usines où sont employés l’immense majorité des salariés en grève depuis déjà une semaine.

Compenser les effets de l’inflation

Pour les grévistes et leurs syndicats, les propositions de la direction sont largement insuffisantes. Ils réclament, en effet, des hausses de salaires de 40 %, notamment pour compenser les effets de l’inflation ces dernières années. A la hauteur de ce que viennent d’obtenir les pilotes de plusieurs compagnies américaines. Ils revendiquent également la restauration de leur régime de retraite.

Pour les grévistes de Boeing, la mise en place prochaine du dispositif de chômage technique partiel sera lourde de conséquences. Aux Etats-Unis, ces salariés ne seront plus payés et n’auront bientôt plus de couverture santé. D’ailleurs, « pour limiter l’impact » financier de cette mesure drastique, le nouveau patron de Boeing a précisé que les employés concernés seraient soumis, par roulement, à une semaine de chômage technique toutes les quatre semaines.

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« Il est important que nous prenions de mesures difficiles pour préserver notre trésorerie et pour s’assurer que Boeing est en mesure de se rétablir avec succès », a tenté de justifier M. Ortberg, mercredi juste après l’échec de la médiation fédérale. Selon le directeur général de Boeing, le chômage technique partiel va aussi toucher « un grand nombre de dirigeants, de responsables et d’employés basés aux Etats-Unis ». Pour faire bonne mesure, il a ajouté que l’équipe de direction et lui-même allaient renoncer « à une part de leur rémunération équivalente [en proportion] » à celle perdue par les effectifs placés en chômage technique.

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A la Guadeloupe, 46 000 foyers privés d’électricité à la suite d’une grève des agents EDF

Le mouvement de grève lancé dimanche 15 septembre par des agents d’Electricité de France (EDF) à la Guadeloupe paralyse une partie de la production électrique de l’île. Mardi soir, 46 000 foyers étaient privés d’électricité. « Le système électrique est en déficit de production notamment en raison de l’indisponibilité de huit moteurs à la centrale de la Pointe Jarry », a fait savoir EDF Guadeloupe dans un communiqué.

Depuis deux jours, une grève oppose les agents d’EDF Production électrique insulaire (PEI) – qui produit près de 70 % de l’électricité de Guadeloupe grâce à une centrale diesel – à leur direction. En cause, « de persistantes situations non conformes au protocole de fin de conflit » signé en février 2023, après une grève de 61 jours, a rappelé le délégué syndical de la Fédération de l’énergie de la Confédération générale du travail de la Guadeloupe (FE-CGTG), Nathanael Verin, dans le préavis de grève envoyé en août.

Des négociations se tiennent actuellement sous la houlette de la direction du travail. Selon La 1ere, il est entre autres question du respect des dispositions relatives au temps de travail, de régularisations de salaires, du paiement des indemnités kilométriques et du libre fractionnement des congés annuels calculés en heures.

« Afin d’éviter l’incident généralisé, des délestages tournants par tranche de deux heures sont en cours », a annoncé EDF, qui appelle à « limiter sa consommation », précisant faire appel à « toutes les sources de production disponibles ».

La Guadeloupe, une zone non interconnectée, produit son électricité grâce à plusieurs sources : centrale thermique diesel (68,6 % de la production) mais aussi énergies renouvelables (biomasse, géothermie, éolien, photovoltaïque, hydraulique, etc.), dont la production ne suffit pas à équilibrer l’offre et la demande en électricité dans l’archipel.

Le Monde avec AFP

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A l’hôpital, plus d’un tiers des postes de praticien sans titulaire

C’est l’un des marqueurs de la crise de l’hôpital : les praticiens hospitaliers continuent de manquer dans les services, année après année, avec de nombreux postes sans titulaire. Mais combien, exactement ? Alors que le Centre national de gestion (CNG), organisme ministériel chargé des concours et des carrières des praticiens, ne fait plus mention de ce recensement dans ses documents officiels depuis deux ans, le Syndicat national des praticiens hospitaliers anesthésistes-réanimateurs élargi (SNPHAR-E) a, lui, obtenu et agrégé ces données, au 1er janvier 2024.

Selon ses calculs, 35 % des postes restent inoccupés par un médecin titulaire (temps plein et temps partiel réunis). Un chiffre qui s’est stabilisé par rapport à l’année précédente, après une dégradation continue sur les quinze dernières années. En 2008, ces postes vacants représentaient 20 % des postes ouverts dans les hôpitaux. Certaines spécialités sont plus fortement touchées par la désaffection, comme la psychiatrie, qui voit sa situation s’aggraver encore, avec 52 % de postes occupés en 2024, contre près de 75 % il y a dix ans.

« Le “choc d’attractivité” promis n’a pas eu lieu »

« La tendance reste extrêmement alarmante », soutient l’anesthésiste Anne Geffroy-Wernet, présidente du SNPHAR-E, tout en reconnaissant des limites à ce chiffrage. Les postes vacants sont en partie occupés par des praticiens contractuels. C’est l’argument avancé par le CNG pour refuser de publier les statistiques sur le sujet, alors qu’il ne dispose pas des données sur les contractuels. En juillet, dans son rapport annuel, il faisait état de 48 552 médecins hospitaliers en exercice au 1er janvier 2024, soit un nombre en augmentation de 13,5 % sur la dernière décennie. « Les contractuels sont nécessaires, mais en avoir trop, cela déstabilise les hôpitaux qui ont besoin d’équipes stables », souligne la docteure Geffroy-Wernet.

Autre limite : les postes vacants dépendent aussi des postes que les hôpitaux décident d’ouvrir, selon les stratégies d’établissements ou les difficultés budgétaires, explique-t-on au SNPHAR-E. « Mais on voit bien, quoi qu’il en soit, que le “choc d’attractivité” promis n’a pas eu lieu », soutient Anne Geffroy-Wernet. Son syndicat regrette, depuis des mois, que les négociations avec le gouvernement sur l’attractivité du métier n’avancent pas, alors que ni le plan du Ségur de la santé (2020) ni la réforme, plus technique, du statut de praticien hospitalier, appliquée depuis 2022, n’ont permis de renverser la tendance.

Le collectif Vignobles Gabriel & Co assure la défense de vignerons bordelais face aux puissants négociants

Jean-François Réaud, vigneron et président-fondateur du collectif Vignobles Gabriel & Co, à Saint-Aubin-de-Blaye (Gironde), le 3 mars 2021.

Ils ont choisi de se regrouper pour mieux se défendre. Avant même que la crise des ventes de vin ne frappe le Bordelais, ils avaient dressé leurs cuvées en ordre de bataille. Et, aujourd’hui, il y a comme un parfum de victoire, avec une douzaine de références sélectionnées pour les foires aux vins d’automne. Eux, ce sont les Vignobles Gabriel & Co, un nom qui réunit une trentaine de vignerons bordelais sur la rive droite de la Garonne. Grâce à cette structure atypique, ce collectif à la croisée du négoce, de la coopération et de la viticulture indépendante écoule environ 6 millions de bouteilles chaque année, à prix sages (7 euros en moyenne).

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« Ce modèle hybride permet de mutualiser idées et moyens techniques, de valoriser l’identité de chaque vigneron, de bâtir une force commerciale, et aussi de favoriser un engagement éthique et environnemental », assure Jean-François Réaud, 63 ans, président et fondateur de cette entreprise. Le modèle est vertueux : les deux tiers des producteurs travaillent désormais en agriculture biologique et les bouteilles affichent toutes le logo Fair for Life, un label attribué par Ecocert, attestant de pratiques commercialement équitables.

Certes, Jean-François Réaud, lui-même vigneron propriétaire des Châteaux Le Grand Moulin, Les Aubiers et Haut Sociondo, dans l’appellation blaye-côtes-de-bordeaux, ne nie pas le contexte maussade du marché bordelais, soit une baisse de 7,1 % des ventes depuis un an dans le pays. Mais le créateur de Vignobles Gabriel & Co veut croire aux atouts de son projet, qui a grandi en marge de la « place de Bordeaux », le système de négoce qui régit la mise en marché de plus de 70 % des vins de la région.

L’histoire du collectif est d’abord la sienne. Quand, au début des années 1980, il récupère la ferme familiale du Grand Moulin, dans le nord de la Gironde, avec ses 7 hectares de vignes subsistantes, il veut s’affranchir du système consensuel du négoce girondin. « Je trouvais que ce modèle nous privait du ressenti du consommateur », justifie Jean-François Réaud. Mais le jeune vigneron a beau s’échiner à faire connaître lui-même ses vins, ses ventes patinent. « La banque menaçait de me lâcher, il me fallait trouver un marché de gros volume. »

Du bricolage à la maîtrise

Plutôt que de vendre en vrac au négoce, il tente alors de pénétrer la grande distribution : « Un acheteur de chez Carrefour, qui aimait bien mon vin, m’a fait comprendre que si je voulais contourner la “place de Bordeaux”, il fallait que je devienne moi-même négociant pour sécuriser une qualité et un volume constants. »

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