Fonction publique territoriale : les élus locaux défendent les 100 000 postes créés depuis 2010

Gabriel Attal, alors premier ministre, en visite dans une maison France Services, à Sceaux (Hauts-de-Seine), le 23 avril 2024.

La rentrée est décidément pénible pour les élus locaux. Pointés pour leurs dépenses par le gouvernement Attal, début septembre, ils ne décolèrent pas à l’idée de devoir consentir à l’effort de 5 milliards d’euros que le premier ministre, Michel Barnier, attend d’eux en 2025. Entre-temps, la Cour des comptes a ajouté sa touche personnelle en suggérant, dans un rapport publié le 2 octobre, de supprimer 100 000 agents territoriaux.

« On voit bien la séquence, affirme Johan Theuret, directeur général adjoint chargé du pôle ressources à Rennes Métropole et à Ville de Rennes, cofondateur du cercle de réflexion Sens du service public. Un déficit qui dérape, la recherche d’économies et la question des effectifs des collectivités locales arrive dans le débat… Ce n’est pas nouveau. »

La Cour des comptes note que « les dépenses de personnel, qui représentent un quart des dépenses des collectivités, connaissent une croissance soutenue », et considère une « optimisation » possible. Appliquer partout la durée légale du travail et lutter contre l’absentéisme permettraient de faire des économies, disent les magistrats financiers. Avant de sortir une proposition massue : ramener la fonction publique territoriale, qui compte 1,9 million d’agents, à son niveau de 2010. Cela se traduirait par la réduction de 100 000 emplois, soit 5,25 % de l’effectif. Economie escomptée : 4,1 milliards d’euros à partir de 2030.

« Procès facile en incompétence »

Pourquoi 2010 ? Parce que pendant dix ans, entre 2011 et 2021, expose l’institution financière, il n’y a pas eu de nouveau transfert de compétences de l’Etat aux collectivités ; que cela n’a cependant pas empêché les groupements de communes – les intercommunalités, en plein développement – d’employer 112 100 agents de plus (+ 48 %) quand les communes ne faisaient baisser leurs effectifs que de 3 %. Or, la logique était précisément qu’en confiant des missions à leur intercommunalité, les communes réduisent leur personnel.

Derrière la logique comptable, les élus locaux perçoivent une nouvelle manifestation du « mépris » des hauts fonctionnaires de Bercy, qui les considéreraient comme dépensiers et incapables de tenir leur masse salariale. « Je ne dis pas que des efforts ne sont pas possibles, poursuit M. Theuret. Mais c’est surtout un procès facile en incompétence des élus dans la gestion des ressources humaines. »

Maire (divers droite) de Charleville-Mézières, Boris Ravignon se dit également « convaincu » que c’est la défiance des argentiers qui s’exprime. « Même si c’est d’abord de la méconnaissance : les magistrats de la Cour des comptes ne connaissent pas le fonctionnement des collectivités locales », note celui qui vient de se voir confier par la ministre du partenariat avec les territoires, Catherine Vautrin, la mission d’alléger le « millefeuille administratif ». Dans un rapport, remis en mai, M. Ravignon a chiffré à 7,5 milliards d’euros l’enchevêtrement des compétences entre l’Etat et les collectivités.

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Airbus va supprimer jusqu’à 2 500 postes dans sa branche défense et espace, en difficulté

 Le logo d’Airbus, affiché au salon international de la défense et de la sécurité terrestres et aéroterrestres Eurosatory, à Villepinte, le 17 juin 2024.

Nouveau signe de la mauvaise passe que traverse l’industrie aérospatiale européenne, Airbus a l’intention de supprimer « d’ici à la mi-2026 » jusqu’à 2 500 postes dans sa branche produisant des satellites, qui leste ses performances financières, a annoncé l’entreprise mercredi 16 octobre.

Citant dans un communiqué la nécessité de s’adapter à « un contexte difficile pour l’activité », le géant industriel européen a dit vouloir « rationaliser [son] organisation pour améliorer la compétitivité à l’avenir ». La division concernée, « Defence and Space » (D&S), compte quelque 35 000 salariés.

Les modalités de ces réductions d’effectifs n’ont pas été précisées dans l’immédiat mais Airbus a dit vouloir éviter des « mesures contraignantes » et promis d’œuvrer à « limiter l’impact » social de cette décision.

« Compte tenu des résultats financiers assez catastrophiques qu’on a eus, on se doutait bien qu’il allait se passer quelque chose de ce genre », a déclaré à l’Agence France-Presse Hervé Pinard, coordinateur CFDT pour l’ensemble du groupe. Pour lui, « il faut que ce soit accompagné non seulement socialement pour ceux qui partent mais aussi pour ceux qui restent, pour qu’ils ne se retrouvent pas dans une situation où on va multiplier les burn-out parce que les gens auront une charge de travail qu’ils ne seront pas capables d’assumer ». La CFDT, pour l’heure, « analyse les données », a expliqué M. Pinard, et « n’est pas encore capable de dire comment [elle] va réagir ».

Le coordinateur adjoint de FO D&S, Jean-Daniel Bloquet, a quant à lui estimé que « la réduction des effectifs ne [pouvait] pas être la principale variable d’ajustement » et a jugé possible « qu’il y ait, à moyen terme, des mesures d’austérité annoncées, si on ne règle pas le problème par les solutions douces qui sont proposées à ce jour ».

Selon le délégué syndical central CFE-CGC D&S, Thierry Préfol, Airbus donnera des détails sur la répartition des mesures par pays et activité le 4 décembre, un délai qui « a un côté anxiogène » pour les salariés, a-t-il regretté, en soulignant l’importance du « jusqu’à » 2 500 suppressions. « Ça ne pourra pas augmenter mais (…) ça peut baisser. On a demandé un engagement qu’il n’y ait pas de licenciements secs. On a eu une forme d’engagement moral [selon lequel], si on arrive à mener à bien les mesures d’économies envisagées, il n’y aura pas de départs contraints », a-t-il ajouté.

« Résoudre les causes racines de ces difficultés »

Numéro un mondial des satellites de télécommunication, Airbus est affecté depuis quelques années « par un climat d’affaires très difficile et en évolution rapide, avec des ruptures de chaînes d’approvisionnement, des changements dans la conduite des conflits et une pression sur les coûts en raison de contraintes budgétaires », a justifié Michael Schoellhorn, le directeur général d’Airbus D&S, cité dans le communiqué.

Thales, un autre poids lourd du secteur, avait déjà annoncé au printemps un plan de redéploiement au sein du groupe de 1 300 postes issus de sa branche spatiale, Thales Alenia Space.

Plombé par de nouvelles charges pour son activité spatiale, Airbus a vu son bénéfice divisé par deux au premier semestre. « Notre performance financière à mi-année reflète principalement les importantes charges liées à nos activités spatiales. Nous nous appliquons à résoudre les causes racines de ces difficultés », avait déclaré le président exécutif, Guillaume Faury, au moment de la publication des résultats, en juillet.

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Le constructeur aéronautique avait déjà prévenu à la fin de juin qu’il devait passer une nouvelle provision d’« environ 900 millions d’euros » au premier semestre, liée au passage en revue des coûts de développement et des perspectives commerciales attendues de certains programmes de satellites de télécommunications et de navigation. Ce montant a finalement été affiné à 989 millions d’euros, à mesure que l’examen programme par programme s’est poursuivi.

En 2023 Airbus avait déjà inscrit une charge de 600 millions d’euros dans ses comptes pour cette même activité spatiale, qui a représenté l’année dernière environ 2 milliards d’euros de chiffre d’affaires sur les 65,4 milliards réalisés par le groupe.

« Nous nous attaquons aux causes profondes de ces problèmes par le biais d’un plan de transformation, qui se concentrera notamment sur la mise en œuvre d’une stratégie plus sélective de réponse aux appels d’offres, sur le renforcement de la gouvernance et du contrôle internes, et sur le plan de maîtrise des coûts et de compétitivité », avait déclaré Guillaume Faury en juillet.

Ces réévaluations concernent avant tout les programmes de satellites de télécommunications et de navigation. Le problème tient au fait qu’il s’agit de satellites adaptés au besoin de chaque client et produits en petites quantités, empêchant les gains d’efficacité d’une production en série, explique-t-on chez Airbus.

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Le Monde avec AFP

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Airbus va supprimer jusqu’à 2 500 postes dans sa division défense et espace

Un Airbus A321 Neo dans l’usine Airbus de Hambourg, dans le nord de l’Allemagne, en octobre 2023.

Si Boeing s’enrhume, Airbus n’est pas non plus à l’abri d’un coup de froid ! L’avionneur européen a annoncé, mercredi 16 octobre, son intention de supprimer jusqu’à 2 500 postes dans sa branche produisant des satellites au sein de son activité défense et espace, qui compte 35 000 salariés. Le groupe présidé par Guillaume Faury a pour objectif de « rationaliser [son] organisation pour améliorer la compétitivité à l’avenir ». Cette restructuration sera menée jusqu’à la mi-2026 en évitant les « mesures contraignantes », c’est-à-dire des licenciements secs, afin de « limiter l’impact » social, a promis l’avionneur.

Airbus, pourtant numéro un mondial des satellites de télécommunication, est affecté depuis quelques années « par un climat d’affaires très difficile et en évolution rapide, avec des ruptures de chaînes d’approvisionnement, des changements dans la conduite des conflits et une pression sur les coûts en raison de contraintes budgétaires », a indiqué Michael Schoellhorn, le directeur général d’Airbus Defence and Space, pour justifier cette réduction d’effectifs.

L’avionneur européen n’est d’ailleurs pas le seul dans cette situation. Thales a lui aussi engagé des réductions d’emplois. Le groupe dirigé par Patrice Caine a annoncé, au printemps, un plan de redéploiement qui prévoit 1 300 suppressions de postes au sein de sa branche spatiale Thales Alenia Space, qu’il détient à 67 % aux côtés de l’italien Leonardo (33 %).

Cette annonce n’a pas surpris les syndicats d’Airbus. « Compte tenu des résultats financiers assez catastrophiques qu’on a eus, on se doutait bien qu’il allait se passer quelque chose de ce genre », a reconnu Hervé Pinard, coordinateur CFDT pour l’ensemble du groupe. Le syndicat veut parer par avance tout durcissement du climat social. « Il faut que ce soit accompagné non seulement socialement pour ceux qui partent mais aussi pour ceux qui restent, pour qu’ils ne se retrouvent pas dans une situation où on va multiplier les burn-out parce que les gens auront une charge de travail qu’ils ne seront pas capables d’assumer », plaide, par avance, la CFDT.

L’émergence des petits satellites

Avec ses 2 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2023, l’activité spatiale ne fait pas le poids face aux 65,4 milliards d’euros réalisés par le groupe essentiellement porté par sa branche aviation commerciale. En revanche, ses pertes pèsent lourd. En 2023, Airbus avait dû déjà inscrire une charge de 600 millions d’euros. En 2024, cette provision a été sensiblement revue à la hausse pour passer à 989 millions d’euros. Plombé par ces nouvelles charges, l’avionneur a vu son bénéfice divisé par deux au premier semestre.

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Suppression de postes d’enseignant : la ministre de l’éducation nationale sous pression avant la discussion du budget au Parlement

La ministre de l’éducation nationale, Anne Genetet, à l’Assemblée nationale, le 16 octobre 2024.

« Le débat parlementaire n’a pas commencé. Il peut encore y avoir des évolutions », a affirmé la ministre de l’éducation nationale, Anne Genetet, dans un entretien à La Tribune Dimanche, le 13 octobre. Son cabinet a martelé ce message aux organisations syndicales, qu’il a reçues mercredi 16 octobre, après leur dépôt d’une « alerte sociale » concernant le projet de budget 2025 pour l’éducation nationale. Les 4 000 suppressions de postes d’enseignant dans le projet de loi de finances provoquent inquiétude et colère dans une école en crise.

L’entourage d’Anne Genetet tente de tempérer et cite l’exemple de Gabriel Attal, qui avait obtenu des créations d’emplois dans le second degré fin 2023, après l’examen du projet de loi de finances, pour soutenir la mise en place de ses « groupes de niveau » au collège, ainsi qu’une baisse du nombre de suppressions de postes dans les écoles primaires.

Faute de réponse sur le volet budgétaire, le cabinet de la ministre a proposé aux représentants syndicaux de relancer l’« agenda social » – les discussions avec les syndicats – autour de plusieurs chantiers : les bas salaires, les progressions de carrière ou encore les conditions de travail, sans dire toutefois comment il arriverait à financer de nouvelles mesures.

Baisser le nombre d’élèves par classe

A la presse, son cabinet a notamment évoqué une revalorisation des bas salaires en novembre, du fait de la transposition de l’augmentation du smic, et une accélération des progressions de salaire en milieu de carrière avec des passages plus rapides au deuxième grade de la grille (la « hors classe »). En la matière, une hausse a déjà été négociée en 2023 et est inscrite au budget 2025. L’entourage d’Anne Genetet a avancé un gain « de 150 à 350 euros net par mois » pour « plus de 100 000 enseignants » d’ici à 2027, sans préciser s’il s’agissait des hausses déjà prévues ou de nouvelles. Aucun chiffre ni objectif n’a cependant été donné aux syndicats, qui ont tous fustigé la communication ministérielle.

L’intersyndicale s’est mise d’accord pour interpeller les parlementaires, exception faite des élus Rassemblement national, sur le budget de l’école. « On ne parle pas le même langage avec le ministère : eux nous disent que les suppressions de postes auraient pu être plus importantes, mais, avec une école en crise et des collègues qui souffrent, ça n’est pas entendable », dénonce plus largement Guislaine David, cosecrétaire générale du SNUipp-FSU.

Anne Genetet se sait attendue au Parlement. Elle a déjà été interpellée sur le budget, lors des questions au gouvernement, mercredi, par la députée socialiste de Seine-Saint-Denis Fatiha Keloua Hachi. La présidente de la commission des affaires sociales et de l’éducation a prévu de déposer des amendements pour revenir sur cette diminution du nombre de professeurs.

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« Ils veulent se rendre utiles à la société » : les jeunes travailleurs sociaux, entre dévouement et questionnements sur leur métier

« Quand est-ce que j’ai su que je voulais travailler dans le social ? » Alice (le prénom a été modifié), 23 ans, rembobine le fil de ses souvenirs. « Dès le lycée. Lorsque je voyais une personne subir du harcèlement scolaire, j’essayais toujours de l’aider. » Celle qui est aujourd’hui monitrice éducatrice exprime comme une évidence : « Je n’ai jamais aimé les injustices. »

La notion d’injustice est également évoquée par Gwendal, 27 ans : « Pour moi, l’injustice est invivable. » L’apprenti éducateur spécialisé ne supporte pas d’observer autour de lui des situations qu’il estime anormales, surtout envers des personnes vulnérables. Ce refus de l’iniquité est lié à son histoire familiale. Son père, atteint d’une sclérose en plaques, se voit refuser des emprunts bancaires depuis des années en raison de sa maladie. « Pourtant, il travaille », déplore Gwendal. En devenant travailleur social, « je voulais contribuer et aider à régler ces situations injustes », confie l’éducateur, qui s’occupe aujourd’hui d’enfants placés dans un lieu de vie et d’accueil.

Cette quête de justice et une profonde volonté d’aider les autres poussent ces jeunes à s’orienter vers le travail social. Les professions du secteur relèvent pour beaucoup de la « vocation » ou du « métier passion », et sont porteuses de sens. « Car elles ont une dimension d’utilité sociale, et ces jeunes veulent se rendre utiles à la société », analyse Yvette Molina, sociologue spécialiste du travail social et directrice du Cereiso, le centre de recherche de l’association Askoria, qui gère des organismes de formation aux métiers de l’intervention sociale. Le souhait d’embrasser une activité professionnelle tournée vers l’autre découle souvent d’un « héritage familial de valeurs humanistes et altruistes », poursuit la sociologue.

« Notre génération n’est plus aveuglée »

Les jeunes travailleurs sociaux vont alors s’engager pleinement dans leur métier, aux horaires parfois décalés. « Ce n’est pas un emploi de bureau où on peut couper son ordinateur à 17 heures, il y a de l’humain derrière », souligne Gwendal, qui travaille régulièrement la nuit. « Je sais que je suis fait pour ça », assure Louis, 23 ans, en souriant. Lui aussi est en formation pour devenir éducateur spécialisé. « En stage, je ne me transforme pas, je reste le même. Mon métier est fatigant mais il n’est pas éprouvant. »

Ce sentiment d’évidence quant à leur vocation n’empêche pas les jeunes travailleurs sociaux de se poser des questions. Notamment sur leur rapport au travail. « Notre génération n’est plus aveuglée par l’idée qu’il faut s’acharner pour réussir, estime Louis. On veut faire ce qu’on aime. Moi-même, je me suis toujours promis de faire ce que j’aime car j’ai vu mes parents, employé dans une usine et fonctionnaire, se tuer à la tâche. »

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Les salariés d’Ubisoft France en grève pour le télétravail et les salaires

Le mouvement de grève chez Ubisoft a mobilisé, mardi 15 octobre, plus de 700 salariés sur les 4 000 que compte l’entreprise en France, selon une estimation du Syndicat des travailleurs et travailleuses du jeu vidéo (STJV), soit autant qu’en février lors d’un premier mouvement social. Ce débrayage intervient alors que le géant français du jeu vidéo traverse une passe difficile avec des ventes en berne et le report de la sortie d’un jeu majeur, sur fond de rumeurs de rachat de l’entreprise.

Devant le siège de l’entreprise à Montreuil, près de Paris, entre 50 et 100 salariés s’étaient réunis dans l’après-midi pour protester contre la décision prise mi-septembre par le groupe d’imposer au moins trois jours de présence au bureau par semaine. « C’est vécu comme une décision très injuste », a affirmé à l’Agence France-Presse (AFP) Marc Rutschlé, délégué syndical Solidaires informatique, l’une des formations ayant appelé à cette grève de trois jours dans les studios français d’Ubisoft à Paris, Lyon, Montpellier et Annecy.

Dans un courriel envoyé à ses salariés, la direction a justifié cette décision en affirmant que « la créativité est stimulée par les interactions interpersonnelles, les conversations informelles et la collaboration autour d’une même table » – tout en promettant de ne pas revenir « à un modèle 100 % présentiel ». « Des gens ont été embauchés sur la promesse de trois jours de télétravail, a fait valoir Clément Montigny, et ça remet en cause toute l’organisation de leur vie. Potentiellement, ces gens-là doivent envisager de quitter l’entreprise, ce qui est inacceptable. »

Effort salarial

Les syndicats demandent également à la direction « un vrai effort salarial », rappelant qu’une première grève d’ampleur avait mobilisé plus de 700 salariés en février sur les 4 000 que compte l’entreprise en France. « On n’a pas eu de réponse de la direction », déplore Pierre-Etienne Marx, délégué STVJ chez Ubisoft Paris. « On va augmenter [la pression] jusqu’à ce qu’il y ait de vraies concessions », avertit-il, espérant atteindre cette fois le millier de grévistes.

Cette grève tombe mal pour le fleuron français des jeux vidéo, qui enchaîne les déconvenues depuis plusieurs mois. « Ubisoft souffre d’un enchaînement de sorties [de jeux] qui n’atteignent pas le succès escompté », estime Oscar Lemaire, du site spécialisé Ludostrie, citant notamment Skull and Bones et le nouvel épisode de Prince of Persia.

Fin septembre, son PDG, Yves Guillemot, a aussi admis que les premières ventes de Star Wars Outlaws, sorti fin août, étaient « plus faibles que prévu », forçant Ubisoft à revoir à la baisse ses objectifs financiers et à repousser de trois mois la sortie du prochain volet de sa série phare, Assassin’s Creed, pour laisser le temps à ses équipes de le peaufiner.

Une mauvaise passe sanctionnée sur les marchés financiers : l’action Ubisoft s’est effondrée de plus de 40 % depuis le début de l’année, atteignant en septembre son plus bas niveau en dix ans. Début octobre, l’agence Bloomberg faisait également état d’un potentiel rachat d’actions par le géant chinois de la tech Tencent, qui possède déjà près de 10 % de l’entreprise, et la famille Guillemot, actionnaire principal, pour sortir le groupe de la Bourse.

Le Monde avec AFP

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BFM-TV fait face à une vague de départs inédite

Nicolas de Tavernost, alors patron du groupe M6, désormais président de BFM-TV et de RMC, à l’Elysée, le 16 février 2023.

Ce fut un drôle de lundi, ce 14 octobre, à BFM-TV. Un retour de week-end émotionnellement perturbé pour la rédaction de la chaîne d’info, bousculée par deux actualités internes aussi réjouissante pour l’une qu’inquiétante pour l’autre. D’un côté, il y avait la fierté d’avoir décroché deux récompenses au prix Bayeux Normandie-Calvados des correspondants de guerre, samedi soir, dont le premier Prix dans la catégorie télévision grand format, pour l’émission « Ligne rouge » et le reportage Gaza, fuir l’enfer, réalisé par le journaliste gazaoui Rami Abou Jamous et ses collègues français Fabrice Babin et Bertrand Séguier. De l’autre, il y a eu des larmes, lorsque Philippe Corbé, le directeur de la rédaction, a confirmé ce que Le Parisien avait écrit la veille : son départ à la fin de la semaine, après quatre années dans la maison, dont un an et demi à la tête de la rédaction.

Cet ancien de RTL, très apprécié des équipes, n’est ni le premier ni le seul à partir. Son adjoint Nicolas Marut a également annoncé, lundi matin, son prochain départ. Dans la journée, c’est celui du directeur délégué à l’information digitale de BFM et RMC, Julien Mielcarek, qui se confirmait avec, pour toile de fond, une absence de perspectives sur la stratégie numérique (BFM, qui compte 20 millions d’abonnés sur les plateformes, vient de lancer BFM 2, un canal 100 % numérique). En interne, l’égrenage des noms des partants, déjà effectifs ou encore officieux, ajoutait, lundi, au sentiment de « débandade » décrit par des témoins.

« La clause de cession qui s’est ouverte avec le rachat de BFM par CMA CGM crée une opportunité dont certains se saisissent, c’est la vie normale d’une entreprise », balaie Nicolas de Tavernost, le président de BFM-TV et RMC. L’ancien patron de M6 n’a jamais cessé de le dire : il se serait bien passé de tous ces départs, à commencer par celui d’Arthur Dreyfuss, le président d’Altice France, le 2 juillet, qu’il a remplacé au pied levé, ainsi que ceux des anciens dirigeants Hervé Béroud et Marc-Olivier Fogiel, annoncés quelques jours plus tard et effectifs depuis début octobre.

Une rédaction sur la réserve

Le duo qui leur a succédé, formé de Jean-Philippe Baille, ancien directeur de l’information de Radio France et Fabien Namias, ancien directeur général adjoint de LCI, affronte une rédaction encore sur la réserve, en attente d’une stratégie éditoriale claire susceptible de la convaincre. « Je regrette les décisions de Philippe Corbé et Nicolas Marut, qui ont fait un travail remarquable et sur lesquels je comptais m’appuyer, assure, fataliste, M. Namias. Mais avec la clause de cession, il y a des départs, et il y en aura d’autres » d’ici au 31 mai 2025, date à laquelle se terminera cette disposition qui permet de quitter une rédaction dans des conditions similaires à celles d’un licenciement, anticipe-t-il.

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Boeing supprime 17 000 emplois et s’enfonce dans une crise devenue existentielle

Lors d’une grève organisée par les employés de Boeing devant leurs locaux de Renton (Etat de Washington, Etats-Unis), le 11 octobre 2024.

Dix-sept mille emplois supprimés, plus de 6 milliards de dollars (5,5 milliards d’euros) de pertes au troisième trimestre, report des livraisons des 777X au début de l’année 2026 : c’est la bombe lâchée, vendredi 11 octobre au soir, par Kelly Ortberg, le nouveau président-directeur général de Boeing, alors que l’entreprise s’enlise dans une grève interminable et est menacée de dégradation par les firmes de notation financière.

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« Notre entreprise traverse une période difficile, et nombreux sont les défis auxquels nous sommes confrontés ensemble. La relance de notre entreprise nécessite des décisions dures à prendre et nous devrons procéder à des changements structurels », écrit M. Ortberg à ses employés, en leur annonçant des coupes claires dans les effectifs. « Nous devons repenser nos effectifs pour les adapter à notre réalité financière et à un ensemble de priorités plus ciblées. Au cours des prochains mois, nous prévoyons de réduire la taille totale de nos effectifs de près de 10 % », poursuit-il. Le groupe emploie dans le monde 170 000 salariés environ.

Il a également annoncé une provision de 5 milliards de dollars, qui concerne à la fois l’aviation civile (3 milliards) et la défense (2 milliards). La perte nette par action atteint 9,97 dollars, ce qui fait une perte d’environ 6,1 milliards de dollars pour le troisième trimestre.

Le PDG a, enfin, prévenu qu’il y aurait de nouveaux délais dans le programme des 777X, dont les premières livraisons n’interviendront pas avant début 2026. L’avion n’est toujours pas certifié et souffre d’un retard d’une dizaine d’années. L’entreprise arrêtera en 2027 la production de son 767 cargo.

Effondrement des commandes

Ces annonces surviennent dans un contexte de grève des ouvriers dans le berceau historique de Seattle (Etat de Washington). Le mouvement a commencé le 13 septembre, lorsque les salariés ont refusé un accord négocié par leur syndicat avec la direction. L’arrêt de travail a conduit à l’immobilisation de la chaîne de production des avions 737 Max, 767 et 777. Depuis, des milliers d’employés ont été mis en chômage technique tandis que les sous-traitants, fournisseurs et prestataires du constructeur aéronautique s’efforcent de survivre à l’effondrement de leurs commandes.

Boeing avait durci le ton mardi 8 octobre, retirant une offre d’augmentation de salaire de 30 % sur quatre ans. « Poursuivre les négociations n’aurait pas de sens à ce stade », a déclaré la directrice de la division avions commerciaux de Boeing, Stephanie Pope, dans une note adressée aux employés, qualifiant les revendications du syndicat, qui représente 33 000 salariés de la Côte ouest, de « non négociables ». Jeudi, la direction a attaqué l’organisation de défense des droits des salariés devant le National Labor Relation Board (NLRB), l’organisme fédéral qui gère les conflits sociaux, estimant que le syndicat « négociait de mauvaise foi ».

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La Poste : une enquête ouverte pour homicide involontaire après des suicides

Une information judiciaire a été ouverte pour homicide involontaire aggravé après deux suicides et une tentative de suicide d’employés de La Poste dans le Rhône, en 2017 et 2018, a déclaré le parquet de Lyon, vendredi 11 octobre.

Un juge d’instruction supervise des investigations pour « homicide involontaire aggravé par la violation manifestement délibérée d’une obligation de sécurité ou de prudence dans le cadre du travail, blessures involontaires dans le cadre du travail, harcèlement moral au travail et mise en danger de la vie d’autrui », a précisé le parquet à l’Agence France-Presse, confirmant une information de Mediapart. « Aucune mise en examen n’est intervenue à ce stade », a-t-il ajouté.

Selon le média d’investigation, l’inspection du travail a effectué un signalement auprès de la justice après les suicides d’un postier et d’une postière ainsi que la tentative de suicide d’un postier en l’espace de onze semaines entre fin 2017 et 2018. Les trois étaient employés sur la plateforme de préparation et de distribution du courrier de Corbas située en banlieue sud de Lyon, alors en pleine réorganisation, et se trouvaient en arrêt maladie au moment des faits, précise Mediapart.

Le site de Corbas entamait sa deuxième réorganisation des tournées de distribution du courrier en seulement deux ans, et ces refontes avaient eu des conséquences directes sur les conditions de travail et de santé des employés, selon une expertise indépendante du cabinet Secafi, datée de 2019 et que Mediapart s’est procurée.

L’inspection du travail avait quant à elle qualifié de « pathogène » le contexte sur la plateforme, et vu dans l’absence de réaction de l’entreprise une possible « mise en danger d’autrui », selon le média d’investigation.

Lire aussi (2018) : Article réservé à nos abonnés Facteurs à La Poste : « Physiquement, nous n’arrivons plus à suivre »

Des députés et élus lyonnais alertent sur « un stress intense »

Une employée du site âgée de 30 ans s’est suicidée en décembre 2017 et un employé en fin de carrière a fait de même en mars 2018. Fin 2017, un de leurs collègues, lui aussi en fin de carrière, était parti à pied et sans téléphone en direction de l’océan, à des centaines de kilomètres de chez lui, dans le but de mettre fin à ses jours, selon le média en ligne.

Il avait été retrouvé dans une forêt de Corrèze, où il vivait isolé, avec des gelures aux deux pieds qui avaient conduit à une double amputation, selon un arrêt de la cour administrative d’appel de Lyon en 2022, qui avait débouté une demande du postier de « reconnaissance de l’imputabilité au service de son épuisement professionnel et de sa tentative de suicide ».

Les réorganisations à La Poste se poursuivent dans le Rhône. Au cours de la semaine du 7 octobre 2024, des députés et élus lyonnais ont interpellé le ministre de la fonction publique Guillaume Kasbarian au sujet de la fermeture programmée de trois bureaux de poste dans l’agglomération de Lyon.

« L’instabilité liée aux réorganisations et les diminutions de personnels au sein des agences du groupe La Poste sont source d’un stress intense pour les salariés et salariées et d’une dégradation globale des conditions de travail notée par les syndicats », écrivent-ils dans leur courrier commun.

Lire aussi (2018) : Article réservé à nos abonnés Facteurs à La Poste : « Physiquement, nous n’arrivons plus à suivre »

Le Monde avec AFP

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Assurance-chômage : le gouvernement demande 400 millions d’euros d’économies

La ministre du travail et de l’emploi, Astrid Panosyan-Bouvet, lors de la séance des questions au gouvernement, à l’Assemblée nationale, le 2 octobre 2024.

Le gouvernement redonne la main aux partenaires sociaux. Et leur demande, au passage, de participer au redressement des comptes publics. Mercredi 9 octobre au soir, la ministre du travail, Astrid Panosyan-Bouvet, leur a envoyé une lettre les invitant à ouvrir « un cycle de discussions » sur deux sujets : l’assurance-chômage et l’emploi des seniors. Ce processus doit débuter « dès que possible », les règles d’indemnisation des demandeurs d’emploi venant à expiration le 31 octobre. Elles devraient, cependant, être prolongées jusqu’à la fin de l’année.

Comme annoncé, il y a quelques jours, par Mme Panosyan-Bouvet, les tractations sur l’assurance-chômage s’appuieront sur l’accord conclu en novembre 2023 par l’ensemble du patronat – Medef, Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) et Union des entreprises de proximité (U2P) – et par trois syndicats – CFDT, FO et CFTC. Un compromis qui actait une baisse du taux de cotisation patronale et renforçait légèrement les droits des demandeurs d’emploi, notamment les plus précaires et les plus jeunes. Le gouvernement avait toutefois refusé d’agréer la « convention » issue de ce texte après l’échec, en avril, de la négociation pour un « nouveau pacte de la vie au travail » qui portait notamment sur l’emploi des seniors.

Dans son courrier, la ministre fixe un objectif financier : « 400 millions d’euros d’économies supplémentaires » par an. A charge pour les organisations d’employeurs et de salariés d’identifier des solutions susceptibles de dégager cette manne. Un effort très inférieur aux 3,5 milliards d’euros escomptés de la réforme que le précédent gouvernement avait portée – avant qu’elle ne soit abandonnée. « C’est conforme à ce que la ministre nous a dit lorsqu’elle nous a rencontrés, il n’y a pas de surprise », souligne Michel Beaugas, secrétaire confédéral de FO. « Il va simplement falloir faire attention à ce que l’accord de 2023 ne soit pas modifié uniquement pour faire des économies et aller dans le sens patronal », précise le secrétaire national de la CFDT Olivier Guivarch.

Le sujet des travailleurs frontaliers

Plusieurs pistes sont déjà explorées. Les partenaires sociaux pourraient notamment agir sur les aides aux chômeurs souhaitant créer ou reprendre une entreprise. Autre hypothèse à l’étude : revisiter les règles d’indemnisation des travailleurs frontaliers, ces personnes résidant dans l’Hexagone tout en exerçant une activité dans un pays limitrophe (Suisse, Luxembourg, en particulier). Ceux-ci cotisent dans l’Etat où ils sont employés, mais, lorsqu’ils perdent leur poste, ils sont indemnisés par le régime d’assurance-chômage français, sur la base de leur rémunération, qui est souvent plus élevée que dans notre pays. Résultat : un surcoût d’environ 800 millions d’euros par an pour l’assurance-chômage tricolore, selon les gestionnaires du régime.

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