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La côte basque, un eldorado pour jeunes cadres parisiens : « J’organise mes rendez-vous en fonction des marées, pour aller surfer »

A Guéthary (Pyrénées-Atlantiques), au sud de Biarritz, le 28 septembre 2023.

Une rumeur a traversé l’Atlantique. Il existerait, en France, un endroit où succès professionnel et épanouissement personnel sont conciliables. Un écrin ensoleillé à la beauté brute, riche en espaces de coworking et en sites de surf. Son nom ? Biarritz (Pyrénées-Atlantiques). Son sobriquet ? « La Californie française », d’après les termes employés par un article du New York Times. On y apprend que cet ancien lieu de villégiature pour retraités bourgeois a été transformé depuis, grâce à l’arrivée de « jeunes Parisiens branchés », « aux avant-postes de la bohème ».

Corps sculptés, bars branchés, océan à proximité… La commune nichée dans le creux du golfe de Gascogne a des airs de Silicon Valley. « On y retrouve la même proximité avec la nature, le même cosmopolitisme aussi, à l’échelle de l’Hexagone. A Biarritz, on vient tous des quatre coins de la France, et on a tous immigré pour la même raison : la quête d’une meilleure qualité de vie, aux antipodes des mégalopoles, qui ne séduisent plus la jeune génération. Tous mes amis sont arrivés ici au cours des six dernières années », résume Julien Motte, 30 ans. Originaire de Lille, ce diplômé de l’Edhec a fait l’essentiel de sa carrière à San Francisco avant de s’implanter dans la cité balnéaire des Pyrénées-Atlantiques en 2021, alors que le siège social de sa start-up de la green tech est domicilié à Lille : « Toute l’équipe est en full remote [travailler sans jamais venir dans les locaux de l’entreprise]. Sur cinq, nous sommes trois à avoir fait le choix de Biarritz. Ici, j’organise mes rendez-vous en fonction des marées, pour aller surfer. Ça me force à avoir une vie équilibrée. »

Le trentenaire loue des bureaux au Connecteur, un nouvel espace de coworking de 500 m2, idéalement situé entre le centre-ville, la gare et l’aéroport, et disposant de tout le confort : bureaux avec vue sur la mer ou la montagne, terrasses, cafétéria, salle de sport, et même un rack pour ranger les planches de surf.

« Notre public est plutôt féminin, avec une surreprésentation de la tranche d’âge 30-40 ans. C’est la génération à l’aise avec l’hybridation du travail », analyse Thibault Saint-Georges-Chaumet, directeur général délégué du Connecteur. Le site héberge 165 entreprises. Si seules 20 % sont domiciliées à Paris – la plupart sont issues du Grand Sud-Ouest –, le bâtiment véhicule beaucoup de fantasmes. « On le taxe de nouveau temple pour bobos parisiens. Nous devons faire un travail d’humilité pour être mieux compris par la population », reconnaît M. Saint-Georges-Chaumet.

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Premier bilan mitigé de l’impact de la dégressivité des allocations-chômage sur le retour à l’emploi

L’Unédic a dressé, le 19 octobre, un premier bilan de la réforme controversée de la dégressivité des allocations-chômage, qui concerne potentiellement 90 000 personnes, soit moins de 3 % des chômeurs indemnisés. Pour ce faire, à la mi-2023, l’organisme paritaire a sollicité en ligne 45 000 chômeurs qui avaient vu leur allocation baisser de 720 euros par mois en moyenne. 10 608 personnes ont répondu à l’enquête qui cherchait à mesurer l’impact sur le retour à l’emploi.

Entrée en vigueur en 2021 durant le premier quinquennat d’Emmanuel Macron, cette réforme introduite par un décret de 2019 suspendu par la crise sanitaire a imposé une baisse de l’allocation à partir du neuvième mois, pouvant aller jusqu’à 30 % du montant pour les demandeurs d’emploi âgés de moins de 57 ans et gagnant plus de 4 500 euros brut par mois. Les bénéficiaires sont principalement des hommes très diplômés (bac + 5 et plus), cadres, âgés de plus de 45 ans percevant en moyenne un salaire brut mensuel de 4 850 euros.

« Le taux de retour à l’emploi des allocataires soumis à la dégressivité est plus faible que celui des autres allocataires », explique l’Unédic. Toutefois, 10 % à 15 % des répondants à l’enquête reconnaissent qu’ils ont accéléré leur recherche à la suite de cette mesure. 10 % affirment même qu’ils n’auraient pas pris l’emploi qu’ils occupent sans dégressivité. Les répondants déclarent être prêts à des concessions sur le type de contrat ou les missions, éventuellement le salaire (40 %), mais moins sur la qualification de l’emploi (le quart) et leur disponibilité pour leur famille (le tiers).

Les syndicats de salariés critiques sur la réforme

Un quart des répondants dit avoir repris un emploi salarié et un tiers avoir créé une entreprise. 15 % de ceux qui envisageaient de créer leur entreprise disent que, sans la dégressivité, ils auraient pris plus de temps pour monter leur projet. Mais les deux tiers évoquent des difficultés financières après la réduction de leur allocation et ressentent un « sentiment d’injustice au regard des années travaillées ».

Antoine Foucher, directeur de cabinet de la ministre du travail à l’époque de la réforme, voit dans ces chiffres « certes pas massifs, mais tout de même significatifs », la preuve que la dégressivité sert d’aiguillon. « A ce niveau de revenu, le chômage est quasi inexistant. Pourtant, ces cadres supérieurs mettaient bien plus de temps à retrouver un job que les chômeurs moins qualifiés. Cela tient au fait qu’ils perçoivent des allocations mensuelles élevées, souvent supérieures à 3 000 euros, et disposent d’un peu d’épargne. Il y a une corrélation entre la durée de la période d’indemnisation du chômage, le montant des allocations et le temps mis à retrouver un emploi. »

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Après un MBA financé par leur entreprise, les cadres parfois tentés « d’aller voir ailleurs »

Un Executive MBA à l’Insead peut coûter plus de 136 500 euros. Un quart des cadres qui suivent un EMBA dans cette école bénéficient du financement intégral de leur formation par leur employeur.

Il existe des cadeaux qui coûtent cher, très cher, et que les entreprises font à leurs cadres prometteurs. Il s’agit des Executive Master of Business Administration, soit les EMBA, une formation continue qui court généralement sur deux années, et que les compagnies financent partiellement, voire intégralement – c’est le cas pour 57 % des diplômés de la promotion 2023 d’HEC, pour près de 25 % pour ceux de l’Insead. Une prise de risque pour les employeurs puisque le coût de la formation s’élève de 55 000 euros (à l’Edhec) à plus de 136 500 euros (à l’Insead) et qu’à l’issue de la formation les salariés, nouveaux diplômés, peuvent avoir une envie d’ailleurs et faire valoir les compétences acquises auprès de la concurrence.

Courtier en assurances, Romain Laniepce, 34 ans, diplômé de l’Ecole supérieure d’assurances, est ambitieux. Il intègre la société de courtage en assurances Diot-Siaci en 2019 au poste de directeur de clientèle. « On me fixe alors des objectifs raisonnables et j’ai surperformé », explique-t-il. Dès la fin de sa formation initiale, le jeune homme a souhaité intégrer un EMBA. « Je savais que cela donnerait un nouvel élan à ma carrière. J’avais besoin d’acquérir de nouvelles connaissances en matière de management et de stratégie, pour me positionner dans le groupe dans un rôle managérial. » Ses performances ouvrent une fenêtre idéale pour convaincre sa direction de parier sur lui ; elle décide de l’accompagner et lui finance un EMBA à l’Edhec, que le courtier suivra en 2022 et 2023.

Le parcours de Romain Laniepce n’est pas rare. « Lorsque les entreprises identifient des talents particuliers en leur sein, l’EMBA est une passerelle pour accéder au stade supérieur dans la société », observe Perrine de Ménonville, 37 ans, responsable grands comptes chez le spécialiste du recrutement PageGroup et également élève de l’EMBA d’HEC Paris. « On y intègre des compétences comportementales, une intelligence émotionnelle, une maîtrise de soi et la gestion des relations humaines au sein de l’entreprise », liste la chasseuse de têtes.

Sortir de son domaine de compétence

Chaque élève peut y trouver le complément à sa formation initiale. Fabien Zubowicz, 44 ans, initialement ingénieur généraliste formé à l’Eigsi de La Rochelle, et directeur des opérations du constructeur naval Nautitech, maîtrise les aspects techniques et technologiques de son métier. « Mais, pour gérer l’entreprise, j’ai besoin d’autres compétences : la stratégie, la finance, le marketing, l’innovation », expose-t-il. Son entreprise a financé l’intégralité de son EMBA au sein de l’Edhec.

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« L’Est républicain » et « Vosges Matin » testent ChatGPT pour la correction d’articles

Les quotidiens L’Est républicain et Vosges Matin vont expérimenter l’usage de ChatGPT « dans le cadre strict de relecture et de corrections de contenus proposés par nos correspondants locaux de presse », a annoncé leur propriétaire, le groupe EBRA, mercredi 25 octobre. C’est la première fois qu’un groupe de presse français fait savoir qu’il recourt à l’intelligence artificielle (IA) générative pour le travail usuel de sa rédaction.

Les modalités doivent être précisées, jeudi, aux représentants du personnel lors d’un comité social et économique, pour une mise en œuvre dans les semaines suivant sa consultation. Il n’y aura pas d’impact sur les emplois, assure la direction.

« L’arrivée de l’IA générative dans les rédactions est inévitable et notre objectif est de l’anticiper en testant les outils à disposition dans nos process de traitement de l’information », explique Christophe Mahieu, directeur général des deux publications.

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Les médias s’essaient prudemment à l’intelligence artificielle

« Tester simplement les “fonctions bureautiques” »

« A l’image des outils de correction orthographique utilisés depuis des années par les journalistes de nos rédactions, il s’agit donc là de tester simplement les “fonctions bureautiques” de cet outil d’IA » qu’est le robot conversationnel ChatGPT, développé par la société américaine OpenAI, ajoute-t-il, dans une déclaration à l’Agence France-Presse.

Dans un communiqué, le Syndicat national des journalistes (SNJ) a affirmé qu’il « ne laissera pas les clés de l’information aux ordinateurs ». « Les chartes relevant de la déontologie et de l’éthique journalistiques ne sont pas désuètes. Elles doivent s’imposer à l’IA, c’est non négociable », martèle-t-il.

La direction de L’Est républicain et de Vosges Matin précise que « le choix, la hiérarchie de l’information, la première et la dernière relecture ainsi que la validation finale pour publication resteront de la responsabilité des journalistes de notre rédaction ». Et, « bien évidemment, le journaliste secrétaire de rédaction [qui met en page les articles] pourra également modifier ce contenu corrigé si cela lui semble nécessaire et pertinent ». La durée de l’expérimentation dépendra des résultats obtenus.

Le groupe EBRA, détenu par Crédit mutuel, est le premier groupe de presse quotidienne régionale, avec neuf titres, dont L’Alsace, Les DNA, Le Progrès, couvrant vingt-trois départements de l’est de la France.

Le Monde avec AFP

Affaibli, Casino poursuit sa restructuration financière

Un hypermarché Casino, à Villefranche-sur-Saône (Rhône), le 28 avril 2023.

Pas à pas, comme un client poussant résolument son chariot de rayon en rayon vers les caisses, le groupe Casino suit le long chemin des entreprises en difficulté. Nouvelle étape de ce parcours semé d’embûches, le distributeur a annoncé, mercredi 25 octobre, l’ouverture d’une procédure de sauvegarde accélérée. « La procédure de sauvegarde accélérée concerne uniquement la dette financière (…) et n’aura aucune incidence sur les relations du groupe avec ses partenaires opérationnels (en particulier ses fournisseurs et ses franchisés) ou ses salariés », précise Casino.

C’est dans ce cadre juridique que les créanciers du groupe seront appelés à voter sur le plan de restructuration négocié de haute lutte. Ce plan prévoit la conversion de 4,9 milliards d’euros de dette en capital ; en parallèle, le consortium réunissant les hommes d’affaires Daniel Kretinsky, Marc Ladreit de Lacharrière et le fonds britannique Attestor prendra le contrôle de Casino après avoir injecté 925 millions d’euros à son capital. Les administrateurs judiciaires Aurélia Perdereau, Helène Bourbouloux et Frédéric Abitbol auront deux mois, quatre au maximum, pour piloter cette sauvegarde.

Fragilisé par la hausse des taux et de mauvais résultats commerciaux, Casino était entré en procédure de conciliation le 25 mai. Les négociations menées sous l’égide des conciliateurs Aurélia Perdereau et Marc Sénéchal ainsi que du comité interministériel de restructuration industrielle avaient permis dans un premier temps de signer un accord de principe, le 27 juillet, entre Casino, les repreneurs et les créanciers bénéficiant de garanties. A la rentrée, les négociations s’étaient poursuivies avec les créanciers non sécurisés, ceux ne bénéficiant pas de sûretés, très pénalisés par le plan de restructuration.

8 milliards d’euros de dettes

Les créanciers ont eu ensuite jusqu’au 17 octobre pour adhérer à un accord dit de « lock-up », dans lequel ils s’engageaient à voter en faveur du plan de restructuration, en échange d’une commission d’adhésion et du droit de souscrire à une augmentation de capital. De quoi s’assurer par avance que le scrutin sera globalement favorable.

Le tribunal de commerce va, en effet, organiser des votes par classe d’actifs, c’est-à-dire en fonction du type de créance détenue, obligation, titre subordonné ou facilité de crédit. Mais, grâce au nouveau régime des faillites, le juge aura ensuite la possibilité de mélanger les résultats pour franchir le seuil des deux tiers nécessaire pour valider l’approbation.

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Les salariés de Ford obtiennent une augmentation de 25 % sur quatre ans au bout de six semaines de grève

Un syndicaliste de United Auto Workers enlève les panneaux appelant à la grève du site de l’usine d’assemblage Ford de Wayne (Michigan), le 25 octobre 2023.

La grève touche sans doute à sa fin à Detroit (Michigan). Le syndicat United Auto Workers (UAW) a indiqué, mercredi 25 octobre, dans la soirée, être parvenu à un accord de principe avec Ford, après six semaines de grève, tandis que les négociations se poursuivent avec Stellantis et General Motors (GM).

L’accord doit être à présent ratifié par les 47 000 syndiqués de Ford. Il prévoit une augmentation salariale de 25 % sur quatre ans, dont un bond de 11 % la première année. Au bout de quatre ans, le salaire horaire maximal serait de 40 dollars (37,90 euros), en hausse d’un tiers, selon le négociateur d’UAW pour Ford, Chuck Browning, tandis que le salaire minimal va augmenter de 68 %, pour atteindre 28 dollars. Désormais, il ne faudra plus que trois ans, contre huit actuellement, pour avoir le salaire plein – des salaires différenciés ont été introduits après la faillite de Detroit, en 2009. Les retraites sont améliorées, tandis que les salariés auront droit de faire grève en cas de fermeture d’usine, ce qui est une première.

Le président Joe Biden, qui avait pris fait et cause pour le syndicat en se déplaçant sur un piquet de grève fin septembre, a immédiatement salué la nouvelle. « Cet accord de principe offre une augmentation record aux travailleurs de l’automobile qui ont tant sacrifié pour garantir que nos trois grandes entreprises emblématiques puissent toujours dominer le monde en matière de qualité et d’innovation », se réjouit le président dans un communiqué.

M. Biden, qui se présente comme le président le plus prosyndicat que le pays ait connu, a répété son credo : « J’ai toujours cru que la classe moyenne avait construit l’Amérique et que les syndicats avaient construit la classe moyenne… Le pouvoir des travailleurs est essentiel à la construction d’une économie à partir de la base, plutôt que du haut vers le bas. »

« Nous renversons la tendance »

L’accord est une victoire manifeste pour le patron du syndicat UAW, Shawn Fain, dont le mouvement était populaire aux Etats-Unis et profitait du mécontentement face à une inflation qui a atteint 17 % depuis l’arrivée de Joe Biden à la Maison Blanche. « Ensemble, nous renversons la tendance pour la classe ouvrière de ce pays », a estimé M. Fain.

Lire aussi le reportage : Article réservé à nos abonnés Grève automobile aux Etats-Unis : « Tout augmente, sauf notre fiche de paie »

Cet ancien électricien de Chrysler, élu au printemps à 54 ans, incarne l’aile gauche du syndicat, après que la précédente direction a été condamnée pour corruption en 2020 et jugée trop conciliante avec le patronat. La nouvelle stratégie agressive portée par M. Fain était fondée sur la dénonciation des superprofits engrangés depuis le Covid par Ford, Stellantis et GM. Le bénéfice opérationnel mondial cumulé des trois constructeurs de Detroit s’est envolé de 4,8 milliards de dollars, en 2020, à 29,4 milliards de dollars en 2021 et à 37,2 milliards de dollars en 2022.

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Télétravail : vers la fin de l’« open bar »

« Je ne vois pas comment c’est possible », peste un salarié de Publicis sur le compte Instagram de #balancetonagency, après l’annonce par son employeur, le 12 octobre, du retour obligatoire au bureau. « Il est déjà actuellement compliqué de trouver une place (bureau flex) ou de s’isoler pour une réunion. Pourtant nous devrons tous être sur place le lundi. » Le groupe publicitaire a décidé qu’à partir du 1er janvier 2024 il ne serait plus question de télétravailler plus de deux jours par semaine et jamais le lundi. Pour Publicis, qui s’était fait le chantre du travail à distance, ce mode d’organisation hybride serait désormais associé à la baisse de productivité.

Et Publicis n’est pas un cas isolé. « Partout, on renégocie les accords, explique Benoît Serre, vice-président de l’Association nationale des DRH (ANDRH). Les dirigeants commencent à mesurer les conséquences structurelles du télétravail. La perte de productivité collective avec des salariés qui se croisent mais ne se voient plus. Ils comprennent que ce mode d’organisation perturbe énormément le management. Ils n’ont plus que 15 % à 20 % de l’effectif le vendredi. Ils ont parfois l’impression qu’on est passé à la semaine de quatre jours sans le dire. Et partout où l’on renégocie, que ce soit chez Safran, L’Oréal, ou Bouygues, ça râle. »

Les employeurs français souhaiteraient limiter le télétravail à 0,7 jour en moyenne par semaine, révèle l’étude internationale « EY Work Reimagined », publiée jeudi 26 octobre. Tandis que les salariés aspirent soit à la stabilité, soit à plus de télétravail : 78 % sont satisfaits de leur rythme actuel, d’après la dernière note de l’Insee sur le sujet, et dans le secteur tertiaire plus d’un Français sur trois préférerait télétravailler quatre jours sur cinq, selon l’étude d’EY. Dans les vingt pays suivis depuis 2020 par le cabinet de conseil, les employeurs français sont « les plus frileux face au télétravail ». Le retour au bureau va-t-il s’imposer en France ?

Cohésion d’équipe

Les Etats-Unis sont les premiers à avoir connu une telle vogue. Zoom, Apple, Google, Meta, Amazon, Tesla, les grandes entreprises américaines qui avaient adopté le 100 % télétravail y ont renoncé dès 2022 pour faire revenir leurs salariés au moins deux ou trois jours par semaine, voire plus. Chez Tesla, c’était quarante heures par semaine au bureau ou la démission, dixit le PDG Elon Musk, au nom de la productivité. Même motif que chez Publicis. La cohésion d’équipe a également été convoquée pour justifier ce rappel des salariés. « Il est plus facile de construire une relation de confiance en présentiel », a expliqué Mark Zuckerberg, fondateur et DG de Meta, dans un courriel adressé à ses effectifs, en mars 2023.

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« L’intensification du travail, longtemps niée, est à présent posée comme inéluctable »

Bien des débats actuels dans les domaines du travail et de l’emploi sont à relier, selon nous, à une fragilisation des usages du temps dans la vie professionnelle. Un « modèle de la hâte » marque l’évolution du travail dans les pays industrialisés depuis une trentaine d’années, avec ses traits bien décrits par les enquêtes statistiques et les chercheurs de plusieurs disciplines : raccourcissement des délais, cumul de contraintes de temps plus ou moins (in)compatibles entre elles, tâches imprévues, horaires plus dispersés, accélération des changements et des mobilités.

Dans les décisions en entreprise ou les politiques publiques, ce modèle est souvent tenu pour intouchable. En témoigne la rareté des débats à ce propos. L’intensification du travail, longtemps niée, est à présent posée comme inéluctable : ainsi va la compétition économique ou, dans l’administration, l’usage « rationalisé » des deniers publics.

Pourtant, si on s’intéresse par exemple aux difficultés de recrutement et de fidélisation, on se confronte aussitôt aux conditions temporelles de l’accueil et de la transmission des savoirs professionnels. On peut penser à cette aide-soignante, peu désireuse d’encadrer une nouvelle collègue, parce qu’elle-même manque de temps pour cela et parce qu’elle hésite sur ce qu’il faut lui montrer : comment faire une « belle toilette » au patient, ou bien comment se montrer expéditive ?

Mal-être des encadrants

Si l’on veut mieux comprendre l’impopularité d’un recul de l’âge de la retraite, il faut avoir à l’esprit que la répétition des urgences, dans le travail lui-même ou dans ses transformations, est davantage problématique quand l’âge avance, parce qu’elle compromet la mise en œuvre des ressources de l’expérience. C’est pour cela que bien des assistantes de direction, par exemple, jugent ce métier éprouvant à la cinquantaine passée, et tentent d’accéder à une fonction plus calme –, mais au prix d’un moindre intérêt au travail. Autant de raisons de ne pas vouloir prolonger sa vie professionnelle…

Si l’on se préoccupe des signes de mal-être chez des encadrants, on doit prêter attention à la contradiction qu’il leur faut gérer entre, d’une part, une batterie de plus en plus rigoureuse d’indicateurs de performance et, d’autre part, une responsabilité accrue quant à la qualité de vie au travail de leurs équipes. Ce qui aboutit entre autres, pour des responsables de service administratif, à « laisser leur porte ouverte », afin d’être approchés à tout moment par les subordonnés, mais aussi, et en conséquence, à étendre leurs horaires pour s’isoler et traiter des dossiers épineux, tôt le matin et/ou tard le soir.

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Le nombre de demandeurs d’emploi en hausse de 0,6 % au troisième trimestre

La hausse était attendue, elle se confirme. A peine les députés et sénateurs, réunis en commission mixte paritaire, lundi 23 octobre, ont-ils trouvé un compromis sur le projet de loi « pour le plein-emploi », censé permettre au gouvernement d’atteindre son objectif d’un taux de chômage de 5 % – contre 7,1 % actuellement – que les chiffres communiqués, mercredi 25 octobre, par la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), rattachée au ministère du travail, et Pôle emploi, montrent une augmentation du nombre de demandeurs d’emploi au troisième trimestre.

Ainsi le nombre de personnes inscrites à Pôle emploi sans aucune activité (catégorie A) connaît une hausse de 0,6 %, avec 3,028 millions de personnes sur l’ensemble du territoire (outre-mer compris, sauf Mayotte) contre 3,011 millions au deuxième trimestre. En comparant sur un an, la tendance est plus favorable, avec une baisse de 3,8 % des effectifs lors des douze derniers mois.

La hausse est toutefois moins marquée si l’on ajoute les demandeurs d’emploi en activité réduite (catégories B et C). Si le nombre d’inscrits en France métropolitaine en catégorie B – ceux qui ont travaillé moins de soixante-dix-huit heures sur un mois – est en forte croissance (+ 3,1 %), ceux qui ont travaillé plus de soixante-dix-huit heures (catégorie C), font le sens inverse (– 2,3 %). Des données qui laissent supposer un transfert entre catégories, « difficilement explicable », selon le professeur d’économie à Neoma Business school, Gilbert Cette. Si l’on prend l’ensemble des personnes tenues de rechercher un emploi, l’opérateur public recense 5,3 millions de personnes inscrites en France (outre-mer compris, hors Mayotte).

Hausse des moins de 25 ans sans emploi

Les dynamiques sont différentes selon les tranches d’âge. La mauvaise nouvelle concerne les jeunes de moins de 25 ans sans emploi, qui voient leur nombre augmenter de 2 % par rapport au second trimestre et de 3,2 % sur un an. Une confirmation que les effets de la réforme de l’apprentissage sont bel et bien terminés. A contrario, le nombre de personnes âgées de 50 ans ou plus inscrites à Pôle emploi en catégorie A continue de baisser, de l’ordre de l’épaisseur du trait au troisième trimestre (– 0,1 %), mais de manière bien plus importante sur les douze derniers mois (– 6,5 %). « La grande question est désormais de savoir si cette hausse attendue depuis des mois anticipe une suite plus violente dans les prochains mois », estime Gilbert Cette.

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« Le Soin des choses », de Jérôme Denis et David Pontille : Attention fragile !

« Tout comme [Giovanni] Morelli, [Sherlock] Holmes et [Sigmund] Freud, les personnes chargées de la maintenance prêtent attention à ce qui est habituellement négligé afin de trouver dans la matière des signes révélateurs », écrivent Jérôme Denis, professeur de sociologie à Mines Paris-PSL, et David Pointille, directeur de recherche au CNRS, dans Le Soin des choses. Politiques de la maintenance (La Découverte, « Terrains philosophiques », 2022).

Ce vaste essai est une invitation au voyage et à la réflexion sur le rôle essentiel de la maintenance dans notre quotidien, dans les entreprises, comme dans les politiques publiques.

L’ouvrage commence comme un roman, par une journée banale décrite à travers ses dysfonctionnements minuscules et ses traces d’usure ordinaires, un robinet qui goutte, un enchevêtrement de câbles rafistolés, un vélo en révision, etc.

Les auteurs, tous deux rattachés au centre de sociologie de l’innovation de Mines Paris-PSL, donnent une large place aux récits, comme « source de connaissance sur le monde », avec l’ambition de changer le regard sur les relations qu’entretiennent les humains avec les choses et dévoiler ainsi « la portée politique des activités de maintenance ».

En prenant l’usure des choses comme point de départ, des panneaux émaillés de la RATP à l’horloge du Panthéon en passant par un pont de Philadelphie, ils démontrent que se préoccuper de ce qui ne fait pas événement force à observer le monde avec plus d’attention pour y lire tout ce qui se joue dans une relation, dont le rapport au temps. La maintenance, au-delà de l’entretien, met en exergue les ruptures indésirables pour la continuité de l’activité et pour le progrès durable.

« Le Soin des choses. Politiques de la maintenance », de David Pontille et Jérôme Denis, La Découverte, « Terrains philosophiques », 376 p., 23 €.

« Le Soin des choses. Politiques de la maintenance », de David Pontille et Jérôme Denis, La Découverte, « Terrains philosophiques », 376 pages, 23 euros.