Charlotte de Vilmorin, une cheffe d’entreprise aux commandes malgré son fauteuil roulant
Jeune, femme, en situation de handicap… Au regard des statistiques, Charlotte de Vilmorin, 29 ans, avait peu de chances de devenir dirigeante d’entreprise. Pourtant, depuis 2015, cette battante est à la tête de Wheeliz, un site de location entre particuliers de voitures aménagées, lancé avec le développeur Rémi Janot. La structure, avec six salariés, gère un parc de 1 500 voitures et compte 10 000 utilisateurs. Le marché est prometteur : la France compte 400 000 personnes en fauteuil roulant et 1,2 million de seniors en perte d’autonomie. Wheeliz travaille au lancement d’une appli qui permettra de dématérialiser la signature du contrat et l’état des lieux.
Wheeliz se développe au prix d’« un combat quotidien », concède, souriante, la jeune femme, chemise en jean et pull sombre à paillettes. « Ce n’est pas facile d’affronter le regard des autres quand on y lit le soupçon d’incompétence a priori. »
Dans sa phase de prospection, elle se souvient de cette personne qui l’a poliment écoutée, puis lui a envoyé un mail le lendemain : « Le business n’est pas compatible avec votre condition physique ! Vendez votre idée et contentez-vous de votre blog [Wheelcome, sur sa vie en fauteuil roulant ; elle a également été l’auteure d’un récit sur son expérience]. » Et que dire de ce banquier auquel elle demandait l’ouverture d’un compte professionnel : « “Mais non, mademoiselle, vous voulez parler d’un compte personnel !”, m’a-t-il lancé, en me regardant comme si j’étais neuneu », se souvient Charlotte de Vilmorin.
« Sur mon CV, je n’indiquais pas que j’étais en fauteuil. J’ai vite déchanté car, souvent, je ne pouvais même pas accéder au bureau du recruteur en raison d’un escalier. » Charlotte de Vilmorin
Mais son plus gros obstacle, « c’est l’autocensure ». Heureusement, sa famille et ses amis sont d’un soutien sans faille. « Cela donne une grande force, ajoute la chef d’entreprise. Mes parents ont tout fait pour que je grandisse en milieu ordinaire, avec les camarades de mon âge, ça change tout. »
Diplômée du Celsa, après une prépa, Charlotte a démarré sa vie professionnelle dans une agence de publicité avant de se lancer à son compte. « A mes débuts, sur mon CV, je n’indiquais pas que j’étais en fauteuil, car je voulais être choisie pour mes compétences, se souvient la jeune femme. Mais j’ai vite déchanté car la plupart du temps, je ne pouvais même pas accéder au bureau du recruteur en raison d’un escalier ou d’un ascenseur trop étroit pour passer. »