Réformes des retraites : « De nouvelles difficultés annoncées en fin de carrière »
Carnet de bureau. Le management risque d’être compliqué pour les entreprises qui s’efforceront de maintenir les seniors en emploi jusqu’à l’âge du départ à la retraite, si le passage à 64 ans devait être appliqué. Le comité de mobilisation de l’Insee contre la réforme des retraites vient de publier son quatrième numéro d’« Analyse retraites » pour tenter d’éclairer le débat sur la pénibilité au travail.
Présenté jeudi 16 mars à Montrouge (Hauts-de-Seine) par une dizaine d’agents de la direction générale de l’Insee, ce recueil officieux est le produit d’un collectif de cinquante statisticiens, chargés d’études et mathématiciens de la fonction publique. Leurs conclusions annoncent une aggravation des difficultés en fin de carrière.
Avant la réforme, la durée moyenne en emploi après 50 ans n’est que de 9,2 ans (et non pas 14), et, en 2019, 37 % de salariés ne se sentaient déjà pas capables de tenir dans leur travail jusqu’à la retraite, comme le révélait la direction de l’animation, de la recherche, des études et des statistiques (Dares) du ministère du travail le 9 mars. « Au moment du départ en retraite, indique l’étude, quasiment une personne sur quatre présente une incapacité : 8 % sont fortement limitées depuis au moins six mois dans leurs activités quotidiennes à cause d’un problème de santé et 15 % moins fortement. »
L’espérance de vie sans incapacité
L’incapacité s’accentue en fonction des catégories socioprofessionnelles. « Ces incapacités sont nettement plus fréquentes chez les ouvriers (34 %) que chez les cadres (14 %). » La durée moyenne en emploi après 50 ans est d’ailleurs de quatre ans plus courte pour les ouvriers (7,5 ans) que pour les cadres et les professions intellectuelles supérieures (11,5 ans).
Un décalage que les statisticiens retrouvent dans la mesure de l’espérance de vie sans incapacité. Toutes catégories confondues, en 2020, l’espérance de vie sans incapacité était de 63,9 ans pour les hommes et de 65,3 ans pour les femmes. Mais « un ouvrier de 30 ans peut espérer vivre sans incapacité jusqu’à 62,4 ans en moyenne pour un homme, et 64,7 ans pour une femme, soit onze ans de moins qu’un ou une cadre du même sexe ». A 62 ans, 14 % des ouvriers sont déjà décédés, contre 6 % des cadres.
Or la réforme de 2010, qui avait reporté l’âge de départ de 60 à 62 ans, s’était accompagnée d’une hausse du nombre d’arrêts maladie après 60 ans : « Ces arrêts maladie qui se substituent à la retraite représentent un surcoût annuel de 68 millions d’euros pour l’Assurance-maladie. Ils peuvent aussi déstabiliser les collectifs de travail et amener à un report du travail sur les autres salariés. Un constat qui ne pourrait que s’aggraver avec un nouveau report de deux ans de l’âge de départ en retraite », alerte l’étude.
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