« L’autonomie favorise la productivité des salariés »

C’est un principe de base du taylorisme, qui sous-tend un pan entier de la théorie économique dite des contrats : les agents économiques sont paresseux, en plus d’être égoïstes. Pour les inciter au travail, deux moyens principaux existent, les incitations monétaires et la surveillance.

Surveillance et incitations monétaires peuvent être substituées l’une à la place des autres. S’il est difficile de surveiller ses employés, alors il faudra leur laisser une part plus grande du gâteau, afin de les motiver à travailler plus. Si, au contraire, on peut les surveiller et, le cas échéant, les punir – notamment par un licenciement –, alors la peur de la sanction les incitera à travailler, et le recours aux incitations financières sera moins nécessaire.

La multiplication des outils numériques de contrôle apparaît, dans cette optique, comme une « solution providentielle », surtout depuis la banalisation du télétravail, qui rend, par définition, la surveillance directe par le manageur plus difficile.

Une étude de terrain publiée en août récente révèle cependant, de manière concrète et chiffrée, les effets néfastes, à la fois pour les salariés et les entreprises, de cette obsession de surveillance et de contrôle. Une équipe de chercheurs a collaboré avec une grande chaîne de boulangeries allemande, aux 145 magasins et au chiffre d’affaires de plus de 100 millions d’euros. Cette entreprise, comme tant d’autres, a multiplié la mise en place de check-lists dans tous ses magasins comme instrument de contrôle des employés.

Satisfaction et stabilité des équipes

Des entretiens détaillés avec ces employés ont révélé une grande insatisfaction envers le contrôle jugé excessif exercé par le management, notamment par l’intermédiaire de ces check-lists. Quant à la direction, elle s’est plainte d’une rotation trop importante du nombre des employés, la version managériale de l’adage : « Les gens ne veulent plus travailler. » Les chercheurs ont alors émis l’hypothèse que ces deux problèmes puissent être liés.

Il vous reste 48.72% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

NovAsco : trois offres de reprise partielle ont été déposées, le site d’Hagondange s’attend au pire

Près du site Novasco d’Hagondange, en Moselle, le 30 juillet 2025.

A Hagondange (Moselle), la nouvelle a fait l’effet d’un coup de massue. Vendredi 24 octobre, Métal blanc, PME ardennaise soutenue par un collectif d’industriels, a informé les administrateurs judiciaires qu’elle ne déposerait finalement pas d’offre pour reprendre le groupe NovAsco (ex-Ascometal, 703 salariés au dernier recensement) dans son entièreté. L’investisseur potentiel veut se concentrer uniquement sur le site de Leffrinckoucke (Nord, 170 salariés), près de Dunkerque, délaissant donc les grands bureaux, l’aciérie d’Hagondange (450 salariés), ainsi que les ateliers de parachèvement de Custines (Meurthe-et-Moselle) et de Saint-Etienne, dans le quartier du Marais.

L’usine vétuste d’Hagondange est à l’arrêt depuis la mi-juillet. La faire tourner coûte actuellement plus que ce qu’elle rapporte, dans un marché de l’acier en grande difficulté. Les équipes de Métal blanc s’y sont rendues à plusieurs reprises ces dernières semaines. Elles ont tout analysé, auscultant les outils de production, sondant clients et fournisseurs, multipliant les études de marché. Un intérêt teinté de discours optimistes.

Il vous reste 77.02% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Enseignement supérieur : bras de fer entre le ministère et les universités sur le financement de la protection sociale complémentaire

Les agents de l’enseignement supérieur et de la recherche doivent bénéficier d’une prise en charge à 50 % de leur mutuelle à partir du 1ᵉʳ mai 2026. Mais l’Etat n’a pas prévu de moyens dans le projet de loi de finances pour compenser le coût de cette mesure, dont la prise en charge incombe, par conséquent, à des universités dont la trésorerie est déjà dégradée.

La rémunération, vecteur de la discrimination ethnique

Carnet de bureau. Une étude du Laboratoire sur les inégalités mondiales, « Racial Inequality in France », publiée le 1er octobre, révèle qu’« en France les minorités racisées subissent de fortes pénalités salariales », avec des différences importantes entre les actifs sans origine migratoire et les autres, et des écarts variables selon la région dont ils sont originaires. Selon les résultats révélés par ce centre de recherche de Paris School of Economics, spécialisé dans l’analyse des inégalités dans le monde, les travailleurs les plus « pénalisés » sont originaires du Moyen-Orient ou d’Afrique du Nord, puis d’Afrique subsaharienne et, plus modérément, d’Asie du Sud-Est. Ni le niveau d’éducation ni la localisation ne suffisent à expliquer les écarts de revenus entre les différents groupes. Ceux qui sont nés en France sont moins touchés, mais « les pénalités persistent d’une génération à l’autre », précisent les chercheurs.

L’entreprise peut-elle y remédier ? « En théorie, les politiques de rémunération pourraient corriger cette situation. Elles le font déjà pour réduire les inégalités salariales entre les femmes et les hommes », avance Jean-François Amadieu, professeur à l’Ecole de management de l’université Paris-I Panthéon-Sorbonne. Mais le diagnostic des discriminations ethnoraciales en entreprise est compliqué par l’absence de statistiques rendues illégales, justement pour éviter les politiques discriminatoires.

Pour contourner la difficulté, les auteurs de l’étude, les économistes Ellora Derenoncourt, Yajna Govind et Paolo Santini ont analysé les données fiscales de 2006 à 2020 à partir de l’« Enquête revenus fiscaux et sociaux » de l’Insee, puis classé les individus par groupe régional selon la nationalité de leurs parents à la naissance.

Situations particulières

Les entreprises ne peuvent pas appliquer la même méthode : elles n’ont évidemment pas le lieu de naissance des parents dans les fichiers paie. « La première étape consiste à aller chercher les écarts salariaux au cas par cas et à mettre en évidence des modèles pour comprendre si les origines peuvent avoir un effet. Ensuite, l’entreprise regarde tout l’effectif pour repérer les groupes de salariés où il y a des écarts inexpliqués, avec un seuil de 10 %, par exemple. C’est ainsi que j’avais procédé pour une banque. On reproduit finalement ce que le juge ferait en cas de litige », décrit M. Amadieu.

Il vous reste 29.25% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

A 20 ans, les nouveaux leaders de l’IA à la conquête de la Silicon Valley

Présentation d’une puce d’intelligence artificielle, à San Jose (Californie), le 12 juin 2025.

Michaël Goldstein, collégien canadien de 13 ans, ne gagne pas son argent de poche en distribuant les journaux à l’aube sur sa bicyclette. C’est un geek. Il a construit des drones et des ballons météo, et depuis un an, il s’intéresse à l’intelligence artificielle (IA). Michaël a déjà créé deux start-up. Il a abandonné la première, Flowe AI, quand il a compris que son idée était déjà sur le marché. Il se consacre dorénavant à Kodo, un agent pour aider ses clients à réaliser leur propre design. En quatre jours, sa version bêta a été consultée par 700 utilisateurs. Si le jeune entrepreneur n’a pas encore réussi à attirer les investisseurs pour financer son projet, il a pu cependant, cet été, visiter la Silicon Valley aux côtés de sa mère et rencontrer son héros, Sam Altman, le dirigeant d’Open AI. L’adolescent illustre, à l’extrême, la jeunesse des nouveaux leaders de l’IA.

Ses presque pairs, ses modèles, forment la nouvelle vague des jeunes patrons de la Silicon Valley, toujours plus précoces, plutôt vingtenaires que trentenaires. Roy Lee, le fondateur de Cluely, qui analyse presque en instantané les conversations en ligne, a 21 ans et un esprit potache. Il a été viré, dit-il, de l’université Columbia parce qu’il était trop beau. Karun Kaushik et Selin Kocalar ont eux aussi 21 ans. Ces deux décrocheurs du MIT ont fondé Delve, un outil d’IA pour vérifier la conformité légale de données sensibles. Brendan Foody, 22 ans, a, lui, mis sur orbite Mercor, un site de recrutement, soutenu par deux vieux habitués de la Silicon Valley, Peter Thiel et Jack Dorsey. En février, Mercor a attiré 100 millions de dollars (86 millions d’euros) d’investissements pour financer son ascension éclair.

Il vous reste 71.05% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

A la société postale UPS, des suppressions massives d’emplois et une automatisation record

Des camions UPS, à Los Angeles, le 28 octobre 2025.

Le groupe américain de messagerie et de livraison de colis UPS a dépassé les attentes au troisième trimestre, estimant tirer les fruits du « plus gros changement stratégique » de son histoire. Celui-ci a entraîné la suppression de dizaines de milliers d’emplois et l’automatisation de dizaines de sites.

« Les départs naturels et les actions opérationnelles se sont accélérés chaque mois (…) et nous avons terminé le trimestre avec près de 34 000 postes en moins sur un an », a indiqué, mardi 28 octobre, Brian Dykes, directeur financier du groupe, lors d’une audioconférence avec des analystes. Selon lui, près d’un tiers ont été supprimés en septembre, y compris via un plan de départ volontaire pour les chauffeurs qui a été accepté par 90 % de la population sollicitée.

Vers 20 heures (heure de Paris), l’action UPS bondissait de près de 8 % à la Bourse de New York. A fin 2024, UPS comptait près de 490 000 employés dans le monde. Fin janvier, la société avait anticipé une baisse du chiffre d’affaires en 2025, après un accord avec le géant du commerce sur internet Amazon pour réduire son volume de plus de 50 % d’ici juin 2026. A fin septembre, le chiffre d’affaires avait baissé de 21,2 % sur un an.

UPS avait ensuite annoncé la suppression d’environ 20 000 postes cette année. Son plan d’entreprise « Fit to Serve », appliqué depuis 2023, prévoyait déjà la suppression de 14 000 postes. L’objectif est notamment de réduire ses coûts de 3,5 milliards de dollars en 2025, dont environ 2,2 milliards ont déjà été réalisés. UPS a notamment fermé 195 sites opérationnels et automatisé 35 sites supplémentaires, avec l’intention d’atteindre 42 d’ici la fin de l’année.

« Au quatrième trimestre, nous anticipons que 66 % de nos volumes vont passer par des systèmes automatisés, contre 63 % un an plus tôt », a relevé Carol Tomé, patronne du groupe, lors de l’audioconférence.

Bouleversement logistique

L’activité du groupe a aussi été directement affectée par des décisions de l’administration Trump : l’arrêt de l’exemption de droits de douane pour tous les petits colis entrant aux Etats-Unis, et l’instauration de nouveaux droits sur les importations.

La première a entraîné un décuplement des colis passant par la douane américaine : de 13 000 quotidiens en mars (environ 21 % traités sans intervention humaine) à 112 000 en septembre (90 % sans intervention humaine), a expliqué Mme Tomé. La deuxième décision a provoqué pour UPS une baisse dans les segments à marge élevée, une valeur en repli et une demande inférieure.

Le Monde Guides d’achat

Gourdes réutilisables

Les meilleures gourdes pour remplacer les bouteilles jetables

Lire

Newsletter

« A la une »

Chaque matin, parcourez l’essentiel de l’actualité du jour avec les derniers titres du « Monde »

S’inscrire

Newsletter

« La revue du Monde »

Chaque week-end, la rédaction sélectionne les articles de la semaine qu’il ne fallait pas manquer

S’inscrire

Le Monde Jeux

Chaque jour de nouvelles grilles de mots croisés, Sudoku et mots trouvés.

Jouer

Newsletter abonnés

« La lettre éco »

Le regard du « Monde » sur l’actualité économique du jour

S’inscrire

Newsletter abonnés

« La lettre des idées »

Votre rendez-vous avec la vie intellectuelle

S’inscrire

Newsletter abonnés

« La lettre éco »

Le regard du « Monde » sur l’actualité économique du jour

S’inscrire

« Au troisième trimestre, le volume des importations a baissé », en particulier depuis la Chine (-27,1 %), a noté M. Dykes, constatant néanmoins une « solidité » concernant les produits de santé. Anticipant un quatrième trimestre de même acabit, les dirigeants se sont montrés confiants pour l’activité pendant la saison festive. « Nous effectuons le plus gros changement stratégique de l’histoire de notre groupe et les modifications que nous effectuons sont destinées à créer de la valeur à long terme pour tous nos acteurs », a commenté Carol Tomé. « Avec la saison des envois pendant les fêtes qui approche, nous sommes positionnés pour le pic d’activité le plus efficace de notre histoire », a-t-elle assuré.

Des résultats financiers qui dépassent les attentes

Au troisième trimestre, le chiffre d’affaires trimestriel a atteint 21,41 milliards de dollars (-3,7 % sur un an) et le bénéfice net 1,31 milliard (-14,8 %). Le consensus de FactSet tablait respectivement sur 20,84 milliards et 1,10 milliard. Pour le quatrième trimestre, UPS table sur un chiffre d’affaires « d’environ » 24 milliards de dollars et une marge opérationnelle à données comparables d’environ 11 % à 11,5 %. Le consensus anticipait, avant la publication de mardi, un chiffre d’affaires de 23,82 milliards au dernier trimestre 2025.

Concernant l’ensemble de l’exercice, UPS entend investir 3,5 milliards de dollars de capitaux, payer autour de 5,5 milliards de dollars de dividendes et racheter pour environ un milliard de dollars de ses propres actions – rachat qui est déjà effectué.

Le Monde avec AFP

Réutiliser ce contenu

Retraites, chômage, immigration… les conséquences du décrochage démographique sur l’emploi

Un changement d’époque pour le marché du travail. La crise démographique en France s’accélère, et les conséquences de ce décrochage vont être nombreuses. Car la population active est déjà entrée en quasi stagnation, et devrait décroître autour de 2035. C’est le sujet d’une note − que Le Monde a consultée − publiée par le Haut-Commissariat à la stratégie et au plan, mardi 28 octobre. Le document présente « cinq révolutions du marché du travail » liées à la baisse attendue du nombre d’actifs dans les années à venir.

Cette contribution extérieure à l’institution, menée par l’ancien directeur du cabinet de Muriel Pénicaud au ministère du travail, Antoine Foucher, fait suite à une première étude consacrée au décrochage démographique diffusée en septembre. « On porte une grande attention à cette question démographique, l’idée est de lancer un signal d’alerte, faire prendre conscience des enjeux et proposer des options », avance le haut-commissaire au plan, Clément Beaune.

En janvier 2024, le président de la République, Emmanuel Macron, avait fait de cette question une priorité en annonçant plusieurs mesures destinées à un « réarmement démographique ». Mais les effets d’une politique publique efficace sur la natalité ne se feraient pas sentir avant une génération. « Pour les trente prochaines années, la messe est dite », affirme Antoine Foucher.

De fait, selon les dernières prévisions de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), qui prennent en compte les effets de la réforme des retraites de 2023, le pic démographique sur le marché du travail devrait se produire autour de 2033-2035, avant que le nombre de personnes en âge de travailler diminue. Un phénomène inédit depuis 1945.

Il vous reste 74.89% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Un compromis n’est bon qu’à certaines conditions

Dans les temps troublés actuels, marqués par toutes sortes de confrontations politiques ou sociales, le recours au compromis est présenté comme la voie de la raison. Trouver des consensus transcenderait les divisions au nom d’un bien commun. Or, la difficulté vient justement de ce que le contenu de ce bien commun n’est pas partagé, du fait de la rivalité des forces en présence… C’est alors que la recherche du compromis pour lui-même est élevée au rang de bien commun permettant de dépasser les oppositions et les dissensions.

L’exemple allemand est souvent invoqué chez nous pour établir que l’arrangement social et politique est possible, y compris sur de longues périodes. Il exigerait seulement une « culture » adaptée. Culture qui ferait défaut aux Français, dont l’esprit « gaulois » se plaît aux querelles et aux divisions. Ces lieux communs sommaires dispensent de comprendre le réel, c’est-à-dire les conditions matérielles qui rendent possible ou non la fameuse culture du compromis – c’est-à-dire les institutions, mais plus encore le rapport de force entre les camps qui s’opposent.

Les institutions rendent plus ou moins nécessaires les compromis selon qu’elles empêchent ou non de monopoliser les lieux de décision. Un système de gouvernance centralisé, qui concentre tous les pouvoirs dans les mains d’un parti majoritaire ou d’une seule partie prenante, ne favorise pas une culture du compromis. C’est le cas de la France.

Logique de don et de contre-don

A l’inverse, un système qui décentralise le pouvoir et multiplie, de ce fait, les lieux où il peut s’exercer permet d’accepter plus facilement les accords locaux et pragmatiques qui ne remettent pas en cause l’identité globale des parties prenantes. Plus encore, certaines institutions peuvent contraindre les parties opposées à partager les décisions en imposant, par exemple, la parité entre actionnaires et salariés dans les conseils de surveillance ou dans les conseils d’atelier des entreprises. C’est le cas de l’Allemagne. Cela oblige à trouver des accords.

Il vous reste 43.2% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Ni en emploi ni en retraite, cet entre-deux qui touche de plus en plus de femmes

Gwenaelle Chauvin, ancienne entrepreneuse, aura épuisé ses droits au chômage en novembre, et basculera alors sous le régime du RSA. A Saint-Brieuc, le 14 octobre 2025.

Gwenaelle Chauvin n’a pas hésité à l’annoncer sur le réseau professionnel LinkedIn : faute de parvenir à retrouver un emploi, à bout de ressources financières, elle « vient de rentrer en Bretagne vivre chez maman ». Un gigantesque bond en arrière pour cette femme énergique de 55 ans. Trop vieille pour convaincre un employeur, trop jeune pour prendre sa retraite.

Pour elle qui, mère de deux enfants, a créé deux entreprises, dont l’une dirigée une douzaine d’années durant avec son compagnon, la spirale infernale débute lors de sa séparation. Alors contrainte de trouver un emploi, Gwenaelle Chauvin décroche d’abord un CDD dans une collectivité locale d’Occitanie, où elle vit, puis un deuxième, un troisième… Six contrats se succèdent en l’espace de treize mois. Puis plus rien. Malgré le millier de candidatures envoyées pendant une longue année et la participation à d’innombrables forums de l’emploi, elle n’a pas retrouvé de place dans une entreprise.

Il vous reste 87.26% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

« Le travail tue, et il tue des mineurs », alerte un collectif de dirigeants syndicaux

Entre avril et juillet, cinq jeunes sont morts au travail. Parmi eux, un apprenti de 15 ans, un lycéen de bac pro de 17 ans, deux élèves de 16 ans en « séquence d’observation » de 2de ont perdu la vie en entreprise. Le plus jeune des morts était un élève de 3e.

Ce ne sont pas des « faits divers » isolés, mais une réalité cruelle : le travail tue, et il tue des mineurs. Selon le dernier rapport annuel de l’Assurance-maladie sur les risques professionnels, en 2023, 1 287 décès liés au travail seraient à déplorer, maladies professionnelles et accidents de trajets inclus, dont 810 accidents du travail reconnus. En la matière, la France est parmi les mauvais élèves de l’Union européenne.

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Morts au travail : une prise de conscience timide et tardive

Les moins de 25 ans sont surreprésentés dans les accidents du travail : 2,5 fois plus que le reste des salariés, selon l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS). En 2023, toujours d’après les statistiques de l’Assurance-maladie, 32 travailleurs de moins de 25 ans cotisant au régime général sont décédés sur leur lieu de travail, 38 si l’on compte les cotisants à la Mutualité sociale agricole.

Exécution de tâches, parfois dangereuses

Ces chiffres auraient dû alerter. Pourtant, le choix a été fait, depuis 2022, d’augmenter les temps de présence des mineurs en entreprise sous prétexte d’améliorer l’orientation et l’insertion professionnelle : stage d’observation pour les élèves de 2de générale et technologique, aides financières massives pour développer à marche forcée l’apprentissage, parcours différenciés en terminale bac pro.

L’entreprise est un mauvais lieu de formation. D’une part, les stages et l’apprentissage sont discriminatoires dans la mesure où ils reproduisent les inégalités d’accès au marché de l’emploi. D’autre part, poussée par une logique de rentabilité, l’entreprise n’a pas le temps d’accompagner les jeunes : les stages d’observation deviennent rapidement des stages d’exécution de tâches, parfois dangereuses.

Lire le récit | Article réservé à nos abonnés Accidents du travail : les jeunes paient un lourd tribut

En mécanique auto, par exemple, un apprenti ou un stagiaire peut se retrouver à dévisser des pneus à longueur de semaines : aucune plus-value pédagogique… A l’inverse, dans un atelier de lycée professionnel, les élèves vont apprendre à travailler en toute sécurité sur des pannes et des activités de plus en plus complexes.

Il vous reste 62.66% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.