A Paris, des éboueurs écœurés par les « casseurs de grève » venus du Sud

A Paris, des éboueurs écœurés par les « casseurs de grève » venus du Sud

Intervention de CRS au dépôt de l’entreprise Pizzorno, à Vitry-sur-Seine, bloquée par des grévistes, le 16 mars.

La discussion avec la direction, en ce lundi 20 mars, aura été de courte durée. A la sortie, un responsable syndical résume, devant une quarantaine de salariés et militants mêlés : « Y a pas d’avancée. » Les jours de grève ne seront pas payés, c’était attendu. Mais les concessions proposées par la direction sont minimes. Personne ne semble surpris. « Ils se foutent de notre gueule, poursuit devant l’assemblée Abdelkader Mekhti, délégué central CGT du groupe Pizzorno, spécialiste de la collecte et du traitement des déchets. Ceux qui veulent continuer lèvent la main. » Les bras se dressent. La grève, entamée le 7 mars, contre la réforme des retraites mais aussi pour des hausses de salaire, est reconduite.

A Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne), devant les locaux de Pizzorno Environnement, situés au milieu d’une zone industrielle, le temps des braseros et des palettes entassées est pourtant révolu. Ne restent que quelques traces sur des palissades. Ici, un autocollant citant Prévert : « Quand les éboueurs font grève, les orduriers sont indignés. » Là, un slogan tagué : « + de poubelles dans la rue, – d’ordures au pouvoir ». Le piquet de grève, la sono et les drapeaux rouges ont été démontés le 16 mars.

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Ce jour-là, plusieurs dizaines de CRS sont venus ­déloger les grévistes, syndicalistes et autres militants qui empêchaient les camions-bennes de sortir. La direction de Pizzorno, qui déplore auprès de M Le magazine du Monde le « blocage de ses activités par un collectif de personnes extérieures à l’entreprise », venait de demander, avec succès, au tribunal de Créteil d’autoriser le recours à la force pour débloquer le dépôt. Mais depuis, contrairement aux équipes du matin, moins mobilisées, les équipes du soir restent grévistes.

Avec ses quelque 250 salariés à Vitry, Pizzorno s’occupe de la collecte des déchets dans le 15e arrondissement de Paris et dans 24 communes du Val-de-Marne. Parmi les différents opérateurs privés travaillant dans une dizaine d’arrondissements de la capitale, la société, basée à Draguignan (Var), est la seule à connaître une grève d’ampleur. Ce n’est peut-être pas un hasard : au sein du groupe, le dialogue social est souvent plus que tendu.

Un système D parfaitement légal

En 2019, à Lyon, la société de 2 000 salariés avait eu recours à des intérimaires pour enrayer une grève. La pratique, illégale, avait été démasquée. Et aujourd’hui, si les grévistes de Pizzorno gardent un goût amer de l’évacuation du 16 mars, ils sont encore plus ulcérés par la stratégie de leur entreprise pour, disent-ils, « casser la grève ». En la matière, la direction n’a pas manqué d’inventivité, en faisant venir des salariés du groupe du sud de la France et de la région lyonnaise. Un système D parfaitement légal, pour un enjeu de taille.

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LJD

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