Réforme des retraites : « Et si nous laissions aux seniors français le choix de l’âge de leur départ, entre 62 et 67 ans ? »

Réforme des retraites : « Et si nous laissions aux seniors français le choix de l’âge de leur départ, entre 62 et 67 ans ? »

Un des arguments justifiant de repousser l’âge légal de départ à la retraite est le constat d’une augmentation de l’espérance de vie, qui réduirait le ratio entre actifs et inactifs. Mais prolonger la vie au travail des seniors risque d’avoir un impact négatif sur les soins aux personnes âgées dépendantes fournis par leurs proches.

Selon les données de l’enquête « Emploi du temps » de l’Insee, les seniors à la retraite consacrent en moyenne une demi-heure de plus par jour que les seniors en emploi aux soins aux enfants et aux personnes âgées de leur entourage. Selon nos calculs (appliquant un taux horaire net au smic, sans compter les contributions sociales et faisant l’hypothèse qu’une personne sur deux est retraitée parmi les générations concernées), les soins aux enfants et aux personnes âgées fournis par les retraités français âgés de 62 à 66 ans correspondent aujourd’hui à un montant de 10,7 milliards d’euros par an.

Cette somme ne représente qu’une toute petite partie des frais de prise en charge des personnes âgées que, sans l’aide précieuse de leurs proches, la réforme pourrait engendrer. Il sera en effet très difficile de garder les personnes âgées dépendantes à leur domicile : le secteur de l’aide à domicile étant depuis longtemps en manque structurel de personnel, les places en maison de retraite sont rares et chères. Selon le rapport 2021 de la Commission des comptes de la sécurité sociale, trois personnes âgées dépendantes sur cinq sont prises en charge à domicile pour un coût moyen par personne de 12 000 euros, contre 35 000 euros en Ehpad. Le Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge évalue l’aide informelle fournie par l’entourage entre 11 milliards et 18 milliards d’euros en 2017.

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Le recul de l’âge légal du départ à la retraite pourrait entraver cette solidarité intergénérationnelle et contribuer au creusement du déficit de la sécurité sociale. Cette solidarité profite aussi aux jeunes parents puisque ce sont souvent les grands-parents qui se déplacent lorsque les petits enfants sont malades pour les garder, les parents ne disposant souvent que de cinq jours par an de congés pour enfant malade.

Risque de déséquilibres du marché du travail

Un second argument repose sur les difficultés de recrutement de certaines entreprises sur le marché du travail : ce manque de main-d’œuvre pourrait être comblé en repoussant l’âge de la retraite. Mais les métiers en tension sont souvent les plus exposés aux facteurs de pénibilité au travail, ou sont très spécialisés. Ils pourront difficilement être assurés par des travailleurs seniors. Selon une enquête menée par Pôle emploi en 2022 auprès de 2,4 millions d’établissements et à laquelle un établissement sur six a répondu, les métiers les plus en tension sont les couvreurs-zingueurs, les aides à domicile et les aides ménagères, les pharmaciens, les chaudronniers, métalliers, serruriers, les mécaniciens et électroniciens de véhicule. Parmi les métiers qui embauchent le plus, on compte les salariés de l’agriculture, de l’hôtellerie-restauration et les aides-soignantes.

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