« Les travailleurs à temps partiel ne tireront que peu, voire pas, de privilège de la modification de la prime d’activité »

Le mécanisme des décisions prises en réponse aux « gilets jaunes » laisse certaines catégories de salariés sur le bord de la route, relèvent les économistes François Bourguignon, Paul Champsaur, ex-présidents du groupe d’experts sur le smic, et Gilbert Cette, le président actuel.

 

« Il aurait été possible de jouer sur les autres paramètres de la prime d’activité pour atteindre l’objectif d’une hausse du pouvoir d’achat de 100 euros au niveau du smic, tout en améliorant celui des travailleurs à temps partiel. »
« Il aurait été possible de jouer sur les autres paramètres de la prime d’activité pour atteindre l’objectif d’une hausse du pouvoir d’achat de 100 euros au niveau du smic, tout en améliorant celui des travailleurs à temps partiel. » PHILIPPE HUGUEN / AFP

Le gouvernement a désiré répondre à la demande de hausse du pouvoir d’achat formulée ces dernières semaines par le mouvement des « gilets jaunes » en préférant la défiscalisation des heures supplémentaires et le relèvement de la prime d’activité à une hausse du smic.

Le groupe d’experts sur le smic a accentué à plusieurs reprises que le salaire minimum n’était pas, en effet, un instrument actif pour soutenir le pouvoir d’achat des personnes à bas revenus salariaux.

D’une part, ses effets sur l’emploi peuvent être contre-productifs.

D’autre part, c’est un dispositif mal ciblé pour lutter contre la pauvreté des travailleurs et, a fortiori, des personnes sans emploi. Une rétribution au smic ou à un taux proche ne signifie pas nécessairement que la famille concernée soit au-dessous du seuil de pauvreté. Il n’est pas rare en effet qu’un autre membre bénéficie d’un revenu supérieur, qui permet à la famille de dépasser ce seuil.

Par ailleurs, plusieurs transferts sociaux (prime d’activité, aides au logement, certaines aides locales) sont sous conditions de ressources ou diminuent avec la hausse de la rétribution d’activité : les effets d’une hausse du smic sur le revenu des ménages éligibles à ces transferts sont donc considérablement réduits.

Ainsi, les simulations publiées dans les rapports du groupe d’experts ont montré qu’une hausse de 1 % du smic augmentait le revenu disponible moyen des 30 % des ménages les moins aisés de moins de 0,15 %, tandis qu’une hausse de la prime d’activité conduisant au même revenu agrégé de l’ensemble des ménages l’augmentait d’environ 0,4 %, la différence reposant surtout sur un meilleur ciblage de la prime d’activité vers le bas de la distribution.

Bonus variable

En revanche, ces décisions négligent les personnes et familles dont les revenus d’activité viennent d’un emploi salarié à temps partiel, souvent contraint, qui, par définition, ne font pas d’heures supplémentaires et qui ne sont peu, voire pas concernées par le relèvement de la prime d’activité.

En effet, la majoration annoncé de la prime d’activité, pour parvenir à une hausse de 100 euros du pouvoir d’achat au niveau du smic (une fois prise en compte la hausse réglementaire du smic au 1er janvier), ne concerne que la partie « bonification » de cette prime. Car la prime d’activité est constituée de deux parties distinctes.

D’une part un montant forfaitaire : le montant de base est égal au RSA socle, soit 550 euros par mois pour un célibataire et plus selon la composition familiale, mais il est réduit de 38 % des revenus d’activité du ménage. Il s’amenuise donc au fur et à mesure de la hausse de ces revenus, jusqu’à disparaître lorsque le revenu atteint, pour une personne seule à temps plein, 1,2 smic.

Les contrats Cifre des PME donnent plus de possibilités aux jeunes chercheurs

Les doctorants, qui sont chaque année plus nombreux à profiter d’un financement Cifre, portent aussitôt majoritairement leur dévolu sur les petites et moyennes entreprises dans leur choix de partenaire.

La convention industrielle de formation par la recherche (Cifre), lancée en 1981, gagne chaque année un peu plus en assise. Cet arrangement ministériel propose des contributions aux entreprises qui décident de recruter un doctorant, permettant aux jeunes chercheurs d’avoir un pied dans le monde privé et un autre dans la recherche publique pendant les trois ans de leur thèse. A l’heure où la question du financement est une grande préoccupation pour ceux qui se projettent dans le doctorat, elle leur assure un salaire d’au moins 1 957 euros par mois pendant leur contrat.

De 5 % à 7 % de candidatures additionnelles sont déposées chaque année par des futurs doctorants. Une attractivité dont s’est félicitée la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, Frédérique Vidal, qui annonçait, en mars, le renforcement du nombre de conventions allouées pour l’année 2018 : 1 450, contre 1 433 en 2017. L’objectif : réduire un peu plus la différence de culture entre monde privé et public, qui freine encore les entreprises dans leur processus d’embauche.

La mission est définie pour les docteurs qui sortent du programme ; deux tiers travaillent encore dans le secteur privé un à cinq ans après leur soutenance et un tiers reste employé dans l’entreprise de leur thèse. Pour Clarisse Angelier, déléguée générale de l’ANRT, l’agence opératrice du dispositif, on peut commencer à parler de « porosité » entre secteur universitaire et secteur privé et industriel.

25 % de Cifre en sciences humaines et sociales

Thomas Coudreau, président du collège des écoles doctorales, se montre moins catégorique, mais voit malgré tout se dessiner une nette évolution : « L’ancien modèle, qui voyait le diable dans le secteur privé, n’est plus de mise dans le domaine de la recherche », note-t-il. La part des docteurs travaillant dans le privé est même passée de 23 % à 37 % entre 2010 et 2015.

Cette entrée en grâce montante du secteur privé pour les doctorants touche principalement les petites et moyennes entreprises (PME). Pour la première fois, le nombre de Cifre allouées aux PME a dépassé en 2017 celles accordées aux grands groupes. La nouvelle génération préfère de plus en plus l’organisation « agile et modulaire » des premières à celle des grands groupes, observe Clarisse Angelier.

Malgré tout, si le programme est désormais bien établi, son dispositif peut s’avérer un peu complexe, pointe Thomas Coudreau : « Il n’est pas toujours aisé pour les équipes universitaires de trouver un partenaire non académique et vice versa. On tourne un peu toujours sur les mêmes équipes et les mêmes thèmes. » Des thèmes souvent reliés aux sciences dites « dures » : seules 25 % des conventions allouées qui touchent des thèses de sciences humaines et sociales (SHS).

« Les ouvriers ne sont plus dans les usines »

S’appuyant sur l’analyse de l’activiste américaine Tamara Draut, le capital-risqueur Nicolas Colin explique, dans sa chronique au « Monde », que les ouvriers occupent désormais majoritairement des emplois de service. Un bas salaire, peu syndiqués, ils sont invisibles pour les pouvoirs publics.

Chronique « Transformations ». Que fait un ministre quand il veut évoquer l’emploi ? Il se rend dans une usine et enfile un casque de chantier. Non que la majorité des ouvriers soient à l’usine : les ouvriers dans l’industrie représentent à peine deux emplois sur dix en France. Réciproquement, l’image de la chaîne d’assemblage continue de dominer notre représentation du monde du travail. Et cette nostalgie des « cols-bleus » est un problème tant elle nous empêche de comprendre l’économie d’aujourd’hui.

Dans son livre Sleeping Giant : How the New Working Class Will Transform America (Doubleday, 2016, non traduit), l’activiste américaine Tamara Draut nous appel à faire un voyage passionnant dans le monde des nouveaux travailleurs – qui ne travaillent plus à l’usine, mais dans les secteurs de service de proximité. Comme elle l’explique, la fonction des travailleurs hier était le plus souvent de « fabriquer des choses ». Aujourd’hui, c’est plutôt de « prendre soin des gens et de les servir ».

Le passage numérique explique cette mutation. Les emplois industriels disparaissent car ils sont faciles à délocaliser ou à automatiser. Leur raréfaction, accélérée par le numérique, est la conséquence ultime de l’organisation scientifique du travail – celle-là même qui a longtemps rendu les ouvriers plus productifs et a permis d’améliorer leur condition pendant les Trente Glorieuses. Les travailleurs des services de proximité, quant à eux, ne sont pas menacés par la transition numérique car le cœur de leur métier, c’est d’interférer avec d’autres personnes. Et il est quasiment impossible de délocaliser ou d’automatiser ces innombrables interactions humaines du quotidien.

Des emplois de mauvaise qualité

Pourquoi cette nouvelle classe de travailleurs, celle des services de proximité, n’est-elle pas pour autant reconnue et valorisée ? S’ils avaient lu Tamara Draut, nos ministres, au lieu de hanter les usines, iraient parler d’emploi là où se trouvent les travailleurs aujourd’hui : dans les crèches et les hôpitaux, derrière les comptoirs des magasins, dans les cuisines des restaurants ou au centre de formation des chauffeurs Uber à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis) – bref, dans tous ces secteurs de service, plutôt urbains, où se concentrent les emplois. Mais il y a trois problèmes.

Le premier, c’est que les emplois dans ces secteurs sont encore de mauvaise qualité. Les salaires y sont bas, le management est rétrograde, les horaires sont décalés et les conventions collectives protègent peu les travailleurs. Il y a donc une réticence, de la part de nos dirigeants, à chanter les louanges des services de proximité. Personne ne souhaite assumer la façon, souvent très mauvaise, dont les entreprises traitent leurs employés dans des secteurs comme la restauration ou les services à la personne.

Copropriété : comment retirer (ou garder) le poste de concierge ?

© Jacques Loic / Photononstop

Ce n’est pas parce que la copropriété retire le poste de concierge, qu’elle peut licencier ce salarié : il risque par conséquence de saisir la juridiction prud’homale, afin d’obtenir d’importants dommages et intérêts pour rupture abusive de contrat.

Une grande partie de juges considèrent en effet que le syndicat de copropriétaires, comme une entreprise privée, doit appliquer les règles du code du travail et surtout l’article L 1233-3, selon lequel le licenciement économique doit être consécutif à « des difficultés économiques ». La Cour de cassation l’a d’ailleurs admis dans un arrêt du 29 avril 2009, qui rejetait le pourvoi d’un ouvrier d’entretien, les difficultés économiques de la copropriété étant selon elle « caractérisées ». Elle a confirmé, dans un arrêt du  20 janvier 2010, que les concierges relèvent, sur les points non réglés par leur statut, des dispositions de droit commun du code du travail.

En quoi consistent les « difficultés économiques » ? Une grande partie de juges considèrent que’elles ne peuvent se limiter à la simple volonté de rationaliser la gestion de l’immeuble et de réduire les charges. On ne compte donc que très peu de jugements favorables aux syndicats de copropriété, selon l’étude qu’a publiée Me Laurence Guégan-Gélinet dans la revue Administrer.

Vétusté de l’immeuble

En voici l’un des rares : le 21 février 2013, la cour d’appel d’Aix-en-Provence admet que le licenciement économique de la gardienne de la résidence Le Longbeach à Grasse (Alpes-Maritimes), le 5 mars 2010,  suite au vote de la suppression de son poste par l’assemblée générale du 13 novembre 2009, est fondé sur une cause réelle et sérieuse. Elle entend le syndicat des copropriétaires, qui fait valoir que « l’immeuble construit en 1978 n’a jamais été entretenu et qu’il est nécessaire aujourd’hui de réaliser de nombreux travaux importants, que les copropriétaires qui sont surtout des retraités, dont les revenus n’évoluent plus à la hausse, sont dans l’incapacité de répondre à des appels de fonds plus élevés, que les bilans du Syndicat des copropriétaires établis pour les années 2007, 2008 et 2009 confirment le déséquilibre économique au sein de la copropriété, que l’état des dettes et des dépenses établi le 10 septembre 2010 démontre que la trésorerie de la copropriété s’élève à 14 681,75 euros pour un débit de 17 980,70 euros, que la suppression du poste de concierge était le seul moyen de financer les travaux nuisibles que la copropriété doit réaliser ».

La cour d’appel constate par conséquence, au vu des nombreux documents comptables qui lui sont fournis, que le syndicat des copropriétaires doit faire face à une élévation importante des charges obligatoires. Elle constate aussi que le remplacement de la gardienne par un service de nettoyage permet une économie des deux-tiers des dépenses de gardiennage. Elle déboute la gardienne de sa demande de paiement de quelque 20 000 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et défaut de reclassement.

40 000 euros d’indemnité

Mais la majorité du temps, les juges refusent d’admettre que le licenciement soit fondé sur une cause réelle et sérieuse, comme le montrent les trois affaires suivantes.

1)Mme X est engagée en 1984 en qualité de concierge au 80 rue de Lauriston à Paris. En 2006, les copropriétaires décident de retirer son poste et de confier l’entretien des parties communes ainsi que le service de sortie des poubelles à une entreprise spécialisée. Le syndic notifie à Mme X son licenciement pour motif économique, en mars 2007. Sa lettre de licenciement évoque « un souci de maîtrise des coûts financiers et de rationalisation du gardiennage de l’immeuble ».

La cour d’appel de Paris, que Mme X saisit après avoir été déboutée par le conseil des prud’hommes, juge, le 31 janvier 2013, que  « les dispositions du code du travail relatives au licenciement pour motif économique sont applicables aux gardiens d’immeubles soumis à la convention collective nationale de travail des gardiens, concierges et employés d’immeubles ». Elle se réfère ainsi à l’arrêt de cassation du 20 janvier 2010. Elle considère qu’en l’occurrence, « l’employeur ne rapporte pas la preuve des motifs d’ordre économique qui ont nécessité la suppression du poste ». Elle alloue à l’ancienne gardienne quelque 40 000 euros d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (39 597 euros).

30 000 euros d’indemnit

2) M. Y, engagé en 1995 en qualité de gardien, est licencié en août 2009, l’assemblée générale des copropriétaires ayant déterminé de supprimer son poste. Sa lettre de licenciement évoque la décision de « réorganiser l’entretien et la maintenance des parties communes ». M. Y saisit le conseil des prud’hommes de Paris, qui, le 7 juillet 2011, le déboute, en considérant qu’un syndicat de copropriétaires n’est pas une entreprise.

La cour d’appel de Paris, qu’il saisit, infirme, le 5 juin 2013, en se référant elle aussi à  l’arrêt de cassation du 20 janvier 2010. « Il […] résulte que, inversement à ce qu’a affirmé le conseil de prud’hommes, le licenciement de M. Y devait être régi par les dispositions générales du code du travail, notamment celles prévues aux articles L 1232-1 et suivants (licenciement pour motif personnel) ou L 1233-1 et suivants (licenciement pour motif économique) de ce code et être fondé sur une cause réelle et sérieuse, suffisamment précise pour être vérifiable par la cour. »

Or, constate la cour d’appel, « la formulation de la lettre de licenciement, totalement imprécise, et qui empêche toute vérification par la cour, équivaut en réalité à une absence de motifs. » Elle juge que la rupture abusive du contrat de travail ouvre droit pour M. Y à une indemnité de 30 000 euros.

Régularisation du paiement des charges

3) Mme Z, engagée en 1984 comme concierge par le syndicat des copropriétaires du 11 boulevard Flandrin, Paris 16e, est licenciée le 1er décembre 2010, l’assemblée générale ayant décidé de supprimer son poste. Sa lettre de licenciement invoque le fait que les copropriétaires ne règlent pas leurs charges, et que la trésorerie est déficitaire : « Vous n’ignorez pas que cette copropriété rencontre de très importants problèmes financiers et que sa trésorerie est déficitaire. Ces difficultés économiques sont constituées, d’une part, par des difficultés de trésorerie, et, d’autre part, par la nécessité absolue d’engager des travaux de sauvegarde de l’immeuble dont le coût aggrave les finances déjà obérées de la copropriété. La trésorerie sur l’exercice 2009 est en effet déficitaire de 24.840, 46 € et la situation ne s’améliore pas de manière substantielle sur l’exercice 2010 en cours…»

La cour d’appel de Paris, que la gardienne saisit après avoir été renvoyée par le conseil de prud’hommes, refuse, le 8 avril 2014, de valider le licenciement car « le syndicat des copropriétaires ne justifie pas, ni même allègue, avoir mis les copropriétaires défaillants en demeure de régulariser le paiement de leurs charges ou avoir tenté, les concernant, une procédure de recouvrement (injonction de payer par exemple)».  Or, « cette carence de la copropriété ne saurait préjudicier à Mme Z et ne peut, en tous cas, caractériser un motif économique justifiant son licenciement». La cour condamne le syndicat à lui verser 40 000 euros d’indemnités pour licenciement abusif.

Revirement de jurisprudence ?

Inversement à tout ce qui vient d’être présenté, la Cour de cassation juge soudain, le 1er février 2017, que le syndicat des copropriétaires n’est pas une entreprise, et que le licenciement du concierge n’est pas soumis aux dispositions du code du travail. Elle repousse le pourvoi (15-26 853) de la concierge du 4 rue Guiglia à Nice, qui protestait contre son licenciement, après 35 années de service.

La lettre de licenciement que lui a envoyée la Sarl Groupe Foch immobilier, syndic de la copropriété, lui indiquait uniquement que l’assemblée générale avait décidé à l’unanimité de supprimer son poste; elle n’invoquait aucun motif économique pour justifier cette suppression. En validant le licenciement, la Cour de cassation semble juger que la décision de supprimer le poste de concierge constitue en elle-même une cause réelle et sérieuse de rupture du contrat de travail.

Selon certains témoins, cet arrêt serait à manier avec précaution: Me Laurence Guégan-Gélinet pense que « la Cour a entendu appliquer au syndicat de copropriété la jurisprudence qui concerne les concierges employés par un particulier, et qui sont assimilés aux employés de maison »: l’article 12 de la Convention collective du particulier employeur exclut en effet l’application des règles spécifiques au licenciement économique. Mais, observe Me Guégan-Gélinet, les règles du licenciement économique redeviennent applicables à l’employé de maison, lorsqu’il est employé une personne morale, notamment une société civile immobilière (SCI).

Il ne lui semble « pas concevable de créer, au regard des règle du droit du travail actuellement en vigueur, un motif de licenciement sui generis: cela n’est conforme ni aux dispositions des articles L 7211-1 à L 7215-1 du code du travail fixant le statut dérogatoire des gardiens d’immeuble, ni à l’article 14 de la Convention collective nationale des gardiens, concierges et employés d’immeubles, ni à l’article L 1233-1 du code du travail ». Elle demande une « clarification » de la Cour de cassation.

Devant ces incertitudes, ceux qui veulent se passer des services du concierge auront intérêt à attendre le départ à la retraite de celui-ci, plutôt qu’à procéder à son licenciement.

 

Retraites complémentaires : la CFDT conteste le malus

La CFDT est-elle en train de réétudier sa position sur un dispositif-clé relatif aux retraites complémentaires ? La question vient d’émerger, à la faveur de déclarations de Jean-Claude Barboul, représentant de la centrale syndicale et président du conseil d’administration de l’Agirc-Arrco, le régime qui verse une pension complémentaire à quelque 12,6 millions d’ex-salariés du privé. Dans un article dernièrement publié sur le site Internet de L’Express, ce responsable cédétiste demande le report à 2020 du système de malus entré en vigueur le 1er janvier, en invoquant des motifs techniques. Mais d’autres raisons, plus politiques celles-là, semblent aussi à l’œuvre : selon nos informations, la CFDT aimerait, en effet, que le mécanisme incriminé, très décrié lors de sa création, soit remis en cause.

Pour comprendre cette ombreuse affaire, il faut aller à octobre 2015. A l’époque, le patronat et trois organisations syndicales (CFDT, CFE-CGC, CFTC) signent à l’arraché un accord pour redresser les comptes, très dégradés, de l’Agirc et de l’Arrco. L’une des mesures retenues dans ce « deal » prédit des abattements et des bonifications, afin d’encourager les personnes à travailler plus longtemps. Ainsi, sauf exception, celui qui cesse sa vie professionnelle dès l’instant où il a droit à une pension de base à taux plein (par exemple 62 ans pour un individu né en 1957 qui a cotisé 41,5 ans) subit une décote temporaire de 10 % sur sa retraite complémentaire ; en revanche, s’il décale son départ d’un an, il n’est pas pénalisé, et s’il prolonge sa carrière de deux ans ou plus, sa pension Agirc-Arrco est majorée.

« Un malus intermédiaire »

Les trois signataires principaux de l’accord acceptent, à contrecœur, un dispositif auquel le Medef tient par-dessus tout car il encourage les actifs à rester dans le monde du travail. « Un tabou est tombé », se réjouit alors le chef de file de la délégation patronale. La CGT et FO, de leur côté, refusent d’entériner un tel compromis, estimant qu’il porte atteinte à la règle des 62 ans pour pouvoir réclamer le versement de sa pension.

Précision importante : le malus ne concerne pas les retraités exonérés de CSG (c’est-à-dire ceux qui ont de faibles ressources). Pour ceux qui sont assujettis au taux réduit de CSG (3,8 %), la décote est deux fois moins élevée que pour ceux soumis au taux normal de CSG (8,3 %). Mais qu’en est-il pour ceux qui se voient appliquer le tout nouveau taux de CSG (6,6 %), instauré par les mesures d’urgence de la fin décembre 2018 ? Faut-il leur prescrire un abattement de 10 % ou de 5 % ?

Fin des études, début des craintes : le passage difficile vers une vie active

Un autre diplôme, une autre spécialisation… la majorité d’étudiants font tout pour retarder le moment de chercher un travail.

Lorsque vient l’heure du grand saut, chacun l’aborde à sa façon. Certains, fonceurs ou téméraires, plongent tête la première. D’autres jaugent le bassin avec crainte et ne diraient pas non à un temps de répit avant de s’immerger totalement dans le grand bain. A écouter les inquiétudes des étudiants en dernière année d’études supérieures, la métaphore illustre bien ce moment charnière où les uns et les autres doivent, de gré ou de force, quitter la vie étudiante et se lancer sur le marché du travail.

Iris admet faire partie de la deuxième catégorie : « C’est clairement pour retarder le fin de mes études que je me suis lancée dans une thèse », raconte la jeune femme. La doctorante en informatique médicale à Paris a débuté son cursus par une classe prépa, au sortir de sa terminale scientifique. « A l’issue des concours, j’ai été prise à l’Ensta ParisTech, une école d’ingénieurs, et j’y suis donc allée sans me demander une seule fois ce que j’avais envie de faire », poursuit la jeune femme de 23 ans. Alors, une fois son diplôme d’ingénieur en poche, impossible pour elle de se projeter.

Cette problématique est très forte parmi les étudiants admis dans des écoles sélectives. « Pendant leurs années de classe prépa, parents et professeurs leur ont fait comprendre qu’ils n’avaient pas besoin de choisir, que le doute n’avait pas sa place à cet instant T et qu’ils devraient seulement réussir le plus dur et le plus prestigieux,observe Anne Delaigue, psychologue à l’Ecole polytechnique. C’est donc très brutalement que ces questions se posent dès l’arrivée à l’école : Qui suis-je ? Pourquoi suis-je là ? Qu’est-ce que je veux vraiment faire ? » A la fac, ce moment du choix apparaît particulièrement en début de master 2, après des années d’un cursus poursuivi comme une continuité, « sans forcément envisager un métier en bout de course », déclare Marilène Callegari, psychologue à l’université Paris-Diderot.

Même avec un master ce n’est plus évident de trouver un emploi

« La valeur théorique des diplômes est bonne, leur valeur pratique dans le monde du travail est extrêmement réduite », juge le sociologue Louis Chauvel.
« La valeur théorique des diplômes est bonne, leur valeur pratique dans le monde du travail est extrêmement réduite », juge le sociologue Louis Chauvel. Caroline Pain /Le Monde
Pour le sociologue Louis Chauvel, professeur à l’université du Luxembourg et auteur de l’essai La Spirale du déclassement (Seuil, 2016), l’augmentation continue du nombre de diplômés ne permet pas une insertion satisfaisante des étudiants sur le marché du travail.Comment traduire les inquiétudes des étudiants en fin de cursus, à la lumière de ce que vous observez du monde du travail actuel ?La majorité des étudiants sont assez angoissés à l’idée de finir leurs études, et cela est plutôt légitime lorsqu’on sait ce que le marché du travail leur réserve. Le diplôme n’a aujourd’hui plus une valeur en soi, si ce n’est pour une minorité d’étudiants en grandes écoles de commerce ou d’ingénieurs. La raison étant que, ces dernières années, la croissance continue du nombre de diplômés n’a pas été proportionnelle à celle des emplois disponibles sur le marché.

Il y a trente ans, le combat se faisait entre ceux qui arrivaient à valider leur bac + 5 et les autres. Dans le contexte actuel, où de plus en plus de jeunes sont archidiplomés, même un master n’offre plus la certitude d’une entrée facile sur le marché de l’emploi.

Qu’est-ce qui rend l’insertion des jeunes diplômés si difficile ?

Seuls quelques établissements, les facultés de médecine notamment, organisent fortement le placement de leurs jeunes sur le marché du travail. Face au nombre de prétendants – que la plupart des secteurs n’ont pas le débit suffisant pour accueillir –, l’accès à un stage professionnel ne découle plus naturellement d’une bonne réussite de ses études. Ce qui rend plus grande encore la difficulté à entrer par la suite dans le monde du travail. Avec des études de plus en plus longues, au fur et à mesure desquelles les attentes des étudiants s’accroissent, la connaissance du milieu professionnel s’est, elle, dramatiquement rétrécie. Dans ce contexte, les risques de déconvenue au moment où le marché produit son verdict sont souvent brutaux.

En France, 43% des jeunes diplômés de 25-29 ans considèrent qu’ils ont des difficultés « à joindre les deux bouts », selon des chiffres Eurostat, contre seulement 10% en Allemagne. La brutalité vient donc aussi, une fois dans la vie active, de cette confrontation à un niveau de vie en deça des attentes…

Oui, dès que les parents cessent d’aider leurs jeunes à soutenir leur niveau de vie, les difficultés adviennent. Le contexte actuel se caractérise par une forte croissance du nombre de diplômés par rapport aux postes qualifiés disponibles, un coût élevé de la vie dans les zones urbaines où les jeunes diplômés tentent de trouver des emplois à leur niveau, et bien évidemment de prix souvent prohibitifs du logement. Dans ce cadre, les jeunes diplômés français peinent à payer les dépenses nécessaires habituelles.

Le « reste à vivre » ne leur permet plus de garantir les dépenses plus élaborées, considérées comme normales dans les classes moyennes (sortie, spectacle, vacances, etc.). Si le diplôme permet généralement d’échapper à la pauvreté, la faible valorisation relative de la jeunesse diplômée pourrait avoir des conséquences dramatiques sur le pessimisme français. Les efforts consentis par les parents pour offrir à leurs enfants de meilleurs diplômes ne permettent pas d’échapper au déclassement socio-économique.

Comment mieux préparer les étudiants à ce passage vers le monde professionnel ?

La valeur théorique des diplômes est bonne, leur valeur pratique dans le monde du travail est extrêmement réduite : c’est sur cela que l’enseignement supérieur français doit travailler. C’est un chemin que les grandes écoles de premier plan ont emprunté depuis longtemps, notamment en entretenant un lien très fort avec leurs réseaux d’anciens. Dans les secteurs plus précaires et universitaires, ces réseaux, très coûteux, sont bien moins étoffés et ne remplissent pas la mission essentielle de placement des étudiants.

Ils préfèrent alors parfois de partir au Québec, au Royaume-Uni ou en Allemagne faire un deuxième master, dans des institutions qui conservent une très forte connexion avec le marché du travail mais qui demeurent particulièrement onéreuses. Ce sont donc les étudiants les mieux armés par leur succès scolaire et par le soutien familial qui échappent le mieux à l’absence de transition en France.

Une citation de Sigmund Freud récapitule très bien, à mon sens, la situation française : « L’éducation pèche en ne préparant pas l’être jeune à l’agressivité dont il est destiné à être l’objet. (…) [Elle] ne se comporte pas autrement que si l’on équipait de vêtements d’été et de cartes des lacs italiens des gens partant pour une expédition polaire. » Il est urgent de fournir un nouvel équipement aux étudiants français pour qu’ils puissent aborder plus sereinement cette expédition qu’est l’entrée dans l’emploi.

 

Classement de meilleures prépas scientifiques durant les 5 ans

Le lycée Sainte-Geneviève (Versailles) se classe encore une fois en tête des prépas scientifiques dans le palmarès 2019

Sur quelle classe préparatoire miser, à quelques jours de l’entrée de la plateforme post-bac Parcoursup ? Le palmarès 2019 des classes prépa scientifiques réalisé par le magazine L’Etudiant, publié le 11 janvier, donne quelques indications aux futurs étudiants pour faire leur choix.

Pour les filières (MP, PC, PSI, PT et BCPST), nous avons listé les cinq établissements qui se distinguent par le meilleur taux de réussite sur cinq ans dans le « top 12 » ou « top 13 » des écoles d’ingénieurs et écoles normales supérieures (ENS) correspondant à leur spécialité.

Classement des classes prépa MP (mathématiques-physique)

Comme l’année dernière, c’est le lycée Sainte-Geneviève, à Versailles, qui gagne la meilleure réussite sur cinq ans (2014-2018). Ce lycée privé également connu par son surnom – « Ginette » – obtient un taux de 72,1 % d’élèves admis dans le top 12 des écoles d’ingénieurs (les quatre ENS, CentraleSupélec, Centrale Lyon, Ensta ParisTech, Mines ParisTech, Polytechnique, Ponts ParisTech, ISAE-Supaéro, Télécom ParisTech).

Le lycée versaillais occupe la place suivante, dans ce classement de 126 établissements, par le lycée Blaise Pascal (Orsay, 66,1 % de réussite sur cinq ans). Aux places suivantes, on retrouve les lycées Stanislas à Paris (63,1 % de réussite), des Lazaristes à Lyon (62,9 %) et enfin Louis le Grand à Paris avec un taux de 62,6 %.

Classement des classes prépa PC (physique-chimie)

Le lycée Sainte-Geneviève (Versailles) se distingue également dans cette filière, avec le plus haut taux de réussite sur cinq ans dans les meilleures écoles (les 3 ENS – Ulm, Lyon et Paris-Saclay –, CentraleSupélec, Centrale Lyon, Ensta ParisTech, Mines ParisTech, Polytechnique, Ponts ParisTech, ISAE-Supaéro, Télécom ParisTech, ESPCI ParisTech, Chimie ParisTech).

Entre les 108 établissements pris en compte, Henri IV (Paris) se hisse à la deuxième place avec un taux de 65,8 %, raflant la place de dauphin à Louis le Grand, qui le talonne avec sa moyenne de réussite à 64,7 %. Suivent enfin le lycée Stanislas (Paris, 63,8 %) et le lycée Hoche (Versailles), qui se fait une place cette année dans le classement, quoique avec un résultat bien moins élevé (49,6 %) que les établissements qui le devancent.

Classement des classes prépa PSI (physique-sciences de l’ingénieur)

Dans cette spécialité, le top 5 – sur 120 établissements pris en compte – est pareil à celui de l’année dernière. C’est encore le lycée versaillais Sainte-Geneviève qui prend la première place avec 92,7 % de réussite sur cinq ans dans le top 11 (Arts et métiers ParisTech, CentraleSupélec, Centrale Lyon, ENS Paris-Saclay, ENS Rennes, Ensta ParisTech, Mines ParisTech, Polytechnique, Ponts ParisTech, ISAE-Supaéro, Télécom ParisTech).

Il est talonné par son voisin versaillais Hoche (90,9 %). Suivent un peu plus loin le parisien Louis le Grand (84,4 %), le toulousain Pierre de Fermat (78,4 %) et Stanilas, à Paris, avec 74,9 % de réussite sur cinq ans.

Classement des classes prépa PT (physique-technologie)

En physique-technologie et comme l’année précédente, Sainte-Geneviève (Versailles) n’occupe cette fois que la deuxième place, très près derrière le lycée Jean-Baptiste Say (Paris), dans le classement de réussite sur cinq dans les écoles du top 11 (CentraleSupélec, Centrale Lyon, Arts et métiers ParisTech, ENS Paris-Saclay, ENS Rennes, Ensta ParisTech, Mines ParisTech, Polytechnique, Ponts ParisTech, ISAE-Supaéro, Télécom ParisTech).

L’établissement parisien occupe le taux de réussite de 86,5 %, contre 85,4 % pour le versaillais. Parmi les 64 établissements pris en compte pour cette filière, se distinguent ensuite le lycée Chaptal (Paris) avec 63,5 %, le lycée de Cachan (ex-Gustave Eiffel) avec 61,1 % et un autre établissement versaillais, celui de Jules Ferry, qui connaît 55,6 % de réussite.

Classement des classes prépa BCPST (biologie-chimie-physique-sciences de la terre)

Le lycée Sainte-Geneviève tient une autre fois la tête du classement dans cette filière, avec un très haut taux de réussite sur cinq ans (92 %) dans les écoles du top 16 du site : 3 ENS (Paris-Saclay, Lyon et Ulm), 4 ENV (ENV Alfort, VetAgroSup Lyon, Oniris-Nantes atlantique, ENV Toulouse), AgroParisTech, Agrocampus Ouest, Agrosup Dijon, Bordeaux Sciences Agro, Montpellier Sup Agro, Engees, Ensaia, Ensat, ENSG.

Il est suivi du lycée parisien Henri IV, avec 78,5 % de réussite. Sur les 55 établissements pris en compte, se distinguent ensuite le lycée Saint-Louis (Paris) avec 77,2 %, le montpelliérain Joffre (72,2 %) et le Parc de Lyon avec un taux de 68,9 %.

le modèle d’Uber averti par une décision de la justice française

A Paris, 11 mars 2016.
A Paris, 11 mars 2016. Charles Platiau / REUTERS

C’est un tremblement de terre pour Uber, qui devrait avoir de nombreuses polémiques pour les plates-formes numériques de services. La société américaine de mise en relation entre chauffeurs (VTC) et passagers a été condamnée, jeudi 10 janvier, à requalifier en contrat de travail le contrat commercial l’ayant lié à un chauffeur indépendant entre octobre 2016 et avril 2017. Ce dernier, Maximilien Petrovic, avait été débouté en premier instance en juin 2018 par le tribunal des prud’hommes de Paris.

Ce jugement en faveur d’un chauffeur indépendant est une première en France. « Il découle de l’arrêt de la Cour de cassation à l’encontre de Take Eat Easy de fin novembre », déclare Jean-Emmanuel Ray, professeur de droit du travail l’université Paris-I Panthéon-Sorbonne. « Pour la cour d’appel de Paris, c’est un véritablement basculement, car jusqu’à présent, elle s’était toujours refusée à requalifier ces chauffeurs a priori indépendants. Cela concerne toutes les plates-formes, mais aussi G7, qui emploie des taxis locataires ou artisans. »

Le 3 décembre dernier, la Cour de cassation requalifiait en contrat de travail un contrat entre un livreur et la plate-forme, aujourd’hui fermée, Take Eat Easy. À cette occasion, elle définissait que « le lien de subordination entre la plate-forme et le livreur est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné », au moyen d’un système de géolocalisation et d’un régime de sanctions.

Depuis sa création, Uber défend son rôle de simple intermédiaire

Dans leur déclaration, les trois juges de la cour d’appel de Paris mentionne que « la qualification de contrat de travail étant d’ordre public (…), il ne peut y être dérogé par convention. Ainsi, l’existence d’une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité. » En somme, quel que soit le contrat signé, ce qui compte, c’est « le faisceau d’indices » qui caractérise « le lien de subordination » liant le chauffeur à la plate-forme, et donc l’existence d’un contrat de travail de fait.

Depuis sa création, Uber défend son rôle de simple intermédiaire. Dans son argumentation, la société assure que « les chauffeurs sont libres de se connecter à l’application Uber en temps réel et unilatéralement s’ils veulent, où ils veulent, quand ils veulent et pour la durée qu’ils veulent. » De même, assure-t-on dans l’entourage de la société, « aucun contrôle d’horaire n’est effectué par Uber envers les chauffeurs. Cette liberté totale dans l’organisation du travail fait obstacle à toute reconnaissance de contrat de travail. » Et aussi, « il n’y a aucune condition d’exclusivité. Les

Les talents des réfugiés et le travail

On peut se plaindre d’assister à l’arrivée de réfugiés sans ressources, après avoir laissé leurs biens dans leur fuite d’un pays en guerre. On peut aussi faire le vœu que ces tragédies se raréfient. En cette période de nouvelle année, c’est le moment ! Mais on peut aussi agir. En entreprise, particulièrement. N’entend-on pas dire qu’en cette période de plein-emploi pour les cadres en France il devient particulièrement difficile de recruter des personnes qualifiées dans un nombre de plus en plus grand de métiers « en tension » ? Or les réfugiés ont des talents. C’est très dur de l’imaginer, tant l’habitude est grande d’associer niveau intellectuel, compétences et apparence ; quand on a réchappé d’un périple extrêmement dangereux, on est rarement tiré à quatre épingles.

« Les réfugiés ont des talents invisibles, une richesse culturelle et une vision du monde différente, qui sont de vrais atouts pour l’entreprise »

Centreprises pionnières ont saisi tout l’intérêt de ce vivier de main-d’œuvre insoupçonné. D’ici à l’été, le service informatique du Réseau de transport d’électricité (RTE) devrait ainsi avoir reçu une dizaine de réfugiés. Deux dirigeants du groupe sont à l’origine du projet : Nathalie Devulder, directrice du développement durable, et Olivier Grabette, membre du directoire. « Les réfugiés ont des talents invisibles, une richesse culturelle et une vision du monde différente, qui sont de vrais atouts pour l’entreprise. Or nous avions des problèmes pour trouver des compétences dans le domaine du numérique. La convergence entre ces deux éléments s’est imposée », explique Nathalie Devulder. « Une entreprise doit être connectée aux enjeux de la société », ajoute Olivier Grabette.

Sur les conseils de Singa, association d’aide aux réfugiés, RTE se fait aider par Tilt & Co, un cabinet de conseil en innovation sociale. Tous, ils ont mené quatre ateliers avec des salariés volontaires de RTE pour définir les profils souhaités. « On les a trouvés très facilement malgré des agendas super-contraints », indique Nathalie Devulder. « Le projet répondait à une envie d’engagement de collaborateurs désireux de donner plus de sens et de valeur humaine à leur vie professionnelle », analyse Olivier Grabette.

« La crainte d’une concurrence déloyale »

Dans un tout autre domaine, L’Oréal a embauché 20 % des 19 réfugiés qu’il a accueillis en stage depuis la mi-2017. L’association Wintegreat avait sélectionné les stagiaires parmi 800 diplômés du supérieur, avant de les accompagner et de les former dans l’une des dix grandes écoles (ESCP Europe, Essec, Mines de Paris…) avec lesquelles elle est en collaboration. « Nous les avons évalués comme tous les autres stagiaires. La diversité de leur parcours, leur vision différente de la beauté apportent beaucoup de richesse en interne », explique Tony Cocoual, directeur du recrutement des divisions sélectives de L’Oréal.