Australie : la chaîne de supermarchés Woolworth a massivement sous-payé des milliers d’employés

L’une des plus grandes enseignes de distribution du pays doit 300 millions de dollars australiens, plus de 185 millions d’euros, aux employés lésés.

Le Monde avec AFP Publié aujourd’hui à 11h29

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L’entrée d’un supermarché Woolworths à Sydney.
L’entrée d’un supermarché Woolworths à Sydney. Jason Reed / REUTERS

Les affaires de « vol de salaire » se multiplient en Australie. Mercredi 30 octobre, le géant australien de la grande distribution Woolworths a admis avoir sous-payé des milliers d’employés, leur devant un montant total de 300 millions de dollars australiens (185,45 millions d’euros). Woolworths, une des plus grandes chaînes de supermarchés du pays, a estimé qu’environ 5 700 de ses employés ont été sous-payés depuis 2010, constituant le plus gros scandale de sous-rémunération d’une longue série en Australie.

« Nous présentons nos excuses sans réserve », a déclaré le PDG Brad Banducci cité dans un communiqué. « La priorité absolue du groupe Woolworths est de résoudre ce problème et de s’assurer qu’il ne se reproduira pas », a-t-il affirmé. Woolworths a fait savoir qu’il effectuerait des paiements rétroactifs, comprenant les intérêts et les cotisations retraite, avant Noël.

« Récemment, nous avons vu un nombre inquiétant de grandes entreprises admettre publiquement qu’elles ont sous-payé leur personnel », a souligné Sandra Parker, de Fair Work Ombudsman, agence indépendante spécialiste du droit du travail. « Certains de ces problèmes remontent à de nombreuses années et plusieurs représentent des millions de dollars dus aux salariés », selon elle.

De nombreux précédents dans le pays

Le gouvernement australien a annoncé le mois dernier qu’un texte était en préparation visant à imposer des sanctions pénales aux employeurs qui sous-paient leur personnel de manière délibérée. Le ministre des relations industrielles, Christian Porter, a proposé que les coupables de tels faits puissent être passibles d’une peine pouvant aller jusqu’à dix ans d’emprisonnement.

De grands noms d’entreprises australiennes comme la Commonwealth Bank, la chaîne de télévision publique ABC ou encore le conglomérat australien Wesfarmers ont reconnu cette année avoir sous-payé leur personnel, devant des montants s’élevant à des millions de dollars. La compagnie aérienne Qantas a, elle, admis avoir sur ou sous-payé plus de 200 salariés après les avoir embauchés sur des contrats erronés.

De tels scandales ont également éclaboussé l’industrie hôtelière ces derniers mois, alors que de nombreux chefs ont admis ne pas avoir rémunéré des personnels de manière adéquate. La chaîne de magasins de proximité 7-Eleven a remboursé son personnel de plus de 160 millions de dollars australiens (98,86 millions d’euros) et a dû s’acquitter d’un total d’amendes de 1,8 million de dollars australiens après la découverte que ses franchises avaient systématiquement sous-payé leurs employés.

Entre les deux constructeurs, une relation de plus de trente ans

L’hypothèse d’un rapprochement entre les deux constructeurrs a déjà été évoquée par le passé. L’opération n’avait finalement pas abouti.

Par Publié aujourd’hui à 11h00, mis à jour à 11h02

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Fiat Chrysler Automobiles PSA discute d’un rapprochement avec PSA.
Fiat Chrysler Automobiles PSA discute d’un rapprochement avec PSA. HAROLD CUNNINGHAM,DANIEL ROLAND / AFP

C’était un projet de longue date de Sergio Marchionne, le charismatique administrateur délégué de Fiat Chrysler automobiles (FCA), disparu brusquement en juillet 2018. Pour l’homme qui avait sauvé, au début des années 2000, ce monument en péril de l’industrie italienne, le groupe FCA n’avait, à terme, d’autre solution que de trouver un allié pour se renforcer. Pour s’ouvrir de nouveaux marchés, bien sûr, notamment en Asie, mais aussi parce que l’effort de redressement des comptes de Fiat avait eu pour conséquences un certain sous-investissement en recherche et développement, qui pourrait s’avérer fatal à l’heure des révolutions technologiques et écologiques vécues par l’industrie automobile.

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Pour cela, PSA était le partenaire idéal. D’abord, en raison des fortes complémentarités opérationnelles existant entre les deux groupes – déjà en 1988 les constructeurs ont implanté une usine commune de véhicules utilitaires à Hordain (Nord) –, mais aussi pour une raison plus diffuse, liée au poids de la famille Peugeot dans la gouvernance du groupe français.

Entreprise fondée en 1899 à Turin par Giovanni Agnelli et restée sous le contrôle exclusif des héritiers du fondateur, l’ancien groupe Fiat a connu ces dernières années de nombreuses mutations, notamment avec le rachat de Chrysler, en 2009, au plus fort de la crise mondiale. Mais il n’a pas cessé d’être avant tout un groupe familial, aujourd’hui présidé par John Elkann, chef de la cinquième génération des héritiers Agnelli, qui à travers la holding Exor, dont la famille est l’actionnaire majoritaire, contrôle 29 % du capital.

Changement de cap

John Elkannne rate pas une occasion de rappeler son attachement au modèle familial, et consacre une grande partie de son temps à cultiver de bons rapports entre les Agnelli et les autres grandes dynasties industrielles. Dans cette logique, au printemps 2019, à la veille d’annoncer un accord de rapprochement avec l’alliance Renault-Nissan, John Elkann avait tenu à rencontrer le chef de la famille Peugeot, Robert Peugeot, pour l’informer personnellement de cette décision, qui mettait un terme définitif, pensait-on alors, à des années d’un patient travail d’approche entre les deux familles.

Engie projette la fermeture de trois centres d’appels, soit 450 suppressions de postes

L’ex-GDF Suez a annoncé aux syndicats une réorganisation de ses centres d’appels en France

Le Monde avec AFP Publié aujourd’hui à 07h05, mis à jour à 09h53

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Le fournisseur historique de gaz Engie se prépare à la fin des tarifs réglementés que la loi Pacte a programmée pour 2023. L’ex-GDF Suez a annoncé aux syndicats une réorganisation de ses centres d’appel en France, soit 450 suppressions d’emplois, a déclaré, mardi 29 octobre, le syndicat Force ouvrière, majoritaire dans ce secteur.

Les tarifs réglementés, qui concernent 4,1 millions de foyers, sont voués à disparaître dans quatre ans au nom de la concurrence. Dans cette optique, les centres d’appels de la division des tarifs réglementés de Toulouse (Haute-Garonne), Villeurbanne (Rhône) et Bagneux (Hauts-de-Seine), ainsi que de deux sites de support (RH, finance, etc.) à Paris-Montparnasse et Lyon, devraient fermer, avec 450 emplois concernés, explique Gildas Gouvazé, représentant FO. « Il faut se souvenir qu’en 2009, GDF Suez ne comptait pas moins de 32 centres d’appels en France. Plus de 90 % ont été externalisés ou délocalisés, au Maroc, en Tunisie, à Madagascar, etc. », rappelle-t-il.

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Mesures d’accompagnement

Engie ne compte plus que neuf centres d’appels en France, dont deux pour la branche grand public qui propose des offres de marché, et sept pour la division des tarifs réglementés. Quatre de ces derniers – Quimper, La Baule, Annecy et Montpellier – vont basculer dans la branche grand public, explique M. Gouvazé, tandis que les trois centres de Toulouse, Villeurbanne et Bagneux sont promis à la fermeture.

L’entreprise annonce des mesures d’accompagnement – mobilité ou reclassement – pour les 450 postes concernés. « Nous sommes confiants dans notre capacité à gérer cette situation, a expliqué le groupe aux Echos. Nous avons quatre ans devant nous et les sites se trouvent dans des bassins d’emploi suffisamment importants. » Mais « on sort à peine d’un plan de restructuration de 650 postes datant de 2016 et on voit mal comment ça va se faire », s’inquiète-t-il. Le syndicat s’oppose « fermement » aux annonces mais se dit ouvert à une négociation.

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Thomas Cook, ou la mort subite des grandes entreprises

A travers les déboires du géant du tourisme anglais, le professeur de sciences de gestion Armand Hatchuel explique, dans sa chronique, que les règles de l’audit comptable et financier semblent peu adaptées à la complexité des investissements de modernisation des grandes entreprises.

Publié aujourd’hui à 06h30 Temps de Lecture 2 min.

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« La trajectoire [du voyagiste] illustre un dilemme stratégique plus général entre croissance externe, qui vise à une position dominante du secteur, et croissance par l’innovation qui renouvelle le métier » (Palma de Majorque, le 25 septembre).
« La trajectoire [du voyagiste] illustre un dilemme stratégique plus général entre croissance externe, qui vise à une position dominante du secteur, et croissance par l’innovation qui renouvelle le métier » (Palma de Majorque, le 25 septembre). DPA / Photononstop

Chronique « Entreprises ». Il y a un mois, Thomas Cook, une des plus vieilles entreprises anglaises, un géant du tourisme, a fait faillite. Près de 600 000 vacanciers de toutes nationalités se retrouvaient, de par le monde, sans moyen de retour, imposant un rapatriement d’urgence aux frais des contribuables.

Quant aux milliers d’agents et d’hôtels qui avaient fait confiance à Thomas Cook, ils voyaient leurs créances compromises. Les faillites sont courantes mais la mort subite d’une des enseignes les plus établies du tourisme est troublante ! Beaucoup y ont vu la main invisible de la « destruction créatrice » propre aux économies de rupture. Mais ces explications n’ont pas suffi au Parlement anglais dont une commission d’enquête a réuni et publié, en un temps record, une masse de témoignages et de documents sur l’affaire.

Ces données révèlent une course en avant commencée dès 2007, avec une série de fusions et d’acquisitions qui devaient donner à Thomas Cook une taille critique mondiale, quoique au prix d’un endettement massif. Mais les bénéfices escomptés ne sont pas là et, en 2011, Thomas Cook est exsangue et remercie son dirigeant.

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L’équipe suivante s’efforce de recapitaliser l’entreprise, abandonne des filiales et engage la transformation numérique. Mais cette marche forcée passe mal et, en 2015, l’actuelle direction la remplace. Celle-ci développe des partenariats avec des acteurs du Web, comme Expedia, mais l’asphyxie financière menace toujours.

Dilemme stratégique

En 2018, la canicule et les effets du Brexit plombent la maison mère anglaise, et imposent plusieurs tentatives de recapitalisation, notamment avec l’entrée du chinois Fosun. Mais plusieurs hedge funds (fonds spéculatifs) parient sur la faillite de Thomas Cook. Acculés, les dirigeants sollicitent en vain l’aide du gouvernement anglais. La liquidation s’impose.

Ainsi la trajectoire de Thomas Cook ne reflète pas un aveuglement constant face à la mutation digitale du tourisme. Elle illustre un dilemme stratégique plus général entre croissance externe, qui vise à une position dominante du secteur, et croissance par l’innovation qui renouvelle le métier.

Des travaux récents (Laure-Anne Parpaleix, « Le capital-investissement peut-il soutenir durablement la croissance des entreprises ? Etude, modèle et conditions d’un capital-régénération », Thèse PSL/Mines ParisTech 2019) montrent que conduire l’une sans l’autre peut condamner l’entreprise à une oscillation désespérée, sous contrainte d’endettement, entre les deux stratégies.

Le top management s’approprie le Post-it

Maniée désormais par les DRH des entreprises grandes et moyennes, l’étiquette repositionnable est devenue l’accessoire des méthodes de « management agile », explique la journaliste du « Monde » Anne Rodier dans sa chronique

Publié aujourd’hui à 06h15 Temps de Lecture 2 min.

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« L’étiquette repositionnable est ainsi devenue l’accessoire des méthodes de management agile ».
« L’étiquette repositionnable est ainsi devenue l’accessoire des méthodes de management agile ». Nathan Alliard / Photononstop

Chronique « Carnet de bureau ». Jaune, vert, rose, le Post-it a mis plus de quarante ans à réaliser son ascension sociale et à s’approprier les bureaux des manageurs. Né à la fin des années 1970 des expériences des chercheurs de la société 3M, Spencer Silver et Art Fry, qui testaient une colle qui ne colle pas, il a longtemps stagné avec la papeterie de base, enfermé dans le tiroir d’un employé, jusqu’à être déposé sur un coin de table pour laisser la trace d’un appel téléphonique à un collègue ou servir d’aide-mémoire aux oublieux.

Aujourd’hui, c’est l’heure de gloire : « Le Post-it est devenu le format standard pour exprimer sa pensée dans les entreprises du XXIe siècle », définit le Petit dictionnaire illustré de l’entreprise, (Diateino) que vient de publier le dessinateur Fix (François-Xavier Chenevat), également amateur des dérives du management.

Les petits papiers multicolores recomposent comme une mosaïque le travail fragmenté

Maniée désormais par les DRH des entreprises grandes et moyennes, dans un nouveau rôle de « stimulateur d’échange » et « vecteur d’hypercollaboration », l’étiquette repositionnable est ainsi devenue l’accessoire des méthodes de « management agile ». Dans les espaces de travail, les équipes « hackent » les bureaux, en en recouvrant les murs ou les vitres. Ces puzzles d’un nouveau genre qui égayent les bureaux permettent surtout d’avoir en permanence sous les yeux les idées ou les axes de travail retenus par l’équipe et de « passer rapidement de la collaboration au travail individuel axé sur la concentration », indique une étude de Steelcase sur « l’hypercollaboration et le travail d’équipe » publiée en septembre.

Nouveau média de l’engagement

Rien de surprenant pour Robert Thomson, professeur de l’université Syracuse de l’Etat de New York. Selon ce spécialiste de la culture populaire, « le Post-it est le reflet d’une vie de plus en plus complexe et de la nécessité de contrôler cette complexité ». De la « to do list » individuelle, pour tenter de contenir l’accélération du rythme de travail et de retenir les informations clés qui s’échappent juste avant la prise de parole, au mur du brainstorming, où se juxtaposent les suggestions de toute une équipe, les petits papiers multicolores recomposent comme une mosaïque le travail fragmenté. Ils collent aussi parfaitement au mode de travail par itération promu par les transformations numériques tous azimuts, de la construction automobile à la bancassurance.

« Au travail, les mouvements du corps disent ce que nous n’exprimons pas avec les mots »

Posture, démarche, position des mains… La communication non verbale a une importance cruciale en entreprise. Tout comme le respect de « l’espace » de chacun, explique la morphopsychologue Martine Tardy.

Propos recueillis par Publié aujourd’hui à 06h00

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Faire ses premiers pas en entreprise, c’est apprendre toute une série de codes sociaux et comportementaux. La morphopsychologue Martine Tardy, auteure de Décoder la gestuelle de votre interlocuteur pour mieux le comprendre (éditions Dangles, 2011), livre quelques conseils pour améliorer sa communication non verbale au bureau.

Pourquoi la communication non verbale est-elle importante ?

La communication non verbale, ce sont les éléments d’information qui permettent de communiquer sans passer par la parole. Avoir les bras ou les jambes croisées, par exemple est un signe de repli qui indique qu’on est méfiant par rapport à ce qui va être dit ou fait. Quelqu’un d’extraverti, à l’inverse, aura tendance à placer les épaules en arrière, les mains posées sur les genoux et le torse en avant. Le regard, qui est le tout premier contact que l’on a avec l’autre, celui qui autorise le contact verbal, peut aussi en dire long, de même que la tenue vestimentaire, l’intonation de la voix, l’expression du visage, les mimiques ou le type de sourire. Le « sourire commercial » disparaît tout de suite. Un vrai sourire met toujours un petit moment à se dissiper. Il s’accompagne de la bouche légèrement entrouverte avec les coins qui remontent et les yeux qui brillent. D’après certaines études, tout ce langage du corps compterait pour 55 % dans la transmission d’un message, contre 38 % pour l’intonation de la voix et seulement 7 % pour les mots choisis.

En entreprise, il convient donc d’y être très attentif…

Les mots seuls ne permettent pas toujours de savoir ce que pensent nos collègues, nos supérieurs. Faute de pouvoir entrer directement dans leur cerveau, nous pouvons essayer de saisir la vérité en observant, derrière le non-dit, les signes extérieurs.

Les mouvements du corps ne mentent pas. Ils disent à notre insu ce que nous n’osons pas exprimer avec des mots. Ils traduisent notre humeur, nos sentiments et nos émotions. En ce sens, aucun geste n’est gratuit. Quand votre supérieur vous serre la main, s’il pose son autre main sur votre épaule, il met d’emblée une emprise sur vous. Il vous montre qu’il vous domine.

Attention toutefois à ne pas tirer de conclusions trop hâtives. Quelqu’un qui a le regard fuyant est vite catalogué comme menteur ou lâche. Mais cette personne peut simplement manquer de confiance en elle et avoir peur du regard de l’autre. Comme les mots, les gestes peuvent avoir plusieurs sens. Le contexte dans lesquels ils s’inscrivent est donc important.

Observer les autres, c’est bien. Mais il faut aussi arriver à maîtriser son propre langage corporel…

Autant il est possible de formater sa parole, autant il est difficile d’avoir la mainmise sur son corps. On peut le contrôler cinq, dix minutes. Au-delà, c’est compliqué. On a beau essayer de chasser le naturel, il finit toujours par revenir. Un jeune qui arrive en entreprise doit donc rester le plus près possible de ce qu’il est. Si son langage corporel n’est pas en accord avec sa parole, on ressentira tout de suite que cela sonne faux.

N’y a-t-il pas néanmoins des erreurs faciles à éviter?

Si bien sûr ! Il faut par exemple se garder de s’habiller au bureau comme on s’habillerait le soir pour sortir et opter pour des vêtements sobres et suffisamment confortables. Parce que notre tenue vestimentaire influe sur nos gestes… Il convient également de soigner sa démarche. Si on arrive d’un pas nonchalant, la veste déboutonnée, avec le regard qui navigue à droite, à gauche, on donnera l’impression de ne pas accorder d’importance à la personne qu’on a en face de soi. Autre point fondamental à garder en tête : en entreprise, il y a des distances à ne pas franchir. L’espace, c’est du pouvoir. Il ne faut donc jamais pénétrer sur le territoire d’autrui sans y avoir été invité. Un jeune qui arrive dans une entreprise doit s’attacher avant tout à rassurer les autres, à leur montrer qu’il ne vient pas pour leur prendre leur place, mais pour collaborer.

Pour ce faire, vous conseillez d’utiliser notamment la synchronisation. De quoi s’agit-il ?

La synchronisation consiste à observer son interlocuteur et à se mettre en miroir avec lui. Bien sûr, il ne s’agit pas de le caricaturer, mais simplement d’adopter le même schéma corporel que lui. S’il croise les bras, vous attendez quelques secondes et vous croisez les bras à votre tour. En douceur. En faisant les mêmes gestes que lui, vous lui renvoyez son image. Vous lui montrez que vous le comprenez. Vous faites donc aussitôt tomber son agressivité et le mettez dans de bonnes dispositions pour entamer le dialogue.

La leçon de clôture d’Alain Supiot : « La fiction du travail-marchandise doit se terminer »

Le juriste nous rappelle que le rôle du droit du travail est de répondre aux défis que lui posent les conditions d’existence de l’espèce humaine, qui ne cessent de changer.

Par Publié aujourd’hui à 06h00

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Le travail n’est pas une marchandise, leçon de clôture d’Alain Supiot, Editions du Collège de France, 72 pages, 6,80 euros.
Le travail n’est pas une marchandise, leçon de clôture d’Alain Supiot, Editions du Collège de France, 72 pages, 6,80 euros.

Le livre. Un professeur du Collège de France ne part pas sans un dernier discours, c’est ce qu’on appelle sa leçon de clôture. Alain Supiot a saisi cette occasion pour délivrer son analyse des transformations du travail au XXIe siècle et décrire dans Le travail n’est pas une marchandise (Editions du Collège de France) les germes d’un régime de travail qui pourrait devenir « réellement humain ».

Dans ce mince recueil, l’éminent juriste nous rappelle que le rôle du droit du travail est de répondre aux défis que lui posent les conditions d’existence de l’espèce humaine, qui ne cessent de changer. Et à ce titre, face à la révolution numérique et à la crise écologique, le droit doit se remettre en question pour s’adapter à la nouvelle donne, et servir l’intérêt général d’un monde tel que nous voudrions qu’il soit. L’affaissement de l’ordre juridique est « une des caractéristiques communes des régimes totalitaires », alerte l’auteur.

Le risque actuel est que toute considération de justice passe à la trappe de la gouvernance par les nombres, « qui porte à soumettre le droit à des calculs d’utilité ». Appliquée aux travailleurs, elle provoque des dégâts considérables. Le paradigme du travail-marchandise, porté par le néolibéralisme, « a conduit à la réduction du périmètre de la justice sociale aux termes quantitatifs de l’échange salarial (…) et à en exclure deux questions cruciales : comment et pourquoi travailler ? », dénonce-t-il. Poursuivre dans cette voie mène tout droit à l’accroissement des inégalités, à la précarité et au déclassement.

Une « leçon » critique et force de propositions

Mais la « leçon » du professeur du Collège de France ne se limite pas à la critique, elle se veut également force de proposition. La révolution numérique porte à la fois le risque « d’un enfoncement dans la déshumanisation du travail » et l’opportunité de « repenser l’articulation du travail des hommes et des machines », affirme-t-il.

Considérer le travail comme une marchandise pourrait porter à croire que les formes de travail qui lui échappent encore, comme les professions libérales ou la fonction publique, sont appelées à se marginaliser. Alain Supiot y voit au contraire « les germes possibles d’un nouveau statut du travail qui fasse place à son objet c’est-à-dire l’œuvre accomplie – et pas seulement à sa valeur d’échange », explique-t-il.

« L’attractivité des métiers du grand âge reste peu reconnue »

Dans une tribune au « Monde », les économistes François-Xavier Devetter et Emmanuelle Puissant pointent les incohérences de la politique gouvernementale en ce qui concerne l’aide à domicile pour les personnes âgées.

Publié aujourd’hui à 05h45 Temps de Lecture 4 min.

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« Les salaires tournent aux alentours de 850 euros par mois en moyenne, pour des femmes qui sont plus souvent que l’ensemble des employées à la tête de familles monoparentales. »
« Les salaires tournent aux alentours de 850 euros par mois en moyenne, pour des femmes qui sont plus souvent que l’ensemble des employées à la tête de familles monoparentales. » Fred De Noyelle/Godong / Photononstop

Tribune. Entre le projet de loi de financement de la Sécurité sociale et la mission El Khomri sur l’attractivité des métiers du grand âge, les attentes en matière d’amélioration des conditions de travail et d’emploi des aides à domicile sont importantes. Aujourd’hui, la situation est bien documentée, mais elle reste peu reconnue.

Les salaires sont faibles pour de nombreuses raisons : temps partiel généralisé, importantes contraintes physiques et temporelles, charge psychologique conséquente et… salaires horaires faibles. Ils tournent aux alentours de 850 euros par mois en moyenne, pour des femmes qui sont plus souvent que l’ensemble des employées à la tête de familles monoparentales.

Des atouts importants

Ces difficultés se cumulent et débouchent sur un taux d’accidents du travail extrêmement élevé (supérieur à celui observé dans le bâtiment), des absences fréquentes et une « attractivité » du secteur particulièrement faible. De nombreuses études quantitatives et qualitatives vont dans ce même sens, et pourtant les blocages semblent toujours aussi importants.

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Ainsi, en 2004, un rapport du Conseil économique et social (CESE) pointait parmi les priorités la nécessité de « pérenniser et améliorer l’emploi des salariés en poste » et « redonner son attractivité au travail dans le secteur ». Dix ans plus tard, la Cour des comptes soulignait la faiblesse des « perspectives de carrière contribuant au maintien de la faible attractivité du secteur ». Les rapports confirmant ces constats s’entassent auprès du Comité national d’action sociale (CNAS) ou de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) tandis que la souffrance des salariées demeure.

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Pourtant le secteur dispose d’atouts importants : l’existence d’employeurs divers et anciens, experts en termes de besoins sociaux auxquels le secteur doit répondre ; une convergence entre les revendications des salariées en termes d’augmentation de leurs salaires et d’amélioration de leurs conditions de travail et les alertes multiples de plusieurs fédérations d’employeurs ; des volontés d’évolutions et de transformations, pour répondre aux besoins, largement partagées, une montée en qualification des salariées observables notamment depuis 2003, etc.

Mais au moins trois éléments bloquent toute perspective d’amélioration durable. Trois « mots-clés » omniprésents dans le secteur, dans les discours politiques, les rapports pré-lois, et les prises de position médiatiques… et dont le sens a aujourd’hui pris une tournure directement inspirée de la novlangue digne de 1984 [roman de George Orwell, 1949] : temps partiel, non-qualification, libre choix.

Les « shadow codir » ont fait des petits pour associer les jeunes au management

Les entreprises divrsifient les modes d’intégration des millennials aux décisions stratégiques.

Par Publié aujourd’hui à 23h47

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« Qui mieux que les 18 à 35 ans peut aider à saisir les nouveaux enjeux, à imaginer les nouvelles offres ou organisations ?  »
« Qui mieux que les 18 à 35 ans peut aider à saisir les nouveaux enjeux, à imaginer les nouvelles offres ou organisations ?  » redheadpictures/Carte Blanche / Photononstop

Apparus il y a quelques années, les « shadow codir » et les « shadow comex » ont apporté idées et regards nouveaux à la tête de l’entreprise. Ils ont depuis inspiré d’autres formes d’intégration des jeunes au top management.

Le groupe hôtelier Accor s’était doté dès 2015 d’un shadow comex : ce « comité exécutif bis » était composé de treize hommes et femmes dont la caractéristique était d’être âgés de moins de 35 ans. Sélectionnés par le comité exécutif, ils représentaient tous les métiers et tous les pays où le groupe est présent.

« Le secteur de l’hôtellerie subissait une forte disruption avec la réservation en ligne, les comparateurs, les nouveaux modes d’hébergement, les attentes des clients d’une expérience différente… Il fallait se prémunir face à ces nouveaux concepts et s’adapter », explique Fabrice Carré, vice-président chargé de la stratégie et des investissements d’Accor.

Un regard critique

Trois objectifs leur ont été fixés : éclairer le comex sur les révolutions en cours et les attentes des clients ; porter un regard critique et enrichir les initiatives du groupe ; porter des projets d’amélioration et de nouvelles offres. Réuni pour la première fois en février 2016, le shadow comex a rapidement fait ses preuves. Dès la fin de l’année ouvrait ainsi un site né d’un projet de création d’hébergements d’un genre nouveau, Jo & Joe, retravaillé par la nouvelle équipe.

Macif, Adecco, Havas, Pernod Ricard, Eiffage ont lancé des initiatives similaires à cette période. Leurs objectifs sont toujours les mêmes : faire bénéficier les instances de direction des idées de la jeune génération et accompagner l’entreprise dans sa transformation numérique. Qui mieux que les 18 à 35 ans peut aider à saisir les nouveaux enjeux, à imaginer les nouvelles offres ou organisations ?

« Il s’agit de donner un lieu d’expression aux jeunes générations pour qu’elles apportent un regard différent au comité de direction », affirme Yann Rolland, président-directeur général d’Engie Ineo. Parmi les pionniers de cette démarche, il avait créé un comité « junior » dès 2015, baptisé « comité challenger ». Il a suscité de nombreux projets innovants ou y a participé, comme, par exemple, celui réalisé avec la start-up Andjaro pour faciliter le transfert de personnel entre les agences, selon les besoins et les disponibilités.

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Les « comités bis » ont aussi inspiré les entreprises pour inventer d’autres modes d’intégration des jeunes aux décisions stratégiques. « Nous avons choisi de ne pas créer de shadow comité après nous être posé la question du devenir des jeunes. Nous préférons les réunir pour travailler sur des thématiques sous l’égide d’un membre du comex », explique Christine Petit, directrice du développement managérial et des talents d’Orange.