Non, il n’y a pas de « pics de contrats aidés » juste avant les élections

Non, il n’y a pas de « pics de contrats aidés » juste avant les élections

Réduction de la voilure. « Nous avons décidé de changer de pied sur cette question des contrats aidés », a annoncé, jeudi 20 septembre, le premier ministre, Edouard Philippe, sur France Inter. Le gouvernement ne financera en 2019 qu’environ 130 000 contrats aidés, contre 200 000 budgétés en 2018, alors qu’il y en avait plus de 320 000 en 2017.


Il faut dire que le chef du gouvernement a une dent contre ce dispositif. Il avait déjà affirmé – à tort, comme nous l’avions déjà écrit en 2017 – que les trois quarts des contrats aidés n’aboutissaient à rien.

Argument avancé cette fois : le détournement électoraliste du dispositif. Selon le premier ministre, les contrats aidés seraient une mesure destinée à améliorer le bilan économique avant les scrutins électoraux.

Ce qu’il a dit

« Il y avait de très forts pics de contrats aidés en général une année avant des élections majeures. On voit bien pourquoi : ça n’avait pas grand-chose à voir avec l’activité, ça avait beaucoup à voir avec la présentation des chiffres. »

POURQUOI C’EST FAUX

Difficile de corroborer cette assertion dans la mesure où on ne constate pas de flambée des bénéficiaires un an avant une élection. Le pic le plus net remonte à 2010, au moment des élections régionales, mais cela n’a pas d’intérêt électoral très notable, puisque les contrats aidés sont financés quasi exclusivement par l’Etat et gérés par les préfets, qui délivrent les prescriptions, et non par les élus locaux.

En fait, la hausse de 2010 est plutôt liée à la conjoncture : le président Nicolas Sarkozy, très critique sur ce dispositif lors de son élection en 2007, avait changé son fusil d’épaule après la crise économique, vantant les mérites des emplois… leur faisant même faire un bond inédit l’année suivante.


Il y a certes une montée en puissance des contrats aidés entre 2012 et 2016, mais elle correspond davantage à une tentative du candidat Hollande d’inverser la courbe du chômage qu’à un changement de braquet visant à s’assurer des voix dans les derniers moments de la campagne.

Terminer sur un bilan positif

En revanche, il n’est pas improbable qu’une équipe cherche à utiliser au maximum les crédits alloués aux contrats aidés (donc déjà avalisés par la loi de finances) avant une élection, pour terminer sur un bilan positif : c’est ce qu’a découvert Muriel Pénicaud quand elle a pris la suite de Myriam El Khomri au ministère du travail.

Lire aussi :   Emplois aidés : la mauvaise surprise de la nouvelle ministre Muriel Pénicaud

Dans tous les cas (Balladur en 1993, Sarkozy en 2012, Hollande en 2017…), les emplois aidés ne font pas gagner une élection. Mais ils constituent des objets de tentation pour jouer sur les chiffres du chômage. Reste à savoir si le gouvernement actuel tiendra son cap et ne reviendra pas sur cette orientation en 2022.

Avatar
LJD

Les commentaires sont fermés.