Le reste à charge sur le CPF : une mesure d’économie qui pourrait faire baisser la demande de plus de 20 %
Un décret en gestation prévoit d’imposer un reste à charge de 100 euros par formation à tous les actifs qui utilisent leur compte personnel de formation (CPF). A peine ce projet éventé, la CGT s’insurgeait, le 20 février dans un communiqué, contre cette mesure qui, selon elle, pénalisera les salariés modestes, « alors que ce sont ceux qui ont le plus besoin de se former ». Et ils sont nombreux.
Selon la plate-forme Mon compte formation, où sont enregistrés les CPF, sur les 1,5 million de dossiers engagés en 2023, 82 % appartiennent à des ouvriers ou à des employés. Avec des revenus supérieurs, les manageurs et les cadres qui y recourent moins seront peu affectés, anticipe-t-on à la Cegos, un organisme de formation.
S’il se concrétise, cet effet d’éviction sera limité, affirme, pour sa part, Bertrand Martinot, économiste à l’Institut Montaigne, un centre de réflexion d’obédience libérale. Le projet prévoit, en effet, de dispenser de ce reste à charge « les chômeurs qui bénéficient de formations intégralement financées par les régions ou [par] France Travail ». Ce n’est pas l’avis de Claire Kecha. La déléguée générale du syndicat professionnel Les Acteurs de la compétence, qui rassemble les organismes de formation, s’attend à une « baisse significative, au-delà de 20 % ».
De fortes contraintes
Quoi qu’il en soit, la mesure s’inscrit dans une politique de régulation de la demande de formation, après avoir régulé l’offre. La lutte contre la fraude émanant d’organismes de formation avait, en effet, conduit à la mise en place d’une identité numérique désormais indispensable pour mobiliser le CPF. Le démarchage qui incitait notamment les actifs proches de la retraite à liquider leurs droits en se faisant plaisir, par exemple avec des cours de photographie, a aussi été interdit.
L’Etat a, par ailleurs, durci les conditions de référencement pour les organismes de formation dont le nombre a fondu de moitié. Ce nouveau tour de vis tient aussi au fait que France Compétences, qui finance la formation professionnelle et l’apprentissage avec la contribution des employeurs, s’attend encore en 2024 à un déficit prévisionnel de 1 milliard d’euros, que l’Etat doit éponger.
La délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGFEP) justifie également ce reste à charge par la nécessité de s’assurer de la motivation des stagiaires : « 11 % des formations CPF ne sont pas conduites à leur terme. L’instauration d’un ticket modérateur comme il en existe pour le service public de la santé ou de la justice contribue à responsabiliser les usagers. » Et 17 % des formations CPF sont suivies par des personnes ne déclarant pas d’objectif professionnel, selon une enquête parue le 17 février 2023 de la Dares, le service études du ministère du travail.
Il vous reste 34.57% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.