« Le grand sujet politique de cette rentrée concerne la capacité du travail à assurer une vie digne et un avenir meilleur à chacun »

« Le grand sujet politique de cette rentrée concerne la capacité du travail à assurer une vie digne et un avenir meilleur à chacun »

Lorsque l’on interroge les membres de la majorité sur la finalité sociale du double quinquennat d’Emmanuel Macron, la réponse la mieux partagée est celle-ci : le retour au plein-emploi, autrement dit la fin du chômage de masse qui mine le pays depuis cinq décennies. En 2017, la France comptait 9,1 % de sa population active au chômage. En 2022, le pourcentage était tombé à 7,1 %. L’objectif affiché est d’atteindre 5 % en 2027 et de pouvoir dire qu’à force d’obstination, une révolution s’est opérée, qui ne touche pas qu’aux chiffres, mais concerne aussi le mental d’une société collectivement dépressive : si une source profonde d’angoisse parvient à être levée, tout pourrait aller mieux.

Le ralentissement de la croissance a beau fragiliser l’objectif, le gouvernement s’y accroche d’autant plus que de lui découle la cohérence d’une bonne partie de ce qui a été engagé depuis six ans : la politique de l’offre, la réforme de l’assurance-chômage, celles de l’apprentissage et du lycée professionnel.

Une angoisse chassant l’autre, ce n’est pourtant plus le niveau du chômage qui préoccupe les Français. Le grand sujet politique de cette rentrée concerne le travail, ou plus précisément la capacité du travail à assurer une vie digne et un avenir meilleur à chacun.

La ministre des Solidarites et des Familles, Aurore Berge, lors de la discussion du projet de loi pour le plein-emploi, à l’Assemblée nationale, à Paris, le 25 septembre 2023.

Bombe politique

La revalorisation en catastrophe des salaires des enseignants et de ceux des métiers du soin, menacés par la même désaffection, l’augmentation du point d’indice des fonctionnaires assortie de mesures spécifiques pour les bas et les moyens salaires, l’annonce d’une conférence sociale portant sur les bas salaires et les carrières n’épuisent pas le sujet.

Par un retournement de conjoncture que personne n’avait anticipé, la question du travail qui n’ouvre pas suffisamment de perspectives est en passe de se transformer en une bombe politique : l’inflation bien plus tenace que prévu ronge le pouvoir d’achat ; la hausse rapide des taux d’intérêt annihile pour beaucoup de ménages la perspective de devenir propriétaires de leur logement ; le marché locatif est hypertendu. Quant à l’Etat surendetté, il ne peut plus jouer autant que ces dernières années le rôle de pompier social. Comme les autres acteurs, il est touché par la hausse des taux d’intérêt, qui pèse sur le remboursement de sa dette.

La tentative maladroite et avortée d’Elisabeth Borne, la première ministre, de faire baisser les prix de l’essence en autorisant la vente à perte, la réponse négative des distributeurs sollicités sont révélatrices du changement de climat qui est en train de s’opérer entre le gouvernement et le patronat. Biberonnées pendant des années à la politique de l’offre, habituées à être choyées au nom de la restauration de la compétitivité, les entreprises ont du mal à admettre que le gouvernement puisse leur demander de « prendre leur part ». Elles rechignent à réduire leur marge pour limiter les effets de l’inflation ou à revoir le partage de la valeur ajoutée pour augmenter les salaires.

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LJD

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