L’argot de bureau : le « design résimercial » ou le bureau fait maison
Personne n’y avait pensé : et si l’achat d’un tatami de bureau était la solution pour mieux travailler ? Attention, n’y voyez pas l’occasion de placer discrètement un uchi-mata à votre chef. Il s’agit plutôt de « transformer les espaces de travail en expérience de convivialité », avec ce mobilier de bureau au ras du sol.
Peut-être cette innovation s’inscrit-elle dans la millionième « tendance » qui frappe l’immobilier de bureau : le « design résimercial ». Ce mot-valise difficile à déchiffrer est la contraction de « résidentiel » et de « commercial ». Il est apparu dans les magazines de design américains en 2017. Si vous n’en avez jamais entendu parler, c’est justement parce qu’il est resté bien au chaud dans l’entre-soi des designers.
« Depuis le Covid, les designers sont obligés de réinventer leur discours, et les consultants inventent des mots. On a toujours l’impression qu’un nouveau pseudo-concept va produire tel effet qu’on sait à l’avance », déplore Nicolas Cochard, directeur R&D du cabinet de conseil en bâtiment et en immobilier Kardham. C’est exactement le cas ici : pour nombre de DRH, il a fallu faire revenir les salariés au bureau.
Le salarié est un client
Il y avait déjà l’« hospitality management », qui consiste depuis une vingtaine d’années à appliquer les codes de l’hôtellerie aux espaces de travail. Le salarié est un client, qu’il faut persuader de venir : or on ne persuade personne avec des bureaux grisâtres et impersonnels.
En plus du service, il est question avec le « résimercial » de se sentir comme chez soi. C’est-à-dire mal assis dans un canapé, avec le bruit des voisins et des travaux, sur un ordinateur portable ? Non voyons, il s’agit de reproduire le confort du nid douillet.
Si l’on en croit les consultants qui tentent de pousser cette « tendance », cela s’illustre par la diversification des lieux au bureau : une kitchenette pour le midi, un lounge pour discuter, un espace extérieur pour prendre l’air. Et, évidemment, la salle de sieste, qui envoie un signal « cool ». Le tout est cosy, avec des tapis, des plantes à n’en plus finir, et des poufs de couleurs chaudes (jaune, rouge)… Mais pourquoi avait-on inventé les sièges ergonomiques, alors ?
Un retour massif des salariés
Comme dans une maison, il y a des espaces intimes et des espaces de discussion : si l’on revient au bureau pour retrouver la discussion et l’informel, il faut prévoir des espaces flexibles pour adapter ces échanges. Au 37e étage de la tour ALTO de la Défense, l’entreprise d’aménagement de bureaux Comet a créé une « oasis inattendue », qui comprend des espaces de convivialité, et en particulier un lieu réservé à la pratique des jeux vidéo. La légende dit que les salariés ont vu leur productivité chuter de 70 %, et que (surtout) certains de ses salariés ont intégré les classements mondiaux sur FIFA.
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