L’appel au travail de nuit s’augmente, aux dépens de la santé

L’appel au travail de nuit s’augmente, aux dépens de la santé

Des sapeurs-pompiers de nuit, à Tours, en décembre 2018.
Des sapeurs-pompiers de nuit, à Tours, en décembre 2018. GUILLAUME SOUVANT / AFP

Vers les 16,3 % de la population active travaille la nuit,  alors qu’elle est qualifiée de « cancérogène probable » et qu’elle est affectée d’une « diminution des performances cognitives ».

Touchant 4,3 millions de personnes, le travail de nuit augmente. Leur chiffre a passé de 1 million entre 1990 et 2013, atteignant 16,3 % de la population active, alerte le Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) de Santé publique France diffusé le 12 mars. Le caractère « exceptionnel » d’appel au travail de nuit a beau être inscrit en toutes lettres dans le code du travail, la disposition est plutôt à la banalisation. Parmi les 4,3 millions de laborieux de nuit, le nombre des « habituels » a « plus que doublé » entre 1990 et 2013. Ils sont passés de 800 000 à 1,9 million, effaçant le léger recul du travail de nuit exceptionnel de 2,5 à 2,4 millions de salariés.

L’accroissement du travail de minuit à 5 heures, enregistrée par Santé publique France, est telle que l’institut en désigne à « la mise en place d’une veille sanitaire dans les groupes professionnels les plus exposés », en contribution du suivi médical individuel et régulier des travailleurs de nuit déjà prévu par la loi.

« Troubles de la santé psychique »

L’élévation du travail de nuit pourrait en effet à elle seule être « responsable des troubles du sommeil d’une très large partie de la population », assurent les six chercheurs de l’Inserm, de Santé publique France et de l’université Claude-Bernard-Lyon-I, auteurs du BEH. Ils en retracent les répercussions sur l’état de santé des travailleurs de nuit.

« Ces formes horaires de travail se conduisent chez les travailleurs affichés d’une désynchronisation des rythmes biologiques normaux, calés sur l’alternance jour-nuit, à l’origine des troubles du sommeil », expliquent les chercheurs. Et ce manque de sommeil provoque un déficit de l’immunité des travailleurs qui augmente le « risque d’accidents, de troubles métaboliques, de maladies cardiovasculaires ou de cancers ».

Le travail de nuit planté est ainsi versé de « cancérogène probable » par le Centre international d’étude sur le cancer. Enfin, les perturbations du rythme de travail liées aux horaires décalés sont aussi à l’origine de « diminution des performances cognitives » et de « troubles de la santé psychique ».

Le secteur le plus touché par le travail de nuit « habituel » est le tertiaire : le ­nombre de travailleurs de nuit habituels y a triplé entre 1990 et 2013, aboutissant 1,5 million de travailleurs nocturnes, arrivant de 3,4 % à 7 % de l’effectif total du ­secteur. Dans l’industrie, le nombre de ­travailleurs montrés (383 450 personnes) est moins important, mais la part de l’effectif a plus que doublé, de 5,3 % à 11,2 %, certifiant la tendance. Les métiers les plus affectés par le travail de nuit standardisé sont les infirmiers, les sages-femmes et les aides-soignants pour quelque 274 500 postes à eux trois, puis les conducteurs routiers et les livreurs (près de 140 000), les agents de ­sécurité, le personnel de l’armée, les policiers et les pompiers (212 762)

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LJD

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