Formation professionnelle : « Ce changement est un rouleau compresseur qui élimine tout ce qui n’est pas standard »

Formation professionnelle : « Ce changement est un rouleau compresseur qui élimine tout ce qui n’est pas standard »

Marie Gouttard

Formatrice et consultante chez Form’Action Rhônes-Alpes

Formatrice, Marie Gouttard dénonce, les suites de la nouvelle loi, qui complique la tâche des petits organismes,  pour le bénéfice des grosses entités.

Depuis le début de cette année, la formation professionnelle vit des confusions colossaux. La réforme est mise en place en toute discrétion, car peu de personnes la connaissent ou en sont informées, même les intéressés. Elle n’est pourtant pas une petite modification, mais un véritable raz-de-marée. Sans expertise en droit et connaissances juridiques développées, la lecture des décrets qui tombent les uns à la suite des autres est ardue. Pour autant, elle fait montrer une étatisation et une centralisation majeure des « opérateurs de compétence » aux dépens des organismes de formation de petite taille.

Si la volonté de professionnaliser de façon visée par l’outil de l’alternance semble une bonne idée, ce choix met en revanche sur le bord du chemin tous les prestataires de formation continue qui dispensent les contenus suivants : la réflexion personnelle, le développement cognitif, la compréhension et l’amélioration des relations interpersonnelles, la connaissance de soi, la créativité, l’optimisation de la cohésion d’équipe, et in fine, la prévention des risques psychosociaux.

Cette réforme semble approcher la formation professionnelle par le biais de la montée en compétences des salariés et demandeurs d’emploi sous le seul aspect du savoir-faire technique, voire des savoirs techniques, laissant la problématique récurrente et porteuse d’enjeux en entreprise, des « savoir être », plus pompeusement désignés comme « savoir-faire comportementaux ». Malgré cela, la maîtrise de la technicité n’est en rien utile si l’acteur ne maîtrise pas les codes du vivre-ensemble et de la communication interpersonnelle.

Quid des financements jusque-là partiellement pris en charge par les organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) qui ont disparu le 31 décembre 2018, remplacés par des OPCO (opérateurs de compétences) au rôle mal défini ? Les TPE et PME, qui collaborent largement à la collecte de fonds pour la formation, vont devoir immerger dans une mutualisation financière sans retour, dans le cas où l’alternance est impossible à mettre en place – c’est le cas des PME du transport, pour ne citer qu’elles.

Injonctions brutales imposées sans pédagogie

Aujourd’hui, les « petits » organismes de formation vivent la même aventure que bien d’autres secteurs d’activité en France. Elles connaissent une chute vertigineuse d’activité liée non pas à un manque de compétences, puisque les clients répondent présents et sont fidèles, mais à l’avalanche d’injonctions brutales et imposées sans aucune pédagogie : injonctions administratives, environnementales, financières, logistiques, de rentabilité, de qualité, auxquelles seules les grosses entités déjà bien intégrées dans les sphères décideuses peuvent répondre, consolidant un monopole absolu sur la formation professionnelle et continue.

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LJD

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