Chez Nestlé Waters à Vittel, les ressources en eau diminuent, les emplois aussi
Longtemps, les suppressions d’emplois chez Nestlé Waters se sont faites à bas bruit. Les départs n’étaient jamais contraints, les syndicats négociaient de confortables « congés de fin de carrière », un genre de préretraite. C’est ainsi que l’établissement de Vittel-Contrexéville (Vosges) a réduit ses effectifs des trois quarts en vingt-cinq ans, dont un quart ces quatre dernières années, passant de 1 000 à 720 salariés, sans fracas.
Néanmoins, les temps changent. Les salariés de Nestlé Waters sont en grève depuis la fin août. Et ont manifesté à plusieurs reprises, et jusque devant le siège de Nestlé France, à Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine), le 2 octobre, contre un plan de réorganisation prévoyant 171 départs, dont une majorité de licenciements. « Un choc pour le territoire », témoigne le maire de Contrexéville, Luc Gerecke (divers droite).
Ce qui a conduit à ces suppressions de postes ? « La fin de la commercialisation de la marque Vittel en Allemagne annoncée en 2022 et l’intensification des aléas climatiques, qui peut impacter les conditions d’exploitation de certains de nos forages peu profonds », explique Nestlé Waters.
L’illusion d’une ressource inépuisable
Revenons un peu en arrière. Longtemps, Vittel et Contrexéville ont vécu sur l’illusion que l’eau était une ressource inépuisable. Sur ce trésor de la nature se sont construites la fortune des deux villes thermales et celle de la multinationale suisse, entrée au capital de la société des eaux de Vittel en 1969, avant d’en prendre le contrôle, en 1992.
Des milliards de litres d’eau ont été embouteillés et commercialisés sous les marques Vittel, Contrex et Hépar, sans anticiper un quelconque tarissement. Les premiers constats du Bureau de recherches géologiques et minières actant de prélèvements trop importants dans la nappe principale – dite « des grès du trias inférieur » ou « GTI » – datent pourtant des années 1970. « Il faut se replonger dans l’esprit de l’époque. On n’avait pas cette vision à long terme, confesse le maire de Contrexéville. Petit à petit, la conscience s’est réveillée. »
De rapport en rapport, aujourd’hui plus personne ne conteste que, comme l’explique la préfecture des Vosges, « la partie de nappe dans le secteur de Vittel-Contrexéville est en déficit quantitatif – le volume prélevé est supérieur au volume d’alimentation – lié à des pompages utilisés pour l’alimentation en eau potable, l’embouteillage d’eau et l’industrie agroalimentaire ». Nestlé déclare ainsi avoir baissé ses prélèvements de 23 % depuis 2010.
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