La traque délicate du salarié fraudeur

« Au-delà des motivations initiales du salarié, au-delà des failles de l’entreprise, il s’agit de percevoir ce qui a rendu l’acte légitime aux yeux de son auteur et l’a fait franchir le pas. »

Dans les entreprises, les « collaborateurs fraudeurs » ont des ambitions variables. Il y a ceux qui montent de petites escroqueries, pour quelques centaines d’euros par an. Comme ces deux employés d’un fabricant des jouets qui, avant d’être appréhendés, détournaient régulièrement de la marchandise pour la revendre sur Le Bon Coin.

Pour d’autres, la fraude se pratique à grande échelle. C’est le cas de la comptable d’une société de courtage en assurances de Nice. Entre 2011 et 2016, elle a détourné des chèques et falsifié des comptes, dérobant ainsi à son employeur 1,7 million d’euros. La malversation a été découverte. Et la comptable a été condamnée en août 2018 à trois ans d’emprisonnement, dont dix-huit mois ferme, rapporte Nice Matin.

Trentenaire, diplômé

Plurielle, la fraude interne constitue un fléau particulièrement difficile à appréhender par les entreprises. Parce qu’elle peut, justement, s’implanter au cœur des sociétés sous de multiples formes. Mais aussi parce qu’elle est le plus souvent commise par des salariés qu’on estime au-dessus de tout soupçon.

Le portrait-robot du « collaborateur fraudeur » dressé par le cabinet de conseil PwC dans une étude de 2016 est, de ce point de vue, des plus parlants : il s’agit d’un cadre, trentenaire, détenteur d’un diplôme universitaire, souvent fidèle collaborateur de l’entreprise depuis plusieurs années. Un salarié « souvent sympathique », ajoute Jean-Louis Di Giovanni, associé PwC, et qui « bénéficie de toute la confiance de son management ». Un fraudeur qu’il est donc « difficile d’identifier ». Conséquence : « Sa fraude ne sera découverte en moyenne qu’au bout de dix-huit mois », explique Sébastien Hager, expert fraude chez Euler Hermes France.

Délicat à appréhender, le phénomène prend aussi de l’ampleur. Une étude Euler Hermes-DFCG (l’Association nationale des directeurs financiers et de contrôle de gestion) souligne qu’en 2017 « sept…

Parler ou se taire ? Comment lancer l’alerte ?

« Oser l’alerte ! Sortir du silence au travail ? », de Marie-Noëlle Auberger et Jean-Paul Bouchet. Editions de l’atelier, 176 pages, 15 euros.

Livre. Le lieutenant-colonel Marie-Georges Picquart (1854-1914) fut probablement un des premiers lanceurs d’alerte en France quand, après avoir averti en vain la hiérarchie militaire, il communiqua au sénateur Scheurer-Kestner des documents prouvant l’innocence du capitaine Dreyfus.

Aujourd’hui, le terme fait fureur. Il suffit d’effectuer une recherche sur le plus célèbre des moteurs de recherche dominants pour obtenir plus de 900 000 pages de résultats. Dans Oser l’alerte !, Marie-Noëlle Auberger et Jean-Paul Bouchet s’intéressent à ceux qui, dans le milieu du travail, qu’ils soient salariés, fonctionnaires, contractuels, sous-traitants ou bénévoles, « ont été témoins de discriminations infondées, d’actes illégaux, d’un management brutal, de malversations à la petite semaine ou de grande ampleur, d’atteintes à l’environnement, de décisions prises en contradiction avec l’intérêt des parties prenantes, avec l’intérêt social de l’entreprise, avec l’intérêt général ».

L’ancienne secrétaire nationale de l’Union confédérale des cadres et rédactrice en chef de la revue Cadres CFDT et l’ancien secrétaire général de la CFDT-Cadres, membre du bureau national confédéral de la CFDT et président de l’Observatoire des cadres et du management, commencent par brosser à grands traits le contexte dans lequel les lanceurs d’alerte sont entrés dans le débat public, ainsi que les textes qui les définissent et les protègent, dans la législation française.

Parler ou se taire ? Certains ont osé, et cela leur a le plus souvent valu des ennemis. Ils en ont parlé à leur hiérarchie, à un représentant du personnel, à une association, à un organe de presse, plus rarement à la justice. Ce ne sont pas forcément des lanceurs d’alerte au sens de la loi Sapin 2, mais ils ont osé alerter sur des situations qui leur paraissaient anormales. « Ils ont la parole dans cet ouvrage, comme l’ont aussi des collègues, des élus…

Ford ne veut pas du plan de reprise pour l’usine de Blanquefort… pour l’instant

Philippe Poutou, délégué syndical du site de Blanquefort (Gironde) et ancien candidat du NPA (Nouveau Parti anticapitaliste) à la présidentielle, peu avant son entrevue avec le ministre de l’économie et des finances, Bruno Le Maire, à Bordeaux, le 15 octobre.

L’usine Ford de Blanquefort (Gironde) fermera-t-elle fin 2019 ? Les 847 salariés du site demeurent dans l’expectative. Mardi 16 octobre, à l’occasion d’un comité d’entreprise extraordinaire, le constructeur américain a certes transmis aux élus syndicaux l’offre de reprise du fabricant de composants automobiles Punch, mais il a réitéré « ses réserves » quant à ce projet, confie Jean-Michel Caille, délégué CFE-CGC, qui participait à la réunion.

Lire aussi :   Syndicats, politiques : union sacrée face à la menace de fermeture de l’usine Ford-Blanquefort

Dans un communiqué, l’entreprise souligne que, « comparé à un plan social Ford très complet, nous ne pensons pas que le plan de l’acquéreur potentiel offre le niveau de sécurité et de protection requis, ou limite le risque futur de suppressions d’emplois ». Cependant, le constructeur laisse la porte entrouverte à l’éventuel repreneur. Bruno Le Maire, le ministre de l’économie et des finances, qui s’était dit lundi « en total désaccord » avec la position de Ford – jugée « indéfendable » –, a notamment eu un échange avec Jim Hackett, son PDG, et obtenu un réexamen du plan de Punch.

« Nous négocions depuis plusieurs semaines avec le constructeur pour qu’il prenne en compte l’offre sur la table, et qu’il l’accompagne au mieux, explique un bon connaisseur du dossier. Mais ses dirigeants ont encore en mémoire 2011, quand l’entreprise avait été forcée par les pouvoirs publics de reprendre le site après l’avoir cédé en 2009 à un repreneur [l’allemand HZ Holding]. Ils ne veulent plus revivre cette histoire et nous devons les rassurer sur ce point. »

Depuis juin, argumente la société américaine, « nous avons constamment insisté sur le fait que le repreneur [devait] avoir un projet viable, à long terme, et que tout accord devrait être raisonnable, réaliste et être dans l’intérêt des salariés de FAI [Ford Aquitaine Industries], de Ford et du repreneur ». A cette aune, le groupe américain ne pense pas que Punch ait les reins suffisamment solides pour exploiter le site.

Lire aussi :   Le gouvernement fait pression sur Ford pour sauver l’usine de Blanquefort

De son côté, le potentiel repreneur a obtenu un soutien unanime des pouvoirs publics. L’Etat est disposé à débloquer 5 millions d’euros, dont 3 millions pour financer le chômage technique, le temps de la transition vers une nouvelle production, tandis que les collectivités territoriales seraient enclines à abonder l’investissement de Punch à hauteur de 12,5 millions d’euros pour conserver 300 des près de 850 salariés.

« Assurer le maintien des conditions sociales »  

Dans son plan de sauvegarde de l’emploi, Ford prévoit de transférer 150 postes au sein de son autre filiale, Getrag Ford Transmissions, installée sur un site voisin, et se dit prêt à financer un plan de cessation anticipée d’activité pour 400 salariés ainsi que d’autres mesures « destinées à aider les salariés à se repositionner avec d’autres employeurs ou à poursuivre d’autres opportunités de carrière, que ce soit la création d’entreprise ou des formations de reconversion ».

Lire aussi :   Ford Blanquefort : Bruno Le Maire crée « un groupe de travail » pour maintenir l’activité

D’après le projet de reprise, Ford est également appelé par Punch à assurer une charge de travail pour l’usine pendant trois ans. « La proposition de Punch paraît sérieuse et ambitieuse, mais elle mérite d’être encore retravaillée, estime M. Caille. Concernant la charge apportée par Ford, je pense qu’il peut faire un effort, car la baisse des volumes est beaucoup trop rapide pour les années 2020 et 2021. »

De même, ajoute le délégué syndical, « il faut que Punch affine sa proposition sociale et améliore son offre ». Philippe Poutou, représentant CGT du site, partage ce point de vue. « Ford doit accepter la reprise, et y mettre les moyens pour que ce soit une réussite, juge-t-il. Le plan doit concerner tous les salariés qui souhaitent garder leur emploi. Tant Ford que Punch doivent assurer le maintien des conditions sociales. »

Encore faut-il qu’un dialogue s’instaure entre les organisations syndicales et Punch. Le comité d’entreprise a demandé à la direction du site de pouvoir rencontrer officiellement le représentant de Punch, ce qui ne lui avait pas encore été accordé mardi soir. Selon Bercy, « une réunion sera organisée en début de semaine prochaine ». Les syndicats, eux, envisagent une grande journée d’action, jeudi 25 octobre.

Le secteur industriel en quête de jeunes talents

Selon David Cousquer, fondateur du cabinet de veille et d’analyse Trendeo, « pas moins de 87 112 emplois ont été créés dans l’industrie entre 2016 et 2018, contre 60 573 pour le secteur du logiciel et 30 743 pour les start-up ».

Vous pouvez lui proposer un poste en or dans les technologies de l’information et de la communication ou le conseil, mais, à 22 ans, Guillaume Grolleau ne jure que par l’industrie. « J’aime le volet technique, confie-t-il. Et puis, pour moi, l’industrie, c’est la sécurité. On aura toujours besoin de produire des voitures, de la nourriture… » Son bac S option sciences de l’ingénieur en poche, il a choisi de suivre un DUT en génie électrique et informatique industrielle, avant d’intégrer l’INSA Lyon en alternance. « Comme j’avais déjà effectué un stage dans une petite entreprise d’automatismes pour l’automobile, j’ai eu envie d’explorer un autre secteur. »

Trois semaines sur cinq, il travaille comme ingénieur automaticien pour l’industrie agroalimentaire. Sa mission ? « Rendre les procédés de fabrication plus efficaces et confortables pour les salariés, détaille-t-il fièrement. C’est une tendance de fond dans les usines, aujourd’hui. De plus en plus, on cherche à éliminer les tâches pénibles et à améliorer les conditions de travail des ouvriers. Je ne devrais donc pas avoir trop de mal à trouver du travail à l’issue de ma formation. »

Opportunités intéressantes

Excès d’optimisme ? Pas du tout ! Selon une enquête publiée en juin par l’association Ingénieurs et scientifiques de France, les deux tiers des ingénieurs fraîchement diplômés décrochent un CDI dès leur sortie d’école. Les débouchés sont particulièrement nombreux dans l’industrie, qui, n’en déplaise aux géants du Web, Google et consorts, reste la principale créatrice de richesses en France, avec une part de 12,5 % dans le PIB national. « Pas moins de 87 112 emplois ont ainsi été créés dans l’industrie entre 2016 et 2018, contre 60 573 pour le secteur du logiciel et 30 743 pour les start-up », compare David Cousquer, fondateur du cabinet de veille et d’analyse Trendeo.

« Pour accompagner nos transformations, nous recherchons…

« Le classement scolaire scelle trop vite le destin professionnel et social des personnes »

« De mauvais résultats scolaires vont progressivement faire basculer les “mauvais” élèves du statut de sujet à celui d’objet d’orientation, relégués dans les voies et les métiers les moins valorisés », estiment les auteurs  d’une enquête auprès des collégiens.

Tribune. Si les inégalités scolaires font l’objet d’une recherche abondante, les inégalités en matière d’orientation scolaire sont peu mises en avant. Or, les inégalités face aux capacités de construire et de choisir son parcours sont réelles. On est beaucoup plus acteur de son orientation quand on est bon élève, car celle-ci se fonde sur les résultats scolaires. Les meilleurs élèves auront accès aux meilleures filières qui mènent vers les emplois les plus attrayants. A contrario, de mauvais résultats scolaires vont progressivement faire basculer les « mauvais » élèves du statut de sujet à celui d’objet d’orientation, relégués dans les voies et les métiers les moins valorisés. Ainsi l’orientation est-elle vécue comme une blessure par celles et ceux qui se sentent dépossédés de choix dans une société dite « méritocratique » où chacun est responsable de sa propre réussite.

Que les meilleures places de la société soient réservées aux bons élèves qui ont fait preuve de leur mérite, cela peut paraître justifié. Mais à y regarder de plus près, en intégrant les apports de la sociologie de l’éducation sur la (très) relative égalité des chances, elle ne l’est pas tant que cela. Le classement scolaire scelle, trop vite et trop fort, le destin professionnel et social des personnes. Notre système d’orientation n’est pas catastrophique, mais il est, comme l’ensemble de notre système scolaire, plus favorable pour la minorité d’élèves qui réussissent dans les matières académiques que pour ceux qui présentent des qualités moins scolaires.

Pour aller vers une orientation plus juste, voici quelques pistes de réflexion issues de la Journée du refus de l’échec scolaire 2018, organisée le 19 septembre par l’Association de la fondation étudiante pour la ville (AFEV) et ses partenaires.

L’importance du réseau familial

Tout d’abord, malgré les progrès importants réalisés en quelques décennies, les liens entre le monde économique et le monde scolaire…

Mim, Pimkie, Jules, Brice… La détresse des salariées de l’habillement

Devant un magasin Mim, à Paris, en mars 2017.

Dix-huit mois après, la douleur est toujours vive. « Ce soir, tu fermes le rideau. C’est fini. C’est cela qu’on a dit aux filles dans les magasins. C’est comme ça que cela s’est passé », raconte une ex-vendeuse d’un magasin Mim. Les anciennes salariées de l’enseigne d’habillement se souviennent très précisément de ce « coup de massue » du 26 avril 2017. La fin d’un monde.

« J’ai tout de suite pensé à moi. A mon diplôme universitaire de technologie. A ces treize années de CDI ! Mim, c’était mon premier vrai boulot », explique une quadragénaire. Vient ensuite l’humiliation ressentie après le prononcé de la liquidation judiciaire des 162 magasins Mim.

Pour celles qui, entre elles, s’appelaient « les mimettes », il faut rester en magasin « trois semaines, derrière la grille baissée », et dire aux clients que « c’est fermé ». Le liquidateur de la société exige du personnel qu’il demeure sur place pour expédier la marchandise au siège social. « Trois jours auraient suffi pour faire les cartons. Lamentable ! », s’emporte une ancienne salariée d’un magasin du Sud-Ouest.

Promises aux licenciements, les vendeuses tuent le temps dans leur boutique : « En regardant des films » dans la réserve ou en riant en « mangeant de la raclette » entre les portants de jeans. Et, surtout, elles s’informent sur Internet des conditions du contrat de sécurisation professionnelle (CSP) qui pourrait leur être proposé.

Les premières lettres de licenciement sont envoyées en juin aux 791 salariés. « Le lendemain du jour où j’ai reçu cette lettre, je ne pouvais plus lire un courriel, je ne supportais plus mon téléphone. En fait, je faisais un burn-out. Je ne suis pas la seule dans la boîte », explique une ancienne salariée.

Chez Pimkie, l’électrochoc, « c’était le 8 janvier 2018 », se souvient une…

« Ce sont les salariés qui ont le plus intérêt à la défense de leur entreprise sur le long terme »

Tribune. Le jeudi 18 octobre, le collectif « J’aime ma boîte », initié par Sophie de Menthon, a décidé que ce serait la fête des entreprises, avec un slogan prometteur pour l’édition 2018 : « Fais bouger ta boîte ! » Son objectif affiché : permettre aux salariés de « montrer un autre visage de leur entreprise ». Qui ne souscrirait à un tel programme ? Qui ne voudrait le bien de l’entreprise à laquelle il participe, sur le long terme ?

Or c’est un fait que, par souci de la pérennité de son entreprise, le salarié doit parfois défendre celle-ci contre elle-même, ou plutôt contre des comportements internes, de la part d’actionnaires ou de dirigeants qui, au nom d’une maximisation de la rentabilité financière à court terme, font jouer leurs intérêts contre ceux de l’entreprise, jusqu’à y sacrifier son avenir. Confondant démarche d’entrepreneur et démarche de prédateur, ils épuisent ce qu’ils exploitent au lieu de le cultiver. Les méthodes mises en œuvre par quelques-uns pour vampiriser l’entreprise commune doivent être portées à la connaissance de tous pour faire « bouger [la] boîte ». Cela servira de révélateur : les vampires détestent la lumière du jour !

Trop d’abus perdurent à cause du silence de ceux qui pourraient parler

C’est un fait aussi que nombre d’entreprises abritent des pratiques criminelles (comme le financement du terrorisme dont Lafarge est actuellement suspecté), délictueuses (comme l’évasion fiscale, la corruption, l’entente commerciale entre « concurrents ») ou socialement condamnables (comme le management toxique, les arnaques commerciales, l’obsolescence programmée, l’optimisation fiscale, la maltraitance animale…).

Or la mise en œuvre de toutes ces pratiques nécessite la collaboration de salariés, qui doivent le 18 octobre prendre la liberté de raconter publiquement ce qu’ils savent pour enfin marquer leur désaccord. Trop d’abus perdurent à cause du silence de ceux qui pourraient parler.

Fonction…

Le dilemme des aides publiques à la reprise d’entreprises

Dans l’usine de fabrication de boîtes de vitesses Ford de Blanquefort (Gironde), en mai 2013.

C’est l’une des inconnues de la reprise du site de Ford Blanquefort. L’Etat et les collectivités territoriales doivent-ils remettre au pot, au risque de tout perdre, pour soutenir la reprise du site par Punch Powerglide ? Lundi 15 octobre, Bruno Le Maire, le ministre de l’économie, a indiqué l’intention de l’Etat de mobiliser 5 millions d’euros pour soutenir la réindustrialisation du site, tandis que les collectivités locales sont prêtes à investir 12,5 millions d’euros.

Lire aussi :   Syndicats, politiques : union sacrée face à la menace de fermeture de l’usine Ford-Blanquefort

Mais si tout s’arrête, que Ford met la clé sous la porte à Blanquefort, que se passera-t-il ? Le constructeur peut-il être obligé de rembourser les moyens alloués par les pouvoirs publics entre 2011 et 2013 pour maintenir, déjà, l’activité de l’usine ? A l’époque, Etat, région, département et communes de l’agglomération avaient mobilisé 15 millions d’euros pour participer à la modernisation du site et assurer, pendant cinq ans, le maintien d’un millier de postes. « Comme les engagements ont été tenus, à savoir le maintien des postes sur la période prévue, cet argent ne peut plus être réclamé », dit-on à Bercy.

A chaque annonce de fermeture d’usine, de départs, la réaction est pourtant la même chez les hommes politiques. Ils exigent le remboursement des aides publiques perçues.

Le sinistre épisode Daewoo

Tous gardent encore en mémoire l’épisode Daewoo, de sinistre mémoire. Après avoir reçu près d’une cinquantaine de millions d’euros d’aides publiques dans les années 1980 et 1990 pour revitaliser la Lorraine, le conglomérat avait décidé de fermer, en 2003, ses trois usines, supprimant au passage 1 200 emplois. Le tout sans jamais avoir remboursé un centime aux pouvoirs publics et en laissant une ardoise fiscale conséquente.

Beaucoup plus récemment, le député Olivier Falorni demandait, en 2015, le remboursement des crédits d’impôt recherche touchés par l’équipementier Delphi, qui fermait son site de Périgny, près de La Rochelle. Sans succès. De même, pendant la campagne présidentielle de 2017, le candidat socialiste Benoît Hamon avait demandé le remboursement par Whirlpool, qui annonçait alors la fermeture de son site d’Amiens, du crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE). Là aussi, sans succès, car les crédits d’impôt ne sont pas soumis à un engagement de conserver l’outil de travail en France.

Mais l’Etat n’est tout de même pas démuni. Depuis 2015, la loi Florange, votée à l’initiative d’Arnaud Montebourg, alors ministre du redressement productif, prévoit que toute entreprise amenée à fermer un établissement en France soit obligée non seulement de chercher un repreneur, mais également, si le préfet le demande, de rembourser « des aides pécuniaires en matière d’installation, de développement économique, de recherche ou d’emploi attribuées par une personne publique à l’entreprise ».

Fin 2017, l’Etat a ainsi demandé au groupe américain Caterpillar de rembourser quelque 125 000 euros d’aides publiques (prime d’aménagement du territoire, fonds de revitalisation) après l’annonce de la fermeture de son usine d’Arras, et la suppression de 67 postes… Un moindre mal.

Lire aussi :   Air France, SNCF, Ford Aquitaine… les dossiers minés de la rentrée

Les salariés à l’assaut des conseils d’administration

Le ministre de l’économie et des finances, Bruno Le Maire, aux côtés de Nicole Notat et Jean-Dominique Senard, lors de la présentation de leur rapport sur « l’entreprise, objet d’intérêt collectif », en mars.

C’est une révolution douce, presque invisible. Le mouvement n’en est pas moins marquant : dans un capitalisme français où tout a longtemps paru se jouer entre amis, les salariés commencent à se frayer un chemin jusqu’au saint des saints : les conseils d’administration des grands groupes. Et à y faire entendre une autre voix. C’est ce que montrent les chiffres publiés mardi 16 octobre par l’Institut français des administrateurs (IFA).

Pas moins de 111 administrateurs représentant les salariés en tant que tels siègent désormais dans les conseils des 120 premiers groupes cotés en Bourse (SBF 120), selon les pointages de l’IFA. Leur nombre a bondi de 29 % en un an, et quasiment triplé depuis 2013.

Les salariés occupent ainsi 7,5 % des sièges aux conseils des grandes entreprises cotées, et même un peu plus de 9 % en incluant les salariés désignés en tant qu’actionnaires. Leur présence se révèle donc de moins en moins marginale. Un effet direct des lois Sapin de 2013 et Rebsamen de 2015, qui ont imposé la présence d’administrateurs salariés dans les grands groupes privés.

« Nous avons des convictions, nous les défendons »

« C’est important que la parole du personnel soit portée jusqu’au conseil, juge Stéphane Sauvage, un élu FO récemment nommé chez Getlink, l’ex-Eurotunnel. Cela aide à ce que les autres administrateurs gardent à l’esprit que, derrière les chiffres, l’entreprise est composée de femmes et d’hommes. » Eric Personne, qui siège chez Renault, confirme : « Avant, les administrateurs discutaient de salaire, de licenciement, dans une forme d’entre-soi. Notre seule présence modifie un peu la donne. »

Un troisième administrateur prend l’exemple d’un conseil récent. Les salariés ont voté contre un projet de la direction. « Bien sûr, nos voix n’ont pas suffi à tout bloquer. Mais nous avons des convictions, nous les défendons et, parfois, cela amène le conseil à réfléchir davantage avant une décision. »

Ce…

Réduction des emplois aidés : les associations s’adaptent difficilement

L’annonce, le 21 septembre 2017, par le gouvernement Philippe de la réduction du nombre de contrats aidés de 320 000 en 2017 à 200 000 à partir de 2018 avait soulevé un vent de panique dans le milieu associatif. En effet, 38 % de ces contrats d’un an renouvelables deux fois étaient signés par des associations. Le projet de loi de finances n’en prévoit que 100 000 pour 2019, mais, en 2018, seuls 60 000 emplois aidés ont été uti­lisés. Quelles alternatives ont été mises en place ? Comment se sont adaptées les associations ?

« Assez difficilement, réagit Philippe ­Jahshan, le président du groupement Mouvement associatif. 12 500 associations emplo­yeuses ont disparu contre 10 800 par an en moyenne les années précédentes. » En 2017, la France comptait 1,5 million d’associations en activité, dont 163 400 associations employeuses,selon le bilan annuel publié en septembre, dans la 16e édition de « La France associative en mouvement » réalisée par l’association Recherches et solidarités.

« En 2017, le club comptait 3 emplois aidés sur une équipe de 5 personnes. On a reventilé notre dispositif, réduit le nombre d’heures, et on a fait intervenir davantage de bénévoles », Alain Rey, président du Comité du Tarn de rugby

Ce sont donc plus de 7 % des associations employeuses qui auraient disparu, les plus petites et les plus en difficulté. Selon le baromètre annuel du moral des responsables d’association, 46 % sont insatisfaits et plus de 11 % jugent leur situation « très difficile », ce qui représente plus de 140 000 associations en souffrance en 2018.

Deux secteurs sont particulièrement concernés par la réduction des emplois aidés : la culture et le sport. En 2017, le sport comptait 25 000 emplois aidés sur 82 000 emplois salariés équivalent temps plein. « La fin des emplois aidés a été une perte de ressources nette, témoigne Alain Rey, le président de l’association Comité du Tarn de rugby. En 2017,…