Directeur de la communication d’Outscale, succursale de Dassault Systèmes
Il faut amplifier les collaborations écoles-entreprises au-delà des intérêts rapides de ces dernières pour combattre la carence de compétences, plaide David Chassan, cadre dirigeant d’une succursale de Dassault Systèmes.
Le besoin grandissant de maîtriser ce qui est devenu le nerf de la guerre pour les entreprises, à savoir leurs informations digitales et toute la data qui en découle, crée un manque sans précédent sur le marché de l’emploi dans la technologie. Principalement, de nouveaux domaines apparaissent régulièrement (blockchain, cloud, machine learning, intelligence artificielle, etc.), qui sollicitent de mettre en face les compétences adéquates. Surtout, ces vagues technologiques consécutives rendent les compétences des collaborateurs et celles des futurs collaborateurs très vite obsolètes.
La collaboration active à la formation des futurs talents français doit se figurer dans une réelle grandeur sociale et éducative
Si l’Etat semble avoir pris connaissance du problème, en initiant particulièrement la récente réforme de l’enseignement secondaire, qui assimile un cursus autour des sciences de l’ingénieur, du digital et des sciences informatiques, on sent bien que la réponse n’est pas à l’altitude des enjeux. Il faut aller beaucoup plus loin. Et c’est là que les entreprises de technologie ont un rôle à jouer. A elles de prendre leurs responsabilités et les devants pour ne pas laisser l’éducation nationale seule face à un défi majeur qui les concerne immédiatement.
De plus en plus d’entreprises s’attrapent du sujet en axiomatisant des partenariats avec de grandes écoles pour dépenser des enseignements concrets, pour arranger des conférences ou des cours d’initiation aux technologies émergentes. L’idée est de terminer le précepte professoral par une estimation technique et métier plus opérationnelle.
Encouragement fiscale
Si une telle allure, qui peigne un investissement en termes de ressources humaines et de moyens financiers, peut être perçue, elle n’en présente pas moins un écueil de taille, sur lequel l’Etat doit demeurer très vigilant. Pour prendre tout son sens, cette collaboration active à la formation des futurs talents français doit s’inscrire dans une réelle dimension sociale et éducative. Or, la majorité des entreprises qui l’entreprend le fait dans l’optique de se faire connaître des étudiants.
Ainsi, plutôt que de remettre un enseignement agnostique, elles les aménagent à leurs propres méthodes et outils et, de fait, les ferments dans une doctrine technologique qui ne profite au final qu’à elles-mêmes, et nullement à notre économie. Les écoles sont solliciteuses mais, dans la diligence, se laissent séduire par des firmes peu scrupuleuses.
Jérôme Tarting, PDG de Up’, BIZJérôme Tarting, conseil en entrepreneuriat, s’alarme de la réfutation entre la souplesse de la loi « mobilités », débattue à l’Assemblée le 14 mai, et une instruction européenne excessive pour la souplesse des plates-formes de services en ligne.Parues après la récente crise économique mondiale, des start-up ont disrupté les secteurs du transport de personne et de la livraison. Devenues le symbole de la « nouvelle économie » favorisée par la numérisation, elles ont ouvert le champ des possibles. Fondant leur modèle sur l’externalisation de missions auprès d’une multitude d’attributaires indépendants, elles ont fait émerger l’épargne de plate-forme. Celle-ci ne cesse depuis de se développer.
Par exemple, l’Europe compte actuellement, entre les 200 millions d’actifs, plus de trois millions de personnes formant une forme nouvelle ou atypique de travail, selon les chiffres de la Commission européenne. Quelles sont les raisons de ce succès ? Les abstractions issues des mobiles et des tablettes ont étendu une nouvelle économie des services. Ils sont venus répondre à une offre qui était jusqu’ici inexistante ou inhibée.
Par ailleurs, elles ont détruit des secteurs monopolistiques. Enfin, elles ont engendré de nouveaux emplois, en allant tenter des compétences externes et inutilisées. Mais la gig economy (économie des petits boulots) a dirigé de nombreuses controverses au point que les pouvoirs publics européens ont décidé de l’ajuster outre mesure, sans en sonder les suites.
Paradoxe politique en France
A l’exemple du Parlement européen qui, le 12 avril, a établi des « droits minimaux pour les travailleurs qui dressent un emploi à la sollicitation, basé sur des chèques ou des plates-formes du type Uber ou Deliveroo. » On peut particulièrement lire, parmi les dispositions optées par les eurodéputés, « l’instauration de conditions de travail transparentes dès la première semaine du contrat » ou encore « une période d’essai maximale de six mois ».
L’instruction, qui doit être convertie dans les Etats membres dans les trois ans à venir, va très vite exposer un paradoxe politique en France, tant elle semble très pénible. Elle risque aussi de réanimer des conflits juridico-judiciaires qui étaient en voie d’apaisement dans notre pays. En effet, l’apparition des termes « contrat » et « période d’essai » va obscurcir l’interprétation des textes.
Pire, l’Europe dégage un débat, surabondant, sur un statut conciliatrice entre indépendant et salarié. Ceci sans se rendre compte que l’arrangement de la réglementation à une nouvelle économie, ne pourra se faire de disposition simple et uniforme. En France, l’approche de l’économie de plate-forme est autre. Elle procurerait présentement plus de 50 % de leurs revenus à 5,2 % des Français (12 % des 25-34 ans), suivant les chiffres de la Direction générale des firmes du ministère de l’économie.
Thomas Breda, 36 ans, économiste du travail, est l’un des trois consigné de l’édition 2019 du Prix du meilleur jeune économiste. Chercheur au CNRS, il est uni à l’Ecole d’économie de Paris (PSE), à l’Institut des politiques publiques et à l’IZA, à Bonn. Ancien élève de l’Ecole normale supérieure, il a fait sa thèse à PSE en 2011.
Vous êtes cité au Prix du meilleur jeune économiste 2019 pour l’ensemble de vos activités. En quoi s’inscrivent-ils dans l’actualité ?
La France a engagé avec la loi El Khomri de 2016 ensuite les ordonnances Pénicaud de 2017 une grande refonte du marché du travail, permettant plus de poids au dialogue social au niveau de la firme, par rapport à la branche et au Code du travail. Les thèmes de la contestation collective sont au cœur de mes travaux, qui traitent plus abondamment des différences sur le marché du travail, du rôle des institutions et des normes sociales : normes de genre (femmes-hommes), règles de représentation du personnel et fiscalité du travail.
La reproduction des salariés avait jusqu’alors été très peu soignée par les économistes. Mes travaux sur la carrière des délégués et leur place dans les dispositions ont mis en évidence la discrimination des envoyés syndicaux, payés 10 % de moins que les autres salariés, et ses conséquences sur le dialogue social. On constate dans les entreprises que plus la situation est incertaine, plus les syndicats sont actifs, et plus la condition des envoyés syndicaux est mauvaise.
Comment l’expliquez-vous ?
C’est le résultat d’un cercle vicieux : les employeurs découvrent un intérêt stratégique à stigmatiser ceux qui sont le moins enclins aux compromis, ne serait-ce que parce que la négociation est coûteuse. Mais cette ségrégation avérée entraîne des effets de désaffection des salariés, qui ne demandent pas se mettre en pénurie en rejoignant un syndicat. Ainsi 35 % des salariés affirment échapper de se syndiquer par peur des représailles.
Par suite, seuls des profils singuliers sont prêts à s’engager : des salariés très militants, ou notamment attachés à la défense de l’intérêt général, qui ne sont définitivement pas continuellement très représentatifs des autres salariés. Mes travaux placent ainsi qu’avant de vouloir donner plus de poids à la tractation d’entreprise, il faut d’abord renforcer la valeur et la conformité des représentants auprès des employeurs et des autres salariés. Ce n’est pas nécessairement ce qu’a fait la refonte El Khomri-Pénicaud.
Le projet de loi d’orientation des changements pourrait forcer employeurs et employés à consigner les déplacements domicile-travail dans les contestations annuelles des entreprises.
Le droit au déplacement est-il en passe de devenir une nouvelle conquête sociale ? Le projet de loi d’orientation des mobilités (LOM), élu par le Sénat le 3 avril et qui devrait être étudié par la commission du développement durable de l’Assemblée nationale, à partir du 14 mai, pourrait bien devenir l’appareil de nouveaux droits pour les salariés. La LOM pourrait en particulier assujettir employeurs et salariés à inscrire la mobilité comme l’un des thèmes devant être abordés lors des négociations annuelles obligatoires (NAO), en plus des rétributions et de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, dans les entreprises d’au moins 50 salariés.
23 députés de La République en marche (LRM) ont placé en effet un rectificatif à l’article 26 du projet de loi, visant à « inclure la mobilité entre le domicile et le travail ainsi que les déplacements professionnels dans les débats annuelles obligatoires, (…) afin de permettre un développement des mobilités actives ». Officiellement, le gouvernement ne prend pas position sur cette question précise et renvoie aux négociations entre partenaires sociaux. Mais dans les coulisses du ministère des transports, on laisse entendre que l’inscription de la mobilité dans les NAO a de fortes probabilités de se faire.
« Personne n’y est opposé, ni les envoyés des salariés ni les patrons, détaille un bon connaisseur du dossier. Et pour la ministre des transports, Elisabeth Borne, la mobilité doit être un thème central du dialogue social. » Pas de doute : la fièvre des « gilets jaunes » a renoncé des traces et ni le gouvernement ni la majorité n’ont oublié que la crise a commencé par une révolte contre la hausse de la taxation du gazole, vécue par de nombreux citoyens comme une agression contre leur besoin économiquement vital de se déplacer.
« Tout le monde ne vit pas dans une grande ville »
C’est donc l’article 26 de la LOM qui pourrait être la pierre angulaire d’une politique sociale de la mobilité. Il envisage, pour le moment, le paiement par les employeurs d’une « prime mobilité durable » optionnelle, sans charges sociales ni taxes, d’un montant maximal de 400 euros par an pour les trajets domicile-travail accomplis à vélo ou en covoiturage. Mais des voix s’élèvent pour solliciter à agrandir, voire à durcir ce dispositif.
Plusieurs délégués des salariés sollicitent à s’affranchir de la contrainte écologique de cette prime mobilité. « Il faut arrêter de se faire des films : tout le monde ne vit pas dans une grande ville, dit Yves Veyrier, secrétaire général de Force ouvrière. Pour beaucoup de salariés, aller travailler à vélo ou en covoiturage est impossible. »
Les chefs de cinq grandes firmes françaises véhiculent leur soutien au projet de convention internationale contre le harcèlement au travail, qui sera discuté à l’Organisation internationale du travail (OIT) à partir du 10 juin.
Le constat est aussi certain qu’insupportable : la violence et le harcèlement au travail sont des dommages présents partout, dans tous les pays et dans tous les secteurs d’activité. En Europe, près d’une femme sur deux a subi une forme de harcèlement sexuel sur son lieu de travail. Une initiative chargé par les violences conjugales qui, elles aussi, ont des conséquences au travail.
À l’heure récente, encore plus d’un pays sur trois n’est affecté d’aucune loi pour interdire le harcèlement sexuel au travail, ce qui crée un vide juridique pour près de 235 millions de travailleuses et travailleurs dans le monde.
Pouvoir œuvrer sans risque de subir des violences ne devrait pas être une question de chance, annexe de l’entreprise ou du pays où l’on se trouve, mais bien un droit humain universel.
Pour une action globale contre les abus
C’est ce droit universel qui sera débattu à partir du 10 juin à l’Organisation internationale du Travail (OIT). Gouvernements, représentants des travailleurs et envoyés des employeurs négocieront la toute première convention internationale visant à mettre fin à la violence et au harcèlement dans le monde du travail. Il s’agira de mettre en place le premier outil réglementaire international de protection des travailleurs et travailleuses, notamment à l’encontre des violences sexistes et sexuelles.
Face à l’urgence, les discussions, qui ont débuté au sein de l’OIT il y a plus d’un an, doivent maintenant aboutir à l’adoption d’un pacte international assez ambitieux pour assurément protéger l’ensemble des travailleuses et des travailleurs.
L’accès à un travail loyal pour les femmes et les hommes partout dans le monde ne peut être assuré que par une action globale contre les abus, un appel de l’ensemble des acteurs du monde du travail, surtout les entreprises.
Supporter une convention la plus ambitieuse possible
C’est la raison pour laquelle nous avons déterminé, à l’appel de l’ONG Care France et du groupe L’Oréal, de soutenir publiquement l’adoption par l’OIT d’une convention internationale qui incorpore des définitions larges du « monde du travail » et des « travailleurs et des travailleuses ». Cette convention doit enfermer le travail dans l’économie formelle ou informelle, dans l’espace public ou l’espace particulier pour le travail à domicile ou les travailleuses domestiques. Cette convention doit également reconnaître les suites que peut avoir la violence subie dans la sphère conjugale sur le monde du travail.
La direction d’Air France envisage un plan de départs volontaires touchant 465 personnes. Les escales du Sud et de l’Est de la France domineraient payer le plus lourd tribut.
C’est sans doute la fin de la lune de miel entre Ben Smith, directeur général d’Air France-KLM, et les syndicats d’Air France. Le nouveau patron, nommé pendant l’été 2018, doit en effet annoncer, lundi 13 mai, un plan de départs volontaires (PDV) à l’occasion d’un comité social et économique central extraordinaire (CSECE). Au total, 465 postes sont visés. Des coupes qui doivent principalement concerner les effectifs des personnels des bases et des escales d’Air France à Paris, comme en province.
Pour cette première tendance de départs de l’ère Smith ce sont les escales du Sud et de l’Est de la France qui nécessiteraient payer le plus lourd tribut. Le tranchoir ne s’abat pas au hasard. Selon un syndicaliste, elles seraient lourdement déficitaires. Fermement faire concurrence depuis une dizaine d’années par les compagnies à bas coûts comme easyJet, mais aussi par les TGV de la SNCF, le court-courrier aurait creusé un déficit de 170 millions d’euros en 2018. Une perte qui tombe d’autant plus mal qu’Air France n’a plus les moyens « d’acheter la paix sociale comme elle l’a fait à un moment », ajoute le syndicaliste.
La compagnie franco-néerlandaise a connu un très mauvais premier trimestre 2019. Son déficit d’exploitation s’est élevée à 303 millions d’euros contre 185 millions sur la même période il y a un an. Le choix de la direction de réduire les effectifs agace les syndicats, qui dénoncent les options uniquement défensives d’Air France. « Nous souhaitons une politique offensive sur le court-courrier », dont les difficultés ne se régleront « pas seulement avec un plan de départs volontaires », se désole Gaël Amaury, secrétaire général adjoint de la CFDT Air France. Dans cette activité, la direction paie aussi le prix des retards de l’union entre les trois compagnies filiales d’Air France, Airlinair, Brit Air et Regional, identifiées sous la bannière d’Air France Hop !.
« Attrition des personnes »
Promise dans une politique de diminution des coûts, Air France devrait terminer son PDV par une réduction des répétitions sur certaines lignes et l’arrêt de quelques destinations sur son réseau domestique. Une démarche « d’attrition des personnes » et de l’activité qui provoque des demandes, indique la CFDT.
Le syndicat s’ahurit que « dans la stratégie qui sera présentée lundi par la direction, il n’y ait pas un mot sur Transavia France », la succursale à bas coûts d’Air France. Pour une fois sur la même longueur d’onde, la CFDT et Philippe Evain, ancien président du Syndicat national des pilotes de lignes (SNPL), considèrent que « Transavia France aurait les moyens de faire concurrence aux low cost en province ».
« Les sujets ne nécessitent pas être abandonnés seuls avec un photographe, maquilleur, ou tout autre adhérent durant un shooting. » « Tous les participants d’un shooting photo ou d’un tournage vidéo nécessitent se concevoir de façon professionnelle et ne pas se livrer à des actes de harcèlement. » Voilà le genre d’ordres que l’on trouve dans le guide Condé Nast pour lutter contre le harcèlement dans la mode. Il a été diffusé en janvier 2018, au moment où des photographes très influents dénoncés de harcèlement – parmi eux, Terry Richardson, Mario Testino, Bruce Weber – ont été mis au ban par des groupes de presse et des maisons de mode.
En septembre 2017, les groupes de luxe Kering et LVMH avaient ouvert la voie avec la constitution d’une charte pour progresser les conditions de travail et le bien-être des mannequins. La concomitance de ces faits n’est pas le fait du hasard : Instagram, qui s’est imposé vers 2015 comme le nouvel outil de communication de la mode, a bouleversé les rapports de force, donnant aux mannequins l’occasion de s’exprimer visiblement et, le cas échéant, de révoquer certains agissements.
Et les agences dans tout ça ? On les a peu expérimentées, alors qu’elles sont malgré cela au cœur du fonctionnement. Comment perçoivent-elles la situation ? Comment leur participation avec les mannequins a-t-elle évolué ? Réponse avec trois d’entre elles.
« On s’est toujours occupé des mannequins, c’est normal. Quand une fille étrangère arrive à Paris, on lui loue une habitation, on lui trouve un rendez-vous chez le médecin, on lui fait un book de photos… », déclare Nathalie Cros-Coitton. Pour la présidente de la Fédération française des agences de mannequins et de l’agence Women, la compétition entre les agences est telle que « si on ne traitait pas bien nos mannequins, ils iraient immédiatement voir la concurrence. Donc, au-delà de l’éthique, il y a des raisons économiques à agir ainsi ».
Un espace à l’abri des regards
Pour certains réponsables d’agence, l’agitation de ces dernières années n’a pas changé leur manière d’œuvrer ; ils estiment que leurs agences ont toujours été irréprochables. Chez Elite, le président, Vick Mihaci, pense aussi que « les chartes n’ont rien changé à [leur] manière de faire ». Il rappelle qu’en droit du travail, la France reste un Etat précurseur, le premier au monde à avoir exigé des certificats médicaux, généralement contrôlés par l’inspection du travail ; c’est aussi un des seuls pays où les mannequins ont un statut de salarié et non d’indépendant. Selon lui, les obstacles dont les mannequins ont pu se plaindre sur Instagram viennent plutôt des marques et de la course à la nouveauté à laquelle elles se livrent.
« Elles ne laissent plus aux mannequins le temps de se développer, elles peuvent les lâcher après une saison », déplore-t-il. Il évoque aussi la pression exercée sur les designers : « La créativité, on ne peut pas en avoir tous les jours, et quand il faut faire huit collections par an, il y a saturation. C’est du travail de dernière minute, et l’organisation devient très compliquée. » Et ce sont les modèles qui en font les frais. Toutes les agences ont leur lot d’anecdotes sur telle fille, appelée la veille d’un défilé pour faire un essayage à minuit, puis rappelée à 2 heures du matin, et de nouveau à 4 heures… pour finalement ne pas être choisie pour le show.
« Ces dernières années, les mannequins étaient devenus un cintre, il n’y avait plus de respect de la personne. Les chartes ont permis aux marques de rectifier le tir », conclu Lena Bodet, de l’agence Elite. « Avant, pour les défilés, les mannequins se changeaient là où ils pouvaient, peu importait qu’il fasse trop chaud ou trop froid, que ce soit plein de monde. Ça n’avait pas d’importance : c’était du bétail, ajoute Cyril Brulé, le chef de l’agence Viva. Avec la charte, toutes les maisons ou presque se sont mises sur les rails. » Aux défilés, les mannequins ont sitôt un espace à l’abri des regards pour se changer, un buffet cohérent où se restaurer, et même parfois un psychologue à disposition. Quant aux inévitables essayages, ils durent aussitôt moins longtemps : « A quelques exceptions près, maintenant, à 23 heures ou minuit, c’est fini, tout le monde est au lit ! », déclare Patrick Simon, d’Elite.
« Longtemps, dans les grands groupes, la direction a été complètement déconnectée de la réalité. L’équipe gouvernante allait complimenter le designer dans les coulisses après le défilé, mais ne se disait pas : “Tiens, il y a des mannequins à moitié nus, mais aussi des journalistes, des photographes” », déclare Cyril Brulé. Il a indirectement participé à la naissance de la charte LVMH Kering en alertant Antoine Arnault et François-Henri Pinault des dérives qu’il observait. Lors des séances de travail qui s’ensuivent, « les groupes ont découvert un laisser-aller qui durait depuis des années ». Cyril Brulé prend le modèle d’un mannequin homme qui a raconté devant un auditoire inquiété qu’il s’était retrouvé dans les coulisses d’un défilé en string avec un type qui prenait des photos des fesses de tous les modèles.
La chute des photographes dénoncés de harcèlement a aussi changé le climat sur les shootings, qui sont devenus plus tendus. Les photographes, les maquilleurs ou les coiffeurs saisissent plus de précautions, veillent à ne pas rester seuls avec un mannequin. « Si un photographe veut demander à une fille d’ouvrir un peu plus sa blouse pour la photo, il favorise que ça soit une femme qui le fasse à sa place », ajoute Nathalie Cros-Coitton, qui nuance : « Ça n’empêche, des prédateurs, il y en aura continuellement. Et la plupart du temps, ils ne se réalisent pas sur le lieu de travail, mais après. »
Toutes les agences consultées assurent ne pas avoir été confrontées à des cas de harcèlement ou d’agression. Bien sûr, toutes étaient au courant de la réputation de certains photographes, mais elles avancent l’argument de n’avoir jamais rencontré de mannequins prêts à déposer une plainte. « Des filles me disaient : “Je veux le job, même si ce photographe est relou, je peux le gérer” », ajoute Cyril Brulé, qui admet avoir déjà démissionné d’une agence qui ne réagissait pas lorsque des modèles révoquaient des pratiques coupables. « Les agences et les marques ont pris conscience qu’il est de notre responsabilité de ne pas travailler avec des gens pourris ou qui cautionnent ce système. »
Chaperon nécessaire
Le mannequinat est un des rares milieux où il existe une vraie mixité sociale, où l’on croise à la fois de riches héritier(ère)s et des réfugié(e)s fuyant la misère de leur pays. Mais tous n’ont pas les mêmes armes pour se défendre. « Un mannequin issu d’un milieu aisé, appuyé par sa famille, qui n’a pas une forte nécessitée à gagner de l’argent, est plus à même de gérer la pression ou le harcèlement. Une gamine qui vient d’un milieu défavorisé va plutôt penser “Je ne vais rien dire, sinon on va me renvoyer chez moi” », déclare Cyril Brulé.
Pour précéder la trop grande fragilité des mannequins, les chartes LVMH et Kering ont d’ailleurs modifié l’âge légal pour œuvrer : les moins de 16 ans ne sont plus acceptés, et le travail de ceux entre 16 ans et 18 ans compliqué par la présence obligatoire d’un chaperon. Avant, on pouvait apercevoir des adolescents sur les podiums. « Mais à cet âge-là, on ne tient pas la pression ! Comment une fille de 15 ans qui débarque à Paris sans maîtriser la langue ni connaître personne saurait-elle se comporter sur un shooting avec 100 personnes autour d’elle ? Surtout que, aujourd’hui, un mannequin doit non seulement être beau, mais aussi être sympathique, en forme, avoir une bonne personnalité et un super Instagram », s’excite Cyril Brulé.
La question de l’âge est aussi très attachée à celle du poids. « Pourquoi on recrute des adolescents ? Parce qu’ils ont des corps qui admettent absolument aux vêtements conçus par les designers », regrette Patrick Simon. Le danger étant que lorsque le corps de l’adolescent se change en corps d’adulte, le mannequin se voit abandonné par la marque qui l’employait et commence alors à s’affamer pour continuer de plaire. « Les chartes ont eu beaucoup d’effets positifs, mais rien n’a changé sur la question du poids, regrette Cyril Brulé. Les mannequins qui ne travaillent pas se rendent bien compte que c’est souvent une question de poids. Une fois qu’ils ont perdu 10 kilos, ça marche mieux pour eux. Habituellement, on entend encore les marques nous dire : “Elle a trop de poitrine ou de fesses.” »
L’enthousiasme pour la maigreur est tenace, mais les espoirs sont permis : à une époque, les mannequins noirs ou asiatiques disposaient du mal à œuvrer, faute de requête. Actuellement, ils sont de plus en plus abondants. Et lors de la dernière fashion week de février 2019, 38,8 % des mannequins n’étaient pas blancs : c’est deux fois plus qu’en 2014.
Pour apprendre la manœuvre de départ à la retraite la plus ajustée, il est nécessaire de faire un calcul, mais aussi de prendre en compte son mode de vie
Depuis le début de l’année, la réforme des règles de retraite complémentaire a établi un système incitant tous les salariés à contribuer quatre trimestres de plus, sous peine de voir leur pension minimisée de 10 % pendant trois ans, jusqu’à 67 ans au maximum. Ce malus est d’autant plus punissant que le montant de la retraite supplémentaire est plus élevé.
En effet, pour les cadres supérieurs dont la retraite complémentaire est une quote-part importante de leurs droits, l’impact peut se révéler significatif. Pour connaître la manœuvre de départ à la retraite la plus ajustée, il convient d’effectuer un calcul, mais aussi de prendre en compte son mode de vie : projets, situation familiale, charges, revenus, etc.
La première stratégie possible admette à décaler d’un an son départ à la retraite pour éviter le malus. Ce dernier peut aussi être équilibré en cumulant emploi et retraite sur les trois premières années. Le salaire devient alors un accessoire de revenus, aucun nouveau droit à la retraite ne sera acquis.
Autre option, la liquidation atténuée de ses droits à la retraite autorise une activité partielle permettant la validation des trimestres additionnels essentiels à l’absence de malus.
D’autres éventualités présentent, mais toutes doivent faire l’objet d’une simulation.
L’intention du changement de l’ancien aéroport militaire de l’Essonne en une ferme bio de 75 hectares et de grands studios de réalisation de films se concrétise.
Au bout de la piste d’atterrissage de l’ancienne base aérienne de Brétigny (Essonne), la construction des blocs agricoles est édifiée au début de l’été, notification à la création d’une vaste ferme bio de 75 hectares unissant maraîchage, élevage et céréales. Un peu plus au Nord, à côté de la tour de contrôle retranchée, la carlingue d’un Airbus A300 espère l’équipe de tournage d’un « biopic » de Céline Dion, sur ce site appelé à devenir l’un des primordiaux lieux du cinéma en Ile-de-France : il a déjà obtenu, ces derniers mois, le tournage du film sur Vidocq avec Vincent Cassel, L’Empereur de Paris (2018), et du J’Accuse, de Roman Polanski.
Des légumes et des stars : c’est l’un des cocktails qui accordent corps à la réinsertion économique de l’ex-base aérienne 217, un des projets d’agencement les plus originaux de la région. La communauté d’agglomération Cœur d’Essonne a racheté à l’Etat en 2015, pour 1 euro symbolique, les 300 hectares de prairies traversées par une piste de 3 kilomètres et peuplées de bâtiments hétéroclites. Elle est en passe de survenir son pari de préserver l’identité de ce site mythique de l’histoire des essais aériens, tout en y faisant éclore une « ville économique » diversifiée, porteuse de quelque 10 000 emplois pour ce territoire relégué aux marges du Grand Paris.
C’est un peu l’anti-EuropaCity, ce mégacomplexe de commerces et de loisirs dont la construction sur 80 hectares de terres agricoles du Val-d’Oise fait face devant une vive opposition. Ici, pas de parc d’attractions ni de galerie marchande dans les champs, mais la détermination de créer un écosystème économique local, qui n’oublie ni la transition écologique ni la solidarité. « Le mot d’ordre, c’est de pouvoir “vivre et travailler au pays”, éviter les deux heures de transport par jour que subissent de nombreux habitants de l’agglomération », conclu Olivier Léonhardt, sénateur (divers gauche) de l’Essonne, à l’origine de cette transformation. Après les années d’études et de préfiguration, plusieurs ingrédients majeurs de la recette se mettent en place.
2 500 euros nets par mois
L’agriculture, d’abord. « Nous faisons le pari de développer de la nature et de l’agriculture sur une terre d’urbanisation, malgré la pression foncière », prétends Arnaud Trécour, le directeur de la société publique locale (SPL) chargée de piloter l’agencement de la base. Baptisée « Ferme de l’envol », la future exploitation, portée par l’association Fermes d’avenir, est lancée par quatre premiers profitants, qui seront bientôt rejoints par d’autres.
Plusieurs femmes enceintes trouvent des gênes à poursuivre leur activité. 45 % des femmes de moins de 40 ans consultées craignent de « travailler tout en étant enceinte », pourtant des entreprises arrivent à organiser un contexte adéquat. L’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail publie un guide des « bonnes pratiques » à l’intention des manageurs et des employés.
Après deux fausses couches de jeunes femmes œuvrant dans la grande distribution, le ministère du travail a missionné l’Agence nationale pour le perfectionnement des conditions de travail (Anact) en 2017, afin de conduire une enquête sur la situation des femmes enceintes dans ce secteur. Ses conclusions n’étonneront pas grand monde : l’agence pointe une « prise en compte insuffisante de lʼétat de ces salariées dans les entreprises » et ce, « au-delà du seul secteur de la grande distribution ».
Port de charges, attitude debout continuée, horaires fractionnés… autant de contraintes qui rendent le quotidien professionnel de la salariée pénible, tout en faisant planer des risques sur la grossesse. Selon un sondage réalisé en 2015 par Odoxa pour la Fondation PremUp, 45 % des femmes de moins de 40 ans interrogées craignent de « travailler tout en étant enceinte ». Du fait de la cadence de travail, l’appui du manageur et des collègues se révèle parfois limité. Des femmes enceintes auditionnées par l’Anact ont, par exemple, certifié devoir « se cacher en réserve » pour se reposer, par peur d’être mal vues.
Si la loi envisage des aménagements de postes nécessaires pour les femmes enceintes (interdiction du port de charges lourdes, mise à disposition d’un siège approprié, changement de poste si celui-ci n’est pas compatible avec la grossesse…), ces dispositions ne sont pas toujours simples à faire respecter : l’Anact donne l’exemple d’une responsable d’espace de vente qui s’est retrouvée à manier un solvant plusieurs fois par jour sans gant ou masque.
Option est difficile à mettre en œuvre
La convention collective dont elle dépendait lui admettait théoriquement de profiter de quinze minutes de pause additionnels par heure, mais elle a rencontré des difficultés à les prendre. Cette salariée a fini par s’arrêter à cinq mois de grossesse. Afin de se protéger, elles et leur bébé, beaucoup de futures mamans se voient ainsi contraintes de quitter de bonne heure leur travail. Parmi les trente-sept salariées interrogées dans le cadre de l’enquête de l’Anact, seules 10 % ont continué à travailler jusqu’à leur congé maternité, même si elles supportent une perte de rémunérations au bout de trois mois d’arrêt maladie.