Réforme des retraites : les répercussions du travail qui marquent surtout sur la santé des femmes
« Les femmes sont de plus en plus sujettes aux accidents de travail comme aux troubles musculo-squelettiques [TMS], auxquels elles sont d’ailleurs deux fois plus exposées que les hommes. En revanche, les cancers d’origine professionnelle restent souvent sous-évalués chez les femmes. » C’est en rappelant ces résultats de recherches menées sur les risques professionnels spécifiquement rencontrés par les femmes qu’Annick Billon (Union centriste), présidente de la délégation aux droits des femmes du Sénat, a ouvert la seconde table ronde organisée dans le cadre d’un rapport d’information sur la santé des femmes au travail, le 12 janvier.
En plein débat sur la réforme des retraites, la délégation se penche sur cette réalité encore mal appréhendée : les répercussions du travail (ou du non-travail) sur la santé des femmes. Tandis que les accidents du travail ont baissé de 27 % chez les hommes entre 2001 et 2019, ce taux a augmenté de 42 % chez les femmes sur la même période, selon une étude de l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact).
Entre méconnaissance des risques professionnels et répercussions d’une carrière hachée sur leur santé à long terme, les femmes rencontrent des difficultés spécifiques tout au long de leur carrière, ont rappelé deux chercheuses de l’Institut national d’études démographiques (INED) lors de cette table ronde.
Sous-évaluation des cancers
« Tandis qu’elles souffrent davantage d’usure physique et psychique, les hommes sont toujours plus exposés aux dangers visibles », a rappelé en introduction Emilie Counil. Cette chargée de recherche à l’INED et chercheuse associée à l’Institut de recherche interdisciplinaire s’est penchée sur « l’avertissement » que constitue la sous-évaluation des cancers en milieu professionnel chez les femmes.
S’appuyant sur une enquête menée durant une dizaine d’années sur plus d’un millier de patients atteints de cancers des voies respiratoires en Seine-Saint-Denis, la chercheuse note qu’une « proportion non négligeable des patientes avait été exposée, et même multi-exposée » à une « double combinaison d’agents biologiques et de polluants organiques dans des activités liées au soin et au nettoyage », où les femmes sont plus présentes. Du fait de la complexité à identifier ces sources d’expositions, renforcée par un parcours professionnel « plus haché », la chercheuse constate une « moindre reconnaissance des femmes ayant cherché à obtenir la reconnaissance de maladie professionnelle ».
Déjà présents chez les hommes, « les mécanismes de l’invisibilisation des liens entre cancer et travail », sont renforcés « par la moindre inclusion des types d’emplois occupés par les femmes et des femmes en général, dans les enquêtes épidémiologiques portant sur les liens entre travail et cancer » a ajouté Emilie Counil lors de son audition.
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