Archive dans 2023

Plongée dans les violences ordinaires en milieu académique

Dans les laboratoires de recherche, il est un mot qu’on ne s’attend pas forcément à trouver : « violence ». Le dernier numéro de la revue sociale, culturelle et politique Mouvements, daté du 15 mai, tente d’en démontrer, au contraire, l’omniprésence, par des témoignages mais aussi des enquêtes de terrain. L’ensemble, rédigé par des spécialistes (psychologues, sociologues…), est assez convaincant dès lors que le lecteur accepte une définition large du terme. Violence sexuelle, violence symbolique, violence des relations au travail, violence envers les animaux… sont autant de volets abordés dans cette publication, qui rattache ces constats aux transformations en cours dans l’enseignement supérieur et la recherche, marquées par la compétition, l’individualisme et un management gestionnaire.

Lire notre enquête : Article réservé à nos abonnés A l’Inria, un climat délétère s’est installé à tous les niveaux

Le volet le plus évident est celui des violences sexuelles et sexistes, dont on sait qu’elles n’épargnent pas le monde académique, comme toute organisation. Deux textes viennent rappeler la lente et difficile prise de conscience et des actions pour y mettre fin. Malgré de premières alertes dès 2002 dans le milieu universitaire, puis le mouvement Metoo, le déni et les résistances sont encore nombreux.

D’autres textes glissent ensuite vers les conditions de travail, les risques psychosociaux et les souffrances des personnels. Des auteurs montrent ainsi la pertinence de construire un observatoire sur ce sujet, afin de mêler action syndicale et méthode scientifique pour documenter les conséquences négatives des changements à l’œuvre, qui mettent les personnels sous pression, engendrent de la précarité ou tordent l’éthique même de la profession.

Un dernier texte enfonce le clou en s’inquiétant de ce que la mise en place de cellules consacrées aux risques psychosociaux n’aggrave, en réalité, la situation par une mise à l’écart des syndicats, une trop forte individualisation et une déresponsabilisation des directions.

Impératifs éthiques et de productivité

Plusieurs situations particulières illustrent concrètement ce que « violence » peut vouloir dire autour des paillasses. Il y a le récit d’une grève des employés de ménage, qui montre la violence cachée subie par ces prestataires. Ou celui d’employés d’animaleries qui se trouvent en tension entre des impératifs éthiques et de productivité ; sans compter la difficulté à saisir le sens de leur travail à cause de chercheurs peu enclins à expliquer les raisons du recours à ces animaux.

Des employés d’un éditeur académique témoignent de leur souffrance à gérer une surcharge de travail induite, a priori paradoxalement, par la numérisation de leur activité. Une nouvelle recrue décrit un stage de formation où elle se sent mal lorsqu’elle se rend compte que la priorité n’est pas ce qu’on dit mais comment on le dit. Elle s’avoue piégée par des dispositifs d’intégration « ludiques », loin de ses valeurs.

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Des matinales filmées de France Bleu et France 3 perturbées par un conflit social

Si les antennes de France Bleu fonctionnent normalement, voilà trois jours qu’il est impossible de regarder les matinales communes avec France 3 pour la moitié d’entre elles. A Lille, Bordeaux, Aix-en-Provence ou encore Paris, les visages de l’information locale ont été remplacés par des dessins animés, comme lors des jours fériés ou pendant les vacances scolaires. Seize locales étaient encore concernées jeudi 1er juin, alors que France Bleu Hérault et France Bleu Drôme-Ardèche pourraient se joindre au mouvement dans les prochains jours.

En cause, des salariés des radios locales publiques ont retiré leur droit à l’image pour dénoncer le statut précaire des confrères mettant en images les journaux radios. Ces derniers sont employés par un sous-traitant privé, la société de production Eden Press, dans le cadre d’un contrat à durée déterminée d’usage (CDDU) durant une saison. La direction d’Eden a annoncé début avril qu’elle ne comptait pas renouveler pour une saison supplémentaire le contrat d’éditeurs visuels ayant travaillé plus de trois ans d’affilée pour Radio France.

Quatre personnes termineront donc leurs contrats le 30 juin (seules trois sont concernées par la règle), dix autres à la fin de la saison 2023-2024. « C’est une forme de licenciement qui ne dit pas son nom », s’est insurgé le SNJ-CGT de Radio France dans un communiqué publié le 24 mai. « Eden Press craint surtout que ces journalistes ayant acquis de l’ancienneté ne revendiquent leurs droits », écrivait alors le syndicat.

Négociation pour prolonger (ou non) l’accord

Matthieu Darriet, cosecrétaire du SNJ à Radio France et journaliste à France Bleu Nord, est lui aussi révolté par cette situation. Il estime que l’entreprise publique doit utiliser « son statut de donneur d’ordre » pour inciter l’entreprise sous-traitante Eden Press à améliorer les conditions de travail de ses salariés et de laisser la possibilité à travailler plus longtemps s’ils le souhaitent. « Ce serait curieux que Radio France ferme les yeux sur les pratiques d’Eden alors que notre entreprise est dans une démarche de RSE [responsabilité sociale des entreprises] qui se veut exemplaire », estime M. Darriet.

Contacté, le président d’Eden Press, Grégoire Olivereau, n’a pas répondu à nos sollicitations. « Dans notre secteur, la règle limitant à trois ans les missions assurées par les collaborateurs en CDD d’usage s’applique partout, dans le privé comme dans le public », avait-il répondu mardi à l’Agence France-Presse. Cela « convient en général assez bien à la nature de nos activités, à leur saisonnalité et aux journalistes eux-mêmes », avait-il ajouté, rappelant que « plusieurs possibilités peuvent s’offrir » aux personnes concernées. « L’évolution vers un autre poste dans l’entreprise, encadrement des équipes détachées auprès de nos clients ou sur un autre programme dont Eden est en charge », avait-il encore insisté.

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« Le Travail et ses espaces » : une histoire des bureaux aux ambitions multiples

C’est un immeuble tertiaire dont les salles de travail ont des allures d’open space. Les bureaux des salariés fourmillent d’innovations, on peut y travailler comme à une table d’architecte. Le bien-être des employés a été réfléchi par le client et mis en musique par l’architecte Franck Lloyd Wright. Aux murs, des valeurs « corporate » sont gravées : « generosity », « imagination », « cooperation »… Baptisé Larkin Building, ce bâtiment a été édifié à Buffalo (New York) en… 1906.

Dans son ouvrage Le Travail et ses espaces, Jean-Pierre Bouchez, directeur de recherche à l’université de Paris-Saclay, nous propose une plongée dans l’histoire du travail et de ses espaces. Elle permet de découvrir, comme à Buffalo, des conceptions avant-gardistes qui ont fait date. C’est le cas des premiers bureaux non attribués de manière permanente et du concept de « non-territorialité », qui voient le jour dès les années 1970 à titre expérimental chez IBM. Lors de la conception de ce flex office avant l’heure, on s’interroge déjà sur les conséquences d’une telle organisation de l’espace sur la communication et la performance des équipes.

S’il souligne la précocité de certaines stratégies spatiales, l’ouvrage montre également combien elles sont le fruit d’une conjonction de facteurs. Elles progressent au rythme des innovations dans la construction comme dans les technologies de communication. Elles sont aussi et surtout portées par les visées managériales des entrepreneurs.

Les manageurs en première ligne

Ainsi le travail sur la luminosité peut être réalisé dans un but de contrôle social. M. Bouchez cite l’exemple d’un immeuble construit en 1886 dans le Nebraska : « En plus du toit vitré, les murs intérieurs autant qu’extérieurs sont ornés de grandes fenêtres. » Les occupants des bureaux fermés sont ainsi exposés en permanence au regard des autres. « Seuls les cadres supérieurs ont alors droit à un bureau autorisant une grande intimité, grâce à une source de lumière privée », précise-t-il.

L’histoire des lieux raconte des ambitions multiples, parfois difficiles à réaliser. L’ouvrage montre ainsi la complexité pour les flex offices de répondre à toutes les promesses qu’ils sont censés tenir. Les coûts immobiliers sont, certes, réduits, mais, dans le même temps, « l’accroissement des performances collaboratives des usagers » et « l’amélioration du confort et du bien-être au travail » sont « loin d’être démontré[s] », note l’auteur.

Lire aussi l’enquête : Article réservé à nos abonnés Le « flex office » bouleverse l’immobilier de bureau

L’ouvrage souligne ensuite que les évolutions récentes des bureaux placent les manageurs en première ligne. Les mutations à l’œuvre doivent être accompagnées. Dans les flex offices tout d’abord, où peuvent se renforcer l’« insécurité émotionnelle » des salariés et le sentiment qu’ils sont interchangeables. De même, « la collaboration ne se décrète pas », expose l’auteur, qui explique combien l’encadrement doit avoir un rôle moteur dans les espaces ouverts.

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La SNCF en surchauffe dans ses centres de maintenance

Dans la région Grand-Est, on les appelle les « TER Fluo ». La marque désigne des trains de proximité qui ont bientôt 20 ans. La moitié de leur vie. A cet âge canonique, les rames doivent être complètement rénovées pour repartir de plus belle et rouler les deux dernières décennies de leur existence. On les désosse, on les gratouille, on les répare, on les pare d’une nouvelle livrée, de nouveaux sièges et porte-bagages, avant de les remettre en service.

C’est l’une de ces rames que les élus de la région ont pu découvrir, vendredi 26 mai, au « technicentre » de la SNCF Voyageurs, à Bischheim (Bas-Rhin), près de Strasbourg, un site immense, étendu sur 23 hectares, dont 8 hectares couverts. Près de 900 agents et 70 alternants travaillent dans cette immense « clinique ferroviaire », comme la nomme son directeur, Alain Praxmarer.

Livrée bleu roi, rehaussée de lignes vert et orange fluo, sièges grisés et accoudoirs en bois, elle sent le neuf. Elle a surtout gagné quelques équipements indispensables : un vrai espace pour les fauteuils roulants, davantage d’emplacements pour les vélos, une prise électrique à chaque place, y compris lorsqu’on reste debout et des racks à bagages plus grands et plus accessibles. La Wi-Fi est renforcée et les caméras de vidéosurveillance permettent au service de sécurité de la SNCF d’avoir en permanence un œil sur ce qui se passe dans le train ou de détecter, avec l’intelligence artificielle, s’il reste des voyageurs à bord au terminus.

La vision externe est aussi améliorée : des caméras assistent le conducteur dans l’aide à la conduite d’un train de plus en plus connecté. Des capteurs permettent aux équipes de maintenance d’avoir une photo en temps réel de son état et de mieux anticiper les réparations. Coût de la remise en forme : 3 millions d’euros pour une rame, après trente-neuf semaines de travail pour roder le processus. C’est un tiers du prix du matériel neuf.

Un wagon de TGV rénové sort de la chaîne de montage, à Bischheim (Bas-Rhin), le 26 mai 2023.

Un enjeu énorme

Ce programme de rénovation des TER, dit OpTER, représente un enjeu énorme pour la SNCF. En 2020, toutes les régions, ainsi que les Chemins de fer luxembourgeois, lui ont confié leur flotte. Un contrat de 2,1 milliards d’euros, pour restaurer 931 rames acquises entre 2004 et 2011. « Il touche 40 % de la flotte de TER de douze régions. C’est sans précédent », explique Christophe Fanichet, PDG de la filiale SNCF Voyageurs, qui fait rouler les trains. Point important pour lui : ce programme était ouvert à la concurrence et les régions auraient pu confier aux constructeurs (Alstom-Bombardier ou CAF) la rénovation des rames. Elles ne l’ont pas fait.

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A New York, des bureaux largement dépeuplés en fin de semaine

Dans le quartier financier de Manhattan, à New York, le 26 janvier 2019.

« Vous ne pouvez pas rester en pyjama toute la journée ! » Pendant l’hiver 2022, le nouveau maire (démocrate) de New York, Eric Adams, avait invité les habitants à reprendre le chemin du bureau. « New-Yorkais, il est temps de retourner au travail. Vous ne pouvez pas me dire le lundi que vous avez peur du Covid-19, alors que je vous croise le dimanche dans une boîte de nuit. » A l’époque, beaucoup pensaient que la pression des employeurs et la remontée du chômage pour cause d’inflation allaient provoquer un retour à la normale. C’est raté. « Le retour au bureau a calé », titrait le Wall Street Journal, le 16 mai.

La part des entreprises américaines qui exigent de leurs employés de travailler à plein temps au bureau est retombée en trois mois de 49 % à 42 %. Selon le groupe de réflexion Working from Home, le pourcentage de salariés travaillant à distance au moins six heures par semaine a certes chuté de 61,5 %, au pic de la pandémie, à 28,4 % en avril, mais ce chiffre n’a rien à voir avec la situation qui prévalait jusqu’en 2020, où le travail de chez soi ne concernait que 4,6 % d’entre eux.

Insensiblement, ils prennent le chemin de la semaine de quatre jours, avec des locaux désertés le vendredi. Ainsi, à New York, en janvier, le taux d’occupation des bureaux était de plus de 60 % le mardi, mais dépassait à peine 25 % le vendredi.

Aides fiscales

Cette situation représente une catastrophe pour les activités de service urbain. D’après Working from Home, pour tout salarié qui travaille de chez lui au lieu de se rendre à Manhattan, 4 600 dollars (environ 4 250 euros) de chiffre d’affaires n’est pas réalisé. « Le comptable qui n’est pas dans son bureau ne va ni chez le teinturier ni au restaurant. Cela ne permet pas aux cuisiniers, aux serveurs, aux laveurs de vaisselle [de gagner leur vie] », a accusé M. Adams.

Le maire a mis en place des aides fiscales pour la rénovation des bureaux construits avant l’an 2000. « Tout bureau vide signifie moins de financement pour tout, qu’il s’agisse des écoles ou des logements à loyer modéré. » Par définition, le travail à distance concerne les « travailleurs sur ordinateur », dans la tech, la banque et le conseil, et très peu les salariés du bas de l’échelle salariale, dans l’hôtellerie, les loisirs et le commerce de détail. C’est aussi un drame pour la mairie : un tiers de son budget est alimenté par la taxe foncière (31 milliards de dollars par an), dont 40 % proviennent de l’immobilier commercial ou de bureau.

Le taux d’occupation des bureaux dans les dix plus grandes villes américaines reste proche de 50 % depuis des semaines, au dire de Kastle Systems, une société de sécurité qui surveille les lectures de cartes d’accès. Les entreprises ont alterné le bâton et la carotte pour attirer leurs salariés. Selon le Wall Street Journal, le cabinet d’avocats Davis Polk & Wardwell LLP a menacé de réduire le bonus des employés qui n’étaient pas présents trois jours par semaine. En avril, la banque d’affaires J.P. Morgan a exigé une présence de cinq jours par semaine. Quant à Meta, la firme de Mark Zuckerberg, elle a indiqué ne plus vouloir recruter de personnes complètement à distance, laissant qu’elle finirait par exiger un retour au bureau.

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« Les discriminations ont une incidence négative sur les performances globales de l’économie »

Depuis plus de vingt ans, le sujet des discriminations est au cœur des débats de société et de nombreux travaux se sont penchés sur cette question. La notion de discrimination telle qu’appréhendée par la science économique repose sur la présence d’une inégalité de traitement entre un groupe et un autre, non motivées par des différences de performance. À titre illustratif, à conditions d’emploi identiques et à niveau de productivité équivalente, si les hommes perçoivent une rémunération supérieure à celle des femmes, on considère donc qu’il y a bel et bien une discrimination.

Au-delà même de toute dimension éthique, ces discriminations ont une incidence négative sur les performances globales de l’économie, et, ne serait-ce que pour cette raison, il convient de réfléchir aux voies et moyens susceptibles de les réduire. En 2019-2020, 18 % des personnes de 18-49 ans déclaraient avoir subi « des traitements inégalitaires ou des discriminations », contre 14 % en 2008-2009 (Insee Première n° 1911, juillet 2022).

Cette évolution se double en outre de deux autres constats : pour les femmes, le motif sexiste est devenu la principale source de discrimination, devant les origines ; pour les hommes, l’origine est le principal motif de discrimination ressentie (58 % des cas, et notamment pour les personnes ayant une relation à l’immigration puisque 22 % des immigrés et 20 % des descendants d’immigré sont concernés). Pour les personnes qui se disent musulmanes, les motifs de discrimination se déplacent de l’origine vers la religion.

Lutter contre la discrimination permet d’augmenter le PIB

De façon générale, les discriminations freinent et obstruent l’insertion sur le marché du travail de catégories de population en âge de travailler (celles qui sont discriminées). En effet, en excluant certaines personnes du marché du marché du travail, la présence de ces discriminations a pour corollaire une contraction de la population active, laquelle peut par ailleurs susciter une hausse du coût du travail (en raison de la baisse de l’offre).

Outre cette baisse de la population active, les discriminations tendent à occasionner une allocation non optimale des compétences dans l’économie, ce qui revient à se priver d’individus à fort potentiel. Ainsi, selon les scenarii étudiés par France Stratégie en 2016, une réduction des discriminations permettrait un gain de PIB oscillant entre 3.6 et 14 % !

Les cinq leviers contre les discriminations

Dans ce contexte, afin de limiter les effets de ce fléau économique et éthique, cinq leviers pourraient utilement être actionnés par les pouvoirs publics :

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Après la réforme des retraites, des entreprises pionnières organisent le maintien en emploi des seniors

Le recul de l’âge de la retraite implique que les entreprises gardent leurs salariés seniors en activité plus longtemps. « C’est à l’entreprise d’adapter son organisation du travail pour accompagner ses salariés expérimentés jusqu’à la fin de leur carrière. C’est une question de bon sens », estime Stéphane Dubois, directeur des responsabilités humaines et sociétales de Safran. Le 11 avril, le motoriste aéronautique et spatial, qui compte 43 200 salariés en France, dont 13 500 âgés de plus de 50 ans, a conclu avec l’ensemble des organisations syndicales du groupe (CFDT, CFE-CGC, CGT, FO) un accord pour renforcer l’emploi de ses « salariés expérimentés », terme préféré à celui de « seniors », jugé galvaudé.

Parmi les mesures prises, le temps partiel aidé pour pouvoir travailler plus longtemps – « un engagement fort de l’entreprise, car sa mise en œuvre est complexe, notamment dans les usines », tient à préciser Stéphane Dubois –, et la possibilité de se reconvertir à partir de 50 ans pour les salariés exposés à des facteurs de risque. Ces reconversions sont accompagnées sur cinq ans et construites avec le salarié demandeur. Les situations individuelles sont appréciées au cas par cas, notamment par la médecine du travail. Enfin, afin d’éviter l’obsolescence des compétences, Safran promet un effort sur la formation continue pour ces salariés.

Le groupe de protection sociale Apicil, dont 18 % des salariés ont plus de 55 ans, va mettre en place un abondement du compte épargne-temps (CET) de 30 % permettant de diminuer l’activité, tout en maintenant le salaire et les cotisations à taux plein. Le Groupe ADP, qui compte 2 100 collaborateurs en France, dont 400 âgés de plus de 55 ans, a signé un accord de gestion des emplois et des parcours professionnels (GEPP) en avril 2022. « Il s’agit de proposer, notamment, un accès au temps partiel pour les 55 ans et plus, avec le maintien à 100 % des cotisations retraite, ainsi qu’un accompagnement individuel pour les 60 ans et plus, avec un bilan de prévention médico-social », détaille Elodie Gourmellet, DRH de Groupe ADP en France et en Suisse.

« Lever les a priori »

Mais de tels accords consacrés aux salariés âgés ou des accords de GEPP incluant un volet seniors sont encore rares. « Les entreprises ne s’emparent pas tellement du sujet et beaucoup de mesures concernent encore une transition en douceur vers la retraite, constate Samuel Pasquier, expert au cabinet Syndex, spécialisé dans l’accompagnement des représentants des salariés et des organisations syndicales. Il est vrai que le sujet est un peu frais, et que la pratique des entreprises ne suit pas forcément les discours. Il faut rappeler que longtemps, le consensus entre les employeurs et leurs salariés âgés était de les faire partir plus vite. Aujourd’hui encore, ils restent confrontés à un plafond de verre : rémunération, accès à la formation… »

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Un salarié sur deux a été en arrêt maladie en 2022

Carnet de bureau. Médecins traitants et médecins du travail sont bien d’accord, l’absentéisme se porte bien. Non pas à cause de l’arrivée des beaux jours, mais bien pour maladie. La moitié des salariés du privé se sont arrêtés au moins une fois en 2022, révèle le Baromètre annuel Malakoff Humanis à paraître dans les prochains jours. C’est une première depuis que le mutualiste a commencé à interroger les entreprises sur la santé au travail en 2016.

Fin mai, un autre professionnel de la prévention, Axa, publiait un Datascope sur le sujet. Après avoir pris le pouls de 3 millions de salariés, le résultat est tombé : 44 % d’entre eux se sont arrêtés au moins une fois en 2022. La moitié de la France serait-elle malade ?

Les premiers touchés sont les jeunes et les cadres, deux catégories de salariés dont le taux d’absentéisme habituellement très bas a fortement augmenté entre 2019 et 2022, de plus de 50 % chez les moins de 30 ans et de plus de 40 % chez les manageurs, selon Axa. Diagnostic aussi alarmant chez Malakoff Humanis : les médecins auraient prescrit un arrêt de travail à 58 % des 18-34 ans, et à 53 % des manageurs en un an.

Davantage d’arrêts courts et une envolée des absences multiples s’expliqueraient par le passage d’Omicron, qui a fait beaucoup de malades au premier trimestre 2022 et le désengagement professionnel. « L’absentéisme est d’autant plus fort que les salariés sont moins engagés dans leur travail », relève le baromètre de Malakoff Humanis, qui a croisé les indicateurs d’engagement au travail avec le taux de prescription d’arrêts maladie.

Une durée moyenne en hausse

Les affections psychologiques, toujours devant les troubles musculosquelettiques, sont la première cause des arrêts longs, de plus en plus longs. La durée moyenne est passée de 97 à 111 jours. Le directeur des affaires sociales de Bayer France, Jean-François Véry, a ainsi confié à Axa qu’un tiers de leurs arrêts de longue durée « sont liés à des difficultés d’ordre psychologique ». « Nous avons besoin de bâtir quelques indicateurs précis pour mesurer (…) en particulier l’absentéisme répété de courte durée. C’est, en effet, souvent un signe précurseur d’arrêts de travail plus longs. »

Selon Axa, le coût direct pour les entreprises de tous ces problèmes de santé s’élève à 4,4 % de la masse salariale en 2022, contre 3, 9 % en 2021 en pleine épidémie de Covid-19. « Un poids financier qui ne tient compte ni de la perte de productivité ni de la désorganisation des équipes », précise le Datascope.

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Pénuries de saisonniers : le gouvernement présente des mesures centrées sur le logement et la formation

« Les clients sont là mais on manque de main d’oeuvre. » Partout la même complainte. Alors que les métiers de l’hôtellerie-restauration figurent parmi ceux les plus en tension, les ministres du travail, Olivier Dussopt et son homologue au tourisme, Olivia Grégoire, ont détaillé, ce mardi 30 mai, lors d’un point presse les premières mesures visant à faciliter le recrutement de saisonniers.

«  En 2022 déjà sur les 150 000 postes de saisonniers nécessaires, seule la moitié a été pourvue », rappellent les cabinets des deux ministères pour justifier ce plan, ajoutant que « leurs recrutements avaient alors baissé de 30 % ». « L’an dernier, 59 % des hôtels et restaurants avaient effectivement dû freiner leur activité durant l’été faute de saisonniers », souligne Vincent Sitz, président de la commission emploi formation du Groupement des hôtelleries et restauration de France. Pour 2023, Il chiffre à 30 000, voire 40 000, le nombre d’emplois supplémentaires à pourvoir par rapport à l’an dernier.

Subvention de 10 millions d’euros aux entreprises

En guise de réponse, le gouvernement s’appuie sur un plan évolutif sur trois ans portant à la fois sur la formation, l’accompagnement et l’aide au logement de ces saisonniers. Sur le premier volet, l’objectif est de promouvoir, dans le cadre de Pôle emploi, des formations courtes – 35 à 150 heures – par exemple sur les connaissances basiques dans la restauration, et ce en vue d’élargir le vivier de personnes à recruter. Une augmentation du budget formation est prévue par le biais d’une subvention supplémentaire de 10 millions d’euros aux entreprises (dans le cadre du plan FNE-Formation) pour répondre aux besoins les plus critiques.

Pôle emploi sera également sollicité avec les employeurs en vue d’accompagner les saisonniers une fois leur saison terminée afin de les orienter de manière systématique vers des formations et des emplois. « Plus de la moitié des saisonniers ne travaillent pas en intersaison et vivent d’assurance chômage ou de rien », ajoute-t-on au sein des ministères, qui prévoient de mener l’expérience sur une quinzaine de sites dans sept régions du littoral français.

Dans un contexte d’augmentation des loyers, le logement reste l’un des enjeux les plus centraux pour attirer les saisonniers. Pour parer à ces difficultés, le gouvernement envisage donc de lancer en juin une plate-forme numérique visant à rassembler l’ensemble des offres de location disponibles dans les parcs publics, associatifs et sociaux. Il mobilisera par ailleurs, dès cet été, 2000 logements universitaires et issus d’internat scolaire. Un chiffre relativement faible, comme le concède l’entourage des ministres, en raison de la réticence de certains directeurs d’établissements à louer ces logements faute de personnel disponible l’été. « L’idée est de partir avec ceux qui sont d’accord et de voir si, à terme, nous pouvons aller au-delà de 6 000 logements, ce qui à notre sens constituera le potentiel d’ici 2025 », rétorque-t-on au sein des cabinets ministériels.

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Un millier de grévistes à Disneyland Paris pour obtenir des hausses de salaire

Un millier de salariés de différents métiers du parc Disneyland Paris ont fait grève, mardi 30 mai, pour réclamer notamment une augmentation de salaire. Face à l’inflation, les grévistes demandent « 200 euros d’augmentation de salaire, le travail du dimanche payé double, la revalorisation des indemnités kilométriques et l’arrêt des horaires adaptés choisis ».

Soutenus par la CGT, l’UNSA ou la CNT-SO, « au moins 1 000 salariés de tous les corps de métiers, comme le spectacle, la maintenance ou la sécurité ont débrayé mardi matin », a précisé le secrétaire général de la CGT Disney, Fabien Beiersdorff. La direction a quant à elle dénombré « 954 » grévistes sur 17 000 employés.

Lire le reportage : Article réservé à nos abonnés A Disneyland Paris, un anniversaire pour solder la crise

Plusieurs spectacles perturbés

Plusieurs spectacles ainsi que la parade ont été perturbés, selon la CGT. « La balle est dans le camp de la direction car les salariés envisagent une nouvelle journée d’action samedi », assure M. Beiersdorff.

Après un mouvement de grève la semaine dernière, la direction avait reçu vendredi les organisations syndicales en leur proposant « le versement d’une prime de 125 euros, la possibilité de monétiser les jours de repos ainsi que les heures supplémentaires et la mensualisation d’une partie du 13e mois », a expliqué un porte-parole de Disneyland Paris. Entre 2022 et 2023, « il y a eu une augmentation de salaire de 9 % pour 82 % des salariés », a ajouté la direction.

Le Monde avec AFP

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