En Sologne, une école forme à l’usinage grâce aux commandes des PME locales
« Au lycée général, j’avais peur de la foule et le lycée pro n’a pas voulu de moi, soupire Emeline (les élèves ont souhaité garder l’anonymat), 16 ans. Quand j’ai annoncé à mes profs que je rejoignais l’école de production de Salbris, ils m’ont dit que je n’allais pas tenir le coup. Heureusement, mes parents étaient à fond derrière moi. » Cette fille d’un ouvrier à la carrière de gravier de Brinon-sur-Sauldre (Cher) et d’une tailleuse de verres à l’usine de lunettes de Nouan-le-Fuzelier (Loir-et-Cher) vient tout juste de terminer une petite série de pièces d’acier commandée par un fabricant de portes de train installé à Contres (Loir-et-Cher), à une cinquantaine de kilomètres.
Face à des machines imposantes, une vingtaine d’ados solognots de 14 à 17 ans, décrocheurs scolaires pour la majorité, se forment à des postes de technicien d’usinage moyennant vingt heures de production par semaine, soit 70 % de leur emploi du temps. Les 30 % restant servent à l’enseignement des matières générales, adaptées aux réalités de l’atelier (mathématiques et lecture de plan, par exemple).
La formation coûte 50 euros par mois. Une boîte à outils et un uniforme sont offerts à l’entrée. Les élèves ont vocation, une fois diplômés, à rejoindre les PME de mécanique du bassin d’emploi.
Car ici, les entreprises participent à la gouvernance de cet établissement hors contrat et à son financement : si l’école bénéficie de subventions de la région Centre-Val de Loire et du département, du programme France Relance, de dons de fondations comme celle de Total Energie, elle vit aussi grâce aux « vraies » commandes passées aux élèves par des sous-traitants de l’automobile, du ferroviaire, de l’aéronautique… et bientôt de l’armement.
Une lueur
Le missilier MBDA est à 15 kilomètres : « Des contacts ont été pris avec ses sous-traitants pour des commandes possibles », indique Dominique Gardy, président de l’association qui a porté le projet d’école à Salbris et également président de la Fédération nationale des écoles de production. Le pays en compte 56 actuellement, 14 écoles supplémentaires ouvriront à la rentrée de septembre.
Lancée en septembre 2021, l’école de Salbris s’est construite sur les ruines d’une grande histoire industrielle. Au tournant des années 2000, Salbris se retrouve brutalement sinistrée. Le fabricant de munitions Giat ferme en 1999 et supprime 1 200 emplois. Celui de composants pour missiles Matra se retire deux plus tard et en liquide 400.
De plus en plus d’entreprises se lancent dans la création d’écoles pour se constituer un vivier de travailleurs sur mesure
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