Archive dans octobre 2023

Les arrêts de travail en téléconsultation sont désormais sous surveillance

La téléconsultation, propice aux arrêts de travail abusifs ? C’est ce qui ressort en filigrane du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2024 présenté le 27 septembre en conseil des ministres et qui prévoit de limiter à trois jours les arrêts de travail prescrits en téléconsultation, sauf quand ils le sont par le médecin traitant. Le projet exige aussi de recourir à un échange vidéo ou téléphonique et non simplement au tchat ou aux SMS pour délivrer un arrêt.

Officiellement, il s’agit d’une mesure de santé publique visant à garantir la qualité des soins. Mais, à en juger par de récentes déclarations du ministre de l’économie, Bruno Le Maire, et de responsables de la Caisse nationale d’arrêt maladie (CNAM), cette mesure vise aussi à endiguer la forte augmentation du nombre d’arrêts maladie (+ 7,9 % en 2022) qui s’obtiendraient plus facilement par téléconsultation.

Soit parce que des salariés multiplient les rendez-vous sur les plates-formes jusqu’à tomber sur un praticien complaisant ou crédule. Soit parce que le médecin, disposant de moins d’éléments pour établir son diagnostic, accorde par sécurité plus facilement un arrêt au patient en distanciel qui se plaint d’être malade.

Le contrôle de plates-formes de téléconsultation

Le Medef se dit bien sûr favorable à un « meilleur encadrement du dispositif d’arrêt maladie via la téléconsultation ». Agnès Giannotti, présidente du syndicat de médecins généralistes MG France, se félicite pour sa part que « les autorités prennent enfin conscience de la nécessité de mettre des garde-fous face à l’essor des plates-formes de téléconsultation ».

Mais Jocelyne Cabanal, secrétaire nationale chargée des questions de santé à la CFDT, est plus critique. Elle considère que cette mesure « stigmatise les salariés alors même que l’accès à un médecin traitant peut être compliqué. Mieux vaut renforcer le contrôle des plates-formes de téléconsultation ».

Medadom, Livi ou Qare, c’est le nom des plates-formes qui ont pris les devants sur ce point. Sur Livi, un patient obtient au mieux cinq jours d’arrêt maladie à la suite d’une téléconsultation. La réduction de ce délai ne gêne pas la plate-forme sachant que « 90 % des arrêts délivrés sont déjà inférieurs ou égaux à trois jours », précise son directeur médical Nicolas Leblanc.

Medadom se targue d’appliquer la règle des trois jours d’arrêt maximum depuis 2019. Cette disposition a été inscrite dans sa charte médicale au même titre que l’interdiction faite au patient de solliciter deux rendez-vous le même jour sur la plate-forme. « On a pris position sur différents sujets sensibles pour parer à toute polémique », explique le cofondateur de Medadom, Nathaniel Bern.

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Vincent Valinducq, médecin : « Personne n’aurait imaginé que mon premier patient serait ma mère »

« J’avais 20 ans » : « Le Monde » interroge une personnalité sur ses années d’études et son passage à l’âge adulte. Ce mois-ci, Vincent Valinducq, également chroniqueur de l’émission « Télématin », sur France 2, revient sur son parcours singulier, commencé comme docker, et sur ses quatorze années d’aidant de sa mère dépendante.

Intelligence artificielle : le gouvernement lance une expérimentation dans la fonction publique

Stanislas Guerini, ministre de la transformation et de la fonction publiques, le 27 septembre 2023, dans la cour du Palais de l’Elysée, à Paris.

Le gouvernement a officiellement lancé une expérimentation de l’intelligence artificielle (IA), jeudi 5 octobre, consistant à mettre cette technologie à disposition d’agents publics pour améliorer le service rendu aux usagers. L’opération, présentée le jour même par le ministre de la transformation et de la fonction publiques, Stanislas Guerini, lors d’une table ronde à Paris avec des chercheurs et des experts de l’IA, vise à permettre à l’administration d’alléger la charge de travail des agents, afin qu’ils puissent consacrer plus de temps à l’accompagnement des Français qui en ont le plus besoin, que ce soit au téléphone ou au guichet. « L’erreur » consisterait à « opposer la numérisation des services publics à l’humanisation », plaide Stanislas Guerini.

L’intelligence artificielle est déjà là, souligne-t-il, utilisée dans les entreprises comme dans l’administration (notamment pour lutter contre la fraude fiscale). « Soit on se met la tête dans le sable, soit on essaie de mettre cette technologie au service de l’humain et des agents », expose le ministre en rappelant qu’il s’agit là d’« une rupture technologique très profonde, peut-être anthropologique ».

Concrètement, 3 500 agents sont aujourd’hui chargés de répondre, par le biais du site Internet intitulé « Services Publics + », aux questions des Français sur leur expérience avec l’administration. Un millier de ces fonctionnaires se sont portés volontaires dans neuf réseaux (Caisse nationale d’assurance-vieillesse, Caisse nationale d’Assurance-maladie, trois préfectures, etc.) pour tester un outil d’intelligence artificielle qui les accompagnera dans la rédaction de leurs réponses aux usagers. Dans tous les cas, assure le ministère, c’est l’agent qui a le dernier mot : c’est lui qui évalue la réponse proposée par la machine, et qui l’envoie.

Pour M. Guerini, l’utilisation de l’IA peut être un moyen de convaincre les usagers les plus éloignés des services publics que l’Etat ne les abandonne pas. « Il faut que ces outils apportent des solutions aux “gilets jaunes” », assure le ministre, pour qui ces derniers doivent être « les VIP du service public, parce que c’est pour eux qu’il est le plus important ». C’est tout l’enjeu de cette expérimentation : voir si cette technologie peut aider les citoyens à effectuer leurs démarches administratives et obtenir une solution à leurs problèmes.

Cinq cents postes en 2024

Pour les Français qui ont le plus de difficultés, dans leur vie personnelle mais aussi dans leur rapport aux services publics, l’intelligence artificielle peut présenter un autre atout. « C’est une technologie très facile à utiliser, et elle représente donc une chance de réduire le fossé numérique », a relevé Laurent Daudet, président et cofondateur de l’entreprise LightOn, spécialisée dans ce domaine, lors du lancement de l’expérimentation, jeudi, au ministère de la transformation et de la fonction publiques. Une étude de l’Insee, publiée en juin, montre que 15 % de la population ne dispose pas des compétences numériques de base ou ne se sert pas d’Internet.

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En redressement judiciaire, la Maison de la literie aiguise les appétits

Vue du rayon literie du magasin Conforama, à proximité de la Samaritaine, le 27 septembre 2005, sur les quais de la Seine, à Paris. AFP PHOTO JACK GUEZ (Photo by JACK GUEZ/AFP)

Les salariés de l’enseigne Maison de la literie parviendront-ils à retrouver des nuits paisibles ? Jeudi 5 octobre, huit candidats au rachat de sa maison mère, le groupe IFP (lnternationale de franchise et de participation) en redressement judiciaire, présentaient leur offre auprès du tribunal de commerce de Chalon-sur-Saône (Saône-et-Loire).

Un « grand oral » portant sur la reprise des 301 magasins, dont 35 détenus en propre, exploités sous diverses enseignes (Maison de la literie, Univers du sommeil, Tousalon, Mobeco, Place de la literie…), ainsi que sur ses deux usines de fabrication en France, situées à Autun, en Saône-et-Loire, et à Confolens, en Charente. En tout, 203 salariés, dont 37 au siège et 84 dans la production.

Si les candidats se pressent, c’est que le marché est porteur. Le secteur de la literie a progressé de 3,6 % en valeur au cours des huit premiers mois de l’année, d’après l’IPEA (l’Institut de prospective et d’études de l’ameublement), lorsque celui du meuble recule de 0,5 %. Et, en 2022, les ventes de sommiers et matelas avaient à peine reculé de 1 % sur un an, à 1,8 milliard d’euros, dont un tiers du marché réalisé par les enseignes spécialisées. De plus, le segment du moyen-haut de gamme fabriqué en France, sur lequel est positionnée l’entreprise, séduit les consommateurs et évite les surcoûts liés à l’importation.

Erreurs de gestion

Comment dès lors expliquer la chute de la Maison de la literie ? Par des erreurs de pilotage et un enchevêtrement d’une myriade de sociétés, qui ont conduit l’entreprise à accumuler des pertes au fil des ans. Charges trop élevées supportées par le siège, mauvaise gestion opérationnelle des succursales qui tombent dans le rouge… Certains magasins en propre perdent entre 200 000 et 300 000 euros par an. Pour les renflouer, le groupe puise dans les redevances de ses 266 franchisés, dont l’activité se tient bien et gonfle leurs frais de gestion. Les usines, enfin, n’ont pas les moyens d’investir dans la modernisation de leur outil de production, une part importante de leurs bénéfices étant aspirés par les entités de distribution et le siège.

Il faut remonter le fil de l’histoire pour comprendre comment l’entreprise en est arrivée là. En 1980, Pierre Elmalek fonde la Maison de la literie, puis devient PDG d’IFP lors de sa création, en 1994. Il s’associe, en 2012, avec le groupe belge Veldeman, qui apporte son outil industriel contre 50 % du capital d’IFP. Sur le papier, le modèle est vertueux, avec des magasins qui se fournissent exclusivement auprès des usines du groupe. Mais les dettes commencent vite à s’accumuler. Hors de question pour M. Elmalek de fermer des magasins intégrés même s’ils sont déficitaires et, en 2015, Veldeman prend la majorité du capital pour assurer la continuité de la branche distribution.

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Casino annonce avoir signé un accord contraignant pour la restructuration de sa dette

Un supermarché Casino à Laventie, dans le nord de la France, le 12 juin 2023.

Le distributeur en difficultés financières Casino a, comme attendu, conclu un accord contraignant pour la restructuration de sa dette avec ses principaux créanciers, dans la continuité de l’accord de principe trouvé fin juillet, a-t-il annoncé jeudi 5 octobre dans un communiqué.

Casino, 200 000 salariés dans le monde dont 50 000 en France, était étranglé par une dette de 6,4 milliards d’euros à la fin de 2022, mais sa restructuration est permise par une offre de reprise émanant du milliardaire tchèque Daniel Kretinsky, du Français Marc Ladreit de Lacharrière et du fonds britannique Attestor. La restructuration est attendue au premier trimestre 2024.

Cet accord prévoit d’une part l’apport de 1,2 milliard d’euros d’argent frais par ces candidats à la reprise, d’autre part que la dette de Casino soit réduite de près de 5 milliards d’euros et que les activités de Casino en Amérique latine, pour laquelle travaillent les trois quarts des quelque 200 000 salariés du groupe, soient cédées.

Lire le décryptage : Article réservé à nos abonnés Les défis de Daniel Kretinsky, nouveau maître de Casino

Placement en sauvegarde accélérée

Le groupe a déclaré dans un communiqué avoir « conclu un accord de lock-up relatif à sa restructuration financière », avec le consortium de repreneurs et avec « des créanciers détenant économiquement 75 % du Term Loan B1, des principaux groupes bancaires commerciaux et certains des créanciers susvisés détenant économiquement 92 % du revolving credit facility (RCF), ainsi que des porteurs des obligations émises par Quatrim représentant 58 % de ces obligations ».

Il s’agit en d’autres termes des créanciers dits sécurisés du groupe. Pour les créanciers non sécurisés, Casino explique « poursuivre ses discussions » afin « d’obtenir leur adhésion à celui-ci ».

Casino devra ensuite demander son placement en sauvegarde accélérée, un processus au terme duquel les créanciers récalcitrants seront embarqués « de manière contrainte s’il le faut » puisque la loi le prévoit, relevaient plusieurs sources fin juillet au moment de la signature de l’accord de principe.

La procédure amiable de conciliation dans laquelle se tiennent les discussions sur la dette de Casino court jusqu’au 25 octobre et Casino prévoit la réalisation de la restructuration de sa dette au premier trimestre 2024.

Le Monde avec AFP

Karen Messing : « Le milieu du travail a été conçu en fonction du corps des hommes »

A l’occasion du Prix « Penser le travail » 2023, organisé par Sciences Po et Le Monde, et qui sera décerné le 25 octobre 2023, Le Monde publie les entretiens avec les auteurs des trois ouvrages finalistes : Le deuxième corps de Karen Messing, Le travail pressé de Corinne Gaudart et Serge Volkoff et Le soin des choses de Jérôme Denis et David Pontille.

Dans Le deuxième corps, la généticienne et ergonome canadienne Karen Messing explore les conséquences des différences biologiques entre les femmes et les hommes sur leurs conditions de travail. L’ouvrage se fonde sur un grand nombre d’études de terrain, réalisées sur plusieurs décennies dans des entreprises nord-américaines de secteurs différents : usine de transformation de volaille, centre d’appels, maison d’hébergement de femmes victimes de violences conjugales…

Pourquoi votre réflexion s’est-elle concentrée sur le corps féminin au travail, et pourquoi le qualifier de « deuxième corps » ?

Aujourd’hui, beaucoup de chercheurs se concentrent sur le genre, c’est-à-dire les normes sociales qui guident le comportement des femmes et hommes dans la société. Je me suis dit qu’il fallait que j’explore clairement ces différences biologiques. Chronologiquement, nous sommes le deuxième corps à être arrivé dans la plupart des emplois. Ce qui explique que dans bien des cas, le milieu du travail a été conçu en fonction du corps des hommes. Par exemple, les claviers d’ordinateur, au début, étaient un outil masculin…

Et aujourd’hui encore, de nombreux claviers ne sont pas appropriés pour les mains des femmes qui sont plus petites en moyenne. Bien évidemment, chez les hommes et femmes, il y a une énorme variation dans les paramètres biologiques : quand on parle de manque d’adaptation, on parle aussi des hommes plus petits. Il faut que tous les milieux s’adaptent à toutes les personnes qui travaillent.

Tout au long de l’ouvrage, vous insistez sur la difficulté des femmes à faire remonter les inégalités qu’elles subissent. Pourquoi ?

Souvent, les femmes ne veulent pas être identifiées comme femmes. Surtout dans les environnements majoritairement masculins où elles sont dénigrées, car elles ont peur de l’être encore plus. Pourtant, nos études montrent qu’il est très satisfaisant de partager nos craintes, nos mauvaises expériences notamment de harcèlement sexuel, pour comprendre les mécaniques à l’œuvre.

En France comme au Québec, les milieux ne sont pas adaptés à l’arrivée massive de femmes : elles ont pourtant beaucoup plus de troubles musculo-squelettiques, notamment. Pendant longtemps, elles se sont fait dire « c’est la ménopause » quand elles se plaignaient, mais on commence à se rendre compte que quand on fait beaucoup de petits mouvements répétitifs, ce qui est plus souvent le cas des femmes, il y a un coût physiologique à la longue.

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« Le Quotidien de La Réunion », placé en liquidation judiciaire, cherche un repreneur

Devant « Le Quotidien de La Réunion », en décembre 2020.

L’île de La Réunion va-t-elle conserver ses deux quotidiens ? Pour l’instant, oui, mais difficile de se prononcer sur le temps long. Après France-Antilles, Les Nouvelles calédoniennes et La Dépêche de Tahiti, deux titres supplémentaires de la presse ultramarine sont en difficulté. Le tribunal de commerce de Saint-Denis a validé, mercredi 4 octobre, le placement en liquidation-cession du Quotidien de La Réunion. Cette procédure se fera avec poursuite d’activité sur une période de trois mois, afin de trouver un repreneur, conformément à la demande de Carole Chane-Ki-Chune, présidente du groupe. Mais le calendrier de reprise apparaît très serré, la date limite de dépôt des offres étant fixée au 15 novembre.

« On pensait que le scénario de reprise était déjà ficelé, mais on se rend compte qu’il n’y a rien de bouclé avec un potentiel nouvel actionnaire, ni en local ni d’un point de vue national », analyse l’un des journalistes du titre réunionnais, qui souhaite rester anonyme. Les paies des 53 salariés, qui n’ont pas été honorées depuis début septembre, restent l’urgence à gérer, selon Edouard Marchal, du SNJ. Il espère que le régime de garantie des salaires puisse honorer les paies d’ici au 11 octobre.

« Un coup de canif dans la démocratie »

Fragilisé depuis la crise sanitaire du Covid-19, Le Quotidien de La Réunion était sorti de redressement judiciaire en décembre 2021 avec un plan de remboursement de ses dettes sur une durée de dix ans. « Ce plan, qui s’était traduit par vingt-quatre suppressions de postes, était intenable », déplore M. Marchal. L’érosion des ventes en kiosque – divisées par trois en l’espace de vingt ans –, le recul du marché publicitaire, causé par la guerre en Ukraine, et l’inflation bien plus importante qu’en métropole ont encore amplifié les déboires financiers du titre, fondé en 1976.

Son concurrent direct, Le Journal de l’île de La Réunion (JIR), est, lui aussi, en difficulté. « Aujourd’hui, j’arrive à peine à m’en sortir, mais je veux tenir », explique Jacques Tillier, le PDG du quotidien, tablant sur des rentrées liées à la diversification, notamment en organisant des salons. Alors que les Etats généraux de l’information se sont ouverts mardi 3 octobre, « il est temps que l’Etat considère les soucis spécifiques des titres ultramarins, comme la moindre publicité publique », souligne M. Tillier. Selon lui, l’aide au pluralisme des titres ultramarins, qui a soutenu onze publications en 2022, avec une enveloppe de 2 millions d’euros, est aujourd’hui insuffisante. « Si Le Quotidien ou Le JIR venait à disparaître, ça serait un coup de canif dans la démocratie », alerte-t-il. Le tribunal de commerce de Saint-Denis a fixé la prochaine audience au 13 décembre pour Le Quotidien de La Réunion.

Un préavis de grève déposé par tous les syndicats à France 24

Près de deux ans après la motion de défiance votée contre cinq membres de la direction et la grève historique de six jours qui avait secoué France 24, la sérénité ne semble toujours pas inscrite à l’agenda de la chaîne d’information internationale de l’audiovisuel public.

La réforme des plannings de la rédaction, voulue par la direction et censée s’appliquer dans les prochains jours, a rallumé la mèche : un préavis de grève a été déposé, mercredi 5 octobre, par tous les syndicats (CFDT, CGT, SNJ, CFTC, FO), pour un mouvement reconductible à partir du 11 octobre. Une réunion entre les organisations syndicales et la direction devrait toutefois se tenir vendredi.

« La direction nous avait annoncé que la réforme allait améliorer le bien-être des salariés, alors qu’il n’est question que d’optimisation et de réduction », résume un élu du personnel. Afin de remédier à un manque chronique d’effectifs, plusieurs fois dénoncé par le passé, la direction de France 24 a en effet proposé une modification d’ampleur des cycles de travail, soumise à un processus d’information-consultation des instances qui doit s’achever le 12 octobre.

Mais une expertise commandée par les élus est venue démontrer que le remède proposé serait, quoi qu’il arrive, insuffisant à soigner le mal. « Même si les personnels permanents en contrat de travail sur chaque métier ne sont jamais absents [les congés et les RTT étant déjà déduits], il manque l’équivalent de 48,63 ETP [équivalent temps plein] », pointe par exemple le document consulté par Le Monde. Un chiffre qui monte à 65 (sur 156 ETP) « si l’on prend en compte l’absentéisme », note encore le cabinet. Or à France 24, l’absentéisme serait particulièrement élevé.

« On ne s’occupe pas du fond »

Lancé par les organisations syndicales, un sondage interne est venu confirmer l’ampleur des craintes suscitées en interne par la réforme. « On a reçu un tel taux de réponse qu’on sentait que les gens étaient remontés », confesse Laurence Amiot, déléguée syndicale CGT. Convoqués en assemblée générale (AG), mardi 3 octobre, 113 salariés sur 134 votants ont répondu « oui » à la question de savoir s’ils souhaitaient qu’un préavis de grève soit déposé en vue d’obtenir la suspension du projet. La direction de la chaîne se dit « évidemment ouverte à la poursuite du dialogue pour répondre à toutes les questions et débattre des différentes options engagées », fait-elle savoir au Monde mercredi soir.

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Mais à France 24, les inquiétudes ne se limitent pas au strict cadre de l’organisation du travail. « Pendant qu’on s’attaque au planning, on ne s’occupe pas du fond », a ainsi souligné un journaliste au cours de l’AG. Les incertitudes qui pèsent sur l’entreprise publique, dont le mode de financement n’est assuré que jusqu’à fin 2024, « créent un sentiment d’insécurité, un saut dans l’inconnu, et l’impression d’un manque de considération », résume une représentante syndicale.

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La livraison d’un livre neuf bientôt facturée 3 euros

Un centre de logistique Amazon à Lauwin-Planque (Nord), le 16 avril 2020.

L’effet boomerang de certaines mesures risque parfois de provoquer l’inverse de ce qui était souhaité. L’arrêté publié au Journal officiel le 7 avril, et qui s’appliquera à partir du 7 octobre, fixe à 3 euros minimum le seuil réglementaire des frais de port pour les commandes de livres neufs inférieures à 35 euros. Au-delà de cette somme, il sera possible de ne facturer que 1 centime d’euro pour ces frais d’envoi.

Le gouvernement a souhaité relever le prix plancher de la livraison des livres neufs pour inciter les lecteurs à aller davantage en librairie. Sans le dire officiellement, en espérant incidemment les détourner d’Amazon ou du service en ligne de la Fnac. Pas sûr, pour autant, que cette décision ne dope le marché du livre, redevenu atone, en 2023, après une parenthèse de deux années de grâce pendant la pandémie. Une étude IFOP de septembre 2023 commandée par Amazon, prévoit que 51 % des lecteurs vont réduire leurs achats de livres à compter de la mise en œuvre de cette mesure.

Depuis 2014 et jusqu’au 7 octobre, Amazon ne facturait l’envoi d’un livre que 1 centime d’euro à ses abonnés Prime. Tout comme la Fnac. Légitimement, les libraires indépendants se plaignaient de la concurrence déloyale de ces géants du secteur qui « orchestrent ce dumping pour améliorer leur part de marché », analyse Guillaume Husson, délégué général du Syndicat de la librairie française (SLF). La nouvelle mesure constitue, selon lui, « une grande amélioration », mais laisse les libraires « au milieu du gué ». Les frais de port devraient, à ses yeux, être facturés 7,50 euros par ouvrage – ce que paient les libraires pour expédier leurs commandes en ligne. « Avec cet arrêté, nous traitons en fait une anomalie », assure M. Husson.

« Effet inflationniste majeur »

Mais en ces temps d’inflation et de réduction des dépenses des ménages, ajouter 3 euros au prix d’un livre pourra sembler élevé. Cette somme représente en effet 40 % du prix d’un livre de poche vendu à 7,50 euros. Une étude Kantar TNS Sofres de 2021 brandie par Amazon assure que, sur les 400 millions d’ouvrages vendus chaque année, 17 % le sont par le commerce en ligne (soit 68 millions d’ouvrages). La décision du gouvernement représentera donc 204 millions d’euros supplémentaires de frais de transport si les ventes se maintiennent au même rythme.

Selon Amazon, « l’introduction d’un tarif minimum d’expédition [aura] un effet inflationniste majeur, induisant une hausse du coût d’acquisition des livres vendus en ligne et affectant le pouvoir d’achat des lecteurs – et plus particulièrement de ceux qui résident loin des points de vente physiques et n’ont pas d’alternative ». Toujours selon l’étude IFOP, 49 % des Français achètent des ouvrages en ligne en raison de l’éloignement des points de vente physiques. Proportion qui monte à 75 % dans les communes rurales.

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