Archive dans 2021

ING, pionnier de la banque en ligne, réfléchit à son avenir en France

Est-ce la fin d’une époque ? L’institution néerlandaise ING, pionnière de la banque en ligne, qui est arrivée en France, en 2000, pour tailler des croupières aux établissements hexagonaux, en lançant un livret d’épargne à la rémunération très attrayante, semble vouloir jeter l’éponge. Dans un communiqué publié jeudi 17 juin, le groupe bancaire annonce « qu’il mène une revue stratégique de ses activités de banque de détail en France », qui ne concernera pas les « activités de banque de gros d’ING », destinées aux entreprises, dans l’Hexagone.

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Le groupe, qui revendique « environ 1 million de clients » (comptes courants, crédits immobiliers, prêts à la consommation et produits d’investissement) en France, y compte quelque 700 employés, dont les deux tiers travaillent dans la banque de détail. « La décision de conduire une revue stratégique a été prise du fait des difficultés liées au contexte économique actuel, et notamment la faiblesse des taux d’intérêt, des résultats financiers négatifs enregistrés par la banque en ligne ces dernières années et de sa part de marché relativement limitée », explique un porte-parole d’ING en France.

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ING ne précise pas, à ce stade, ses intentions. « La revue stratégique commence et aucune décision n’a été prise », poursuit ce responsable, en renvoyant à « une vision plus claire de la direction dans quelques mois ». Le communiqué du groupe ne présage toutefois rien de bon : « Quelle que soit l’issue de la revue stratégique », elle sera effectuée « conformément à la législation sociale et réglementaire en vigueur », indique-t-il, en tenant compte « des meilleurs intérêts de nos clients et de nos employés ».

D’autres restructurations sont en cours

Il y a près de deux ans, une autre banque internationale, HSBC, lançait, elle aussi, une « revue stratégique » de son métier de banque de détail en France. Pour s’y implanter, également en 2000, le géant sino-britannique avait racheté à prix d’or (11 milliards d’euros) le Crédit commercial de France (CCF), une enseigne haut de gamme, dont le siège rayonnait sur les Champs-Elysées, à Paris. Après avoir cherché en vain un acquéreur dans la sphère bancaire, HSBC s’apprêterait finalement à vendre sa filiale française au fonds d’investissement américain Cerberus, qui devrait encaisser un important chèque au passage pour prendre en charge la restructuration à venir de la banque déchue.

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Des chauffeurs bannis d’Uber portent plainte contre l’application

Ils accusent Uber de les avoir bannis illégalement, selon un processus automatique. Cent soixante et onze chauffeurs VTC ont mandaté la Ligue des droits de l’homme (LDH), pour déposer une plainte, jeudi 17 juin, auprès de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL).

De nombreux chauffeurs se sont ainsi vu bannir de l’application Uber après « l’envoi de messages automatiques et strictement identiques, tous établis sur le même modèle », est-il écrit dans la plainte. Ils évoquent dans la plupart des cas une « violation de l’un des principes de la charte de la communauté Uber » ou bien une « anomalie », sans précision supplémentaire.

« Déconnexions en chaîne »

Pour les plaignants, ce processus de sanction standardisé est entièrement automatisé et sans intervention humaine, ce qui est illégal. D’autant plus que dans l’immense majorité des cas, il n’existe aucune voie de recours pour contester ces sanctions.

Dans une enquête menée auprès de 813 chauffeurs VTC, l’Intersyndicale nationale VTC (INV) a établi que plus de la moitié d’entre eux avaient été victimes d’une déconnexion définitive ou temporaire. Sur les 138 chauffeurs définitivement déconnectés, 120 disent l’avoir été sans le moindre avertissement et 123 n’avoir pu bénéficier d’aucun recours pour contester la sanction.

Ces derniers mois, « on assiste à des déconnexions en chaîne », affirme Me Jérôme Giusti, l’avocat de la LDH. « Il y a eu l’ordonnance sur le dialogue social [qui prévoit des élections professionnelles dans le secteur pour 2022] et nous suspectons Uber de vouloir faire le ménage dans cette perspective », avance-t-il.

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Précédente condamnation

Le 24 février, un tribunal d’Amsterdam a condamné Uber pour avoir procédé à des déconnexions « fondées uniquement sur un traitement automatisé », est-il écrit dans la plainte. Un jugement contesté par Uber, qui a demandé son annulation. Toute déconnexion « est prise après un examen manuel par notre équipe de spécialistes », a affirmé un porte-parole de la compagnie à l’Agence France-Presse, ajoutant que les chauffeurs pouvaient à tout moment demander d’avoir accès à leurs données, sauf lorsque « leur divulgation porterait atteinte aux droits d’une autre personne ».

Jérôme Giusti appelle de son côté la CNIL à « saisir en urgence les tribunaux pour faire cesser ces déconnexions temporaires ou définitives massives ». « Aujourd’hui, c’est un risque dans le domaine des droits sociaux qu’il y ait des ordinateurs qui traitent et prennent des décisions », a-t-il conclu.

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Le Monde avec AFP

Retraite complémentaire : qui subit finalement le nouveau malus Agirc-Arrco ?

Les hommes sont en proportion davantage touchés par le nouveau malus Agirc-Arrco.

Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification clé du principe de calcul de la retraite des salariés. Jusque-là, qui obtenait sa pension de base à taux plein au régime de base était généralement assuré de toucher sa complémentaire Agirc-Arrco sans minoration.

Ce n’est plus vrai depuis l’instauration d’un système de malus-bonus temporaire : désormais, même avec le taux plein au régime de base, la pension complémentaire peut être minorée de 10 % ou 5 % durant trois ans si l’on ne décale pas sa retraite d’au moins un an, à partir du moment où sont remplies les conditions du taux plein. Avec des exceptions, notamment pour les plus modestes.

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Cette réforme avait été imposée par le Medef pour inciter les séniors à repousser leur retraite, dans le cadre de négociations sur le régime menées avec les syndicats en 2015. L’idée avait à l’époque des visées plus idéologiques et politiques que financières puisqu’il était question que le dispositif fasse économiser au régime quelque 500 millions d’euros par an seulement sur les plus de 6 milliards d’économies que devaient permettre, en 2020, toutes les mesures de l’accord.

Pas de CSG, pas de minoration

L’incertitude régnait toutefois sur les comportements des aspirants à la retraite. Allaient-ils partir avec le malus temporaire ? Attendre un an ? De premiers éléments de réponses ont été fournis fin mai par la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) dans son rapport « Les Retraités et les retraites ».

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La réforme a été appliquée pour la première fois aux personnes ayant pris leur retraite en 2019, mais celles nées avant 1957 n’étaient pas concernées. Selon la Drees, sur les 371 666 séniors des générations 1957 et suivantes ayant liquidé leur pension Agirc-Arrco en 2019, 183 266 ont écopé d’un malus. La moitié, donc (49,3 %).

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Ces chiffres intègrent les retraités visés par le malus entier de 10 % (ceux qui paient la CSG à taux plein), mais aussi par le « demi-malus » de 5 % (ceux qui la paient au taux réduit de 3,8 %), nous ont précisé les auteurs du rapport.

La réforme a aussi instauré un bonus pour qui prend sa retraite au moins deux ans après le taux plein : durant un an, la pension complémentaire est dopée de 10 % pour un report de deux ans, de 20 % pour trois ans, de 30 % pour quatre. En 2019, les retraités nés en 1957 ou après ne sont que 1 033 à l’avoir perçu (0,3 %), mais cette donnée est pour l’heure peu parlante, car le nombre de séniors éligibles au bonus était réduit en 20191.

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Quid des retraités de 1957 ou après ayant échappé au malus comme au bonus ? Ils se divisent en trois groupes :

  • 29,2 % (du total) en étaient exemptés d’office. Le sont les foyers modestes (exonérés de CSG), les départs anticipés pour handicap, les inaptitudes au travail, certains aidants familiaux, chômeurs en fin de droit ou titulaires de pension d’invalidité, les bénéficiaires de l’Allocation adulte handicapé (AAH), etc.
  • 12,7 % y ont échappé parce qu’ils avaient déjà dépassé leur taux plein d’un an (sans atteindre le bonus).
  • 8,5 % n’ont pas subi de malus temporaire mais une minoration définitive. Le malus temporaire est en effet « réservé » aux retraites à taux plein, les autres ont de toute façon une minoration définitive à l’Agirc-Arrco.

Les hommes plus que les femmes

Autre élément : les femmes sont plus souvent automatiquement dispensées de malus que les hommes. Elles sont ainsi 32 % à avoir été exemptées pour situation spécifique (foyer modeste, aidant familial, etc.) contre 26 % des hommes. Et 10 % (contre 7 % des hommes) à ne pas avoir subi de malus temporaire parce qu’elles avaient déjà un malus définitif. Résultat, les hommes sont en proportion davantage touchés par le malus – 51 % contre 47 % des femmes.

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Ce ne sont toutefois que des premières données. Il est trop tôt pour tirer le bilan des comportements de la génération 1957, la première concernée par la réforme, les séniors ayant décidé de reporter leur départ d’au moins un an et qui pouvaient partir à compter de 2019 (à 62 ans, l’âge légal) n’apparaissant logiquement pas dans les statistiques des départs de 2019.

Les services de l’Agirc-Arrco ne souhaitent par ailleurs pas commenter ces chiffres pour l’heure, ni fournir plus de détails sur les départs de 2020, car les discussions entre les partenaires sociaux qui copilotent le régime devraient reprendre dans les mois à venir, sur ce sujet et sur les finances du régime en général.

« Les services de l’Agirc-Arrco doivent nous fournir cette année une évaluation plus fine du dispositif et nous pourrons alors voir l’effet de la mesure sur les comportements, savoir quelles populations ont opté pour le malus, etc. Mais ma première impression confirme ce que je pressentais en 2015, la mesure aura peu d’effet sur les comportements, la plupart des gens préfèrent le malus à un report de retraite », réagit Frédéric Sève, secrétaire national CFDT.

Le bilan plus complet des premières années d’application du dispositif ne manquera pas d’être scruté à la loupe dans les mois à venir alors que le débat sur une réforme des retraites et les perspectives financières du système a été relancé.

Combien coûte le malus sur une pension complémentaire de 500 euros ?

Prenons l’exemple, fictif, de Barbara, qui avait prévu de prendre sa retraite au 1er juillet 2021 à 62 ans, avec les 167 trimestres requis pour décrocher le taux plein pour sa génération (1959). Sans le nouveau dispositif de malus-bonus de l’Agirc-Arrco, elle aurait touché 1 650 euros de pension nette : 1 150 euros de pension de base + 500 euros de complémentaire.

Avec la réforme, si elle maintient son départ au 1er juillet 2021, et qu’elle ne compte pas parmi la population exemptée de malus ou concernée par le demi-malus, sa pension complémentaire sera minorée de 10 %, pour trois ans. Jusqu’à juin 2024, elle touchera donc 1 600 euros par mois (1 150 + 450). Et à compter de mai 2022, sa pension intégrale, 1 650 euros, lui sera versée. La réforme lui coûtera au total 1 800 euros (calculs hors revalorisations annuelles). Si elle attend le 1er juillet 2022 pour prendre sa retraite, elle échappera au malus… mais elle renoncera à un an retraite.

1. Pour avoir dépassé dès 2019 le taux plein de deux ans tout en étant né au moins en 1957, et donc être éligible au bonus, il fallait avoir décroché son taux plein au plus tard en 2017. Cela suppose d’avoir eu droit à un départ anticipé à 60 ans ou avant, contre 62 ans dans le cas général.

Le mythe d’un niveau de chômage inévitable déconstruit

Le livre. La pandémie a révélé le ridicule d’un grand nombre de débats que nous avions hier. Faire passer le salaire minimum à 15 dollars (12,35 euros) de l’heure aux Etats-Unis, disait-on, risquait de coûter des millions d’emplois. Aujourd’hui, il est évident que les travailleurs dont nous avons un besoin vital sont aussi ceux auxquels nous ne pouvons pas garantir un salaire décent : le personnel des commerces et des entrepôts, celui chargé de l’expédition des colis et des livraisons, le personnel assurant le ramassage des ordures et le nettoyage…

Hier, la plupart des candidats à l’élection présidentielle américaine rejetaient l’idée qu’il appartient à l’Etat de fournir des soins de santé universels. Aujourd’hui, nous voyons que non seulement l’Etat en est capable, mais qu’il en a le devoir.

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Hier, les économistes admettaient de mauvaise grâce qu’en dépit d’un taux de chômage historiquement bas, l’économie des Etats-Unis n’était en aucun cas proche du plein-emploi et que des millions de personnes étaient toujours en quête d’un bon emploi.

Aujourd’hui que le chômage atteint des taux à deux chiffres, nous sommes confrontés à la tâche immense de revenir à un faible niveau de chômage.

Les avantages de la garantie d’emploi

Pourquoi ne pas concevoir un système qui garantirait des possibilités d’emploi à toute personne désireuse de travailler, quelles que soient son expérience, sa formation, sa situation personnelle ? A quoi pourrait ressembler une économie de ce type ? s’interroge Pavlina Tcherneva dans son essai La Garantie d’emploi (La Découverte).

De son mode de propagation à sa virulence, en passant par l’énorme coût social qu’il fait peser sur les individus, la collectivité et l’économie, « le chômage agit, à bien des égards, comme une épidémie silencieuse », souligne l’économiste, membre du Levy Institute. Comme le disait William Vickrey, ancien lauréat du prix Nobel d’économie, le chômage est « au mieux l’équivalent du vandalisme » et fait s’abattre sur les familles et sur tout le tissu social un malheur et une misère inconcevables.

Lire la chronique : Dominique Méda : « Territoire zéro chômeur : pour la généralisation d’un dispositif d’utilité sociale »

Et pourtant, l’idée que le chômage involontaire est un événement malheureux mais inévitable, et qu’un certain niveau de chômage est nécessaire au bon fonctionnement de l’économie, demeure un des grands mythes de notre temps. L’ouvrage déconstruit ce mythe, et défend la cause de la garantie d’emploi : fournir à tous les citoyens qui le souhaitent un travail rémunéré permettant de vivre décemment.

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« Aux Etats-Unis, le choc du télétravail est massif et les entreprises peinent à trouver la bonne martingale »

Vont-ils revenir ? Comme les marmottes en cette fin de printemps, les travailleurs peinent à sortir de leur tanière et leurs patrons s’inquiètent. « Si vous êtes capable d’aller de nouveau au restaurant, vous pouvez vous rendre au travail », a lancé, lundi 14 juin, James Gorman, le PDG de Morgan Stanley, à ses employés. Il les attend de pied ferme en septembre.

Plus expéditifs, les patrons de Goldman Sachs et de JPMorgan Chase ont convoqué leurs employés d’ici à juillet. « Nous savons d’expérience que notre culture de collaboration, d’innovation et d’apprentissage prospère quand nos employés sont ensemble, et nous souhaiterions que nos collègues retournent au bureau pour s’en rendre à nouveau compte », indique le mémo interne envoyé par la direction de Goldman Sachs.

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Il semble flotter comme un vent de panique dans la banque américaine. Une étude de la société Accenture, publiée en mai, indiquait que 78 % des patrons du secteur voulaient que leurs ouailles reviennent au moins quatre jours par semaine. Ce ne sera pas de gaieté de cœur, si l’on en juge par la très intéressante étude conduite par trois économistes des universités de Chicago, Stanford et Mexico (National Bureau of Economic Research, avril 2021).

Clivage politique

Ils ont interviewé un échantillon de près de 30 000 travailleurs américains, âgés de 20 à 64 ans et gagnant plus de 20 000 dollars par an, sur leur expérience d’un an de télétravail. Et la réponse est sans appel : moins de 30 % veulent retourner à plein temps au bureau. Et près de 20 % veulent désormais travailler totalement en télétravail. Ils n’étaient que 5 % avant la pandémie de Covid-19. Les chercheurs estiment le gain de productivité global à + 4,6 %, essentiellement par la réduction des temps de transport.

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Le choc est donc massif et les entreprises peinent à trouver la bonne martingale – généralement deux jours de télétravail par semaine –, entre la nécessité de préserver la cohésion du groupe et le souci de garder la motivation de troupes conquises à cette nouvelle vie, notamment les couples avec de jeunes enfants.

Un clivage qui n’évite pas la case politique, puisque les demandeurs les plus acharnés se recrutent dans la tranche des employés diplômés, travaillant dans les services… et habitant dans des Etats favorables au Parti démocrate. Pour eux, « l’économie postpandémie comprendra plus de télétravail, mais bien moins que ce qu’ils souhaiteraient », conclu l’étude. L’expérimentation sociale par la crise sanitaire.

Des pistes pour limiter la prolifération des CDD d’usage

Pour combattre la précarité dans le monde du travail, il faut stopper l’expansion incontrôlée d’une des formes d’emploi les plus instables : le CDD d’usage (CDDU). C’est le sens des recommandations dévoilées, mardi 15 juin, par deux parlementaires macronistes : le député (LRM, Val-de-Marne) Jean-François Mbaye et le sénateur (RDPI, Hauts-de-Seine) Xavier Iacovelli. Dans le rapport qu’ils ont réalisé à la demande de Matignon, une vingtaine de pistes sont esquissées, le but étant de réduire « de 20 % en trois ans » les recrutements conclus par le biais de ce dispositif.

Créé par une ordonnance de 1982, le CDDU se singularise par sa flexibilité extrême : il peut être renouvelé à l’infini et ne prévoit, à de rares exceptions près, aucune prime de précarité lorsqu’il arrive à son terme, contrairement au CDD de droit commun. A l’origine, ce statut atypique devait être cantonné aux secteurs où « il est d’usage constant de ne pas recourir au CDI, en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère, par nature, temporaire de ces emplois ». Mais le système, après de multiples dévoiements, s’est développé au-delà de son cœur de cible : alors que les CDDU devraient concerner « une petite vingtaine de métiers », ils sont en réalité dix fois plus à être touchés, comme le constatait un rapport remis, fin 2015, par l’inspection générale des affaires sociales (IGAS).

Rationaliser les pratiques

Ce succès se lit dans les chiffres : en 2019, quelque 9,2 millions contrats de ce type ont été signés par 4,8 millions de personnes, soit un peu plus de 16 % « de l’ensemble des embauches », selon les données recueillies par MM. Iacovelli et Mbaye. C’est dans l’industrie des « arts et spectacles » que les employeurs y recourent le plus. Au sein du peloton de tête, il y a aussi les hôtels-cafés-restaurants, les instituts de sondage, les entreprises de services à la personne, les établissements privés d’enseignement, les foires et salons… Dans 42 % des cas, la durée du CDDU est de « moins d’un jour ».

Alors que les « abus » sont légion et identifiés de longue date, le CDDU semble « susciter une forme de désintérêt » de la part des pouvoirs publics, « mais également des partenaires sociaux », regrettent MM. Iacovelli et Mbaye. Une telle inertie s’avère d’autant plus dommageable aujourd’hui, que des milliers d’« intermittents de l’emploi » ont vu leurs « difficultés » s’accroître avec la récession liée à l’épidémie de Covid-19. C’est pourquoi les deux élus émettent des propositions pour « réguler » le dispositif, sans pour autant le remettre en cause dans son principe même. Selon eux, le CDDU est adapté au modèle économique de certaines activités. Il peut, de surcroît, « avoir la faveur » des parties en présence – celle du patron mais aussi de son salarié – et constitue, dans certaines situations, un « rempart » contre le travail au noir.

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Les diplômés des grandes écoles n’échappent pas à la crise liée au Covid-19

Anne-Lucie Wack, présidente de la Conférence des grandes écoles, à Paris, en 2019.

En matière d’insertion sur le marché du travail, les diplômés des grandes écoles françaises n’ont pas échappé aux conséquences de la crise sanitaire. C’est ce que constate l’étude publiée, mardi 15 juin, par la Conférence des grandes écoles (CGE), qui porte sur la situation des diplômés 2020 de 193 établissements (essentiellement des écoles de commerce ou d’ingénieurs), six mois après leur entrée sur le marché du travail. Cette année, 42 000 diplômés 2020 ont répondu à l’enquête.

« Le contexte sanitaire et économique défavorable au marché de l’emploi des cadres a eu un réel impact sur l’entrée dans la vie professionnelle des jeunes diplômés », soulignent les auteurs. Ainsi, le taux net d’emploi six mois après le diplôme est de 79 %, une chute de 9 points par rapport à l’année précédente – un taux similaire à celui observé en 2010, dans le contexte post-crise financière. Aussi, le pourcentage de jeunes diplômés en recherche d’un emploi au moment de l’enquête a bondi : s’il était de 4,2 % en 2017, il atteint 17,7 % cette année.

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Le salaire brut annuel moyen déclaré par les répondants, en revanche, a peu bougé. Il s’établit à 35 461 euros brut (hors primes), soit une baisse de 0,7 % sur un an. « L’onde de choc est moins importante que ce que nous aurions pu craindre », abonde Anne-Lucie Wack, présidente de la CGE. Avec toujours des écarts importants selon les secteurs : le conseil est celui qui rémunère le mieux (39 000 euros annuels en moyenne, pour les diplômés d’écoles de commerce). L’agroalimentaire est celui qui offre les salaires les moins élevés (31 000 euros, en moyenne, pour les diplômés d’écoles d’ingénieurs).

« La crise a accentué les écarts entre les hommes et les femmes »

« On note aussi que la crise a accentué les écarts entre les hommes et les femmes », constate Nicolas Glady, directeur de Télécom Paris, et rapporteur de l’étude de la CGE. Parmi les diplômés 2020, le salaire moyen des hommes est supérieur de 6,6 % au salaire moyen des femmes. Près d’une femme sur quatre (23,2 %) perçoit moins de 30 000 euros ; c’est le cas de seulement 11,7 % des hommes. « Du côté des salaires plus élevés, la situation s’inverse », souligne le rapport.

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En outre, les emplois décrochés par les diplômés 2020 sont plus précaires. La part des jeunes en CDI recule de 4 à 5 points par rapport à la promotion 2019 (elle se maintient tout de même à 78 % pour les ingénieurs). Et si, en 2018, 87 % des diplômés disposaient du statut de cadre en entrant dans l’entreprise (91 % pour les hommes), cette année, ils ne sont plus que 82 % et 76 % pour les femmes. Une sous-valorisation du premier emploi, en termes de statut, de salaire, qui peut avoir des conséquences sur l’ensemble d’une carrière.

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En Allemagne, IG Metall veut amortir le choc sur l’emploi de la voiture électrique

Sur une ligne de production de systèmes d’échappement pour véhicules commerciaux, près de Dresde, en Allemagne, le 23 novembre 2017.

Esslingue est une de ces villes industrielles cossues de la banlieue de Stuttgart, en Bade-Wurtemberg. Derrière la gare, un flanc de coteau est couvert de rangs de vignes exploitées par des passionnés. Ici, la prospérité est partout, luxuriante. Si elle n’était pas intimement liée au moteur à explosion, on pourrait presque la croire éternelle.

L’impression est trompeuse. Chez Eberspächer, le grand industriel d’Esslingue, on est, depuis quelques mois, plus anxieux qu’auparavant, en passant devant l’histoire de l’entreprise familiale, exposée au rez-de-chaussée. Au commencement, il y a Jakob Eberspächer, fier maître plombier à la moustache en chevron, qui fonde, en 1865, un atelier de construction de verrières à structure métallique. Ce n’est qu’en 1933 que l’entreprise fait le virage qui fera sa fortune actuelle : les descendants de Jakob transforment la production de structures métalliques en fabrication des premiers silencieux de pot d’échappement. Eberspächer est aujourd’hui un des plus grands équipementiers allemands de « technologies d’échappement », spécialisé dans la réduction du bruit et le traitement des gaz des véhicules thermiques.

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L’année 2020 aura sûrement aussi sa place dans la chronique de l’entreprise. C’est l’année où Eberspächer, ébranlé à la fois par les conséquences de la pandémie de Covid-19 et la fin d’une phase de haute conjoncture dans l’automobile, a essuyé une perte de 53 millions d’euros. Il a dû fermer sa dernière usine à Esslingue, délocalisée en Pologne. Le groupe a pris acte du déclin définitif du moteur à explosion. Le 21 mai 2021, Eberspächer a annoncé la scission des techniques d’échappement au sein d’une nouvelle entité. Ces activités, qui représentent encore 90 % du chiffre d’affaires de l’entreprise, doivent continuer à fournir les marchés qui utiliseront encore longtemps le moteur à explosion. Ses bénéfices doivent financer la transition du reste de l’entreprise vers l’électrique et la conduite autonome.

2,2 millions de salariés

L’histoire d’Eberspächer est emblématique de tous les sous-traitants de l’industrie automobile allemande. Avec le moteur électrique, plus de pots d’échappement, plus de bielles, plus de pistons, plus de soupapes : toutes ces pièces métalliques de grande précision, souvent fabriquées par des PME, sont, à terme, condamnées. Ces dernières semaines, la tension est montée d’un cran chez IG Metall, le grand syndicat de l’industrie. Sous la pression d’un arrêt de la Cour constitutionnelle allemande, l’Allemagne a décidé de renforcer ses objectifs climatiques. « Cela signifie que nous allons avoir besoin de beaucoup plus de véhicules électriques qu’anticipé jusqu’ici. Au lieu de 8 millions à 10 millions, d’ici à la fin de la décennie, ce sont 14 millions à 16 millions qui devront circuler sur les routes allemandes », souligne Kai Bliesener, expert chez IG Metall.

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Qualité de vie et travail hybride : le cocktail de l’été

« La qualité de vie au travail a pris depuis le Covid une nouvelle dimension. »

Carnet de bureau. Le travail de demain est au cœur des débats de la Semaine pour la qualité de vie au travail qui s’est ouverte lundi 14 juin. Confinée jusqu’en 2020 au sein des établissements, la qualité de vie au travail a pris depuis la crise sanitaire une nouvelle dimension. Qu’est-elle devenue dans une organisation hybride, avec des équipes incomplètes qui varient d’une semaine sur l’autre, des sentiments d’inéquité de certains salariés à l’égard du télétravail, des temps de communications éclatés et des collaborateurs devenus parfois invisibles, voire muets ?

« La période Covid a ouvert le champ à un environnement de travail hybride que personne n’a réellement testé. On sait d’ores et déjà qu’il ne s’agit pas d’une simple délocalisation de l’organisation, ni d’une partition binaire entre le travail individuel à domicile et le travail collectif sur site, et que tout le système de collaboration est à revoir. La qualité de vie au travail relève de la capacité des organisations à la mesurer et à l’ajuster », explique Amandine Brugière, responsable du développement technique et scientifique à l’Agence nationale pour les conditions de travail (Anact).

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Le niveau de dégradation des interactions de travail depuis le Covid a été chiffré fin mai par l’Anact : 35 % des salariés estiment que les relations se sont dégradées entre direction et salariés, 34 % entre les cadres et les salariés et 27 % entre les salariés eux-mêmes. De son côté l’Association pour l’emploi des cadres révèle que plus d’un tiers des cadres seniors (37 %), « perçus comme fiables et fidèles à l’entreprise », témoignent d’une dégradation de l’ensemble de leur qualité de vie au travail, liée aux changements de mode de management puis d’organisation du travail.

Salariés ayant déménagé

La période Covid a renforcé le travail en silo, laissé les salariés autonomes dans leur organisation et produit des situations inédites qui bousculent le management : 30 % des responsables RH répondants à l’enquête du 8 juin de l’Association nationale des DRH (ANDRH) disent avoir été confrontés à des demandes de salariés ayant déménagé pendant la crise, et sollicitant l’adaptation de leurs conditions de travail. « Il faut rappeler que la gestion des cas individuels ne doit pas prendre le pas sur le collectif », a commenté la présidente de l’ANDRH, Audrey Richard.

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« La qualité de vie au travail va reposer sur la capacité des entreprises à restaurer les bonnes relations à tous les niveaux par plus de transparence et d’encadrement, en soutenant à la fois les individus et l’esprit d’équipe par la régulation et l’exemplarité », analyse Laurent Labbé, fondateur du label HappyIndexAtWork.

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Etendu à vingt-cinq jours, le congé paternité marque des points en entreprise

Pour favoriser l’implication des pères lors de l’arrivée d’un enfant et rééquilibrer la charge des tâches familiales, la durée du congé paternité doublera à compter du 1er juillet 2021, passant de onze à vingt-cinq jours en plus des trois jours de congés de naissance payés par l’employeur. Indemnisé en proportion du salaire, le congé paternité est actuellement pris par 70 % des hommes.

Un beau score par rapport au congé parental à temps plein qui, lui, est demandé par moins de 1 % des pères, contre l’objectif de 25 % visé par la réforme de 2015, indique une étude publiée le 7 avril par l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). « Celle-ci [la réforme] poursuivait un double objectif : inciter les pères à consacrer plus de temps aux tâches parentales et amener les mères à retourner plus rapidement sur le marché du travail, rappelle Hélène Périvier, économiste à l’OFCE et coautrice de l’étude. La réaction des pères à la réforme a été très faible. Cet objectif-là n’est clairement pas atteint. »

Une des raisons du non-recours au congé parental à temps plein est son faible niveau d’indemnisation – 399 euros mensuels pour un temps plein, quel que soit le salaire antérieur –, mais ceci n’explique pas tout.

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Le regard des autres pèse pour beaucoup. La vision traditionnelle du paterfamilias – principal pourvoyeur des revenus de la famille, très impliqué dans sa carrière, mais peu dans le quotidien familial – reste ancrée, de même que l’idée que la garde des enfants concerne avant tout les femmes. « On a longtemps exclu les hommes de la petite enfance en leur faisant un procès pour incompétence, note Christine Castelain-Meunier, sociologue au CNRS et à l’Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS). Mais les choses évoluent. »

Effets sur le recrutement

Pour favoriser l’égalité femmes-hommes, certaines entreprises estiment avoir un rôle à jouer et vont plus loin. Ainsi, l’assureur Aviva offre depuis 2017 dix semaines de congé de parentalité à salaire et avantages maintenus pour le deuxième parent. « Tous les parents conjoints, sans exception, sont concernés, quelles que soient leur orientation sexuelle et leur identité de genre », précise Sylvie Chartier-Gueudet, directrice de l’inclusion et du bien-être d’Aviva France.

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Le groupe de luxe Kering prévoit pour ses 38 000 collaborateurs dans le monde un congé paternité ou « partenaire » de quatorze semaines payées à 100 %. Chez Dataiku, spécialiste de l’analyse de données, les nouveaux parents peuvent bénéficier d’un congé « second parent » de soixante jours ouvrés rémunéré à 100 %. Dans ces trois entreprises, le congé est à prendre dans les six mois suivant l’arrivée de l’enfant.

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