Archive dans 2021

« A la fin de l’année, on aura retrouvé le niveau d’activité de fin 2019 »

Jean-Luc Tavernier, le directeur général de l’Insee, le 15 octobre 2018 à Montrouge, lors de l’inauguration des nouveaux locaux de l’institut de statistiques.

La confiance des ménages a dépassé en juin, pour la première fois depuis le début de la crise sanitaire, sa moyenne de longue période, la consommation a rebondi de 10 % en mai, le taux de chômage est stable… Dans un entretien, Jean-Luc Tavernier, le directeur général de l’Insee (dont la note de conjoncture a été publiée jeudi 1er juillet), se dit confiant sur la reprise et estime une inflation autour de 1,8 % en fin d’année.

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Après un an et demi de pandémie, tous les voyants de l’économie française sont passés au vert. La crise est-elle derrière nous ?

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Compte tenu des données issues des enquêtes de conjoncture et des enquêtes de confiance auprès des ménages – collectées dans une période très favorable du point de vue de l’amélioration de la situation sanitaire et de la levée des restrictions –, la croissance devrait atteindre 6 % cette année par rapport à 2020. Pour mémoire, le PIB a été en léger recul de 0,1 % au premier trimestre, il progresserait de 0,7 % au deuxième trimestre, et nous prévoyons 3,4 % au troisième trimestre et 0,7 % au quatrième.

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Nous pensons que nous reviendrons à la fin de l’année au niveau d’activité pré-crise, celui qui avait été atteint à la fin de l’année 2019. C’est mieux que ce que la plupart des conjoncturistes anticipaient en début d’année. Mais il faut rester prudent, comme nous l’avons toujours été dans nos prévisions depuis le début de cette crise : tout dépendra de la situation sanitaire, de l’évolution du variant Delta et du développement de la vaccination.

A cette réserve près, peut-on dire que la crise sera derrière nous à la fin de l’année ?

Entendons-nous bien : on aura retrouvé le niveau d’activité de fin 2019, ce qui ne signifie pas que nous aurons rattrapé le terrain perdu. Pendant ces deux années, on aurait quand même dû avoir un peu de croissance. En mettant bout à bout les différentes analyses sectorielles, nous estimons ce terrain perdu à 1,6 point de PIB. Environ la moitié de cette perte est imputable aux secteurs les plus touchés par la crise, comme l’aéronautique ou le tourisme.

Certains redoutaient une très forte hausse du chômage, elle ne s’est pas produite…

Effectivement, les pertes d’emplois ont été freinées par le dispositif d’activité partielle l’an passé, et la reprise des créations d’emplois avec le redressement de l’activité. Le taux de chômage reste un peu au-dessus de 8 % et devrait se maintenir à ce niveau à la fin de l’année. Si certains actifs qui avaient cessé de chercher un emploi vont revenir sur le marché du travail dans les mois qui viennent. Dans le même temps, de nombreux secteurs devraient recréer des emplois au second semestre, notamment dans les services. On attend ainsi un peu plus de 300 000 créations d’emplois cette année, contre 300 000 destructions d’emplois en 2020. On reviendra, alors, au niveau d’il y a deux ans.

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Les fonctionnaires municipaux protestent contre la légère augmentation de leur temps de travail

Depuis plusieurs semaines, une partie des 7 500 agents territoriaux titulaires ou contractuels de la ville de Rennes et de Rennes métropole se mobilisent contre la loi de transformation de la fonction publique du 6 août 2019 qui oblige les collectivités territoriales à se mettre en conformité, avant le 1er janvier 2022, avec le temps de travail légal de 1 607 heures par an. Ils dénoncent notamment la perte de jours de congé. Après avoir bloqué le principal parc de la ville, des piscines, des bus ou encore des balayeuses, une centaine de fonctionnaires grévistes se sont rassemblés devant l’hôtel de ville, lundi 28 juin, en marge du conseil municipal délibérant alors sur l’application de la loi.

« Cette obligation ne me paraît pas être la priorité des chantiers nécessaires à l’amélioration du service public, insiste Emmanuelle Rousset, conseillère municipale déléguée (PS) aux ressources humaines et au dialogue social. Cela suppose de supprimer aux agents de la ville trois jours et demi de congé dits extralégaux pour passer de vingt-huit jours et demi à vingt-cinq jours. Nous avons sanctuarisé les jours supplémentaires travaillés en les affectant pour partie au développement personnel et professionnel de l’agent, pour un autre tiers à des temps collectifs au sein de chaque service, et pour le reste au service du public. »

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L’élue chargée du dossier assure vouloir profiter de la mise en œuvre de cette réforme pour « améliorer l’équité entre agents ». La collectivité prendra désormais en considération les temps d’habillage et de déshabillage, de déplacement, de pénibilité de certains métiers, et promet des « compensations » pour les agents travaillant les week-ends et les jours fériés. Certains points sont encore en discussion avec les syndicats. Lors des discussions préalables à la présentation du texte en conseil municipal, la CFDT, organisation majoritaire, s’est abstenue quand les autres syndicats s’y sont opposés.

Des « contreparties »

A Besançon, comme partout, il a fallu discuter. Mais, en comité technique, le protocole d’accord portant sur la réforme horaire des agents de la ville, du Centre communal d’action sociale et de la communauté urbaine a été adopté par douze organisations sur quinze, avec une voix contre. Cela n’a pas empêché la CGT et SUD-Collectivités territoriales, hostiles à la mesure, de manifester, jeudi 24 juin, devant l’hôtel de ville, où le rapport devait être débattu. « Il a été voté en conseil municipal, seuls le Parti communiste et Génération citoyenne se sont prononcés contre ce jour-là », précise Elise Aebischer, adjointe chargée des ressources humaines dans la majorité d’Anne Vignot, la maire Europe Ecologie-Les Verts.

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A l’origine de la médiation

Livre. « Tenez, un mauvais arrangement vaut mieux qu’un bon procès… » Dans Illusions perdues, Balzac, bachelier en droit et expert en faillites, met en scène un sage magistrat qui convainc un inventeur de trouver un arrangement avec les deuxfrères malhonnêtes l’ayant dépossédé de son brevet.

Un procès, c’est la guerre. Il se gagne ou il se perd au terme de longues passes d’armes contradictoires, étoffées d’expertises et de manœuvres procédurales. Au contraire, un arrangement n’a ni vainqueur ni vaincu. Il permet seulement aux parties qui s’opposent d’accueillir une solution acceptable par chacune d’entre elles. « Ce n’est ni un pis-aller ni un moyen terme, mais une réponse satisfaisante à de vrais besoins », souligne Valérie Ohannessian dans La Médiation en entreprise.

« La médiation en entreprise », de Valérie Ohannessian. Que sais-je, PUF, 128 pages, 9 euros.

Dans cette synthèse, l’avocate de formation revient sur la philosophie et les fondements juridiques qui sous-tendent la médiation, mais aussi sur sa mise en œuvre et les techniques qu’il faut connaître pour une médiation réussie.

L’autrice, qui conseille les entreprises dans leur gouvernance, en est convaincue : « Choisir la médiation pour régler un différend s’accommode de la finalité de l’entreprise. C’est gagner du temps, de l’argent, de la sérénité pour continuer à accomplir sa mission, qui est de produire des biens ou des services et de créer de la valeur. »

Temps long de la justice anachronique

Alors que le temps long de la justice apparaît de plus en plus anachronique face au temps de l’entreprise, qui s’accélère avec le développement des technologies de l’information, la médiation est encore présentée comme une alternative commode mais dégradée à une justice encombrée, lente et inefficace. « Cette approche regrettable introduit un ensemble de suspicions à l’égard des acteurs de la médiation : le médiateur n’a pas d’autorité de juge, il n’offrirait donc pas les mêmes garanties d’impartialité et pourrait favoriser la loi du plus fort au détriment de la partie la plus faible. »

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Pourtant, la médiation ne s’affranchit pas des principes fondamentaux du droit et son utilité est apparue aux magistrats eux-mêmes, conscients des limites de la seule mobilisation de la loi pour régler de manière satisfaisante certains conflits.

Née dans les années 1970 d’une pratique prétorienne privilégiant la recherche et la bonne compréhension de la solution par les parties, la médiation est organisée par la loi du 8 février 1995 et ne cesse de se développer. Depuis janvier 2020, les litiges de moins de 5 000 euros ne peuvent être portés devant le tribunal que si le demandeur justifie d’une tentative de résolution amiable qui n’a pas abouti. Elle est aujourd’hui « un mode autonome de résolution des conflits et pas seulement un simple moyen de désengorger les tribunaux ».

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Des salariés d’Europe 1 manifestent contre « l’emprise croissante de Vincent Bolloré dans les médias »

Des salariés d’Europe 1 manifestent contre « l’emprise croissante de Vincent Bolloré dans les médias », le 30 juin 2021, à Paris.

Actuelles ou anciennes voix de la station, confrères d’autres médias, syndicalistes, défenseurs de la liberté de la presse… Tous ont répondu à l’appel de l’intersyndicale (SNJ-CGT – CFTC – FO) et de la société des rédacteurs d’Europe 1 à manifester devant les locaux de la radio, mercredi 30 juin. Quelque 150 personnes, pour la plupart journalistes, ont ainsi dénoncé « l’emprise croissante de Vincent Bolloré dans les médias » et fait part de leurs craintes de voir leur radio se transformer en un « média d’opinion » du fait du rapprochement annoncé avec CNews, contrôlée par le magnat breton.

Ce rassemblement était organisé alors que se tenait l’assemblée générale des actionnaires de Lagardère. Celle-ci a entériné la transformation du groupe en société anonyme, mettant fin au pouvoir absolu d’Arnaud Lagardère au profit de son premier actionnaire, Vincent Bolloré. Le milliardaire contrôle Vivendi et sa filiale Canal+, maison mère de CNews.

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Préférer l’« information à la controverse »

Europe 1 est une « radio qui a toujours préféré l’information à la controverse », a fait valoir la journaliste Anne Sinclair, ancienne salariée de la station, soucieuse « que cela perdure, surtout avant la présidentielle ». « Ce qui nous rassemble aujourd’hui, c’est une conception de l’information », une « éthique de responsabilité vis-à-vis de la société », a lancé à la foule Patrick Cohen, qui anime la tranche de la mi-journée sur Europe 1. « Le modèle qui est en train de gagner », c’est celui qui cherche à créer « des fractures, à dresser une partie de la France contre l’autre, y compris par des appels à la haine » jugés « par les tribunaux », a-t-il déploré. Le chroniqueur vedette de CNews, Eric Zemmour, a été condamné à plusieurs reprises pour provocation à la haine.

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Le secrétaire général de Reporters sans frontières, Christophe Deloire, a de son côté défendu « l’indépendance éditoriale » et le « pluralisme interne des médias audiovisuels », appelant le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) à « jouer [le] rôle »qu’il n’a pas tenu, selon lui, pour i-Télé (devenue CNews en 2017) et Canal+. Début juin, l’institution avait cependant mis en demeure CNews pour manquement à ses obligations en matière de pluralisme politique, après avoir omis de comptabiliser près d’une heure de temps de parole d’un candidat du Rassemblement national.

En conséquence, les journalistes d’Europe 1 s’inquiètent des « synergies » mises en place entre la radio et CNews, telle une émission commune présentée par Laurence Ferrari, officialisée il y a quelques jours par Arnaud Lagardère. La semaine dernière, une partie d’entre eux se sont mis en grève pendant six jours. A l’issue du mouvement, la direction s’est engagée à négocier un dispositif semblable à la clause de conscience, un dispositif qui permet aux journalistes en désaccord avec un changement de ligne éditoriale de partir avec des indemnités. Mais « la mobilisation ne s’arrête pas », a assuré Olivier Samain, délégué syndical SNJ, promettant d’« autres actions ».

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Le Monde avec AFP

Après la saturation du site du CPF, de la « souplesse » promise pour transférer ses droits individuels à la formation

« Vous êtes extrêmement nombreux à vouloir utiliser le site moncompteformation en même temps !  » La phrase, inscrite en gras au milieu de l’écran, a créé des sueurs froides à plus d’un internaute tentant de transférer ses droits individuels à la formation (DIF) acquis avant 2015 vers son compte personnel de formation (CPF), nouveau dispositif en place. Pour répondre à cet afflux, le gouvernement s’est engagé, mercredi 30 juin, à faire preuve de « souplesse » et à ne pas clore les opérations à minuit comme cela était prévu.

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Les salariés du privé avaient en principe jusqu’à cette date pour effectuer le transfert via le site moncompteformation.gouv.fr. Or, selon le ministère du travail, « il y a une petite surcharge » du système avec « 100 000 bascules » enregistrées mardi et « 40 000 depuis ce matin » contre environ 10 000 entre le 1er et le 15 juin. « Nous avons [donc] décidé de ne pas fermer le site à minuit », a ajouté le ministère, sans donner plus de précisions sur les délais.

Jusqu’à 1 800 euros de crédit formation

Jusqu’en 2014, les salariés à temps complet se voyaient crédités de vingt heures de formation par an via le DIF. En 2015, le CPF a pris le relais du DIF, et il est désormais alimenté à hauteur de 500 euros par an.

Pour transférer ses heures de DIF non utilisées et ne pas les perdre, le salarié doit récupérer son solde d’heures sur son bulletin de salaire de décembre 2014 ou de janvier 2015, ou demander une attestation à son employeur d’alors, et le rentrer dans son compte CPF. En cas d’absence de justificatif, il est possible de contacter la Caisse des dépôts, qui gère le CPF.

Les heures DIF renseignées sont converties automatiquement en euros, selon un taux de conversion de 15 euros de l’heure. Les droits acquis au titre du DIF peuvent représenter jusqu’à 1 800 euros pour ceux qui n’y ont jamais fait appel.

Selon des chiffres du ministère du Travail communiqués mi-juin, 6,33 millions de compteurs DIF au total avaient été renseignés à cette date par leur titulaire depuis 2015. Pour les agents publics, le transfert est automatique.

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Le Monde avec AFP

« Les déséquilibres géographiques du chômage demeurent la source d’une possible colère populaire »

Chronique. Les précédentes élections régionales, en 2015, s’étaient déroulées alors que la France portait les stigmates de la grande récession de 2009. Le taux de chômage était toujours à deux chiffres. Toutes les zones d’emploi avaient connu une hausse du chômage, mais l’hétérogénéité s’était fortement accrue : le chômage avait progressé significativement plus dans des zones où il était initialement élevé. L’accélération de la désindustrialisation était en cause dans de nombreuses zones du Grand Nord-Est, mais la crise de 2009 avait surtout fait basculer des zones où s’accumulaient en amont des fragilités spécifiques.

La zone d’emploi de Perpignan (Pyrénées-Orientales), qui avait alors subi la pire hausse du chômage en métropole, en est l’illustration la plus dramatique : le taux de pauvreté et la part des jeunes faiblement diplômés y étaient déjà parmi les plus élevés de France, le commerce de centre-ville sinistré, l’habitat dans certains quartiers délabrés… alors que l’héliotropisme attirait un nombre croissant de résidents dans le département. Cette divergence territoriale est une des clés de lecture des résultats des élections de 2015 : le candidat du Front national, Louis Aliot, avait obtenu à Perpignan 42 % des voix au premier tour.

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Depuis, tout au moins jusqu’à la crise sanitaire, la lente reprise économique a permis une progression de l’emploi et un retour à la moyenne des taux de chômage locaux, sans pour autant effacer totalement le tournant de 2009. Au dernier trimestre 2019, la zone d’emploi de Perpignan présentait toujours le deuxième plus haut taux de chômage en France métropolitaine à 13,1 %, soit encore 3,5 points de plus qu’en 2008. Louis Aliot a été élu maire de la ville en 2020, et au premier tour des régionales de 2021, le Rassemblement national y a obtenu encore 40 %, tranchant avec une chute de 9 points sur l’ensemble de l’Occitanie.

« Débranchement » progressif des aides

La crise actuelle n’a pour l’instant pas renforcé les déséquilibres géographiques à l’échelle des zones d’emploi ou des départements. C’est peut-être un élément d’explication de la sous-performance de l’extrême droite dimanche. Les chiffres publiés par l’Insee, mardi 29 juin, pour le 1er trimestre 2021, confirment la singularité de la récession historique de 2020. Le soutien massif aux entreprises a permis de préserver les emplois permanents. Les divers besoins en équipement ont même favorisé certains pans de l’industrie manufacturière. Les conditions sanitaires ont dicté les opportunités des travailleurs précaires : jobs sous statut de micro-entrepreneur dans l’économie du dernier kilomètre, saisons touristiques estivales sauvées, mais stations de ski fermées et tourisme international au point mort.

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Entre Brexit et électrification, l’industrie automobile britannique craint le pire

L’usine de construction automobile Vauxhall d’Ellesmere Port, dans le nord-ouest de l’Angleterre, le 22 février 2021.

L’industrie automobile britannique fait face à une violence tempête. « Nous menons la bataille sur trois fronts : le Covid, le Brexit et la transition à zéro émission [de CO2] », explique Mike Hawes, le directeur de la Society of Motor Manufacturers and Traders (SMMT), l’association représentant le secteur, dont se tenait la conférence annuelle mardi 29 juin. Son ton était volontairement alarmiste, avec un sérieux avertissement : dans le pire des scénarios, l’industrie automobile britannique pourrait perdre la moitié de ses emplois d’ici une décennie.

La chute est violente. Il y a tout juste cinq ans, l’automobile britannique semblait avoir retrouvé une nouvelle jeunesse. La production atteignait 1,7 million de véhicules fabriqués par an, revenant à des niveaux inconnus depuis les années 1970, grâce notamment aux usines de Nissan et de Jaguar Land Rover, très productives. A l’époque, il était question de dépasser la production de la France, qui était alors d’un peu plus de 2 millions de véhicules.

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Le Brexit, voté en juin 2016, est venu changer la donne. Craignant le rétablissement de droits de douane à la frontière entre l’Union européenne (UE) et le Royaume-Uni, les constructeurs automobiles ont cessé d’investir, attendant d’y voir clair.

Casse limitée

Le pire ne s’est finalement pas concrétisé. L’accord sur le Brexit, signé la veille de Noël 2020, a permis d’éviter le retour des droits de douane, laissant l’industrie « pousser un soupir de soulagement », selon M. Hawes. Pour un secteur qui importe la majorité de ses pièces détachées de l’UE, et qui y exporte la moitié de sa production, c’est d’une importance majeure. « Le premier ministre en personne est monté au front pour nous », rappelle M. Hawes.

Cet accord sur le Brexit est cependant loin d’être une situation parfaite. « Les déclarations à faire [pour importer ou exporter chaque pièce ou véhicule] provoquent des retards dans l’approvisionnement », souligne Alison Jones, la directrice pour le Royaume-Uni de Stellantis (PSA, Chrysler…). Son usine Vauxhall d’Ellesmere Port, près de Liverpool, est d’ailleurs en sursis. En janvier, Carlos Tavares, le directeur exécutif du groupe, avertissait qu’une décision sur sa possible fermeture serait prise « dans les prochaines semaines ». Six mois plus tard, Mme Jones refuse d’en dire plus. « Cela dépend de nos négociations avec le gouvernement », explique-t-elle, sans préciser exactement la teneur des discussions.

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Assurance-chômage : le bonus-malus pour les entreprises entre en application

La réforme de l’assurance-chômage poursuit son cheminement chaotique. Alors que le nouveau mode de calcul de l’allocation vient d’être suspendu par le Conseil d’Etat, d’autres dispositions entrent en application à compter du jeudi 1er juillet, conformément à ce qui était prévu dans un décret du 30 mars.

L’une des mesures mises en vigueur en ce début d’été correspond à une promesse de campagne d’Emmanuel Macron. Elle cherche à combattre la précarité dans le monde du travail en incitant les dirigeants de sociétés à privilégier les embauches sur de longues durées, par le biais d’un système de bonus-malus. Ainsi, les cotisations patronales seront modulées en fonction du nombre de contrats et de missions d’intérim qui prennent fin. Au lieu d’être, comme aujourd’hui, soumises à un prélèvement uniforme (égal à 4,05 % de la masse salariale), les entreprises verront leur contribution varier en tenant compte de la stabilité des effectifs : les plus vertueuses seront assujetties à la ponction minimale (3 %) ; à l’inverse, celles qui font tourner fréquemment leurs équipes paieront davantage, dans la limite de 5,05 % au maximum.

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L’instauration de ce mécanisme va prendre du temps. A partir de jeudi et jusqu’à la fin juin 2022, le comportement des employeurs sera scruté à la loupe afin de recenser les salariés dont le contrat de travail s’est achevé. Sur cette base sera ensuite déterminé un taux de cotisation, plus ou moins élevé selon la part de main-d’œuvre restée en place. Cette logique de la carotte et du bâton comporte trois limites. D’abord, la modulation ne sera effective qu’à partir de début septembre 2022 et « seulement jusqu’au 31 octobre [suivant], soit le terme de l’application du règlement d’assurance-chômage », comme le rappelle le Conseil d’Etat dans sa décision suspendant la formule de calcul de l’allocation : cela « atténue, dans une large mesure, le caractère supposément incitatif de la période d’observation qui débute le 1er juillet 2021 », ajoute la haute juridiction. Le ministère du travail, lui, fait valoir que le dispositif a vocation à être reconduit, quand un nouveau corpus de règles sera mis au point pour la période allant au-delà de la fin octobre 2022.

Deuxième limite du bonus-malus : seules sont concernées les entreprises d’au moins 11 personnes évoluant dans sept grands secteurs (hébergement et restauration, transport et entreposage, fabrication de denrées alimentaires, etc.). Enfin, les sociétés les plus ébranlées par la crise sanitaire en seront provisoirement exclues : par exemple, les compagnies aériennes, les hôtels et cafés, les gestionnaires de terrains de camping… D’après le ministère du travail, le dispositif jouera, dans un premier temps, pour quelque 21 000 entreprises, soit un peu moins de 10 % de celles comptant au moins 11 salariés.

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Le chèque bureau, une idée qui fait son chemin

Carnet de bureau. Le 21 juin, trente-trois personnalités du monde de l’entreprise ont signé un appel de la Fondation Travailler autrement à créer un « chèque bureau ». Le télétravail ayant durablement bousculé l’organisation du travail, ils défendent l’idée d’un dispositif qui permettrait à tout salarié d’accéder au bureau de proximité de son choix, qu’il se situe dans un espace de coworking, dans un hôtel ou dans un tiers-lieu.

A l’instar du Ticket Restaurant, « ce titre serait émis directement par l’employeur ou par l’intermédiaire d’une entreprise spécialisée ; à l’issue d’un accord d’entreprise, le Comité social et économique pourrait lui aussi participer au financement de ces chèques (…). Ni les salariés ni les entreprises ne peuvent supporter seuls le coût de leur propre bureau ou d’un second bureau », expliquent les signataires, qui envisagent que le « chèque bureau » soit cofinancé par l’Etat et les collectivités locales. « Il permettra également aux territoires de redynamiser leur tissu économique local », estime la Fondation Travailler autrement dans une note ad hoc.

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Quelle que soit l’évolution de la crise sanitaire, les entreprises qui préparent la rentrée de septembre maintiennent pour la plupart un à trois jours de travail à distance par semaine et repensent leurs bureaux. Au sortir d’une longue période de travail en mode dégradé, la réflexion porte sur une organisation compétitive avec du télétravail régulier.

Un nouveau marché

L’accord national interprofessionnel signé en novembre 2020, en prévoyant la possibilité de télétravailler ailleurs qu’à domicile, a ouvert la voie à la commercialisation d’espaces de travail autonomes, déconnectés de l’entreprise et du domicile. C’est un nouveau marché, investi aujourd’hui à la fois par l’immobilier de bureau évidemment, mais aussi par les professionnels du coworking et de l’hôtellerie.

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Rien d’étonnant ainsi de trouver dans les soutiens au « chèque bureau » le PDG d’Accor Sébastien Bazin, qui expliquait début mai sur BFM Business vouloir, grâce au flex office, « donner la capacité à 8 milliards de personnes de travailler de n’importe où, à l’hôtel, dans un restaurant, dans un musée ». Il annonçait alors des espaces de flex office « dans 100 % du réseau » des hôtels Accor, mais pas seulement. Son objectif étant d’organiser ce système de bureau pour d’autres groupes que le sien. Autre signataire, Clément Alteresco, fondateur de Morning, qui a organisé l’aménagement, dans le prestigieux Hôtel de la Marine à Paris, d’un espace de coworking de 600 postes de travail, qui sera inauguré jeudi 1er juillet.

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Le délicat exercice de l’enquête interne en cas de harcèlement

Balance ta start-up, ta rédac, ton agency… Les accusations de harcèlement se multiplient. Et les entreprises, soucieuses de leur image, prennent le sujet très au sérieux. Un premier pas vers la prévention du phénomène a été fait avec l’obligation pour les entreprises de désigner un référent harcèlement sexuel depuis le 1er janvier 2019.

« En cas de harcèlement moral ou sexuel avéré, l’employeur engage sa responsabilité civile voire pénale s’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour prévenir et faire cesser de tels agissements, explique Xavier Berjot, avocat associé au sein du cabinet Sancy Avocats. Toute allégation de harcèlement doit donner lieu à une enquête interne, afin d’établir la matérialité et la preuve des faits dénoncés. »

En effet, que les faits de harcèlement soient constitués ou non, si l’employeur n’a pas diligenté une telle enquête, il se met en faute car il n’a pas respecté son obligation de protection de la santé et de la sécurité de ses salariés. Cependant le code du travail ne prévoit aucune règle particulière concernant les modalités de l’enquête. Quant à la jurisprudence, elle est encore bien mince.

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L’enquête peut être menée en interne, le plus souvent par la direction des ressources humaines, ou par un cabinet externe. L’exercice est délicat. « C’est un métier », explique Bruno Gourévitch, président d’Altaïr Conseil, cabinet de conseil en organisation, gestion des risques et gestion de crise, qui a réalisé ces douze derniers mois une centaine d’enquêtes de ce type pour ses entreprises clientes. « Il est fondamental de rester neutre et d’être factuel », précise-t-il. Une neutralité qui fait parfois défaut. Ainsi Pierre Gojat, représentant du personnel CFE-CGC chez Orange, estime que « le respect de la présomption de véracité de la parole des victimes est encore largement bafoué dans les entreprises et la minimisation de leurs propos trop fréquente ».

« L’enquête doit être contradictoire »

C’est pour que ces enquêtes soient les plus objectives possible que Bosch France – 6 600 salariés – a coconstruit avec le comité social et économique (CSE) un guide pratique à destination des vingt-six enquêteurs (référents harcèlement et membres de la DRH). Un guide complété par des formations d’une journée, dispensées par un cabinet extérieur. Une chose est sûre : la réactivité de la direction est primordiale. Bosch France conseille ainsi de mener l’enquête en une ou deux semaines, et au maximum un mois, s’il faut interroger de nombreuses personnes.

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