S’il ne l’a inventée lui-même, Emmanuel Macron a du moins largement contribué à faire émerger une tendance en vogue : le « chômeur-shaming » (de l’anglais to shame, qui pourrait se traduire par « coller la honte »). Là où le body-shaming consiste à se moquer des particularités physiques de quelqu’un, le chômeur-shaming peut se définir comme l’humiliation publique, de préférence face caméra, d’une personne sans travail qui a eu la mauvaise idée de se trouver là.
Le 16 septembre, c’est un jeune horticulteur sans emploi qui a été la victime de cette séance de flagellation symbolique. Alors qu’il avait interpellé le président de la République, dans le parc de l’Elysée, à l’occasion des Journées du patrimoine, pour lui confier sa difficulté à trouver un travail dans sa branche, il s’est vu conseiller de s’orienter plutôt vers les cafés, la restauration, le bâtiment où, paraît-il, les emplois pullulent. « Je traverse la rue et je vous en trouve. Ils veulent seulement des gens qui sont prêts à travailler, avec les contraintes du métier », a précisé M. Macron. Sous-entendu : pas des feignants qui regardent pousser les thuyas.
Le premier jardinier augmenté de France
S’il fut assimilé par certains commentateurs à un mépris de classe, le chômeur-shaming est surtout révélateur de la centralité rémanente du travail au sein des sociétés occidentales. Aujourd’hui, à l’heure de la robotisation et de l’intelligence artificielle, ne pas avoir d’emploi est encore envisagé – bizarrement – comme quelque chose de honteux. Censé posséder des vertus dynamisantes, le chômeur-shaming est donc avant tout cet opprobre social diffus qui pèse au quotidien sur l’inactif et qui a trouvé là, dans cette énième sortie jupitérienne, une manifestation emblématique.
Dans une France qui se rêve ouvertement 4.0, le président aurait pourtant pu inviter le jeune homme à se former aux nouvelles technologies et à devenir, pourquoi pas, un…
Une valeur estimée à 200 millions d’euros, plus de 9,5 millions d’euros levés, 1,5 million d’utilisateurs… Au moment de son rachat par son concurrent britannique, Trainline, en mars 2016, Captain Train, créé en 2009, est sur le haut de la vague. Pourtant, pas moins de cinq membres de la start-up ont aujourd’hui rejoint les équipes de l’incubateur public Beta.gouv.fr.
Loin d’un salaire mirobolant ou d’une perspective d’entrée en Bourse, c’est bien autre chose qui a poussé ces start-upeurs à succès à franchir le Rubicon. « Les start-up se vantent toujours de vouloir changer le monde, sans trop y parvenir, explique Grégoire Novel, ancien de Captain Train, aujourd’hui développeur pour Demarches-simplifiees.fr. Il est beaucoup plus facile d’avoir un impact, d’agir pour l’intérêt général dans une start-up d’Etat, en touchant beaucoup plus de gens. » Voila pour le côté positif.
Côté négatif, pas grand-chose à signaler, selon lui. « Il y a beaucoup de similitudes dans le fonctionnement de ces structures. On est dans une organisation basée sur la confiance, autonomes dans notre travail. Et on retrouve aussi le désir de bien faire les choses techniquement. »
Une communauté d’environ 220 personnes
Et si les start-up d’Etat devenaient un argument pour attirer développeurs ou jeunes diplômés à la fibre entrepreneuriale ? « Début 2017, il n’était pas facile de recruter les talents, confesse Ivan Collombet, qui accompagne les start-up d’Etat chez Beta.gouv.fr. Mais depuis quelques mois, les problèmes de recrutement ont complètement disparu. Il suffit qu’on diffuse un tweet pour que les candidatures arrivent. » Qu’est-ce qui a changé ?
Une communauté qui s’est élargie, pour compter environ 220 personnes, des projets dotés d’une certaine visibilité – comme le Pass culture –, un effet « réseau » indéniable. Et puis cette envie de trouver un sens à son travail de plus en plus partagée. « Quand ils voient…
La Bonne Boîte, la Bonne Formation, bientôt la Bonne Alternance, mais également Avril (la VAE facile) ou Clara, pour tout connaître sur les aides… Pôle emploi abrite, au sein de son incubateur La Fabrique, huit start-up. « C’est aujourd’hui l’un de nos plus gros incubateurs, mais aussi le plus vieux », précise Ismaël Héry, coach au sein de l’incubateur d’Etat Beta.gouv.fr.
L’histoire de la Bonne Boîte est souvent citée en exemple pour raconter l’émergence des start-up d’Etat. Lors du premier appel à projets, lancé en 2015, Eric Barthélémy, un conseiller d’une agence proche d’Hayange (Moselle), dépité de ne pas pouvoir venir en aide aux demandeurs d’emploi faute de postes à leur proposer, a une conviction : c’est le « marché caché » qu’il faut explorer.
Il lance l’idée de créer un site sur lequel seraient recensées toutes les entreprises de la région qui recrutent par candidatures spontanées. Bingo ! La start-up est lancée, et la Bonne Boîte permet de faire progresser de deux points le taux de retour à l’emploi en six mois. En 2016, le dispositif est étendu à la France entière. Et c’est aujourd’hui l’un des services les plus utilisés sur l’Emploi Store, la plate-forme de services aux demandeurs d’emploi.
« Au début, mes collègues étaient sceptiques, ils me disaient : “Tu t’amuses.” », se souvient Eric Barthélémy. Mais après la Bonne Boîte vient la Bonne Formation, lancée par Christophe Bonraisin, qui vise à apporter de la transparence sur le marché de la formation professionnelle…
Un « potentiel d’innovation réel »
A chaque appel à projet, au rythme de deux fois par an, environ 200 dossiers arrivent, émanant de l’un ou plusieurs des 30 000 agents. « Le rôle des start-up est de plus en plus reconnu par les conseillers », souligne Eric Barthélémy. « Le cas de Pôle emploi est un peu particulier : les conseillers sont sous forte pression, ils voient tous les jours en agence des gens qui sont dans des situations…
Laurent Berger compte « assumer ses responsabilités » et participer aux négociations sur l’assurance chômage. Le secrétaire général de la CFDT a affirmé dimanche 23 septembre au micro de l’émission Le Grand Jury sur RTL qu’il ne compte pas pratiquer la politique de la « chaise vide ». Pas question, pour lui, de laisser le gouvernement prendre la main en boudant les négociations.
L’exécutif a réclamé vendredi que la future négociation sur l’assurance-chômage permette de réaliser de 3 à 3,9 milliards d’euros d’économies en trois ans, ce que les partenaires sociaux ont dénoncé comme une « logique uniquement budgétaire ». Les huit organisations syndicales et patronales qui gèrent paritairement l’assurance-chômage, à travers l’Unédic, ont souhaité se laisser du temps pour décider de négocier ou non. Si elles refusent, l’Etat prendra la main. Dans le cas contraire, les partenaires sociaux auront quatre mois pour aboutir à un accord.
« S’il n’y a pas de négociation, c’est l’Etat qui récupère l’assurance-chômage et à chaque fois (…) que l’Etat a récupéré l’assurance-chômage, c’était des droits en moins pour les demandeurs d’emploi. Il y a un risque énorme à laisser le terrain à l’Etat seul. Si la stratégie (du gouvernement) c’est de dire“on fait en sorte qu’ils n’ouvrent pas de négociation”, je pense qu’on ne tombera pas dans le piège ».
« Ni la chaise vide, ni le chèque en blanc »
« La CFDT ne pratique ni la chaise vide, ni le chèque en blanc », a expliqué le responsable, qui souhaite toutefois attendre l’arrivée « lundi ou mardi » de la lettre de cadrage envoyée par le gouvernement aux partenaires sociaux, avant d’annoncer sa décision. « La CFDT doit assumer ses responsabilités », a-t-il martelé, réaffirmant la volonté du syndicat de « refonder le système (…) et ne pas pénaliser » les demandeurs d’emploi.
Le responsable syndical a également rappelé que la dégressivité des allocations-chômage constituait une « ligne rouge » pour la CFDT. « Aucune étude économique sur les systèmes d’assurance-chômage dans le monde n’a prouvé l’efficacité de la dégressivité », a-t-il affirmé.
La ministre du Travail Muriel Pénicaud a jugé vendredi qu’il appartenait aux partenaires sociaux, et non au gouvernement, de « définir si, parmi les formules, ils veulent la dégressivité ou autre chose ».
« En France, une salariée a droit à un congé maternité de seize semaines, dont huit obligatoires. Un salarié, lui, dispose d’un congé paternité facultatif de onze jours », rappelle cette pétition publiée samedi 22 septembre dans Le Parisien, jugeant que « l’organisation des congés “à la française” participe au maintien d’un système inégalitaire et patriarcal au travail, en biaisant les critères d’embauche et d’avancement ».
« Seule une loi peut créer les conditions d’une parentalité à égalité, en rendant ce congé obligatoire et de même durée pour les deux parents, qu’ils soient travailleur·euses indépendant·es ou salarié·es », poursuit la pétition.
Les 160 signataires, parmi lesquels figurent des experts comme le psychiatre Serge Hefez, de simples citoyens et des personnalités, telles que l’humoriste Guillaume Meurice, exhortent à s’inspirer du Portugal, où le congé paternité vient d’être rendu obligatoire.
« Le congé paternité ne peut rester une option, au risque que le père ou second parent n’ose affirmer son choix de peur d’être discriminé à l’embauche ou dans sa carrière », arguent-ils.
Le gouvernement a annoncé jeudi que les travailleuses indépendantes, cheffes d’entreprises et agricultrices pourraient bénéficier en 2019 d’un congé maternité aussi long que celui des salariées ; une promesse de campagne d’Emmanuel Macron.
Dans un communiqué, les deux collectifs regrettent le « report sine die de la réforme du congé paternité par Edouard Philippe, pourtant chef d’un gouvernement qui a désigné l’égalité entre les femmes et les hommes comme la “grande cause du quinquennat” ».
Dans un rapport remis récemment à l’exécutif, l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) avait préconisé de rallonger le congé paternité et de le rendre au moins en partie obligatoire.
« Le congé paternité, il est très important qu’il puisse être amélioré », a commenté jeudi sur BFM-TV la secrétaire d’Etat chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa. Mais « là on est vraiment concentrés sur le congé maternité », avait-elle ajouté.
Alors que la nouvelle procédure d’admission dans l’enseignement supérieur a clos le 21 septembre, des pistes de réforme se dessinent, après les polémiques de l’été.
Le gouvernement a réclamé vendredi 21 septembre que la future négociation sur l’assurance-chômage permette au régime de réaliser de 3 à 3,9 milliards d’euros d’économies en trois ans, ont annoncé les négociateurs patronaux et syndicaux.
Le chef de cabinet de la ministre du travail, Muriel Pénicaud, a présenté aux partenaires sociaux les grandes lignes du document de cadrage qui doit servir de base aux prochaines négociations sur le régime. Tous les négociateurs en ont dénoncé la « logique budgétaire ». Les syndicats ont fait savoir qu’ils décideraient ou non de négocier d’ici à la « semaine prochaine », tandis que le Medef dit avoir besoin de « quelques semaines » de réflexion.
« L’objectif est de faire des économies à hauteur, nous dit-on, de 1 milliard à 1,3 milliard supplémentaires chaque année, en plus des efforts déjà consentis au titre des dernières réformes », a dénoncé Jean-Michel Pottier, vice-président de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME). Cet effort devra être renouvelé chaque année pendant trois ans. « C’est un document sur une réforme à l’envers, puisqu’on part d’un objectif budgétaire pour fixer les objectifs dans lequel on va reparamétrer l’assurance-chômage », ajoute M. Pottier.
Un « prisme marqué sur les économies »
« 1,3 milliard d’économies par an, c’est beaucoup », a de son côté réagi Michel Beaugas, de Force ouvrière (FO), qui a critiqué un « prisme marqué sur les économies ». Ces économies « sont extrêmement conséquentes, qui font suite à une convention où il y a eu déjà 800 millions d’économies sur les droits des demandeurs d’emploi », a réagi Marylise Léon (CFDT), qui a demandé au gouvernement « de sortir de la logique budgétaire ».
Patronat et syndicats gèrent paritairement l’assurance-chômage, à travers l’Unédic. Depuis la crise, le régime est passé d’excédentaire (4,5 milliards d’euros en 2008) à déficitaire (−3,5 milliards en 2017). Mais forte de la convention signée en 2017 et de la reprise économique, l’Unédic table sur un retour à l’équilibre dès 2019, puis à un excédent en 2020.
Pour autant, « il faut accélérer le désendettement », a fait savoir le ministère, à propos de la dette de l’Unédic, qui a atteint 35 milliards d’euros. Interviewée sur LCI vendredi soir, Muriel Pénicaud a estimé que c’était en luttant contre la précarité qu’on permettrait au régime de faire des économies : « Les contrats courts ça coûte 8 milliards de plus que les cotisations que ça rapporte. Donc si on lutte contre la précarité, en même temps on rend moins fragile le dispositif. »
L’exécutif souhaite notamment que soit revu le système permettant de toucher une allocation chômage et un petit salaire. Prévu pour inciter au retour à l’emploi, ce dispositif dit de « l’activité réduite » ou du « cumul emploi-chômage » concerne 800 000 personnes en moyenne par mois, notamment des femmes et des seniors.
Interrogée sur la dégressivité des allocations-chômage, la ministre a rappelé que « ce n’est pas au gouvernement de dire les solutions » mais aux partenaires sociaux de « définir si, parmi les formules, ils veulent la dégressivité ou autre chose ».
Les négociations sur ce dossier, si les partenaires sociaux souhaitent les mener, se tiendront jusqu’à la fin de janvier ou au début de février. La lettre de cadrage devrait être remise la semaine prochaine, selon les partenaires sociaux.
L’exécutif fait « les choses dans l’ordre », a affirmé Benjamin Griveaux sur LCI, vendredi 21 septembre. Le secrétaire d’Etat et porte-parole du gouvernement a défendu tout au long de son interview la politique économique menée depuis l’élection d’Emmanuel Macron. Mais certains de ses arguments sont contestables, voire erronés. Retour sur trois d’entre eux.
1. Certains impôts ont bien augmenté en 2018
Ce qu’il a dit
Interrogé sur le pouvoir d’achat des retraités, Benjamin Griveaux a défendu le calendrier des réformes, évoquant le fait qu’après la hausse de la contribution sociale généralisée (CSG) au début de 2018, une bonne partie des retraités bénéficierait de la baisse d’un tiers de la taxe d’habitation en octobre 2018.
« Vous avez d’abord augmenté les impôts et maintenant vous dites qu’on va les baisser ? », demande alors le journaliste de LCI Christophe Jakubyszyn. « C’est inexact, on n’a augmenté aucun impôt. Aucun », lui rétorque Benjamin Griveaux. Et « la CSG ? », l’interpelle le journaliste. Le porte-parole du gouvernement justifie alors la politique économique du gouvernement, qui vise selon lui à ce que « le travail paie mieux ».
POURQUOI C’EST FAUX
Benjamin Griveaux joue ici sur les mots : quoi qu’on en pense, le gouvernement a bien augmenté certaines taxes ou impôts. La hausse du taux normal de la contribution sociale généralisée de 1,7 point au début de 2018 en est un exemple. Mais on peut aussi citer la hausse de la fiscalité des carburants, certes décidée pour des considérations environnementales, ainsi que celle du prix du tabac, légitimée par des impératifs de santé publique. « On augmente les impôts sur ce qui pollue », a d’ailleurs déclaré la ministre des transports, Elisabeth Borne, vendredi sur Europe 1 au sujet du prix des carburants.
Au crédit du porte-parole du gouvernement, on peut néanmoins noter que le taux de prélèvements obligatoires devrait baisser en 2018 par rapport en 2017, passant de 44,7 % à 44,3 %, selon les prévisions gouvernementales. S’il est faux d’affirmer qu’aucun impôt n’a augmenté, il est vrai que les impôts, au sens large, devraient diminuer.
Le journaliste de LCI a cité, au cours de l’interview, une étude de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE, un organisme de prévision et d’évaluation des politiques publiques), selon laquelle la somme des mesures prises par le gouvernement en 2018 aurait un effet nul sur le pouvoir d’achat, avant une hausse de celui-ci en 2019.
Un point contesté par Benjamin Griveaux à plusieurs reprises : « Cela ne peut pas être zéro en 2018 », a-t-il tranché. Et de citer les principales dispositions du gouvernement en faveur du pouvoir d’achat : baisse des cotisations salariales ; baisse d’un tiers de la taxe d’habitation pour 80 % des contribuables ; hausse du minimum vieillesse… En matière de pouvoir d’achat, « il faut faire le total » des mesures favorables et défavorables, a-t-il estimé.
POURQUOI C’EST CONTESTABLE
L’OFCE a publié jeudi une étude sur l’effet des mesures prises par le gouvernement sur le pouvoir d’achat en 2018 et en 2019. L’effet total de celles-ci serait ainsi quasi nul pour l’année en cours (+ 0,1 milliard), mais plus notable à partir de l’année 2019 (+ 3,5 milliards).
Contrairement à ce qu’affirme Benjamin Griveaux, ces prévisions tiennent compte de l’ensemble des annonces gouvernementales. Ainsi, l’OFCE estime que la fiscalité directe baisserait de 4,3 milliards d’euros en 2018 et de 9,4 milliards d’euros en 2019. Elle juge aussi que les prestations sociales augmenteront de 1 milliard d’euros en 2018, mais baisseront de 2,3 milliards d’euros en 2019 (principalement à cause de la désindexation des pensions de retraite, d’autres mesures étant par ailleurs favorables au pouvoir d’achat).
Il ne s’agit bien sûr que de prévisions, et il faudra encore patienter plusieurs mois pour pouvoir analyser avec certitude l’évolution du pouvoir d’achat. D’autant que certains points font l’objet de controverses, comme la hausse de la fiscalité du tabac : le gouvernement estime que l’OFCE, tout comme l’Insee, surestime son effet sur le portefeuille des ménages en sous-estimant la baisse induite de la consommation de cigarettes.
Cependant, Benjamin Griveaux occulte une réalité de taille : les deux mesures les plus fortes en matière de pouvoir d’achat du gouvernement en 2018 sont la réforme de la taxe d’habitation (+ 3 milliards, selon l’OFCE) et la « transformation » de l’impôt sur la fortune (ISF, + 3,2 milliards). Or, la seconde ne profitera qu’aux quelque 330 000 ménages fortunés redevables de l’ISF jusqu’à présent, qui sont les grands gagnants du premier budget du quinquennat.
Si l’on exclut la baisse de l’ISF, la balance du pouvoir d’achat en 2018 pour les foyers français vire au rouge. Il ne s’agit bien sûr que d’un constat d’ensemble, qui cache des situations extrêmement variables, mais qu’on ne peut balayer d’un revers de la main.
3. Une intox sur les emplois non pourvus
Ce qu’il a dit
Interrogé sur l’échange entre Emmanuel Macron et un jeune horticulteur au chômage le 15 septembre, au cours duquel le chef de l’Etat lui a recommandé de postuler dans l’hôtellerie, la restauration ou le bâtiment, le porte-parole du gouvernement a affirmé ceci :
« Moi, ce que je veux dire suite à l’épisode du week-end dernier que vous mentionnez, [c’est que] l’an dernier en France, il y a 300 000 offres d’emploi où il n’y a jamais eu de personne en face à proposer. »
POURQUOI C’EST FAUX
On ne peut pas affirmer, comme le fait Benjamin Griveaux, que 300 000 offres d’emploi n’auraient pas fait l’objet de ne serait-ce qu’une candidature en 2017 en France.
Ce chiffre est en fait tiré d’une enquête de Pôle emploi publiée en décembre 2017 (à défaut d’être exhaustive, il s’agit de la plus vaste sur la question). Selon cette dernière, 2,9 millions des 3,2 millions d’offres d’emploi « déposées à Pôle emploi sur une année » ont été pourvues. Restent donc 300 000 offres d’emploi qui n’ont pas trouvé preneur. Mais il est faux d’affirmer que ce serait par absence totale de candidature.
En réalité, ce chiffre englobe 97 000 recrutements annulés parce que le besoin d’embauche avait disparu (par exemple lorsque l’employeur n’a plus le budget) et 53 000 pour lesquels le recrutement se poursuivait au moment de l’étude. Les 150 000 offres restantes sont, elles, étiquetées comme « abandon de recrutement faute de candidats ».
Mais attention : dans 87 % des cas, l’employeur potentiel a bien reçu des candidatures avant de renoncer à recruter. Il les aura simplement écartées, les jugeant insatisfaisantes. Dans « la moitié des cas, l’offre a recueilli entre une et cinq candidatures », précise Pôle emploi. Le cas des offres qui n’ont fait l’objet d’aucune candidature, évoqué par Benjamin Griveaux, ne concerne à l’arrivée non pas 300 000 offres mais 19 500, selon cette étude. Soit environ 0,6 % de l’ensemble des offres d’emploi.
En résumé, cette étude de Pôle emploi montre bien des tensions sur le marché du travail, entre les attentes des recruteurs et les candidatures qui leur parviennent réellement. Mais cet écart peut aussi s’expliquer par des défauts d’attractivité des postes concernés, et en tout cas dans une très faible proportion par une absence totale de main-d’œuvre prête à travailler.
Tribune. Le low cost a de facto une qualité évidente : par une offre ajustée, il permet d’élargir le choix des consommateurs, notamment les plus pauvres pour qui n’existaient pas toujours de solutions abordables spécifiques. En outre, l’irruption du low cost bouleverse une situation concurrentielle établie et force les acteurs du secteur à revoir des marges parfois très (trop ?) confortables. Lidl, Tchip, Ikea, Ryanair, Free ont permis à des milliers ou des millions de personnes de diminuer leur taux d’effort pour respectivement se nourrir, se coiffer, se meubler, voyager ou communiquer. Cet aspect est fondamental – mais on ne saurait s’arrêter là.
La critique la plus évidente du modèle low cost porte sur son coût total : il élargit certes le nombre des consommateurs, mais au prix de méthodes parfois brutales. Bas salaires, mauvaises conditions de travail, obstruction aux syndicats, délocalisations… : les dessous de « la méthode Wal-Mart », copiée dans le monde entier, ont été mis en évidence depuis longtemps (Travailler plus pour gagner moins : la menace Wal-Mart, Gilles Biassette et Lysiane J. Baudu, Buchet Chastel, 2008), y compris certaines conséquences plus étonnantes comme l’augmentation du taux d’obésité (« Supersizing supercenters ? The impact of Walmart supercenters on body mass index and obesity », Charles Courtemanche et Art Carden, Journal of Urban Economics, n°69, 2011).
Risque de payer plus cher
Mais le low cost peut avoir des conséquences plus pernicieuses encore, en créant des écarts importants entre consommateurs pauvres. Au départ, l’arbitrage semble clair : le modèle propose une nouvelle équation « prix-performance », un service ou produit ajusté, certes parfois de moindre qualité (« good enough », disent les Anglo-Saxons), mais à un prix très inférieur. Quand vous allez chez Ikea, vous savez qu’il va falloir aller chercher vos meubles, les monter vous-même… et ne pas les déménager trop souvent.
Tribune. L’université est souvent décriée pour son niveau et les inégalités qui s’y perpétuent. Etrangement, les écoles de commerce sont absentes du débat public. Pourtant, ce sont les élites économiques de demain que l’on y forme. J’y ai travaillé pendant un an, après avoir exercé auparavant dans trois universités, et aujourd’hui à Sciences Po Lille. Mais ce qui se passe en école de commerce n’a rien en commun avec ce que l’on est en droit d’attendre de l’enseignement supérieur.
Les étudiants y calent les tables avec des billets de 50 euros ; leur emploi du temps est si chargé qu’il leur faut deux téléphones portables, un « perso » et un « pro ». On s’était cru dans une école, on se découvre dans une garderie. Pas de bibliothèque : trop coûteux, et puis de toute façon, les étudiants ne lisent pas. Globalement, les étudiants se montrent intolérants à l’effort, à la frustration ou à l’ennui. Bien sûr, une minorité se révèle motivée et douée. Seulement, très rares sont ceux qui prennent des notes. Quand on tente de les faire travailler, quelques-uns répliquent sur le ton de l’évidence : « Mais monsieur, je paye votre salaire, donc je fais ce que je veux. »
J’ai cru, en arrivant, au discours que les écoles de commerce tiennent sur elles-mêmes : on paye des frais d’inscriptions certes élevés, mais, à la fin, nos futures élites auront des compétences solides. En fait de compétences, j’ai très vite déchanté.
A quelques mois du diplôme, la plupart ne savent pas ce qu’est un seuil de rentabilité ; la vue d’un bilan ou d’un compte de résultat les effraie aussi sûrement qu’un crucifix terrorise les vampires ; leur anglais est incompréhensible pour qui ne parle pas français ; calculer un taux de croissance suscite le désarroi, même parmi les « bons » éléments… On se rassure parfois en se disant que, pour des collégiens, ils ne sont pas si mauvais. Et puis, on les entend parler de leurs stages dans les meilleures entreprises…