Une TPE-PME sur trois concernée par la « trappe à bas salaires »
La « smicardisation », qui se traduit par un tassement des grilles autour du salaire minimum, touche des millions de personnes : le nombre de salariés rémunérés au smic a atteint 3,1 millions début 2023, soit un million de plus que deux ans auparavant. Mais ce phénomène qui frappe les travailleurs modestes devient aussi, et de plus en plus, un sujet de préoccupation pour les chefs d’entreprise.
Pour la première fois, le baromètre Bpifrance Le Lab réalisé avec l’institut d’études économiques Rexecode a inclus une question liée aux conséquences de l’indexation automatique du smic sur l’inflation, qui a provoqué ce tassement des grilles salariales, dans son enquête trimestrielle. Dans l’édition du premier trimestre 2024 de cette étude publiée lundi 26 février, réalisé auprès des TPE et PME (comptant de 1 à 250 salariés, et moins de 50 millions d’euros de chiffre d’affaires), près d’un patron sur deux indique avoir constaté ce phénomène au sein de son entreprise.
Parmi eux, un petit quart (22 %) estime être en mesure, dès 2024, de revaloriser les salaires de manière à limiter, voire annuler l’effet de cette hausse automatique du smic sur leur grille salariale. Autrement dit : les personnes qui se sont fait « rattraper » par le smic, car leurs salaires ont évolué moins vite que le salaire minimum, verront leur rémunération augmenter cette année suffisamment pour restaurer l’écart initial avec leurs collègues payés au niveau du smic.
Sentiment de déclassement et d’injustice
Toujours parmi les entreprises concernées, les deux tiers se disent, en revanche, dans l’impossibilité de procéder à de telles augmentations et donc, de compenser le tassement intervenu pendant les deux années écoulées, où l’inflation a été forte. Ils invoquent trois raisons principales : le manque de marges financières – en lien avec la dégradation de la conjoncture, notamment ; le fait qu’augmenter les salaires leur fera perdre des allègements de cotisations patronales, augmentant ainsi fortement le coût du travail pour l’entreprise ; et le fait que ce coût du travail serait alors en décalage avec la productivité des postes concernés.
Ils sont, de fait, confrontés à la situation de « trappe à bas salaires », qui est la conséquence du système français d’allègements de cotisations sociales, notamment au niveau des salaires les plus faibles. « Cela concerne 34 % des entreprises consultées par le baromètre, comptabilise Philippe Mutricy, directeur de l’évaluation des études et de la prospective chez Bpifrance. Dans la mesure où l’on dénombre entre 1,2 et 1,4 million d’entreprises de 1 à 250 salariés en France, ce n’est pas un petit sujet. »
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