Start-up : la face cachée de l’hypercroissance

Start-up : la face cachée de l’hypercroissance

L’économie numérique raffole des entreprises qui connaissent une croissance fulgurante. Mais il y a un revers de la médaille à cette frénésie : des problèmes managériaux apparaissent et la pression des investisseurs peut se révéler lourde à gérer pour les patrons de ces jeunes pousses.

Par Publié aujourd’hui à 10h40

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OLIVIER BONHOMME

Thomas Rebaud parle vite, en homme pressé qu’il est : « Ma philosophie, ce n’est pas de faire en vingt ans ce qui peut l’être en cinq. » Il lui a fallu moins de quatre ans pour faire de Meero l’une des start-up françaises les plus en vue. Mi-juin, la plate-forme consacrée aux photographes a annoncé une levée de fonds de 230 millions de dollars (207 millions d’euros), la seconde plus importante de l’histoire de la French Tech. De quoi faire croître les effectifs et partir à la conquête du monde. De 40 salariés début 2018, la société devrait passer à environ 1 200 d’ici fin 2019. Un exemple parfait de cette « hypercroissance » dont raffole l’économie numérique.

Lire la chronique : « L’argent afflue dans la French Tech »

Le phénomène n’a pas de définition unique, mais désigne la situation d’entreprises qui connaissent un bond fulgurant de leur chiffre d’affaires – certains retiennent le palier d’une croissance de plus de 40 % sur trois années consécutives. Il coïncide souvent avec une importante levée de fonds. Et constitue un changement de dimension, souvent synonyme de fortes turbulences. « Tout est accéléré, le meilleur comme le pire. On ne peut rien laisser traîner, parce que le plus petit problème peut rapidement prendre des proportions démesurées », explique Matthieu Beucher, dirigeant de Klaxoon, une start-up qui, en deux ans, a vu son chiffre d’affaires croître de 15 000 %.

Pour ces sociétés, le passage à l’hypercroissance signe le deuil des premières heures si enthousiasmantes, où chacun fait un peu tout. Soudain, les effectifs explosent, les déménagements s’enchaînent, et l’organisation est chamboulée en permanence. De nouveaux métiers apparaissent et les exigences à l’égard des collaborateurs sont toujours plus élevées. Souvent l’anglais devient une compétence obligatoire. « D’un coup, c’est moins cocooning », reconnaît Christian Raisson, cofondateur de ManoMano, la plate-forme de vente en ligne d’outils de bricolage et de jardinage.

Gare aux erreurs de casting

Les collaborateurs de la première heure ne s’y retrouvent pas toujours. « Avec l’hypercroissance, soit tu deviens un expert dans un domaine, soit tu pars », admet Octave Klaba, le patron d’OVH, le géant du cloud européen. Et gare aux erreurs de casting quand on recrute à marche forcée. Après une levée de fonds de 30 millions d’euros, Armand Thiberge, fondateur de SendinBlue (marketing digital), a entrepris de doubler les effectifs de sa société, à 200 personnes environ : « On a recruté des gens à de très hauts postes de responsabilité qui ne sont pas restés. »

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LJD

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