Le Medef condamné aux prud’hommes pour « licenciement vexatoire »
On ne badine pas avec le droit du travail. Si le Medef semble l’avoir oublié à l’occasion d’un litige, le conseil de prud’hommes de Paris vient de le rappeler à ses obligations. Le 13 avril, l’organisation patronale a été condamnée à verser un peu plus de 65 000 euros à un ancien salarié, dont 10 000 euros pour « licenciement brutal et vexatoire », comme l’indique le jugement, révélé par Le Canard enchaîné du mercredi 2 juin et que Le Monde s’est procuré.
Pierre-Yves Lavallade est embauché en septembre 2016 par le Medef comme directeur du pôle des fédérations professionnelles. Un an après, il devient chef de cabinet « au sein de la présidence » du mouvement d’employeurs, alors dirigé par Pierre Gattaz. En juillet 2018, ce dernier cède son fauteuil à Geoffroy Roux de Bézieux.
Commence alors « la “descente aux enfers” pour [M.] Lavallade » : « Il se trouve isolé, exclu des prises de décisions importantes, à tel point qu’il n’est plus en mesure d’assurer ses fonctions », à en croire la plaidoirie de son avocate, résumée dans le jugement. Le 31 août 2018, il est convoqué à un entretien préalable à un licenciement, prévu pour le 12 septembre. Mais il prévient qu’il ne pourra pas s’y rendre, étant à cette date en arrêt-maladie « pour état anxieux important ». S’ensuit, peu après, une lettre recommandée de l’organisation patronale dans laquelle elle lui notifie la rupture de son contrat de travail pour « faute grave ». Une procédure justifiée par le fait que le chef de cabinet a « volontairement et brusquement cessé d’exercer ses missions », d’après l’argumentaire de l’avocat du Medef, développé à l’audience.
« Aucun élément probant » pour les juges
Les juges ont considéré que ces « reproches » n’étaient étayés par « aucun élément probant » : dès lors, il n’y a ni « faute grave » ni « cause réelle et sérieuse » à cette séparation. Ils ont également estimé qu’il fallait dédommager le préjudice spécifique, lié aux « circonstances » de la rupture : M. Lavallade a été flanqué à la porte alors qu’il se trouvait en arrêt-maladie et bien que son travail ait reçu les « félicitations » de M. Gattaz. En outre, le nom de son successeur avait été annoncé « publiquement et très largement le jour même du prononcé de son licenciement » alors que « lui-même n’en était pas informé », rapporte le conseil de prud’hommes, dans son jugement.
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