Le difficile retour au travail des cadres après un congé maternité
C’est un moment charnière trop souvent impensé, celui du retour des femmes sur leur lieu de travail après un congé maternité. Alors que peu d’études existent sur le sujet, l’Association pour l’emploi des cadres (APEC) publie ce jeudi 8 février les résultats d’une enquête menée auprès de 12 400 femmes cadres en janvier-février 2023. Son résultat est sans appel : près de la moitié d’entre elles dévoilent que la reprise du travail après leur grossesse a été « difficile ».
A cela plusieurs raisons. La plus évoquée reste sans conteste celle d’une charge mentale compliquée à gérer en raison de la fatigue. Mais nombreuses sont les femmes qui pointent également les défis à relever pour être aussi efficaces et engagées qu’avant. « Cette reprise est un moment crucial pour les femmes, elles sortent de leur cocon pour se remettre dans la vie professionnelle », relate Thi Nhu An Pham, autrice sur le sujet d’un podcast et du livre La Reprise. Le tabou de la condition des femmes après le congé maternité (Payot, 2023). « C’est une transition compliquée que personne ne conscientise vraiment. On attend d’elles qu’elles reviennent comme avant sans contrainte familiale », insiste-t-elle.
Dans l’enquête de l’APEC, 71 % des femmes interrogées considèrent que les entreprises sont insuffisamment organisées pour accompagner le retour de leurs salariées. Elles ne se donnent pas la peine de mener un entretien de retour (pourtant obligatoire), ni de les informer sur les changements qui ont eu lieu pendant le congé maternité, ni encore de les former aux nouveaux supports et logiciels informatiques. « Il est normal que la charge mentale des femmes soit plus élevée à ce moment-là. Ce qui l’est moins, c’est que les entreprises n’adoptent pas les mesures pour les aider à la réduire », constate Gilles Gateau, directeur général de l’APEC.
Pour les y aider, de jeunes mères actives ont lancé en décembre 2021 une charte de bonnes pratiques baptisée « Parental Challenge », que de plus en plus de groupes s’engagent à respecter, même si, à ce jour, elle ne concerne encore que 34 275 salariés.
Comportement « culpabilisant »
Si le retour de congé maternité reste un moment crucial, il est loin d’être le seul : « On aimerait ne plus voir un manageur se prendre la tête entre les mains à chaque fois qu’une collaboratrice lui annonce qu’elle est enceinte », poursuit M. Gateau, qui note que ce genre de comportement est « culpabilisant » pour ces femmes.
Certaines gardent d’ailleurs contact avec leur entreprise pendant leur congé, à des degrés divers, contrairement à l’obligation légale. « Si je ne me connectais pas durant mon congé maternité, j’allais me retrouver à mon retour avec 1 800 mails ! », raconte ainsi une jeune manageuse de la finance qui préfère garder l’anonymat.
Il vous reste 30% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.