L’aviation de ligne victime collatérale de la réforme des retraites
C’est un angle mort de la réforme des retraites. Contestée par près des trois quarts des Français, à en croire les sondages et l’importance des manifestations qu’elle a suscitées, elle ne ferait pas non plus l’unanimité dans les entreprises du transport aérien. La réforme va en effet venir affecter le système de retraite des pilotes et des personnels navigants commerciaux (PNC), les hôtesses et stewards.
Aujourd’hui, ces catégories d’employés des compagnies françaises cotisent à la Caisse de retraite complémentaire du personnel navigant professionnel de l’aéronautique civile (CRPNAC), une caisse complémentaire constituée de deux fonds distincts. Un fond destiné aux retraites et un autre créé dans les années 1950, quand les hôtesses n’avaient pas le droit de voler au-delà de 45 ans. Les pilotes prennent leur retraite, en moyenne, à 63 ans, et même 62 ans et 6 mois chez Air France. Les hôtesses et stewards partent, eux, à 56 ans. Avec ce différentiel de sept ans entre pilotes et PNC, la CRPNAC est structurellement dans le rouge depuis quelques années. Heureusement, elle est assise sur un trésor de guerre de plus de cinq milliards d’euros. Une réserve qui lui permet d’assurer ses prestations.
Mais en proposant de reculer de 62 ans à 64 ans l’âge de la retraite, la réforme va bousculer un équilibre déjà précaire. Aujourd’hui, une disposition de la direction générale de l’aviation civile fixe à 60 ans l’âge de la retraite pour les pilotes. Par dérogation, ils peuvent poursuivre leur activité jusqu’à 65 ans, mais pas au-delà. Une limite imposée par l’Organisation de l’aviation civile internationale.
Quatre cents navigants recrutés en 2022
De plus, passé le cap des 60 ans, chaque navigant doit se soumettre à une visite médicale semestrielle. En cas d’incapacité, il ne peut plus exercer son métier dans l’aviation civile. La compagnie peut alors le reclasser au sol, mais, faute d’y parvenir, elle licencie le plus souvent son pilote. Enfin, une autre disposition interdit de mettre deux pilotes de plus de 60 ans dans un même cockpit.
Avec le recul de l’âge de la retraite, les compagnies aériennes vont être confrontées au vieillissement de leurs navigants. Chez Air France, indique un pilote et ancien dirigeant syndical, les 57-62 ans représenteraient déjà « 20 % des effectifs des pilotes » de la compagnie qui en compte environ 4 500. Ils seront d’autant moins enclins à partir que la durée d’indemnisation du chômage vient d’être réduite de trente-six à vingt-sept mois. La compagnie dirigée par Ben Smith a tenté de rajeunir sa pyramide des âges, pendant la pandémie, en poussant vers la sortie quatre cents pilotes.
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