L’argot de bureau : « Full remote », au secours mon bureau a disparu !
Fini d’entendre à la machine à café qu’Enzo, le petit dernier de la DRH, sait jongler tout en récitant La Fontaine à 7 ans ; fini les débats passionnés sur le PSG dans l’open space ; fini les fameux « malaises voyageurs » qui expliquent l’arrivée au compte-gouttes à la réunion du matin, fini le métro-boulot-dodo ! On ne parle que de télétravail en cette année 2020 : et si on le poussait à l’extrême ? Bienvenue au pays du « full remote ».
Travailler « en remote », littéralement « éloigné, isolé », c’est travailler à distance. Mais davantage que du télétravail quelques jours de-ci de-là, il s’agit de faire le deuil du bureau. En français, on parlera de « télétravail systématique ». Avec le full remote, plus question de se rendre dans les locaux de sa boîte, puisque la plupart du temps… ils n’existent pas. Un salarié en full remote n’a pas de bureau, ou plutôt, il est partout.
Pionnière dans les années 2000, la jeune start-up Automattic, société éditrice de WordPress, a ainsi dissous ses locaux dans la Silicon Valley. Ses 850 salariés travaillent désormais depuis cinquante pays. On parle alors d’« entreprise distribuée ». Alors que l’immobilier de bureau est le deuxième poste de dépenses d’une entreprise derrière celui de la masse salariale, se débarrasser des locaux tout en s’offrant l’occasion de recruter des talents aux quatre coins du monde a tout du casse du siècle pour l’employeur.
Réinventer les relations sociales
Le full remote est un mode de vie à part entière, à entendre ses adeptes : pour un cadre dynamique hyperactif, c’est la liberté de travailler depuis le fin fond de l’Ardèche, ou même de s’exiler sur une île des Caraïbes (à condition que la 4G soit de qualité) !
C’est le paradis des « digital nomades ». Un ordinateur et un smartphone à la main, ces travailleurs du futur changent de maison et de pays en permanence pour mieux s’ouvrir à la diversité du monde. « Les hommes sont faits pour être Vasco de Gama et pas employés de bureau ! », disait Jacques Brel.
Mais quid de la productivité ? Encore plus qu’ailleurs, il faut rendre des comptes réguliers à Vincent, ce manageur pas commode que l’on n’a jamais vu, et maîtriser une farandole d’outils. On se fait un Google Drive pour parler du dernier « process », un petit « meet » sur Zoom, une carte mentale sur Trello et le planning avec Doodle… Sans compter Slack, le Graal du « full-remoteur » : un espace de discussions organisées par « canaux », selon les sujets, qui accumulent 845 messages non lus dès le moindre quart d’heure de pause.
Il vous reste 23.4% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.