La dernière chance pour la dentelle de Calais

La dernière chance pour la dentelle de Calais

Dans l’atelier du dentellier Codentel, à Calais, le 4 avril 2016.
Dans l’atelier du dentellier Codentel, à Calais, le 4 avril 2016. JEAN-PIERRE BRUNET / PHOTOPQR / VOIX DU NORD / MAXPPP

« Les salariés, les proches, les amis ont la grande douleur de vous faire part du décès des Dentelles Desseilles survenu volontairement à Boulogne-sur-Mer le 23 septembre à l’âge de 72 ans. » C’est à travers ce faire-part de décès que Renato Fragoli, le secrétaire CFTC du comité d’entreprise de Desseilles, a annoncé, amer, la liquidation de l’un des derniers dentelliers de Calais.

Loin des podiums de la haute couture parisienne, le tribunal de commerce de Boulogne-sur-Mer a validé il y a deux mois l’unique offre de reprise proposée par le groupe Cochez pour sauver les dentelliers Desseilles, maison fondée en 1947, et Noyon, qui vient de célébrer ses 100 ans. Cinquante-huit des soixante-treize salariés de Desseilles ont été licenciés. Pascal Cochez, un industriel de Valenciennes qui s’est spécialisé dans le sauvetage du patrimoine industriel régional en péril, a regroupé Noyon, Desseilles et Darquer, la plus ancienne marque de dentelle calaisienne, créée en 1840, en une seule entité composée des trois noms pour relancer la filière. « Quand j’ai réuni le personnel, je leur ai dit que l’on était comme une arche de Noé, explique l’entrepreneur de 42 ans. On est les derniers dentelliers de Calais. Je leur ai demandé de l’enthousiasme pour lancer une reconquête commerciale. »

Voilà une dizaine d’années que la filière dentelle, représentée par les villes nordistes de Calais et Caudry, souffre d’une baisse d’activité liée au contexte concurrentiel. La fin des quotas d’importation sur le textile chinois, décidée en 2005, a fait plonger les industriels du secteur. Comment lutter face à des écarts de prix allant de un à sept entre les fabricants français et les concurrents asiatiques ? Surtout, l’évolution des techniques a permis de fabriquer des dentelles à bas coût, de moindre qualité mais utilisée avec abondance dans l’industrie textile.

« Les gens ne savent pas faire la différence entre la dentelle de Calais, un art unique, et ce qui ressemble à de la dentelle », juge la maire de Calais, Natacha Bouchart. Bien loin des 28 000 personnes qui travaillaient chez l’un des 546 fabricants calaisiens vers 1905, l’objectif de la conseillère régionale est aujourd’hui de préserver 150 à 200 emplois dans ce qui constitue selon elle « l’ADN de la ville ».

Un fleuron de Calais

Petites mains au savoir-faire unique – il faut environ huit ans pour former un dentellier –, les salariés repris dans le nouveau groupe de Pascal Cochez ont accepté un défi : reconquérir des parts du marché de la dentelle. Toute l’activité a été regroupée dans les anciens ateliers de Noyon, rue des Salines, à 3 kilomètres de la plage de Calais.

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LJD

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