« La crise sanitaire ne peut pas être la porte ouverte à tout » : l’opposition politique monte au créneau contre les ordonnances gouvernementales
Le gouvernement a adopté, mercredi 25 mars, vingt-cinq ordonnances – économiques, sociales, judiciaires – pour faire face aux conséquences économiques et sociales de l’état d’urgence sanitaire provoqué par l’épidémie de Covid-19. « C’est un effort long auquel nous allons tous ensemble faire face », a assuré le premier ministre, Edouard Philippe. Mais ces mesures, et plus particulièrement celles relatives à l’aménagement du droit du travail, n’ont pas fait l’unanimité dans le monde politique.
« Aucune réquisition du secteur textile ni mécanique pour la production des masques et des respirateurs. Aucune nationalisation des entreprises défaillantes utiles dans la lutte comme Luxfer. Aucune méthode de planification de la mobilisation sanitaire n’est mise en place », déplore ainsi dans un communiqué Jean-Luc Mélenchon, le chef de file de La France insoumise (LFI). « Nous avons eu raison de voter contre la loi d’état d’urgence sanitaire. Car, une fois de plus, c’est un prétexte à un nouveau recul des droits sociaux », a-t-il ajouté, estimant que l’exécutif aurait pu prendre des mesures pour mettre « à contribution les ultra-riches ».
« Cette crise sanitaire ne peut pas être la porte ouverte à tout. Il faut être vigilant et rigoureux », a plaidé de son côté, sur Public Sénat, le porte-parole du Parti socialiste, Boris Vallaud. Selon lui, les ordonnances gouvernementales entament certains pans de la protection sociale que les responsables politiques doivent aux Français : « Aujourd’hui, on nous parle de 60 heures hebdomadaires, de plus de flexibilité. (…) Les directives européennes imposent par exemple 48 heures hebdomadaires maximum. Nous aurions aimé que les partenaires sociaux soient associés aux discussions, mais ce n’est pas le cas. »
Cette dérogation à la durée du travail dans certains secteurs « est une hérésie », s’est agacé Yves Veyrier, le numéro un du syndicat Force ouvrière (FO), interrogé sur RTL. « On a besoin justement de ménager les salariés qui sont mobilisés. On risque d’ajouter au risque d’épidémie un risque de fatigue, d’épuisement par des temps de travail plus importants et des temps de repos réduits. »
Un son de cloche qu’on retrouve étonnamment à droite. Ainsi, sur Twitter, le député Les Républicains Julien Aubert estime que « les mesures qu’implique la crise sanitaire doivent être strictement proportionnées ». « Après les congés, abolir par ordonnance les règles du droit de travail en portant la durée à 60 heures est un choix socialement régressif. »
Les mesures qu’impliquent la crise sanitaire doivent être strictement proportionnées. Après les congés, abolir par… https://t.co/0X5dzTFeFz
— JulienAubert84 (@Julien Aubert)
« Elle n’est pas belle, l’union sacrée ? »
Pour la sénatrice Europe Ecologie-Les Verts (EELV) Esther Benbassa, le Covid-19 « inaugure en France l’esclavage moderne ». Et cette dernière de décliner dans un Tweet : « La ministre du travail instaure les 60 heures/semaine dans certains secteurs, celui de l’agriculture exhorte les chômeurs à travailler aux champs pour remplacer les saisonniers. Elle n’est pas belle, l’union sacrée ? »
#COVIDー19, le virus qui tue, inaugure en France l’#esclavage moderne. La ministre du travail instaure les 60h/semai… https://t.co/iAGqHPSl2V
— EstherBenbassa (@Esther Benbassa 🌻)
Le député européen EELV David Cormand déplore, quant à lui, sur le même réseau social, l’absence de considération à l’égard des enseignants, victimes à ses yeux de dénigrement de la part de l’exécutif. « Elles et ils assurent le suivi pédagogique des élèves. Ce gouvernement a un problème avec les services publics. Comment prendre ce déni permanent autrement que pour du mépris ? »
« Nous sommes dans une situation très particulière et extrêmement grave avec un impact sur les entreprises et forcément sur l’emploi », a jugé, pour sa part, sur Public Sénat, le sénateur LR Philippe Dallier. « Il faut essayer de s’y adapter pour une période qui restera j’espère relativement courte. (…) Il faut effectivement prendre des décisions, on ne peut pas attendre que le temps passe et constater les dégâts après coup », a-t-il tempéré.
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