Ils ont quitté le secteur de l’hôtellerie, du tourisme ou de la restauration : « J’en ai eu marre de me sacrifier »

Ils ont quitté le secteur de l’hôtellerie, du tourisme ou de la restauration : « J’en ai eu marre de me sacrifier »

Une maison achetée à crédit, un CDI à l’agence Orpi du centre-ville d’Aurillac, un van aménagé pour partir en week-end avec son compagnon : telle est la nouvelle vie de Marjolaine Guibal, 30 ans, depuis qu’elle a quitté le monde de l’hôtellerie. Elle y a passé dix ans, dont plusieurs saisons comme réceptionniste d’un village vacances à Super-Besse (Puy-de-Dôme). « Sans le Covid, j’y serais encore !, assure cette diplômée d’une licence en commerce. La pandémie a été un déclic. On devait se confiner, l’hôtel fermait, et je n’avais pas de logement à moi. J’ai compris que ce n’était plus possible. »

Comme Marjorie Guibal, de nombreux salariés du monde du tourisme (hôtellerie, restauration, campings, parcs de loisirs…) ont changé de vie au cours de ces trois dernières années, accentuant les difficultés de recrutement que connaît ce secteur. Les longues périodes de fermeture ou de ralentissement de l’activité liées à la crise sanitaire, en 2020 et 2021, ont accéléré leur prise de conscience, en particulier sur l’impact de leurs conditions de travail sur leur vie privée. Et ce, même si les personnes que nous avons interrogés parlent aussi avec nostalgie de leur ancien métier, du collectif, du plaisir du service, de « l’esprit de famille » qui s’en dégageait. Ou du sentiment de liberté que procurait cette possibilité de travailler comme saisonnier, l’hiver à la montagne, l’été au soleil.

« Quand tu es dans ce secteur, tu travailles quand tout le monde est en week-end ou en vacances. Tu rates tout : les anniversaires, les soirées, les mariages, la vie, quoi ! », exprime Delphine Palatan, 39 ans, qui, quinze ans durant, a été gouvernante dans plusieurs hôtels de Savoie. « Le Covid, ça a été un moment qui m’a permis de penser à moi », déclare celle qui a amorcé un processus de reconversion pour devenir formatrice, « avec des horaires normaux, du lundi au vendredi ».

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Face à la désertion des salariés des hôtels, restaurants et campings, le douloureux réveil des employeurs

« A un moment, j’en ai eu marre de me sacrifier », poursuit Rodolphe Lucas Gome, 38 ans, ex-majordome dans un cinq-étoiles de la côte basque, et qui a quitté le secteur fin 2020. « Je faisais 40-45 heures par semaine, je remplaçais les collègues au dernier moment, je disais au revoir à tous mes congés pendant l’été… Et les heures sup ne sont pas toujours payées. » Depuis, il a créé sa société de marketing numérique.

Aucun d’eux ne dit regretter sa nouvelle vie, même Lucie Ha, 30 ans, qui précise gagner « un peu moins » aujourd’hui que lorsqu’elle travaillait en salle dans la restauration. Elle officie désormais dans une charcuterie installée au sein des halles de Poitiers. « J’embauche tôt le matin, mais au moins, j’ai deux jours de repos consécutifs. J’ai mes soirées, les horaires sont carrés. Pour la vie de couple, ça change tout », commente-t-elle.

Il vous reste 48.01% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Avatar
LJD

Les commentaires sont fermés.