Espoir et réalisme
Brises européennes 3|5. Affectés de plein règlement par la crise de 2008, les jeunes ont la sensation que leurs espoirs ne sont pas assez pris en compte par le monde politique.
En cet après-midi illuminé de février, la foule se fait dense sur la place de l’Opéra, à Paris. Des centaines de lycéens se sont assemblés pour circuler en faveur du climat. « Où est-elle, où est-elle ? » Les badauds se pressent, des étudiants jouent des coudes pour l’apercevoir. Visage poupin encadré de longues nattes brunes, Greta Thunberg prend la parole : « Nous, les jeunes, ne devrions pas avoir à faire cela. Mais comme les adultes ne prennent pas leurs responsabilités, nous agissons. »
En quelques semaines, la Suédoise de 16 ans est transformée le symbole d’une jeunesse européenne qui, comme dans 120 pays dans le monde, bat le pavé pour additionner les dirigeants d’agir enfin pour l’environnement.
Cette appel en dit long sur le fossé entre les moins de 25 ans et la classe politique. « Le climat est un sujet majeur pour beaucoup de jeunes », note Vincent Cocquebert, auteur de Millennial burn-out (Arkhê, 216 pages, 17,90 euros), un essai sur la génération née entre 1980 et 2000. Avant de nuancer : « Mais il serait problématique d’oublier que ceux-ci forment un groupe hétérogène et éclaté, aux aspirations très différentes. »
Comment enfermer, en contrepartie, ce à quoi rêvent les jeunes des 28 pays membres ? Les idéaux des pères fondateurs de l’Europe les inspirent-ils encore ? Quel regard portent-ils sur l’Union européenne (UE) ? Les résultats des élections européennes de 2014, ainsi que les enquêtes faites par la Commission depuis, apportent quelques éléments de réponse : dans l’ensemble, ils se sentent plus européens que leurs aînés mais admettent moins à la politique. Il y a cinq ans, seuls 28 % des électeurs de moins de 25 ans sont allés voter, contre 42,5 % pour l’ensemble de la population.
Malgré tout, les moins de 25 ans conservent à l’Europe : d’après l’Eurobaromètre de mars 2018, 61 % se définissent comme attachés à l’Union européenne, contre 56 % pour l’ensemble de la population, et ils sont plus nombreux à concevoir que l’UE est une bonne chose pour leur pays. « La rejoindre a transformé la Slovénie : désormais, nous sommes libres de traverser les frontières et d’étudier à l’étranger », témoigne ainsi Patrik Bole, 22 ans, étudiant en sciences sociales à Ljubljana. Mais les institutions ne sont pas assez démocratiques, et cela nourrit la défiance des citoyens. »