Le télétravail, reflet de la stratification de nos fractures géographiques et sociales

Le télétravail est devenu un fait de société. Les résistances fondées sur le besoin supposé de travailler toujours dans les mêmes espaces pour assurer la cohésion des équipes se sont affaiblies, tandis que les excès prônant, à l’opposé, l’éradication de tous les lieux de travail communs ont été oubliés. Une norme semble s’imposer autour de deux jours par semaine ouverts au télétravail. La coordination nécessaire a la vertu d’obliger à améliorer l’efficacité des activités réalisées en commun.

Devenu le symbole par excellence d’une transformation de notre rapport au travail, le télétravail ne concerne pourtant que 25 % de la population active. Inégalement réparti selon les métiers et les fonctions, il traduit aussi la fracture sociale dont le géographe Christophe Guilluy s’est fait le théoricien (Fractures françaises, 2010 ; No Society, 2018).

En observant les stratifications géographiques de la population, M. Guilluy distingue une large zone périphérique composée des villes petites et moyennes et des zones rurales ; 60 % des Français y travaillent essentiellement dans un tissu d’administrations locales, de PME et de petites ETI.

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En regard, se dessine une France des métropoles (Paris et les capitales régionales), qui concentre les sièges sociaux des grandes entreprises internationalisées et les administrations centrales. Elle est constituée d’une part d’une élite d’acteurs économiques, politiques et culturels impliqués dans la mondialisation des échanges et de la culture. Elle est dans les quartiers gentrifiés des centres-villes ou dans les banlieues aisées, protégée par des coûts immobiliers élevés.

Un gain nouveau de qualité de vie

Cette France des métropoles comprend aussi les catégories sociales défavorisées habitant les banlieues pauvres et qui forment le bataillon des emplois peu qualifiés assurant la logistique de la vie métropolitaine (restauration, entretien, transports, sécurité, etc.). Entre les zones périphérique et métropolitaine, les classes moyennes en déclin travaillent dans les métropoles, mais habitent de plus en plus loin d’elles pour conserver leur pouvoir d’achat en bénéficiant d’un coût immobilier abordable, quitte à accepter de longs trajets quotidiens.

Le télétravail est exclu quand la production nécessite la présence physique du travailleur (personnel d’entretien, de santé, de nettoyage, etc.). Il est donc largement inenvisageable pour 75 % de la population active qui vit essentiellement dans les zones périphériques et les banlieues. En revanche, il est commode pour les élites urbaines dont le travail créatif individualisé est fortement valorisé, ainsi qu’aux cadres et employés dont une partie de l’activité consiste à traiter de l’information.

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« C’est un métier ! » : les spécialistes du BIM n’ont pas encore envahi le monde de la construction

« A la base, je voulais être architecte, mais le métier n’a pas répondu à mes attentes, ce n’était pas aussi artistique que je le pensais. Je me suis tourné vers le numérique, car ça m’attirait », confie Ruben Johan. Cet étudiant en mastère management de projets de construction au Centre des études supérieures industrielles (CESI), apprenti dans un bureau d’études, est devenu en septembre champion du monde de « construction digitale », lors de l’olympiade des métiers WorldSkills.

Durant trois jours et demi, il a modélisé seul un projet de construction sur un logiciel. Son métier a un nom : BIM manageur. « Le BIM manageur donne vie au projet, il modélise en 3D, et est en contact avec tous les corps de métiers du début à la fin », explique-t-il. Le BIM, ou building information modeling (« modélisation des informations de construction »), désigne un processus de conception et de construction d’un bâtiment fondé sur l’utilisation d’une maquette numérique.

Dans un logiciel, le projet immobilier est rendu accessible à tous ses acteurs, de la maîtrise d’ouvrage aux différents corps de métiers, qui peuvent y trouver et y ajouter toutes les informations techniques. La numérisation des projets est censée améliorer la coordination entre acteurs, diminuer les coûts et faire gagner en précision sur les chantiers.

Incontournable sur les grands chantiers

Dix ans plus tard, il est difficile d’affirmer que le numérique a révolutionné le monde du bâtiment. Le BIM n’a pas été rendu obligatoire, même s’il est devenu incontournable sur les grands chantiers (Grand Paris, Jeux olympiques) et chez les bailleurs sociaux. Fin novembre, France Travail ne proposait que 361 offres d’emploi liées au mot-clé « BIM ».

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Selon un sondage de la Fédération française du bâtiment (FFB) mené en avril auprès de 201 décideurs du secteur, 26 % utilisent ou prévoient d’utiliser le BIM. « Le terme a un peu mauvaise presse, car on met tout et n’importe quoi dedans, estime Jonathan Pires, ingénieur BIM et transition numérique à la FFB. Lors du boom de 2014, on en parlait comme de la solution miracle. Ça n’a pas pris autant que ce qu’on pensait à ce moment-là. »

Sur les 24 000 ingénieurs que comptait le BTP en 2021, selon l’observatoire des métiers du secteur, impossible de déterminer quelle part est spécialisée dans le BIM. Chez les architectes, « 50 % des 64 000 personnes qui travaillent en agence sont capables de prendre part à un processus BIM », estime Olivier Celnik, architecte et directeur du mastère BIM de l’Ecole des Ponts et ESTP. Il ajoute néanmoins que « certains maîtres d’ouvrage ou maîtres d’œuvre régressent, et se rendent compte que ce n’est pas adapté à tous les cas de figure ».

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« Entre 2009 et 2024, Tesla a embauché 6 976 travailleurs immigrés qualifiés »

Si une preuve supplémentaire était nécessaire, la réélection de Donald Trump à la présidence des Etats-Unis en est une : le durcissement des discours sur l’immigration est une stratégie électoralement payante. D’aucuns en France ne manqueront pas de s’emparer de ce constat en ciblant, sans nuance, toute forme d’immigration. Après tout, la montée inexorable des partis anti-immigration, élection après élection, semble aussi confirmer l’efficacité de cette stratégie en Europe.

Les partisans d’une immigration zéro oublient pourtant une facette importante du discours de Donald Trump durant sa campagne. Bien qu’il ait été particulièrement hostile à l’immigration en général, l’essentiel de sa communication s’est surtout concentré sur un rejet très ferme de l’immigration irrégulière aux Etats-Unis. En revanche, le candidat républicain a beaucoup moins questionné les nombreux dispositifs historiques de son pays qui visent à attirer légalement des travailleurs du monde entier, notamment des talents qualifiés.

Chaque année, plus de 85 000 travailleurs qualifiés rejoignent les Etats-Unis grâce au programme de visas H-1b, contribuant ainsi au dynamisme de l’économie américaine. Ces visas permettent d’attirer des talents internationaux, particulièrement dans des régions comme la Silicon Valley, où ils renforcent l’innovation et jouent un rôle-clé dans le développement économique des start-up.

Des profils qualifiés mais aussi diversifiés

Elon Musk, dernier favori de Donald Trump, ne s’y est d’ailleurs pas trompé : entre 2009 et 2024, Tesla a embauché 6 976 travailleurs grâce à ce type de visa. Résultat, les immigrés représentent aux Etats-Unis 16 % de la population, mais déposent 23 % des brevets. Quarante-six pour cent des 500 plus grandes entreprises américaines en 2024 (considérées d’après le chiffre d’affaires) ont été fondées par des immigrés ou par leurs enfants.

De plus, la politique migratoire outre-Atlantique ne vise pas seulement des profils qualifiés, mais aussi diversifiés. Les Etats-Unis ont ainsi recours à une loterie annuelle permettant à 55 000 étrangers, détenteurs au minimum d’un diplôme du secondaire et issus de pays sous-représentés, d’obtenir un visa de résident permanent.

Ce dispositif favorise une diversité culturelle essentielle, dont les recherches montrent l’impact positif sur l’innovation et la croissance. De l’autre côté de l’Atlantique, la France semble avoir renoncé à mener une politique migratoire économique réellement ambitieuse et offensive. Sur les 318 926 titres de séjour délivrés en 2022, l’immigration économique fait pâle figure, ne représentant que 16 % du total.

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L’AFPA défend son bilan

Quel impact social peuvent avoir des formations destinées aux chômeurs sur leur retour à l’emploi ? Quelles économies ces mêmes formations peuvent-elles générer pour les pouvoirs publics qui les financent ? Et, finalement, ce double impact permet-il de rentabiliser l’investissement public consenti pour réinsérer les chômeurs ?

A ces trois questions cruciales l’Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA), devenue un établissement public industriel et commercial en 2017, apporte des réponses précises en s’appuyant sur une vaste étude confiée au cabinet Koreis, spécialiste de l’impact social.

Sur vingt-quatre mois, à cheval sur 2020 et 2021, Koreis a suivi le parcours de 73 496 chômeurs accompagnés par l’AFPA. Cette cohorte a d’abord été comparée à l’insertion professionnelle de demandeurs d’emploi non formés. Résultat ? Durant les six premiers mois, les chômeurs accompagnés par l’AFPA, moins disponibles pour la recherche d’emploi, car ils étaient en formation durant 5,8 mois en moyenne, ont un taux d’insertion inférieur aux chômeurs non formés.

Les conditions pour faciliter le retour à l’emploi

Mais, passé ce délai, les premiers sont plus nombreux à travailler que les seconds. Et, au terme des vingt-quatre mois, 71 % des chômeurs passés par l’agence nationale sont en situation d’insertion professionnelle (intérim, contrat à durée déterminée ou contrat à durée indéterminée) contre 58 % de ceux qui n’ont suivi aucune formation.

Par ailleurs, l’étude, publiée le 18 novembre, montre que l’établissement public fait mieux que la moyenne du marché de la formation professionnelle sur ce critère : l’insertion dans l’emploi des chômeurs formés durant vingt-quatre mois par la totalité des organismes s’établit en moyenne à 67 %, soit quatre points de moins que l’AFPA. « Nos formations permettent une insertion plus importante et durable que les autres, et ce, alors même que nous prenons en charge davantage de personnes éloignées de l’emploi », commente Pascale d’Artois, la directrice générale.

Pour compenser ce handicap de départ, l’AFPA propose des sessions plus longues (5,8 mois contre 4,4 mois tous organismes de formation confondus) qui garantissent une meilleure remise à niveau. Pour faciliter le retour à l’emploi, l’établissement public a aussi entrepris de transformer ses centres en tiers-lieux où interviennent des partenaires dans le domaine du logement et de la mobilité.

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En silence ou avec fracas, l’art subtil de la démission

En mai, après avoir longtemps vécu heureux dans un cockpit, le pilote de ligne Yann Woodcock publiait sur le réseau professionnel LinkedIn un long texte dans lequel il expliquait pourquoi il avait décidé de quitter l’aéronautique : « Je pars car j’ai pris conscience de l’ampleur de la catastrophe climatique et de l’effondrement du vivant. Ainsi, je ne souhaite plus être partie prenante d’une industrie contribuant de manière significative au problème. » Ce départ, que l’on imagine assorti d’un véhément rabat d’étole par-dessus l’épaule, s’inscrit dans une nouvelle tendance, épinglée sur les réseaux sociaux sous le hashtag #climatequitting.

Difficilement chiffrables, les « démissions climatiques » conduisent un certain nombre de salariés à prendre congé de leur entreprise, parce qu’ils considèrent que celle-ci n’est pas alignée sur leurs convictions environnementales. Avant, on se trouvait mille arguments pour rester (le crédit du pavillon, la perspective de grimper dans l’organigramme…) ; désormais, il semble exister plein de bonnes raisons de s’en aller : le bilan carbone déplorable de sa boîte, le manque de sens, la surcharge de travail, la lassitude, les collègues toxiques…

En conséquence, la démission, qui constituait un impondérable de fin de parcours sans grand relief, figure aujourd’hui l’acmé de la vie professionnelle. Signe de ce nouveau statut, elle est désormais esthétisée, avec des sous-catégories correspondant aux tempéraments de chacun : les timides pourront avoir recours au « quiet quitting » ou au « ghost quitting », deux formules qui consistent à ne pas vraiment quitter sa boîte mais à s’y faire de plus en plus discret, voire fantomatique.

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A l’opposé, le « loud quitting » désigne un désengagement tonitruant où l’on manifeste ouvertement son mécontentement. En 1999, dans le film Office Space, l’actrice Jennifer Aniston anticipait la tendance en larguant son boulot de serveuse, majeur tendu face au visage de son employeur : « Je déteste ce job ! » Devenue un happening en soi, au point qu’il existe désormais des coachs permettant de vous épauler dans la démarche et des posts Instagram inspirants, la démission permet de poser un geste fort, d’afficher une posture morale.

Forme de développement personnel

Dans une enquête sur le « conscious quitting » (la « démission consciente ») publiée en avril 2023, le cabinet de conseil en design d’espace de travail Génie des lieux avançait que 68 % des Français ont déjà pensé à quitter une entreprise non respectueuse de leurs valeurs, et que 34 % seraient déjà passés à l’acte. Même s’il est à noter que les démissions sont en baisse depuis quelques mois, elles restent symboliquement valorisées. Preuve de votre capacité d’indignation, la rupture pétaradante avec votre employeur fera de vous un Stéphane Hessel d’open space adulé.

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Un groupe d’experts recommande de ne pas supprimer les allègements de cotisation au niveau du smic

Sur le front de l’emploi, l’année 2024 est celle du ralentissement. Le marché du travail, tout d’abord, est dans une situation morose après trois années dynamiques depuis la crise due au Covid-19. Un recul qui s’accompagne de la fin de l’épisode inflationniste. En octobre, l’inflation atteint seulement 1,2 % sur un an. Un contexte qui amène le smic à freiner lui aussi. Depuis fin 2020, le salaire minimum a augmenté de 17 % à la faveur de neuf revalorisations, une croissance bien plus forte que pour les autres salaires. Au deuxième trimestre, la hausse du smic n’était que de 1,1 % sur un an, contre 2,9 % pour le salaire mensuel de base. Conséquence plutôt positive : le nombre de salariés au smic baisse également.

Selon le groupe d’expert sur le smic, qui a remis son rapport annuel au gouvernement et aux partenaires sociaux jeudi 28 novembre, ils étaient 14,6 % des salariés du privé (hors agriculture), soit 2,7 millions de personnes, à être concernés par la revalorisation du salaire minimum au 1er janvier 2024. C’est-à-dire 400 000 travailleurs de moins qu’un an auparavant, qui avait été une année record, avec 17,3 % des salariés du privé.

Ce chiffre ne prend toutefois pas en compte la hausse de 2 % du salaire minimum du 1er novembre. Celle-ci avait été décidée par Michel Barnier en anticipation de la revalorisation automatique prévue en janvier. « Compte tenu de la hausse modérée, il ne devrait pas y avoir de changement notable dans la proportion de salariés au smic », précise le président du groupe d’experts, Stéphane Carcillo. L’économiste, qui a succédé à Gilbert Cette, nommé à la tête du Conseil d’orientation des retraites, dirigeait son premier rapport cette année.

L’exécutif devrait suivre

Le salaire minimum reste le seul à être indexé, en partie, sur les prix. Il a donc augmenté mécaniquement depuis fin 2020. Et en cas de forte hausse, des travailleurs au salaire supérieur sont « rattrapés » par le smic si leur rémunération n’est pas revalorisée dans les temps.

C’est cette mécanique qui explique, en grande partie, la « smicardisation » du pays. Lorsque l’inflation recule, le smic augmente de manière beaucoup plus modérée alors qu’on observe une croissance des autres salaires à retardement. Ainsi, de nombreux salariés sortent du smic pour retrouver des rémunérations supérieures. « La France reste un pays où les salaires sont très concentrés autour du smic, tempère Stéphane Carcillo. Les choses redescendent à la faveur d’un smic moins dynamique, mais cela reste très haut. »

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Denis Colombi, sociologue : « Nous assistons à une invisibilisation croissante du travail »

Le sociologue Denis Colombi auteur de Qui travaille vraiment (éditions Payot) souligne que le travail gagnera en visibilité en redevenant un « enjeu de lutte » dans les entreprises comme dans le débat public.

Vous mettez en avant dans votre ouvrage un processus d’« invisibilisation croissante » du travail. Il repose notamment, à vos yeux, sur des représentations biaisées…

La façon dont les femmes et hommes politiques s’emparent du sujet permet de bien saisir le poids de ces représentations. Lorsqu’ils mettent, par exemple, en scène leur rapport au travail, lorsqu’ils veulent parler de « la France qui se lève tôt », beaucoup d’entre eux vont se rendre au marché international de Rungis. C’est une image qui va éclipser les autres situations de travail, telles celle des caissières de supermarché qui finissent tard, ou celle des femmes au foyer qui se lèvent tôt, elles aussi, pour s’occuper de leurs enfants et effectuer des tâches domestiques… De nombreux métiers – dans les services, par exemple – passent « sous les radars », car ils ne correspondent pas à la représentation que l’on se fait du travail.

Le processus d’invisibilisation est également à l’œuvre au cœur des entreprises. En quoi l’organisation du travail peut-elle y contribuer ?

De nombreux mécanismes rendent la compréhension du travail effectué plus complexe. L’atomisation des tâches, par exemple. Avec cette division du travail, il devient plus difficile d’expliquer sa mission, d’en rendre compte, de dire, au fond, à quoi l’on sert. En parallèle, le travail renvoie aujourd’hui, pour une part importante, à des activités où il s’agit moins de faire quelque chose que de rendre possible pour d’autres de faire. Autre facteur de complexité : des métiers évoluent et se « bureaucratisent », comme le montre la sociologue Béatrice Hibou, évoquant le cas des infirmières qui doivent remplir de nombreux documents avant et après ses actes médicaux.

Vous estimez plus largement que l’invisibilisation du travail est « inscrite de façon profonde dans la dynamique du capitalisme ». Pourquoi ?

C’est une idée qui peut sembler, de prime abord, contre-intuitive. Le capitalisme a en effet placé le travail sur le devant de la scène et nous incite à le penser comme une activité spécifique. Mais, dans le même temps, il va participer à cette invisibilisation. Tout d’abord en répondant à la question « Qui travaille vraiment ?  » : il met en avant ceux qui possèdent le capital et non les travailleurs. Ainsi, ce sont les innovateurs, les créateurs, ceux qui contrôlent et prennent les décisions qui « font » l’économie. Ce n’est pourtant pas Jeff Bezos, le fondateur d’Amazon, qui se trouve dans l’entrepôt à préparer les colis puis à en assurer la livraison.

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Automobile : Valeo annonce la suppression de 868 postes en France

L’équipementier automobile Valeo compte supprimer 868 postes sur huit de ses sites français, a communiqué la direction du groupe, mercredi 27 novembre, sans préciser à quelle échéance. La direction de Valeo a annoncé aux salariés 694 départs contraints et 174 départs volontaires, selon un porte-parole du groupe joint par l’Agence France-Presse.

Les sites de La Suze-sur-Sarthe (Sarthe) et La Verrière (Yvelines) vont être fermés. La plupart de leurs salariés se verront proposer des postes sur d’autres sites de Valeo à proximité. Le site de L’Isle-d’Abeau (Isère), lui, ne va pas fermer, mais réduira ses effectifs, avec 70 salariés au lieu de 308 jusqu’ici. Les sites de Sainte-Florine (Haute-Loire), Reims (Marne), Laval (Mayenne), Amiens (Somme) et Limoges (Haute-Vienne) sont également concernés.

Selon le syndicat Force ouvrière (FO), le total serait en fait de 1 282 suppressions de postes, sur 13 500 salariés en France, si les salariés refusent leur transfert et si l’on prend aussi en compte des postes vacants supprimés. En outre, 200 postes pourraient être supprimés en Allemagne, en République tchèque et en Pologne.

« Le calendrier et les modalités vont être discutés ensuite »

Cette annonce est « un projet » dont « le calendrier et les modalités vont être discutés ensuite », a précisé le porte-parole du groupe. « On a travaillé pour avoir un plan qui préserve les opérateurs de production », qui ne sont pas concernés par les départs contraints, a-t-il souligné.

« C’est une annonce dramatique », a réagi Bertrand Bellanger, de FO. « Réduire les coûts peut être nécessaire, mais sacrifier des emplois et fragiliser l’avenir de la filière en France est une erreur stratégique », a-t-il jugé. « L’électrification de l’automobile représente un tournant majeur pour le secteur. Mais elle ne doit pas se faire au détriment des salariés », a-t-il dit.

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Le groupe Valeo avait déjà annoncé en janvier qu’il envisageait de supprimer 1 150 postes dans le monde, dont 235 en France, principalement dans des fonctions d’encadrement, sur 109 900 salariés dans le monde.

Valeo est un énième géant du secteur automobile à souffrir du ralentissement du marché automobile européen et à annoncer des suppressions de postes, après Michelin, Ford ou Bosch.

Spécialisé dans les systèmes électroniques et d’éclairage, l’équipementier souffre aussi d’une électrification qui patine, avec « énormément de reports de lancements de nouvelles productions chez les constructeurs », avait expliqué fin octobre son directeur général, Christophe Périllat. Valeo avait alors légèrement revu à la baisse (-3,2 %) son objectif de chiffre d’affaires pour l’année 2024, à 21,3 milliards d’euros.

Le Monde avec AFP

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Chômage : les Français ont une vision erronée sur leurs droits et la réalité des demandeurs d’emploi

Une agence France Travail, à Dammarie-lès-Lys (Seine-et-Marne), en avril 2024.

Les idées reçues sur l’assurance-chômage ont la vie dure. Taux de chômage surévalué, nombre de demandeurs d’emploi qui bénéficient d’une allocation surestimée, méconnaissance des règles d’indemnisation… Les Français ont souvent une vision erronée des réalités du chômage. Mais plus ils sont informés, plus leurs préjugés et leurs critiques vis-à-vis des demandeurs d’emploi reculent.

Pour la sixième fois depuis 2020, l’Unédic – l’organisme paritaire qui gère l’assurance-chômage –, en partenariat avec le cabinet Elabe, a publié, mardi 26 novembre, son « Baromètre de la perception du chômage et de l’emploi ». Une enquête réalisée sur Internet du 4 au 27 septembre auprès d’un échantillon représentatif de quelque 4 500 personnes (dont 1 500 demandeurs d’emploi), selon la méthode des quotas.

Depuis le premier volet de l’étude, en mars 2020, certaines représentations semblent bien ancrées dans la population, avec des éléments qui ont très peu évolué. Ainsi, 95 % des Français partagent l’idée que « tout le monde peut connaître une période de chômage au cours de sa carrière » et 90 % considèrent que les allocations sont un « droit puisque issues de cotisations ». L’assurance-chômage est également perçue comme un « bouclier permettant à la plupart des chômeurs de vivre dignement » par une grande majorité des sondés (88 %).

Vision inquiète de l’avenir

En revanche, certaines positions évoluent. Le contexte économique est l’un des éléments qui jouent en faveur de ces variations. Ainsi, lorsque la situation sur le marché de l’emploi paraît plus incertaine, comme c’est le cas actuellement avec une remontée du chômage – 7,4 % au 3e trimestre – et une cascade de plans sociaux et de faillites d’entreprises, l’assurance-chômage bénéficie d’une meilleure image.

Aujourd’hui, 60 % des personnes interrogées se disent attachées au modèle français d’indemnisation, un résultat en augmentation de 3 points sur un an. De plus, 73 % des Français considèrent que l’existence d’un tel dispositif réduit l’inquiétude de perdre son emploi. Un chiffre à mettre en regard avec la crainte des actifs de perdre leur emploi dans le contexte économique actuel. En effet, 28 % d’entre eux jugent « probable de connaître une période de chômage dans les deux prochaines années », contre 24 % en 2023 et 22 % en 2022.

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Cette vision inquiète de l’avenir n’est toutefois pas étrangère à la méconnaissance de la réalité du marché de l’emploi. Les Français ont une tendance assez forte à « noircir » le tableau ; 60 % pensent, par exemple, que le taux de chômage se situe à 15,3 % de la population active, alors qu’il était de 7,3 % au moment où ils ont répondu au questionnaire. La plupart d’entre eux (87 %) surestiment également la part des demandeurs d’emploi qui bénéficient d’une allocation – seules 40 % des personnes inscrites à France Travail sont indemnisées par l’assurance-chômage.

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Les inondations de Valence révèlent un impensé dans les entreprises : l’impact des catastrophes climatiques sur le travail

Jose Olcina Asemad en a encore la voix émue. Plus de dix jours après les inondations qui ont frappé Valence en Espagne, ce patron a échappé de peu au désastre qui s’est abattu sur la zone industrielle aux abords de la ville où se trouve sa petite entreprise de fabrication de meubles. « Je rentrais chez moi vers 16 h 30, il y avait une file de voitures devant moi. Certains conducteurs ont commencé à faire demi-tour vers moi quand d’autres les avisaient que le ravin débordait », raconte-t-il. Avec 13 autres personnes, il n’a eu d’autre choix que de se réfugier dans une société située en hauteur, où il a passé la nuit. « Aujourd’hui on fait l’inventaire, mais 80 % du matériel semble touché », explique-t-il, les pieds plantés dans la boue qui recouvre le sol.

Assurer le retour à l’activité ou sa continuité peut être matériellement et psychologiquement long pour les travailleurs. Près de Valence, 350 000 employés et 70 000 indépendants environ ont été concernés par ces inondations. « Nombre de petits commerces et d’industries sont touchés et ne peuvent tout simplement pas reprendre leur activité ni faire télétravailler leurs employés », insiste Salvador Navarro, le président de la Confédération des entreprises de la communauté valencienne. A la mairie de Valence, par exemple, sur les 1 000 employés ayant subi de près ou de loin l’impact de la catastrophe, la moitié environ a pu télétravailler.

Face à l’urgence, le gouvernement a déployé des mécanismes de chômage technique subventionné « pour raison de force majeure ». Semblables à ceux qui avaient été mis en place durant la pandémie, si ce n’est que les personnes n’auront pas à « compenser » les jours non travaillés. Alors que les drames liés au dérèglement climatique se multiplient, les impacts sur les travailleurs restent encore gérés dans l’urgence et non pensés de manière structurelle, en Espagne comme en France, où l’on observe avec attention les graves difficultés de la province valencienne.

Un régime risque climatique

Ayant assisté aux inondations dans le Pas-de-Calais en 2023, Perrine Mohr, secrétaire générale CFDT Hauts-de-France, estime qu’il va falloir entamer une réflexion sur les risques climatiques et leur prise en charge par la collectivité. Si nombre d’entreprises ont eu recours au chômage partiel dans cette région, certains employés n’ont pu bénéficier de jours supplémentaires pour faire face au sinistre. « Nous avons œuvré avec le ministère de la fonction publique et les préfets pour que les travailleurs obtiennent des facilités d’absence, explique Perrine Mohr, cela a été accepté dans le public. En revanche, dans le privé, nous nous sommes heurtés au silence de certaines entreprises. »

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