« Travailleur (mais) pauvre » : comment sortir de la pauvreté laborieuse ?

« Travailleur (mais) pauvre » : comment sortir de la pauvreté laborieuse ?

C’est un débat apparu aux Etats-Unis dans les années 1960. Au cœur des « trente glorieuses », de multiples indicateurs ont été développés pour mettre en lumière l’existence de travailleurs pauvres, les « working poor ». Pourquoi, en ces temps prospères, « le travail n’était[-il] pas un antidote d’une parfaite efficacité contre la pauvreté » ?

Plusieurs décennies plus tard, Gilbert Cette, professeur à Neoma Business School, président du groupe d’experts sur le smic de 2017 à 2024, poursuit la réflexion sur le sujet dans un ouvrage, Travailleur (mais) pauvre (De Boeck Supérieur).

L’auteur propose une analyse documentée de la pauvreté en France – soulignant les « enseignements de la littérature », mais aussi les résultats contradictoires de certains travaux. Il détaille les politiques visant à la réduire et les failles qu’il perçoit en elles. Cet essai est surtout l’occasion de préconiser des pistes d’action qui permettraient de s’attaquer efficacement à cette pauvreté laborieuse.

Premier constat porté par l’auteur : « La quantité de travail est une protection efficace contre la pauvreté. » Il démontre ainsi que « les travailleurs en temps partiel contraint ou enfermés dans une succession de contrats courts » sont particulièrement exposés au risque de pauvreté laborieuse. « Le taux de pauvreté des salariés à temps partiel est trois fois plus élevé [en France] que celui des salariés à temps complet (15,1 % contre 5 %) », explique M. Cette, s’appuyant sur des données de 2019 compilées par l’Insee. Il souligne que « ce taux est d’autant plus élevé que la quotité de travail (le pourcentage du temps de travail à temps partiel) est faible », atteignant ainsi 24 % pour les salariés travaillant à 50 % d’un temps complet ou moins.

Privilégier l’accompagnement

En conséquence, pour réduire la pauvreté laborieuse, les efforts doivent se concentrer, selon lui, sur l’accompagnement des collaborateurs à temps partiel vers des temps pleins, notamment par des changements d’emploi. Une piste d’action bien plus efficace, pour l’auteur, que l’augmentation du salaire minimum, qu’il désigne comme un « piètre instrument de redistribution des revenus » – il « évince de l’emploi (…) les personnes les plus fragiles (…), du fait de la sensibilité de la demande de travail [des entreprises] au coût du travail ».

Dans le même temps, M. Cette souligne un autre facteur favorisant la pauvreté des travailleurs : la situation familiale, en particulier l’appartenance à une famille monoparentale. Il préconise, en la matière, un « soutien déterminé à la garde des enfants, un accès prioritaire aux structures adaptées ou une prise en charge plus complète des dépenses correspondantes ».

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LJD

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