Retraite à l’étranger : les démarches enfin allégées
Vous n’êtes pas mort ? Prouvez-le ! C’est, en somme, ce que demandent chaque année les différents régimes français aux retraités installés hors de nos frontières. Rien d’illogique, il s’agit pour eux d’éviter de continuer à verser des pensions à des personnes décédées depuis des années. L’enjeu financier est important : « environ 6 milliards d’euros de pensions sont réglés chaque année à l’étranger, soit grosso modo 2 % des retraites versées par les régimes français », détaille Stéphane Bonnet, directeur de l’Union Retraite, l’organisme interrégimes.
Le hic, c’est que la démarche s’avérait jusqu’ici très fastidieuse. Chaque année, les près de un million et demi de retraités concernés (qu’ils soient ou non de nationalité française) recevaient par la poste un certificat d’existence, à faire tamponner par une autorité locale compétente, puis à renvoyer, là aussi par courrier, en respectant un délai généralement fixé à deux mois.
Une procédure à répéter autant de fois qu’ils avaient de régimes de retraite, de base comme complémentaires. Le moindre couac rimait généralement avec suspension de pension, l’assuré étant alors présumé mort.
Une procédure unique, et dématérialisée
De quoi agacer les retraités de l’étranger qui, depuis des années, exposaient leurs « galères » à leurs élus, sur les forums en ligne, dans la presse ou encore via une pétition. Les uns racontant que les courriers ne leur arrivaient parfois pas, ou tardivement, en raison d’un service postal défaillant dans le pays d’accueil. D’autres expliquant ne pas avoir d’adresse postale (villes sans noms de rue, dans certaines contrées, par exemple) ou rencontrer des difficultés pour se déplacer en raison d’une maladie.
Ils ont finalement eu gain de cause avec le lancement, en novembre, d’une procédure unifiée et dématérialisée. En pratique, chacun recevra désormais une fois l’an un certificat de vie valable pour tous les régimes, par mail ou via son « compte retraite » en ligne. Comme avant, il devra se rendre dans les bureaux d’une autorité locale compétente en la matière (ambassades, consulats, mairies, police, etc. : les services habilités varient selon les pays d’accueil, la liste pour chacun est consultable sur le site de l’Union retraite ou du régime général).
Il devra ensuite renvoyer le document scanné ou photographié via la messagerie de son compte retraite. L’ancienne procédure postale demeure possible, le certificat peut toujours être reçu et renvoyé par courrier.
Le formulaire est pour l’heure disponible en anglais, portugais, espagnol et italien. D’autres langues devraient être ajoutées au printemps 2020, prioritairement l’arabe, peut-être aussi l’allemand, le polonais, le turc et le néerlandais, nous a indiqué l’Union Retraite, précisant avoir procédé fin octobre à une première fournée d’envois de certificats uniques, à 180 000 retraités.
« Le service étant progressivement mis en place au dernier trimestre 2019, il est possible que certains assurés reçoivent plusieurs demandes de leurs régimes pour justifier de leur existence en 2019 », prévient toutefois l’organisme dans un communiqué.
« C’est une avancée majeure », se réjouit Anne Genetet, députée des Français de l’étranger et auteure en 2018 d’un rapport sur la mobilité internationale des Français, dans lequel elle pointait du doigt les difficultés que posait la démarche du certificat de vie. Certes, la procédure nécessitera toujours de se déplacer pour faire tamponner son certificat par une autorité habilitée du pays d’accueil, mais cette rencontre « en face à face d’un tiers identifié de confiance par les régimes français reste indispensable pour éviter les fraudes », justifie M. Bonnet.
Bientôt la fin du certificat de vie pour certains pays ?
L’autre bonne nouvelle, c’est que pour certains pays d’expatriation européens, le renvoi annuel du certificat d’existence ne sera bientôt plus du tout requis grâce à des échanges automatisés d’information sur les décès entre la Caisse nationale d’assurance-vieillesse (CNAV), qui gère le régime général français, et certains régimes étrangers. Si ces organismes se tiennent réciproquement au courant des décès survenus dans leur pays, les retraités n’ont en effet plus besoin de prouver qu’ils sont en vie…
Ces échanges d’informations sont d’ores et déjà effectifs avec l’Allemagne, la Belgique et le Luxembourg, ce qui signifie que pour ces pays, la CNAV ne demande plus à ses retraités de produire de certificats d’existence. Des conventions ouvrant la voie à de tels échanges ont également été signées avec l’Italie, la Suisse, les Pays-Bas et l’Espagne mais ne sont pas encore effectives. Ils devraient l’être en 2020 ou début 2021, selon le régime.
Mieux encore : la CNAV peut désormais partager ces données avec les autres régimes français. Pour les retraités installés dans les pays concernés par ces conventions, plus aucun certificat de vie ne sera donc a priori réclamé à terme par aucun régime.