« Renault joue sa survie » : l’Etat demande au constructeur de s’engager sur le maintien de ses activités en France

« Renault joue sa survie », a prévenu Bruno Le Maire. Le prêt de 5 milliards d’euros, « je ne l’ai pas encore signé », a expliqué le ministre de l’économie dans un entretien publié jeudi 21 mai au soir par Le Figaro, en demandant aux constructeurs automobiles de s’engager sur trois points, dont « la localisation en France de leurs activités technologiquement les plus avancées ».
Renault se retrouve dans une très mauvaise situation, ayant vu ses usines et son réseau commercial paralysés par la crise sanitaire et les confinements décidés notamment en Europe, qui ont fait chuter le marché du neuf de 76,3 % en avril en Europe. Le groupe était déjà fragilisé avant cet épisode, ayant subi en 2019 sa première perte nette en dix ans.
L’Etat français, premier actionnaire de Renault avec 15 % du capital, a accepté de voler à son secours en garantissant un prêt bancaire d’environ 5 milliards d’euros, qui a été approuvé par l’Union européenne. Mais il faut encore qu’il soit validé par M. Le Maire et un décret publié au Journal officiel.
Des engagements du groupe automobile attendus

Le groupe doit présenter vendredi 29 mai son nouveau plan stratégique, et a déjà chiffré les économies nécessaires à 2 milliards d’euros. Ce plan pourrait comprendre la fermeture de trois usines de taille moyenne en France, ainsi qu’une reconversion de l’installation industrielle emblématique de Flins (Yvelines), selon le Canard Enchaîné et une source proche du dossier.
Si le constructeur n’a pas commenté ces informations, elles ont suscité une levée de boucliers, le premier ministre, Edouard Philippe, prévenant mercredi que le gouvernement serait « intransigeant » sur la préservation des sites.
« Nous poursuivons nos discussions dans le cadre du plan de soutien à l’industrie automobile », a précisé Bruno Le Maire en révélant que ce plan, attendu par la filière tout entière, serait annoncé la semaine prochaine par le président de la République.
Dans ce cadre, « nous demandons aux constructeurs de prendre des engagements dans trois directions : le véhicule électrique, le respect de leurs sous-traitants et la localisation en France de leurs activités technologiquement les plus avancées », a détaillé le ministre.
« Toutes les aides que nous apportons aux entreprises doivent être orientées dans ces deux directions : la décarbonation de l’économie française et l’amélioration de sa compétitivité. »
La suspension des règles de discipline budgétaire pour 2021
Dans cet entretien, le ministre de l’économie revient aussi sur les règles de discipline budgétaire entre membres de l’Union européenne : « Nous souhaitons que les règles du pacte de stabilité, suspendues pour 2020, le soient également pour 2021. » « Rien ne serait pire que de relancer la machine économique tout en appuyant sur le frein des dépenses publiques. C’est une erreur qui a été commise en 2009 et que nous ne commettrons pas à nouveau », a ajouté le ministre.
Interrogé sur le projet de relance de 500 milliards d’euros proposé lundi par le président français, Emmanuel Macron, et la chancelière allemande, Angela Merkel, qui doit encore néanmoins recevoir l’onction des autres membres de l’Union, dont certains renâclent, il a déclaré :
« L’Autriche, les Pays-Bas, la Suède, le Danemark ont exprimé leurs réserves. Pourtant, les économies de ces Etats bénéficient du marché unique : c’est donc leur intérêt que l’économie redémarre chez tous leurs partenaires en Europe. »
« Ce redémarrage dépendra de la puissance du plan de relance. Lever de la dette en commun est l’instrument le moins cher, parce que les taux sont faibles et que nous rembourserons la dette sur une longue durée, supérieure à dix ans. C’est donc bien la solution la plus frugale, a plaidé M. Le Maire. L’Europe ne peut pas être construite sur les seuls intérêts nationaux, elle ne peut être construite que sur la solidarité. »
Enfin, dans le domaine fiscal, le ministre a réitéré son souhait d’un « accord international sur la taxation des géants du numérique, qui sortent renforcés de la crise, de mettre en place une taxation minimale à l’impôt sur les sociétés pour lutter contre l’optimisation fiscale et d’instaurer une taxe carbone aux frontières de l’Union européenne ».