Réforme des retraites : reçus par Elisabeth Borne, les syndicats ont dit leur opposition à tout report de l’âge de départ
A quelques jours de sa présentation de la réforme des retraites, Elisabeth Borne souhaite afficher sa volonté de concertation. La première ministre a reçu, jeudi 8 décembre, à Matignon, plusieurs secrétaires généraux syndicaux, dont Philippe Martinez de la Confédération générale du travail (CGT) et Laurent Berger de la Confédération française démocratique du travail (CFDT).
Les secrétaires généraux de la CFDT et de la CGT ont promis une mobilisation sociale « déterminée » en cas de report de l’âge de départ à la retraite, à l’issue de leurs rendez-vous. « Ils sont obstinés, je pèse mes mots, à dire qu’il faut travailler jusqu’à 65 ans », a déploré à sa sortie de Matignon M. Martinez (CGT), premier reçu par la première ministre. « Travaillons d’abord sur les questions essentielles, l’emploi des seniors en étant une, avant de dire “c’est 65 ans”. Parce que sinon c’est du bricolage », a ajouté le secrétaire général de la CGT devant la presse, assurant ne « sûrement pas » se rendre au rendez-vous fixé vendredi par le ministre du travail, Olivier Dussopt, dans ces conditions.
Une « réforme dure » qui serait « durement vécue par les travailleurs »
Reçu dans la foulée, Laurent Berger (CFDT) a exprimé sa « crainte » que la réforme se concentre sur une « mesure d’âge » (report de l’âge légal de départ ou allongement de la durée de cotisation) « qui ne tiendrait pas compte de deux mois de concertation ». Le dirigeant du premier syndicat français a rappelé ses propositions « sur les travailleurs seniors, les métiers pénibles, les petites retraites », devant une première ministre « à l’écoute ».
« Mais tout report de l’âge légal de départ en retraite fera que la CFDT sera en intersyndicale pour se mobiliser. Je le redis avec force : attention à ne pas avoir une réforme qui va être dure, qui va être vécue très durement par les travailleurs, et la réaction sociale sera tout aussi déterminée. »
François Hommeril (CFE-CGC) s’est élevé contre l’argument selon lequel « le système de retraite serait en péril : c’est faux ». Précédemment, « on avait considéré qu’il y avait du bien-fondé à passer à 62 ans et à quarante-deux années de cotisation, mais là il n’y a aucune justification », a commenté le président de la confédération des cadres.
« En reculant l’âge de départ, on fait peser la réforme uniquement sur les salariés, a déploré Cyril Chabanier (CFTC), qui regrette l’absence de mesures sur les entreprises. Les contreparties sur l’emploi des seniors ne sont pas suffisantes pour compenser une mesure profondément injuste. »
L’ensemble des syndicats (CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC, UNSA, Solidaires et FSU) ont annoncé qu’ils décideraient d’une « première date de mobilisation unitaire » en janvier « si le gouvernement demeurait arc-bouté sur son projet » de contraindre les salariés à travailler plus longtemps, au motif d’assurer l’équilibre du système des retraites.
Un report de l’âge de départ à 65 ans est la piste privilégiée pour cette réforme, qui sera portée dans un projet de budget rectificatif de la Sécurité sociale, ont rapporté jeudi plusieurs convives d’un dîner à l’Elysée.
Menace de mobilisation unitaire en janvier
Les rencontres de jeudi à Matignon ont eu lieu au lendemain d’un dîner de la majorité à l’Elysée notamment consacré aux retraites, autour du président Emmanuel Macron et d’Elisabeth Borne, avec les responsables des groupes parlementaires et des partis Renaissance, MoDem et Horizons.
Les représentants de différents groupes parlementaires – majorité comme opposition – seront reçus la semaine prochaine, avant la présentation des grandes lignes de la réforme par Mme Borne autour du 15 décembre, a ajouté l’entourage de la cheffe du gouvernement.
Emmanuel Macron avait défendu pendant la campagne présidentielle un report de l’âge légal de 62 à 65 ans, avant d’évoquer, une fois réélu, un recul à 64 ans couplé à une augmentation de la durée de cotisation.
Ces points font actuellement l’objet d’une concertation entre le gouvernement et les partenaires sociaux qui doit se terminer vendredi. Un projet de loi doit ensuite être présenté en janvier, avant un examen au Parlement.
Reste à savoir si, avec une majorité relative à l’Assemblée nationale, la première ministre pourra éviter un nouveau recours à l’article 49.3 de la Constitution, qui permet d’adopter un texte sans vote, sauf motion de censure.