« Que sait-on du travail ? » : les effets délétères de la sous-traitance sur la santé des salariés
15,3 % : c’est la part de salariés victimes d’au moins un accident du travail en 2019, dans l’effectif des entreprises « preneuses d’ordre », dont la sous-traitance représente plus de la moitié du chiffre d’affaires, indique l’enquête « Conditions de travail et risques psychosociaux » du ministère du travail.
Cette proportion dépasse tout juste les 10 % chez l’ensemble des salariés français. A partir des données disponibles et de travaux publiés depuis une dizaine d’années, les économistes Corinne Perraudin et Nadine Thévenot mettent en évidence la pénibilité subie par les travailleurs de la sous-traitance, exerçant dans des secteurs déjà difficiles (industrie, construction, transports…).
Les chercheuses développent leurs principaux résultats dans une contribution au projet de médiation scientifique « Que sait-on du travail ? » du Laboratoire interdisciplinaire d’évaluation des politiques publiques (Liepp), diffusé en collaboration avec les Presses de Sciences Po sur la chaîne Emploi du site Lemonde.fr.
Malheureusement, ces conditions de travail difficiles et les risques qui en découlent sont rarement assumés par les entreprises donneuses d’ordre : cela tient précisément à la définition de la sous-traitance, qui établit un lien de dépendance économique entre les entreprises, mais sans responsabilité de l’emploi en lui-même, et sans engagement sur le long terme.
Une société donneuse d’ordre confie simplement à une autre, preneuse d’ordre, le soin d’exécuter une partie des tâches de production. Elle est coresponsable des risques subis par les salariés du sous-traitant uniquement si ceux-ci travaillent sur un site qui lui appartient. Depuis 2017, les entreprises multinationales ont un devoir de vigilance sur les risques subis par les travailleurs de toute leur chaîne de production, dans leurs filiales en France et dans le monde, mais pour l’ensemble des entreprises, cette obligation de vigilance se résume à la lutte contre le travail dissimulé.
Renforcer la responsabilité des entreprises
En 2019, 28 % des établissements sont sous-traitants (et 7 % le sont pour plus de la moitié de leur activité). Certains sous-traitants sont eux-mêmes donneurs d’ordre. La sous-traitance n’est pas un statut d’emploi à proprement parler, puisque les travailleurs sont des salariés comme les autres. Il ressort des travaux des autrices que ces salariés sont moins bien rémunérés que les salariés des donneurs d’ordre, à qualification égale, et qu’ils exercent davantage des métiers « d’exécution ». Ainsi, ils sont plus souvent exposés au travail de nuit, à la manutention de charges lourdes ou encore au bruit.
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