Pour Stuart, filiale de La Poste accusée de travail dissimulé, la procureure requiert la peine maximale

Pour Stuart, filiale de La Poste accusée de travail dissimulé, la procureure requiert la peine maximale

Livraison Stuart, à Paris, le 16 septembre 2022.

C’est le énième procès d’une plate-forme de livraison. Mais il a un parfum d’inédit car c’est la première fois qu’il met en cause une entreprise aujourd’hui détenue à 100 % par un groupe public. Devant le tribunal judiciaire de Paris, les 15, 16, 22 et 23 septembre, l’entreprise Stuart, filiale de La Poste implantée dans six pays et 125 villes, et son ancien dirigeant, Benjamin Chemla, devaient répondre des faits de travail dissimulé en France. Comparaissait également l’ex-associé de M. Chemla, Clément Benoît, fondateur de la plate-forme de livraison de repas Resto In, aujourd’hui disparue.

Stuart est soupçonnée d’avoir entretenu une relation de salariat avec ses coursiers alors qu’ils relevaient officiellement du statut indépendant d’autoentrepreneur. Les faits remontent à 2015 et 2016. A l’époque, M. Chemla lance Stuart avec l’espoir de « conquérir l’Europe » en proposant à de petits commerçants de livrer à leur clientèle des repas comme des colis, face à la concurrence féroce du géant Amazon. C’est en tout cas le récit que font les prévenus au tribunal.

Lire aussi : Deliveroo, reconnue coupable de travail dissimulé, condamnée à verser 9,7 millions d’euros à l’Urssaf

A l’audience, M. Chemla tient à se distinguer des plates-formes comme Deliveroo, condamnée en juillet pour des faits similaires de travail dissimulé. « Stuart n’a rien à voir avec ce genre de plate-forme », assure le trentenaire. Stuart est « différent », insiste-t-il, car c’est « un modèle français » et, à l’inverse des plates-formes qui mettent en relation un particulier et un livreur, Stuart met en relation « un donneur d’ordre qui n’est autre que Franprix ou encore Pizza Hut, et un professionnel qui souhaite se faire livrer ».

Un modèle « Free » mis à mal

Tout au long des débats, les prévenus ont tenté de défendre le caractère technologique de la plate-forme, « un outil informatique de transmission » qui garantit l’indépendance des livreurs grâce au mode « free » de l’application, qui laisse les autoentrepreneurs choisir leur zone de courses et leurs horaires.

Une démonstration qui n’a pas eu l’air de convaincre le tribunal. Au gré des témoignages de coursiers lus à l’audience, Stuart est en réalité apparue comme le donneur d’ordre principal des livreurs : rappel à l’ordre suite à des retards de livraison, désactivation de compte en cas de refus de course réitéré, sessions de formation dispensées en vue d’inculquer un « comportement » à adopter…

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Des livreurs Uber Eats sans-papiers réclament leur régularisation

L’un des livreurs, qui travaille toujours pour la plate-forme, est venu témoigner à l’audience. Il y a notamment évoqué des directives de circulation ou encore les annulations de courses imposées par la plate-forme. Son récit a mis à mal le modèle « free » derrière lequel s’est retranché M. Chemla : le coursier doit en réalité honorer les deux tiers des courses qui lui sont proposées sous peine de recevoir un avertissement, et d’être déconnecté du réseau après deux avertissements.

Il vous reste 40.66% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Avatar
LJD

Les commentaires sont fermés.