Poser la question de l’assistance sociale des travailleurs des plates-formes recommence à poser celle de la protection sociale des autoentrepreneurs

Poser la question de l’assistance sociale des travailleurs des plates-formes recommence à poser celle de la protection sociale des autoentrepreneurs

François Hurel, directeur de l’Union des autoentrepreneurs, estime qu’il ne faut pas abandonner les plates-formes numériques saisir le contrôle de la couverture sociale de ces indépendants.

Récupération du contrat d’un livreur Deliveroo en contrat de travail en Espagne en juin 2018, de ceux de chauffeurs Uber au Royaume-Uni en décembre 2018 et en France le 10 janvier… Les recours juridiques de chauffeurs et de livreurs qui fleurissent en Europe contre les plates-formes de crowdworking (littéralement, « travail de foule ») nous placent au pied du mur : quelle protection voulons-nous pour cette nouvelle catégorie de travailleurs indépendants qui, pour la plupart, travaillent en autoentrepreneurs, et qui représentent aujourd’hui environ 10 % des 1,3 million de Français exerçant sous ce régime ?

On ne peut pas, d’un côté, célébrer en France le fort détermination des créations de microentreprises, qui ont encore battu un record en 2018, avec 308 300 créations d’activité sous ce statut, et, de l’autre, rejeter les plus fragiles d’entre eux en dehors du pacte social, en lâchant la protection de ces travailleurs aux mains des plates-formes.

Nous savons que les parcours professionnels ne sont plus linéaires. On se doute – et on espère – que les travailleurs des plates-formes ne le seront pas jusqu’à la fin de leur vie professionnelle. Nous savons aussi que le salarié peut faire également le choix de l’autoentrepreneuriat à un moment de sa carrière. Tout le monde s’accorde à vouloir – à débuter par la ministre du travail, Muriel Pénicaud, qui a porté l’une des réformes les plus emblématiques de ce début de quinquennat – que la portabilité des droits, qui s’applique à la formation mais aussi à nos droits à la sécurité, fonctionne pour tous. Ne serait-ce pas un paradoxe d’en exclure les travailleurs des plates-formes ?

Le risque d’un statut hybride

Autre paradoxe, pour le moins étrange : on entend dire que certains réfléchiraient à créer un nouveau régime juridique pour filtrer les liens entre les travailleurs et les plates-formes. Il est impératif que les pouvoirs publics soient prudents et ne confondent pas vitesse et précipitation, et surtout qu’ils ne cèdent pas aux sirènes des litigieux qui se multiplient devant les tribunaux. Alors que l’on reproche aux plates-formes d’être des employeurs déguisés et de contourner la législation du travail, leur confier la protection sociale des travailleurs indépendants ne serait-il pas placer de facto ces derniers en position de dépendance plus franche encore ?

Comment peut-on laisser les plates-formes prendre le contrôle de la protection des autoentrepreneurs, les plaçant dans une situation de dépendance qui ne pourra que les dissuader de quitter la plate-forme ?

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LJD

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