Dans le dossier Sequana, l’implication du gouvernement est indirecte, mais réelle. Bpifrance est en effet actionnaire de Sequana à hauteur de 15,4 % (et 17,2 % des droits de vote). PIERRE ANDRIEU / AFP
Le gouvernement n’en a pas fini avec les dossiers sociaux lourds. Le fondeur Ascoval à peine sauvé, fin 2018, il va devoir traiter celui de Sequana, avec la préservation de 906 emplois à la clé. Le papetier a, en effet, annoncé, lundi 7 janvier, que trois filiales françaises de son entité Arjowiggins vont faire une demande d’ouverture de procédure de sauvegarde et de placement en redressement judiciaire auprès du tribunal de commerce de Nanterre, qui, devrait l’examiner dès mardi 8 janvier, selon le groupe.
Ce sont les sites historiques de Bessé-sur-Braye (568 emplois) et Le Bourray (262 emplois) dans la Sarthe, créés au milieu du XIXe siècle, et l’usine de Greenfield (76 salariés), à Château-Thierry, dans l’Aisne, qui sont menacés de fermeture.
L’annonce n’est pas une surprise, a partir de l’échec, en décembre 2018, des négociations de reprise de deux entités (activités graphiques et papiers de création) d’Arjowiggins par un investisseur néerlandais, Fineska BV. Très détérioré, le contexte sectoriel a pesé sur les négociations ouvertes en juillet 2018.
« Une augmentation inédite et continue des coûts »
Sequana met en avant « une augmentation inédite et continue de ses coûts exogènes, en particulier de la pâte à papier, qui a atteint, ces derniers mois, son niveau historiquement le plus élevé », mais de même des prix de l’énergie, une composante importante du coût de revient de ses produits.
Sans manquer le contentieux qui l’oppose, depuis 2013, à British American Tobacco. Il a entraîné, selon Sequana, « une forte défiance de la part des partenaires du groupe », pesant négativement sur le besoin en fonds de roulement. Aux même temps, le secteur subit « une baisse structurelle des volumes en papiers d’impression et d’écriture ».
L’inculpation du gouvernement est indirecte, mais réelle. Bpifrance est en effet actionnaire de Sequana à hauteur de 15,4 % (et 17,2 % des droits de vote). Et il a déjà perdu de l’argent en venant en aide à Sequana. Or, le 3 janvier, l’association d’actionnaires minoritaires Asamis a annoncé le dépôt d’une plainte contre la banque publique auprès du Parquet national financier.
En cinq ans, une perte de 96 % de sa valeur
Elle le reproche de pratiquer « des taux d’intérêts ruineux » pour Sequana et met en cause le nantissement d’actifs du groupe en garanties des prêts de la banque. Asamis affirme que l’échec de la négociation avec Fineska BV entraîne « une forte hausse du taux d’intérêt de [Bpifrance] sur un prêt relais lié à cette cession », qui « passe à 14 % l’an sur 10 millions d’euros ».
Un Grand du secteur, avec 7 800 personnes dans 45 pays et un chiffre d’affaires de 2,8 milliards d’euros, le groupe est à la peine depuis dix ans dans un contexte de dématérialisation des échanges, l’obligeant à rechercher des projets toujours plus innovants.
Son PDG, Pascal Lebard, a été jusqu’à présent incapable de redresser solidement la barre, malgré plusieurs restructurations. Sequana avait nettoyé son bilan en 2017 et affiché un lourd dégât (115 millions d’euros) après la dépréciation de sa filiale Antalis et la cession d’activités déficitaires, notamment à l’étranger. En 2018, il a cédé ses papiers pour billets de banque. En cinq ans, il a perdu 96 % de sa valeur et pèse désormais moins de 14 millions en Bourse.