Pénalisé par le rachat de Monsanto, Bayer va supprimer 12 000 emplois d’ici à 2021

Pénalisé par le rachat de Monsanto, Bayer va supprimer 12 000 emplois d’ici à 2021

Werner Baumann, PDG de Bayer, lors de l’assemblée générale annuelle des actionnaires du groupe, à Bonn (ouest de l’Allemagne), en mai.
Werner Baumann, PDG de Bayer, lors de l’assemblée générale annuelle des actionnaires du groupe, à Bonn (ouest de l’Allemagne), en mai. Wolfgang Rattay / REUTERS

Monsanto va-t-il faire couler le groupe Bayer ? Moins de six mois après avoir racheté le semencier américain, le chimiste allemand, confronté à une baisse spectaculaire de son cours de Bourse, a annoncé une saignée dans ses effectifs. Ainsi, 12 000 postes seront supprimés d’ici à 2021, dont « une partie significative en Allemagne », a précisé le chimiste allemand dans un communiqué publié jeudi 29 novembre.

Bayer présente la mesure comme un plan de restructuration destiné à renforcer la rentabilité de l’entreprise. Outre les suppressions d’emploi, qui représentent presque 10 % des effectifs, le groupe prévoit de vendre son département de santé animale, ainsi que deux marques de médicaments vendus sans ordonnance. Il espère ainsi économiser 2,6 milliards d’euros par an d’ici à 2022. Tous les départements sont touchés par ces coupes claires. La plus grande partie concernera des fonctions administratives et de services, où 5 500 postes disparaîtront.

« Les mesures que nous prenons aujourd’hui doivent augmenter les performances de l’entreprise de façon durable. Elles ne sont pas une réaction à la reprise de Monsanto et ne dépendent pas de la plainte glyphosate », a précisé le PDG du groupe, Werner Baumann. Si l’annonce du plan de restructuration a entraîné un léger redressement du cours en séance, jeudi, celui-ci a terminé en très légère baisse (– 0,72 %), à 63,77 euros, son plus bas niveau depuis 2012. Car, depuis trois mois, l’action est plombée par l’affaire du glyphosate.

Les investisseurs redoutent une explosion du risque judiciaire lié au glyphosate

Le 10 août, un jardinier américain, Dewayne Johnson, avait obtenu gain de cause dans son procès contre Monsanto, dont il accusait le produit phare – le Roundup, à base de glyphosate – d’avoir causé son cancer. La firme américaine avait alors été condamnée par un jury populaire à lui verser 289,2 millions de dollars (248 millions d’euros) de dommages et intérêts. Le montant avait été ensuite réduit en appel à 78 millions de dollars par une magistrate californienne, sans que le jugement soit remis en question sur le fond. Fin novembre, Bayer a de nouveau contesté la décision. Il soutient qu’il n’existe aucun lien entre cancer et glyphosate, si le produit est utilisé correctement.

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Quelle que soit l’issue du procès, le mal est déjà considérable. Les deux décisions américaines, qui augurent mal de l’issue des 9 300 plaintes déposées contre Monsanto, ont fait perdre à Bayer 30 milliards d’euros de valeur boursière en trois mois. Les investisseurs redoutent une explosion du risque judiciaire lié au glyphosate.

Signes de faiblesse

Le pesticide controversé n’est pas le seul problème du chimiste allemand. Chez Bayer, le département de médicaments sans ordonnance montre des signes de faiblesse depuis trois ans. En 2014, Bayer avait racheté certaines activités de l’américain Merck & Co afin de devenir un leader mondial de cette spécialité. Mais les produits n’ont pas tenu leurs promesses sur un marché hautement concurrentiel, où les consommateurs préfèrent acheter leurs produits du quotidien sur Internet que dans les pharmacies.

Plus grave, le département de pharmacie classique sur ordonnance, qui assure presque la moitié du chiffre d’affaires du groupe, est également en difficulté. Les deux molécules phares de Bayer, qui assurent actuellement le gros des ventes et de la croissance du département, voient leur brevet arriver à échéance en 2023.

A partir de cette date, le groupe pourrait avoir à compenser une baisse de chiffre d’affaires de plus de 6 milliards d’euros. Le temps presse, donc. Bayer prévoit de réorganiser son département pharmaceutique et de faire appel à des prestataires extérieurs pour la recherche et le développement. Outre la baisse des coûts, l’objectif est d’accélérer le modèle d’innovation, en renforçant les partenariats avec la recherche académique et les start-up spécialisées en biotechnologie.

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Toutefois, le plus gros défi demeure l’intégration de Monsanto. Bayer promet que le mariage avec le semencier devra dégager des synergies de 1,2 milliard d’euros, ce qui se traduit notamment par la suppression de 4 200 postes dans le département. De nouveaux produits devront également arriver sur le marché. Sur ce dossier, le groupe n’a pas le droit à l’erreur.

Bayer doit non seulement réussir sur le plan opérationnel, mais aussi faire oublier l’image désastreuse de Monsanto dans l’opinion publique, en montrant que les pratiques du semencier appartiennent au passé. La valeur du cours montre que les investisseurs sont pour l’instant réservés sur ces perspectives.

Cécile Boutelet (Berlin, correspondance)

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