Des cours pour apprendre à mémoriser

 A l’université d’Evry, des étudiants de première année de licence suivent des ateliers spécifiques pour être plus efficaces dans leurs révisions.

 

Ces élèves  présents ce jeudi approuvent d’un mouvement de tête. Alexandre, étudiant en première année d’administration économique et sociale (AES), prépare ses examens, qui s’étalent jusqu’en janvier. Proposé par l’université d’Evry depuis la rentrée, le module de mémorisation est un des six choix possibles pour les étudiants de première année admis en parcours « oui, si » (l’élève est admis en première année de licence à condition qu’il suive certains modules de méthodologie et de mise à niveau).

Après avoir regardé une vidéo qui explique la méthode Feynman, du nom du physicien américain lauréat du prix Nobel en 1965, Ces élèves choisissent un concept d’un de leurs cours pour s’entraîner à appliquer la méthode. Ce sera le déficit et la dette publique pour Guillaume, et l’économie de l’Antiquité au Moyen Age pour Alexandre.

Outre des techniques comme celle-ci, Eric Marbeau répète et fait continuellement répéter à ses élèves ce qu’il estime être les clés de la mémorisation : l’attention, l’association, la structuration, la répétition, l’émotion et la production.

Comprendre pour retenir

Sur le tableau, on peut lire cette phrase : « On ne le répétera jamais assez : être assidu et attentif en cours, c’est déjà mémoriser la majeure partie du contenu. » M. Marbeau explique que pour retenir une information, il faut la comprendre, et que pour cela, le plus simple est de faire des liens entre les différentes notions. D’où l’importance de structurer l’information avec une notion centrale, et d’autres qui gravitent autour.

« Autre méthode qui peut vous aider : imaginez dans quel contexte vous allez utiliser l’information, explique le coach. C’est lié à la notion d’émotion : si vous vous voyez en train de vous servir de ce que vous apprenez, vous comprendrez en quoi il est utile de l’apprendre. La mémoire est sensible à ce genre de pensée, tout comme au stress. Alors si vous avez prévisualisé votre réussite, par exemple, que vous arrivez à gérer votre stress, vous arriverez plus facilement à vous souvenir des informations. »

Des notions évoquées par enseignante-chercheuse en psychologie cognitive à l’université de Caen-Normandie Sandrine Rossi, qui travaille sur la mémoire de travail. « Cette mémoire de travail fait le lien entre la mémoire à court terme, qui ne permet pas de stocker des souvenirs ou des connaissances, et la mémoire à long terme, qui se définit au contraire par un encodage plus profond, grâce à laquelle une information peut être maintenue trois minutes, des années, voire tout une vie. » C’est donc cette mémoire de travail qu’il faut souvent réactiver pour emmagasiner des connaissances. « Mais elle est très gourmande en énergie, et mobilise beaucoup de capacités attentionnelles », souligne l’enseignante-chercheuse.

Conseils et techniques utiles

Alexandre, qui n’est pas allé au bout de sa première année de droit l’an dernier, estime que les conseils et les techniques délivrés dans ce module lui sont utiles : « Je savais que j’avais une bonne mémoire visuelle. J’ai appris à développer ma mémoire auditive, en me mettant plus près du prof en cours, pour être attentif. Je m’enregistre en train de dire mes cours, cela m’aide à les retenir. »

Pour Guillaume, l’une des principales difficultés qu’il a jusqu’à présent rencontrée est d’apprendre régulièrement. « Au lycée, on avait souvent des contrôles, alors qu’ici on est plutôt livrés à nous-mêmes », constate le jeune homme. Sandrine Rossi confirme que les méthodes d’apprentissage changent entre le lycée et l’université, ce qui peut être déroutant. « Au lycée, l’objectif est de faire assimiler aux jeunes des connaissances que l’on évalue régulièrement, alors qu’à l’université, pendant les cours magistraux, les professeurs donnent des connaissances, mais c’est à l’étudiant de se les approprier grâce à des recherches et une prise de recul sur le thème abordé. »

Autre exercice du jour : noter ses points forts, ses ressources et les obstacles à la réussite. Guillaume inscrit dans cette dernière case les distractions qui l’empêchent de travailler : sorties avec les amis, les jeux vidéo, etc. Sandrine Rossi remarque que les écrans, en général, génèrent un besoin important d’attention, et requièrent donc beaucoup d’énergie. L’enseignante-chercheuse conseille de limiter leur pratique dans le temps.

 

Au Final, Alexandre range quelques fiches bristol bleues dans son trieur. Guillaume, lui, dit vouloir se mettre à en faire ce week-end. « Les étudiants n’ont pas forcément encore le réflexe d’appliquer les méthodes qu’ils apprennent, constate Eric Marbeau. On sème, ça poussera en temps voulu. »

Printemps 2019: Vivarte se cherche un nouveau boss

Au siège de La Halle, à Paris, en septembre 2017.

Patrick Puy a fini sa « mission » chez Vivarte. Le spécialiste de la restructuration d’entreprises, PDG du groupe d’habillement depuis fin 2016, a annoncé, jeudi 20 décembre, l’arrivée d’un directeur général au printemps 2019 pour prendre la direction opérationnelle de Vivarte dont il conserverait la présidence.

Ce futur patron aurait un pedigree « retail » (comprendre, issu du secteur de la distribution), à en croire M. Puy. De fait, d’après nos informations, depuis plusieurs mois, à la demande des actionnaires du groupe français, les cabinets parisiens de chasseurs de tête sont en quête d’un nouveau patron pour Vivarte. Et M. Puy aurait déjà fort à faire ailleurs, à Marseille, précisément. Celui qui s’est associé à Raymond Soubie, ancien conseiller social de Nicolas Sarkozy, au sein de la société Alixio, pour des missions de restructuration, confirme épauler Bourbon pour trouver de nouveaux partenaires financiers au groupe parapétrolier, dont la dette atteint 1,34 milliard d’euros.

Mais, rue de Flandres, à Paris, au siège du groupe Vivarte, qui emploie 10 000 salariés, la perle rare n’est pas facile à trouver. Car tout le secteur sait que « Vivarte partira à la découpe jusqu’au dernier bouclard », rapporte un dirigeant récemment approché. Dès lors, rares seraient les cadres prêts à prendre la direction d’un groupe racheté plusieurs fois en leveraged buy-out (« rachat avec effet de levier »), et dont les actionnaires créanciers, parmi lesquels le fonds Oaktree, mènent le démantèlement à la hâte.

Une cessions de 300M d’euros

Vivarte compte aujourd’hui six enseignes. A l’arrivée de M. Puy, en octobre 2016, le groupe en fédérait seize. Ses deux années de présidence auront été marquées par une série de cessions menées pour réduire l’endettement de l’entreprise. Les chaussures Pataugas, le réseau Kookäi et l’espagnol Merkal sont vendus en 2017. Puis, l’enseigne André est cédée au site de vente en ligne Spartoo, en avril, et Naf Naf au chinois La Chapelle, en mai. Chevignon revient à Royer, en octobre, tandis que Besson Chaussures est repris par le fonds d’investissement Weinberg Capital Partners, associé à Philippe Ginestet, fondateur de Gifi. Le montant total des cessions aurait atteint « environ 300 millions d’euros », selon M. Puy. Près de 200 millions auraient été affectés au remboursement de la dette du groupe.

En novembre, Vivarte a annoncé vouloir aussi vendre ses enseignes de chaussures Minelli, San Marina et Cosmoparis. L’affaire devrait être conclue en « mai ou juin » 2019, prévoit le dirigeant. Vivarte, ancienne figure de la distribution européenne, qui a été côtée en Bourse et présidée par des stars de la distribution, dont Georges Plassat (ex-Carrefour), Richard Simonin (ex-La Redoute) Marc Lelandais (ex-Lancel) et Stéphane Maquaire (ex-Monoprix) pourrait alors se résumer à deux enseignes : La Halle et Caroll. Voire à la première, née de la fusion de La Halle aux vêtements et de La Halle aux chaussures, estime un élu. Car, selon des sources syndicales, le conseil d’administration travaillerait aussi sur la sortie de Caroll. L’enseigne n’est « pas à vendre », dément cependant M. Puy.

« Une nouvelle phase de développement »

Adapter des thérapies de choc s’emploie désormais surtout à rappeler le chemin parcouru depuis sa nomination. « Vivarte est maintenant un groupe normal », affirme-t-il. Le conglomérat a bouclé, fin août, son exercice 2017-2018, sur un chiffre d’affaires de 1,4 milliard d’euros et dégagé un résultat d’exploitation de 50,6 millions d’euros, d’après les données qu’il communique. Sa dette s’établirait à 302 millions d’euros, en septembre, contre 437 millions d’euros, à la même période en 2017 et 1,084 milliard, fin 2016.

Dès lors, le groupe serait en mesure « d’entrer dans une phase de développement », promet-il. Après une année marquée par un recul d’activité de 4,1 % au total, avec une chute des ventes de 9 % chez Caroll et une dégradation de 2,5 % chez La Halle, Vivarte devrait renouer avec « une croissance de 2 % » sur son exercice 2018-2019, déclare M. Puy, et dégager des résultats pour financer ces projets. A savoir, exporter ses enseignes jusqu’en Afrique, rénover ses entrepôts d’Issoudun et Châteauroux (65 000 m² au total), dans l’Indre, ou revoir l’approvisionnement pour acheter les collections La Halle en Europe.

Ce discours agace les représentants du personnel. Jean-Louis Alfred, délégué CFDT, dénonce « l’opacité » des chiffres communiqués jeudi. « Rien n’est vérifiable », s’étonne l’élu. L’avenir des salariés La Halle inquiète aussi M. Alfred. Après un premier plan social, en 2017, avec la suppression de 700 postes la fermeture de magasins déficitaires, les deux enseignes La Halle et La Halle aux chaussures fusionneront au 1er janvier 2019. Dès lors, une offre de chaussures et de vêtements sera vendue sous un même toit. Au prix de cette fusion, une vingtaine de magasins par an disparaîtront à moyen terme. Les deux réseaux comptent aujourd’hui 870 magasins. « Philippe Thirache [président de La Halle] estime que l’enseigne ne peut être rentable qu’aux alentours de 500 à 600 points de vente », rapporte M. Alfred. Mais M. Puy assure ne pas avoir besoin de recourir un nouveau plan social.

 

Prime insolite de fin d’année

Beaucoup d’entreprises ont répondu à l’appel du président de la république en décidant de verser une prime exceptionnelle de fin d’année à leurs salariés. Les députés ont examiné jeudi 20 décembre le texte de loi encadrant cette mesure. Qui pourra enfin en bénéficier ?

« Seuls les salariés gagnant moins de 4 500 euros bruts par mois environ – l’équivalent de trois salaires minimum – et seuls les montants inférieurs à 1 000 euros pourront bénéficier d’une exonération totale de cotisations sociales et d’impôt sur le revenu. »

Pour calmer la rage des « gilets jaunes » sans trop mettre à contribution les finances publiques, Le président de la république a décidé d’en appeler à la générosité des employeurs. Beaucoup d’entreprises ont déjà répondu à l’appel, en annonçant qu’elles offriraient une prime exceptionnelle de fin d’année défiscalisée à leurs salariés. Le versement de cette prime est toutefois encadré par le projet de loi portant mesures d’urgences économiques et sociales, examiné cette semaine en accéléré par les parlementaires pour une adoption d’ici la fin de l’année.

Rappelons d’abord que cette prime n’a rien d’obligatoire : seuls les salariés des entreprises qui se seront portées volontaires pourront la percevoir. Toutefois, un amendement qui a été apporté au texte de loi précise que le versement de cette prime peut être décidé par un accord de groupe : celui-ci s’impose alors à ses filiales.

Le montant est libre

En revanche, seuls les salariés gagnant moins de 4 500 euros bruts par mois environ – l’équivalent de trois salaires minimum – et seuls les montants inférieurs à 1 000 euros pourront bénéficier d’une exonération totale de cotisations sociales et d’impôt sur le revenu. L’idée est d’utiliser la « carotte » de la défiscalisation pour inciter les employeurs à mettre en place cette prime au niveau des bas salaires.

Le groupe de protection sociale Klesia (3 500 salariés) offre un bon exemple de la manière dont cette prime exceptionnelle peut être distribuée. L’entreprise a décidé d’en faire bénéficier une partie de ses salariés, selon une grille variable en fonction du salaire annuel brut perçu : les collaborateurs qui touchent entre 30 000 et 35 000 euros percevront 300 euros, tandis que la prime pourra s’élever jusqu’à 900 euros pour les rémunérations inférieures à 25 000 euros.

Le SMIC mensuel passera à 1 521,22 euros au début de l’année 2019

 

Le smic passera à 10,03 euros de l’heure brut à compter du 1er janvier 2019, en hausse de 1,5 %, selon le décret n° 2018-1173 , publié au Journal officiel. Le brut mensuel est donc relevé à 1 521,22 euros mensuels sur la base de la durée légale du travail de 35 heures hebdomadaires. Le smic horaire brut s’élevait en 2018 à 9,88 euros, et à 8,82 euros il y a dix ans, en 2009.

Ces montants s’appliquent en métropole, en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon. En revanche, à Mayotte, le montant du smic brut horaire également augmenté de 1,5 % sera à 7,57 euros à partir du 1er janvier 2019, soit 1 148,12 euros mensuels. Enfin, le minimum garanti s’établit à 3,62 euros, précise le décret.

« Prime Macron » : le retour du revenu universel

Pour notre journaliste Antoine Reverchon, la prime proposée par le président démontre que la simple rémunération du travail ne représente parfois pas un revenu suffisant pour vivre.

 

Assemblée générale des « gilets jaunes » de Montceau-les-Mines (Saône-et-Loire),  le 18 décembre.

Descendre de l’Olympe de la théorie économique est sans doute tout aussi délicat et douloureux que déchoir de l’Olympe de la pratique du pouvoir politique. Les économistes – du moins un grand nombre d’entre eux – s’étaient réjouis de voir depuis dix-huit mois régner à Bercy, à Matignon et à l’Elysée des politiques qui avaient enfin intégré « les lois de l’économie » : seules les entreprises créent de la richesse ; c’est cette richesse qui, une fois répartie, crée les profits des investisseurs, les salaires des travailleurs – et des fonctionnaires par l’impôt, les prestations des assurances sociales et des aides publiques – par les cotisations et l’impôt ; le niveau de ces prestations et de ces aides doit donc être indexé sur la capacité des entreprises à les financer.

Pour cela, il faut d’une part augmenter la capacité de financement des entreprises, et donc réduire les impôts qui pèsent sur leurs bénéfices et sur la rémunération de ceux qui y investissent ou qui les dirigent, les fameux « premiers de cordée » ; d’autre part réduire la dépense publique et respecter les règles budgétaires des traités européens, les prestations sociales étant revues à la baisse selon une logique assurancielle – pallier l’absence momentanée d’un revenu d’activité – et non plus selon une logique de droit à la solidarité. Le tout résumé d’une belle formule dont la multiplicité sémantique laisse rêveur : « Le travail doit payer. »

A cette aune, augmenter le revenu des Français en puisant dans l’argent public comme vient de l’annoncer le président de la République apparaît comme une double hérésie, et l’on comprend que les « technocrates de Bercy » et leurs ministres aient eu un haut-le-cœur. C’est accorder un revenu supplémentaire qui n’est basé sur aucun gain de productivité ni aucune nouvelle activité créatrice de richesse ; c’est augmenter – de 10 milliards d’euros – la dépense publique qui, tôt ou tard, pèsera sur l’activité économique malgré les dénégations empressées d’économistes girouettes du « story-telling ».

Prime d’activité et coup de pouce au smic

Ce sont pourtant exactement les reproches que ces mêmes économistes adressaient à l’idée d’un revenu universel versé à tous les citoyens, idée défendue par quelques intellectuels, de nombreuses associations et un certain Benoît Hamon, qui fut candidat du Parti socialiste à l’élection présidentielle de 2017 et obtint au premier tour le score calamiteux de 6,35 %.

Orange et Pôle emploi s’entendent en faveur de l’emploi des personnes handicapées

« Orange compte aujourd’hui 7 % de ses salariés en situation de handicap, mais souhaite aller plus loin et recruter sur ses cœurs de métier 150 collaborateurs, 360 alternants et stagiaires en situation de handicap de 2017 à la fin de 2019. »

« Orange compte aujourd’hui 7 % de ses salariés en situation de handicap, mais souhaite aller plus loin et recruter sur ses cœurs de métier 150 collaborateurs, 360 alternants et stagiaires en situation de handicap de 2017 à la fin de 2019. » DANAE MUNOZ / Ikon Images / Photononstop

 

 

Esthéticienne de formation, Aurélie a travaillé quinze ans dans plusieurs instituts de beauté, « jusqu’au jour où ce n’était plus possible ». Au café littéraire du groupe Orange dans le 15e arrondissement de Paris, devant un parterre de journalistes, et assise près du directeur général de Pôle emploi, Jean Bassères, et de la directrice des ressources humaines d’Orange, Valérie Le Boulanger, la trentenaire revient sur la malformation congénitale qui a fini par la priver de son emploi, et lui a valu tant de refus. « Je me suis inscrite à Pôle emploi, mais entre l’absence de diplômes et le handicap, trouver un travail relevait de l’impossible. »

Ou presque. Aurélie travaille désormais comme conseillère commerciale pour Orange. Et ce, grâce au recrutement par simulation, une pratique qui va être démocratisée avec la signature d’un accord de partenariat en faveur de l’emploi des personnes handicapées, annoncé par Orange et Pôle emploi vendredi 7 décembre.

Concrètement, l’accord de partenariat va installer une relation de proximité entre les référents diversité d’Orange et les représentants régionaux de Pôle emploi. Dans chaque territoire, les deux partenaires établiront conjointement un plan d’action qui prendra en compte les besoins et les ressources disponibles et décrira les modalités d’intervention sur le terrain.

 

Recrutement par simulation

« Par la signature de cet accord avec Pôle emploi, Orange réaffirme ses engagements en faveur de l’emploi et de l’insertion des personnes en situation de handicap. Les actions concrètes mises en œuvre dans ce cadre témoignent de notre volonté collective d’inclusion et de notre attachement à la diversité », explique Valérie Le Boulanger. Orange compte aujourd’hui parmi ses salariés 7 % de handicapés, mais souhaite aller plus loin et recruter dans ses cœurs de métier 150 collaborateurs, 360 alternants et stagiaires en situation de handicap de 2017 à la fin de 2019.

« Nous avons atteint et même dépassé l’obligation légale, mais nous souhaitons continuer à recruter des personnes en situation de handicap. Le problème, c’est que 80 % de la population en situation de handicap n’a que son bac, alors que chez Orange, nous recrutons sur bac + 2 minimum, et toutes les boîtes s’arrachent les profils spécialisés », détaille Sandrine Laborde, directrice du département recrutement régions de France chez Orange.

« En l’Europe, l’équité, l’environnement et le droit doivent l’emporter sur la loi du marché »

 

La décision autiste de Ford concernant l’avenir de son établissement industriel de Blanquefort, près de Bordeaux [le constructeur a annoncé jeudi 13 décembre l’arrêt de la production sur ce site en août 2019, écartant l’offre de reprise de l’entreprise belge Punch Powerglide soutenue par l’Etat], remet sur le devant de la scène la question des relations entre les grandes entreprises et les Etats : qui commande ? Pour sa part, la société civile répond clairement : aux Etats de faire respecter les valeurs qui fondent la souveraineté de nos sociétés démocratiques et ce d’autant plus qu’elles ne cessent de s’engager dans des traités internationaux qu’elles sont censées faire respecter, comme les conventions de l’Organisation internationale du travail, les principes de l’OCDE, la charte des Nations unies sur les droits de l’homme, etc.

 

Dans le cas de Ford, aucune justification ne pourra légitimer le refus d’une continuation d’activité qui conserve un maximum d’emplois

Les opinions publiques ressentent aujourd’hui comme un déni de démocratie l’impuissance des pouvoirs publics à utiliser un arsenal juridique désormais très complet pour faire valoir la primauté du politique sur l’économique. Il est d’autant plus étonnant que le Conseil constitutionnel ait décidé, en 2017, de censurer la loi sur le devoir de vigilance des multinationales, qui prévoyait d’infliger une amende aux firmes qui ne respecteraient pas leur obligation de prévenir les atteintes graves envers les droits humains et les libertés fondamentales. L’application extraterritoriale de ces principes est pourtant plus que jamais nécessaire à l’époque de la mondialisation.

Dans le cas de Ford, aucune justification ne pourra légitimer le refus d’une continuation d’activité qui conserve un maximum d’emplois, ne serait-ce qu’au regard des principes directeurs de l’OCDE signés par plus de quarante pays et qui imposent aux entreprises de « coopérer avec les partenaires sociaux et les autorités nationales compétentes pour atténuer au maximum tout effet défavorable » aux salariés. Ce point s’inscrit dans le cadre de « la conduite responsable des affaires » que les Etats développés et les grandes entreprises revendiquent aujourd’hui, mais dont elles se gardent encore d’appliquer rigoureusement les modalités, prenant le risque d’enlever toute crédibilité à ces approches de « régulation douce » et ouvrant la porte aux mesures coercitives à contre-courant d’une « globalisation civilisée » à laquelle on voudrait croire.

Semaine de 60 heures et quête « du pic d’activité » dans les centres logistiques d’Amazon

Dans le centre de Lauwin-Planque en 2014.
Dans le centre de Lauwin-Planque en 2014. DENIS CHARLET / AFP

Il se passe décidément quelque chose autour d’Amazon, le numéro un mondial de la vente en ligne. Et pas seulement l’installation de ses deux nouveaux sièges à New York et Washington, ou la volonté d’adopter une taxe au niveau européen sur les géants du numérique, les fameux GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon).

Le groupe de Jeff Bezos est eu cœur d’une nouvelle série d’articles, intitulée « Amazon Diaries » (le journal d’Amazon), rédigés par un employé de l’entreprise, sous couvert d’anonymat, et publiés sur le site du quotidien britannique The Guardian. Ils mettent en lumière les conditions de travail dans les centres logistiques, notamment lors de la période des fêtes de fin d’année.

L’article du 19 décembre est intitulé « Comment les courses de Noël conduisent les salariés d’Amazon à l’épuisement ». Il décrit la peak season (« saison du pic d’activité »), qui démarre lors du « Black Friday » (le 23 novembre, cette année) et se termine avec les fêtes de fin d’année, marquées par le « Peak Fest » (« la fête du pic d’activité »).

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Frénésie dans les centres logistiques

Jeff Bezos, PDG d’Amazon.
Jeff Bezos, PDG d’Amazon. Cliff Owen / AP

Il est ainsi décrit la frénésie d’activité s’emparant des centres logistiques d’Amazon. Pendant cette période de six semaines, le nombre de colis est tel que les salariés à temps plein font des « heures supplémentaires obligatoires », travaillant près de douze heures par jour, soixante heures par semaine. Dans le même temps, les salariés à temps partiel sont incités à effectuer « autant de services que possible ».

Les effectifs sont aussi renforcés par des travailleurs saisonniers qui sont moins payés, ne bénéficient d’aucun avantage et sont sur des horaires contraints qui les obligeront à travailler pendant toutes les vacances.

Des posters flatteurs sont accrochés dans l’entrepôt, montrant un membre du personnel tenant son scanner, avec des slogans tels que « Soyez un pro du pic d’activité ». Chacun est encouragé à publier des photos de « l’événement » sur la page Instagram de l’entreprise.

Les cadres motivent les salariés à coups de slogans, comme « on va dégommer » le record d’envois en une journée, avec la perspective de gagner un Kindle ou une enceinte sans fil Echo Dot, alors que certains préféreraient toucher de l’argent. Mais, assez rapidement, l’excitation retombe et les salariés sont exténués, comptant le nombre de jours avant la fin du pic d’activité.

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Grèves en Espagne, Allemagne et Angleterre

Manifestation devant un centre logistique d’Amazon, en Allemagne.
Manifestation devant un centre logistique d’Amazon, en Allemagne. PETER ENDIG / AFP

C’est contre ces cadences infernales que des salariés d’Amazon en Espagne, en Allemagne et en Grande-Bretagne se sont mis en grève lors des supersoldes du « Black Friday », pour exiger de meilleures conditions de travail.

Les employés, dont beaucoup étaient appelés à suivre le hashtag #amazonwearenotrobots (« Amazon, nous ne sommes pas des robots »), avaient déjà mené une action d’envergure en juillet pendant une opération promotionnelle d’Amazon, baptisée « Prime Day ».

Le leader mondial de la vente en ligne minimise l’ampleur du mouvement et défend sa politique sociale, affirmant avoir créé au Royaume-Uni plus de vingt-cinq mille emplois bien payés et se présentant en Allemagne comme « un employeur aussi fiable que bon ».

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Qui recrute les jeunes RH ?

Les ressources humaines font une place aux jeunes diplômés dans les grandes entreprises, mais dans des conditions moins favorables que les autres fonctions à même niveau de qualification, indique une étude APEC publiée le 14 décembre.

 

« Le secteur des services est le premier recruteur avec 67 % de jeunes RH   contre 23 % pour l’industrie, 6 % pour le commerce et la distribution, et 4 % pour la construction et le BTP. »

Les ressources humaines recrutent 9 % des jeunes diplômés de niveau bac+5 ou plus. L’accès à l’emploi en deux mois maximum est relativement rapide, mais la fonction RH est moins valorisée que d’autres pour les jeunes diplômés, révèle une étude de l’Association pour l’emploi des cadres (APEC) publiée le 14 décembre.

Moins souvent cadres, ils sont aussi moins souvent en CDI que leurs homologues de même niveau employés dans d’autres fonctions. 49 % des jeunes diplômés recrutés en ressources humaines obtiennent un emploi cadre contre 70 % sur l’ensemble des jeunes diplômés et 65 % sont employés en CDI contre 72 % pour les autres. Leur rémunération brute annuelle médiane est aussi de 11 % inférieure : « 21 000 euros contre 31 400 euros pour l’ensemble des jeunes diplômés, sur la base des promotions 2015 et 2016 » précise l’APEC.

Les jeunes diplômés en emploi en 2018 travaillent surtout les grandes entreprises. Ils sont 48 % dans des entreprises de plus de 1 000 salariés et 31 % dans des PME de moins de 250 salariés. « Les petites structures sont en proportion moins souvent dotées d’une équipe dédiée en RH que les plus grandes », commente l’APEC.

Secteur des services

Le secteur des services est le premier recruteur avec 67 % de jeunes RH (dont 12 % en informatique et télécommunications), contre 23 % pour l’industrie, 6 % pour le commerce et la distribution, et 4 % pour la construction et le BTP.

Enfin plus que d’autres fonctions, les ressources humaines sont ouvertes à des diplômés de diverses disciplines. Le lien entre la formation initiale et l’emploi occupé « se distend progressivement au cours de la carrière », précise l’étude. Certes 55 % des jeunes RH sont diplômés des ressources humaines, mais 11 % ont suivi une formation initiale en sciences humaines, 10 % en gestion et 6 % en droit. Seuls 4 % ont fait une école d’ingénieur contre 36 % une école de commerce. Ils sortent à 52 % de l’université. A noter que la fonction RH pratique une ouverture particulière aux universitaires.

Contrats courts : les exonérations de charge critiquées par l’OFCE

 

Voilà un rapport qui tombe à point nommé, pour le gouvernement mais aussi pour les partenaires sociaux qui copilotent l’assurance-chômage. Rendu public, mercredi 19 décembre, par la délégation sénatoriale aux entreprises, il plaide pour une « régulation économique » des contrats de travail de courte durée et suggère plusieurs pistes susceptibles de contenir le recours à ces formes d’emploi précaires. Une thématique inscrite au cœur du programme de campagne d’Emmanuel Macron. Elle doit être traitée, début janvier 2019, par les organisations syndicales et patronales, dans le cadre de leurs négociations sur une nouvelle convention Unédic, l’association paritaire qui gère l’indemnisation des demandeurs d’emploi.

Réalisée par l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), l’étude met en exergue une réalité qui, même si elle est identifiée et documentée depuis des années, frappe les esprits : la spectaculaire hausse des CDD courts (moins d’un mois). On en dénombre près de 17,6 millions, « maintenant », soit trois fois plus qu’en 2000. Au cours des dernières décennies, les employeurs ont, de plus en plus souvent, recruté du personnel pour des activités extrêmement brèves – la tendance connaissant toutefois « un léger infléchissement » depuis 2014. Une précision importante : l’écrasante majorité des salariés reste titulaire d’un CDI mais le ratio a baissé de près de dix points en une trentaine d’années, passant de 94,1 % en 1984 à 84,4 % en 2017.

Ces tendances s’accompagnent d’un net raccourcissement de la durée des CDD (46 jours en moyenne en 2017 contre 112 en 2001) et d’une vive progression de la « réembauche » – ce cas de figure où une personne est reprise, maintes fois, par son dernier employeur. Le développement des contrats de moins d’un mois « n’est pas l’apanage » du privé, souligne l’OFCE : les administrations publiques y ont concouru, elles aussi.

 

Salariés dans l’incertitude

Plusieurs facteurs sont mis en avant pour expliquer le phénomène : volatilité plus grande de la demande des consommateurs dans certains secteurs, extension du CDD d’usage (un statut très souple, qui permet d’enchaîner à l’infini des contrats)… Mais l’étude de l’OFCE révèle qu’un autre élément a joué un rôle crucial dans la précarisation des travailleurs : les politiques d’exonérations de charges sur les bas salaires, dont le volume a été quadruplé entre 2001 et 2008. En revanche, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), qui n’est pas ciblé sur les rémunérations les plus basses, semble avoir pesé dans le sens inverse : il « a pu modifier le comportement d’embauche des entreprises en limitant le recours aux contrats courts », note l’OFCE. Un constat à méditer, à l’heure où le CICE doit être transformé en allègement pérenne de cotisations.