Les suppressions d’emplois dans le monde entier mêleront licenciements et départs volontaires, précise le fabriquant d’ordinateurs et d’imprimantes américain.
Le Monde avec AFPPublié aujourd’hui à 08h08, mis à jour à 09h48
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Jusqu’à 9 000 emplois. Le fabriquant d’ordinateurs et d’imprimantes américain HP a annoncé jeudi 3 octobre un vaste plan de restructuration qui va conduire à la suppression de plusieurs milliers d’emplois sur les 55 000 que compte l’entreprise. Elle souhaite ainsi devenir une entreprise plus numérique et orientée vers les services.
Les 7 000 à 9 000 suppressions d’emplois dans le monde entier vont s’étaler sur trois ans et mêleront licenciements et départs volontaires à la préretraite, précise HP dans un communiqué.
Ce plan de restructuration, présenté par Enrique Lores, le nouveau président-directeur général qui prendra les rênes au 1er novembre, doit permettre à HP de s’adapter aux nouvelles habitudes de consommation de ses clients, en particulier en matière de cartouches d’encre, qui pendant longtemps ont été la vache à lait de l’entreprise.
Economie de 1 milliard de dollars envisagée
HP compte se concentrer davantage sur les services et proposer par exemple de vendre ses imprimantes à des prix cassés – comme elle le fait déjà – mais en échange le client s’engagerait à s’approvisionner en cartouches chez HP.
L’entreprise estime que grâce à cette restructuration elle pourra économiser 1 milliard de dollars par an à partir de l’exercice 2022.
HP est né de la scission en 2015 de Hewlett-Packard, le grand ancêtre des entreprises high-tech de la Californie et qui a été la première d’une longue série à être fondée dans un garage par William Hewlett et David Packard en 1939.
L’autre société née de la séparation, HP Enterprise, est spécialisée dans les serveurs et les machines de stockage de données destinées aux entreprises. M. Lores était à la tête de la division imprimantes quand il a été nommé en août pour remplacer Dion Weisler, qui avait annoncé son départ pour des raisons personnelles et son retour dans son Australie natale.
Lors de l’exercice 2018, HP avait engrangé un chiffre d’affaires de 58,5 milliards de dollars pour un bénéfice net de 5,3 milliards de dollars.
Des dispositifs ont été mis en place pour soulager les aidants qui s’occupent d’un proche dépendant ou handicapé. Mais ces derniers y ont peu recours car les conditions pour en bénéficier sont trop strictes ou contraignantes.
Par Pauline JanicotPublié aujourd’hui à 08h00, mis à jour à 10h57
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Quiconque assiste une personne âgée dépendante ou handicapée s’épuise forcément peu à peu. « Un tiers des aidants meurent avant la personne qu’ils aident, 40 % lorsqu’il s’agit d’un malade d’Alzheimer », alerte Serge Guérin, sociologue et spécialiste du vieillissement. Concilier sa vie professionnelle et son rôle d’aidant se révèle aussi très compliqué. Plus d’un Français sur six soutient au quotidien un parent, un enfant ou un proche en situation de dépendance. Parmi eux, plus de la moitié est en activité professionnelle.
Si les personnes âgées dépendantes ou handicapées peuvent toucher des aides financières (allocation personnalisée d’autonomie (APA)…), le dédommagement des proches aidants est, lui, presque inexistant. Dans de rares cas, ces derniers peuvent être salariés par la personne dépendante dont ils s’occupent (mais cela est impossible s’il s’agit de son conjoint, concubin ou pacsé) ou percevoir une partie de la prestation de compensation du handicap (PCH).
Le congé du « proche aidant » permet de cesser son activité pendant trois mois (renouvelables jusqu’à un an) pour aider un proche handicapé ou dépendant. Pour l’heure, il n’est toujours pas indemnisé
Néanmoins, trois congés distincts existent pour soulager les aidants qui travaillent. Le congé de « présence parentale » permet, par exemple, d’accompagner son enfant de moins de 20 ans handicapé ou malade. Sa durée peut atteindre 310 jours (soit 14 mois maximum) et peut être étalée sur trois ans. Lors de ce congé, le parent touche une allocation journalière, versée par la Caisse d’allocation familiale, s’élevant à 43,70 euros s’il vit en couple ou à 51,92 euros s’il vit seul. Le congé de « solidarité familiale » permet quant à lui de cesser de travailler si l’un de ses proches est en fin de vie. Sa durée est de trois mois, renouvelable une fois. Durant ce congé, une allocation journalière est versée par la Sécurité sociale. Elle s’élève à 56,10 euros dans la limite de 21 jours (pour un temps plein) ou à 28,05 euros dans la limite de 42 jours (temps partiel).
Enfin, le congé du « proche aidant » permet de cesser son activité pendant trois mois (renouvelables jusqu’à un an) pour aider un proche handicapé ou dépendant. Il peut être posé par un membre de la famille ou toute personne qui apporte une aide régulière pour l’aider au quotidien. Plus de 4 millions d’aidants actifs sont ainsi concernés. Pour en bénéficier, il faut justifier d’une ancienneté d’un an minimum dans son entreprise. Or, ce congé n’était jusqu’à présent pas indemnisé.
Droits à la retraite
Une mesure figurant dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2020 prévoit néanmoins qu’il le soit dès l’an prochain. Son montant devrait atteindre entre 43 et 52 euros par jour selon la composition du foyer, mais il doit encore être fixé par décret. « C’est une bonne nouvelle car ce congé était le seul à ne pas être indemnisé, ce qui limitait franchement son efficacité », estime Benoit Durand, directeur général de l’association France Alzheimer & maladies apparentées. cette indemnité pourra être versée pendant une durée de trois mois maximum pour l’ensemble de la carrière de l’aidant, qu’il soit salarié, fonctionnaire ou indépendant. Ce congé pourra, avec l’accord de l’employeur, être transformé en temps partiel ou bien fractionné. Dans ce cas, la durée minimale de chaque congé sera d’une journée. Il devrait également être comptabilisé pour les droits à la retraite.
Ces aménagements vont-ils améliorer l’efficacité de ce dispositif ? Il faut l’espérer car, si ces congés ont le mérite d’exister, « peu d’aidants y ont recours en réalité », constate Benoit Durand. Par exemple, selon le rapport du Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge, seules 545 personnes ont bénéficié du congé de solidarité familiale en 2016. « Ces congés sont encore méconnus et mal indemnisés, ce qui explique leur faible utilisation », commente Guillemette Leneveu, directrice générale de l’Union nationale des associations familiales (Unaf).
Le droit au répit finance l’accueil ou l’hébergement de la personne aidée dans une structure adaptée et permet ainsi aux aidants de prendre un peu de repos
Ils manquent aussi de lisibilité. « Les délais pour prévenir les employeurs sont, par exemple, variables selon les congés demandés », relève Mme Leneveu. Enfin, ils ne sont pas toujours évidents à poser. « Certains aidants n’osent en pas parler à leur employeur car ils craignent d’être stigmatisés. Ils n’ont donc parfois pas d’autres choix que de poser des RTT ou un arrêt maladie lorsque l’épuisement est trop grand », note Marie-Jeanne Richard, présidente de l’Union nationale de familles et amis de personnes malades et/ou handicapées psychiques (Unafam). Par ailleurs, un certain nombre de proches aidants, qui ne sont pas salariés, sont laissés au bord de la route. « Rien ou presque n’existe pour les plus jeunes qui accompagnent au quotidien un parent ou un frère malade ou en situation de handicap », rappelle Françoise Ellien, présidente de l’association nationale Jeunes AiDants Ensemble (JADE).
Le constat est le même pour le droit « au répit » qui peine à décoller. Cette mesure, instaurée lors de la loi d’adaptation de la société au vieillissement de 2015, permet aux aidants de prendre un peu de repos en finançant l’accueil ou l’hébergement de la personne aidée dans une structure adaptée. Son montant s’élève, en 2019, à 506,71 euros maximum par an. « C’est une aide indispensable et fondamentale mais les conditions pour en bénéficier sont trop limitées », constate Benoit Durand. Elle est actuellement réservée aux aidants de personnes âgées percevant l’APA et qui ont atteint son plafond d’éligibilité.
Seule une petite partie des 8,3 millions de proches aidants est donc susceptible d’en bénéficier. Un constat partagé par le rapport de Dominique Libault sur la concertation Grand âge et autonomie de mars 2019 : « La loi a créé une aide au répit et un relais en cas d’hospitalisation de l’aidant. Mais ces dispositifs, dont les critères d’activation sont restrictifs et dont la mobilisation s’avère complexe, sont peu utilisés. » Ils sont pourtant incontournables et devraient être au cœur des réflexions lors du plan de mobilisation nationale en faveur des proches aidants présenté cet automne par le gouvernement.
Article réalisé dans le cadre d’un partenariat avec Harmonie mutuelle
L’enseigne française de mode masculine change d’identité pour relancer ses ventes, notamment en France où elle envisage la fermeture de 26 de ses 545 magasins.
Par Juliette GarnierPublié aujourd’hui à 07h50, mis à jour à 09h46
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Celio s’offre un coup de jeune. L’enseigne de mode masculine, fondée en 1978, signe une campagne de publicité à la télévision et sur Internet, à partir du dimanche 6 octobre, en faisant appel à une nouvelle agence de publicité M & C Saatchi Gad. Cette vidéo de 14 saynètes doit « installer une nouvelle image » auprès de sa cible de clientèle « âgée entre 25 et 40 ans », précise Gaëlle de la Fosse, sa directrice générale depuis février.
La chaîne aux 1 313 magasins dans le monde en a urgemment besoin. En France, son premier marché, le secteur de l’habillement masculin peine à sortir de la crise. Le circuit des chaînes spécialisées, dont le chiffre d’affaires est en recul de 1,3 % depuis début janvier, selon l’Institut français de la mode, est bousculé par la puissance de feu de l’espagnol Zara et de l’irlandais Primark, et des prix pratiqués en ligne, chez le britannique Asos notamment. Plusieurs des concurrents de Celio ont déjà pris des mesures. Jules, chaîne détenue par l’Association familiale Mulliez, a notamment mené des plans de restructuration en 2018.
Celio, enseigne toujours détenue à 100 % par ses fondateurs, les frères Laurent et Marc Grosman, assure ne pas avoir besoin de mesures aussi drastiques. « Celio est leader du marché français ; elle représente 6 % des ventes de mode masculine. Chaque année, plus de 56 millions de personnes entrent dans un magasin Celio », explique Mme de la Fosse, ancienne consultante chez l’entreprise de services informatiques Capgemini et au cabinet Roland Berger.
Réduire ses coûts
La marque à l’astérisque rouge, qui exploite 545 magasins en France – soit plus du double des hypermarchés Carrefour en France –, espère aussi profiter de ses implantations « aux meilleures adresses »partout dans les centres commerciaux, les centres-villes et les zones commerciales de périphérie.
Il n’empêche. D’après nos informations, l’enseigne qui refuse de dévoiler sa rentabilité, cherche à réduire ses coûts depuis plusieurs années. Après avoir mené un plan social en 2015, portant sur quinze postes au siège social de Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), Celio a fermé 18 points de vente en France l’an dernier. Et, après un exercice 2018 marqué par une chute de 30 % de la fréquentation en magasin, la direction de l’enseigne a dévoilé un nouveau plan de restructuration en avril. Cette fois, il s’agit de fermer 26 magasins non rentables. Les syndicats évoquent la suppression de 86 postes et l’adoption d’un plan de reclassement interne, sur un effectif global de 4 200 personnes. « Il s’agit d’un pourcentage très limité de magasins », souligne Mme de la Fosse.
Le droit des sociétés a fabriqué, au nom de la liberté d’entreprendre, une puissance d’action sans principe de responsabilité, dénoncent, dans une tribune au « Monde », Kevin Levillain et Blanche Segrestin, les lauréats du Prix du livre RH 2019, créé par Syntec Recrutement en partenariat avec « Le Monde » et Sciences Po.
Publié aujourd’hui à 06h00, mis à jour à 09h35Temps de Lecture 4 min.
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Tribune. Qu’est-ce qu’une entreprise responsable ? Et qu’est-ce que « bien diriger » une entreprise ? Ces questions sont incontournables dans un monde où les entreprises ont développé des puissances d’innovation, mais aussi souvent de détérioration, à l’échelle de la planète. Elles appellent un profond effort de renouvellement théorique et doctrinal.
Il faut partir d’un constat : en droit, la notion d’« entreprise responsable » n’a pas de fondement. Si le droit du travail ou de l’environnement est venu imposer des règles de comportement aux entreprises, celles-ci ne sont tenues, comme tout citoyen, que de respecter la loi. Au-delà, c’est le principe fondateur de la liberté d’entreprendre qui prévaut. De sorte que le droit s’abstient autant que possible de dire ce qu’est la « bonne gestion » d’une entreprise. L’employeur est seul juge du bien-fondé de ses décisions. Et sauf situation particulière, le juge ne peut les remettre en cause.
Pour encadrer l’action des dirigeants, le droit établit en revanche des mécanismes de contrôle et des règles de pouvoir au sein des entreprises. C’est l’assemblée générale des actionnaires qui contrôle, en dernier recours, l’action des dirigeants. Or les actionnaires, dans la mesure où ils délèguent la gestion, sont censés ne pas s’immiscer dans les choix de gestion. Ils bénéficient d’une responsabilité limitée. Le droit des sociétés a donc fabriqué, au nom de la liberté d’entreprendre, une puissance d’action sans principe de responsabilité, puisque la gestion des dirigeants ne peut être mise en cause juridiquement (sauf action contraire à la loi) et qu’elle est contrôlée par ceux qui en sont présumés irresponsables.
Un schéma devenu intenable
Un tel schéma a pu fonctionner durant une partie du XXe siècle, mais il est devenu aujourd’hui intenable. D’une part, les actionnaires des entreprises cotées en Bourse se sont considérablement transformés. Les investisseurs institutionnels sont devenus des organisations très sophistiquées, qui investissent dans des portefeuilles très larges de sociétés en automatisant souvent les décisions d’investissement sur des critères financiers. Ils sont donc, par construction, peu intéressés par l’activité des entreprises et leurs éventuelles conséquences sociales ou environnementales.
D’autre part, la puissance des entreprises a changé d’ampleur et d’échelle. Il faut abandonner l’idée que l’entreprise est un simple agent économique qui crée des emplois et fait circuler des marchandises. L’action des entreprises, et pas seulement celle des plus grandes, est devenue déterminante dans la construction des sociétés, des Etats et du bien-être humain. La controverse actuelle sur la puissance des GAFA n’en est que l’exemple le plus connu.
Au sein de l’entreprise, ce métier est rattaché à la stratégie, à l’innovation, à la recherche et au développement ou encore aux ressources humaines. Mais l’activité est aussi pratiquée par les villes, les régions, les Etats, les institutions ou la Commission européenne.
« Les gens vivent comme si la paix était une chose acquise, comme s’il n’y aurait jamais d’accident nucléaire. Moi, je sais que cela peut arriver, que tout peut arriver ! » Cécile Wendling exerce le métier de prospectiviste. « A la différence du prévisionniste, le prospectiviste travaille sur les ruptures, sur ce qui fait dévier le chemin à long terme. Pour lui, demain n’est pas la continuité d’hier, il s’intéresse au futur, là où rien n’est écrit ! » explique-t-elle. Elle donne l’exemple de l’automobile : les voitures qui verront le jour dans sept ans sont connues, celles que nous aurons dans sept à quatorze ans en sont au stade de la recherche et du développement ; la prospective, elle, s’intéresse à ce qui se passera après.
Son métier est d’identifier les sujets qui feront disruption, de les étudier afin d’anticiper les scénarios possibles et d’évaluer leurs conséquences. La prospective est d’abord apparue dans le domaine militaire avant de s’imposer dans d’autres secteurs d’activité stratégiques pour les Etats.
Souvent envisagée sous l’angle juridico-politique, la prospective s’étend bien au-delà. « Nous traitons de sujets extrêmement variés : de la blockchain à l’économie circulaire, du véhicule autonome à l’avenir du travail, de l’intelligence artificielle à la santé personnalisée », explique Cécile Wendling. Venant d’être nommée responsable de la stratégie de sécurité, des études et de l’anticipation des menaces pour le groupe AXA, qu’elle avait rejoint en 2014 comme responsable de la prospective, elle couvre désormais les risques physiques, cyber ou géopolitiques. « Tout ce qui touche à la résilience opérationnelle du groupe, à la continuité de ses activités », résume-t-elle.
Au sein de l’entreprise, l’activité de prospectiviste est rattachée à la stratégie, à l’innovation, à la recherche et au développement ou encore aux ressources humaines. Mais elle est aussi pratiquée par les villes, les régions, les Etats, les institutions ou la Commission européenne, dont la nouvelle composition compte un commissaire chargé des relations interinstitutionnelles et de la prospective.
Reprenant à son compte la phrase de Pierre Bourdieu à propos de la sociologie, Cécile Wendling aime dire que « la prospective est un sport de combat », bien qu’elle pratique plus le yoga et la méditation que les arts martiaux !
Lorsqu’on lui demande de quoi sont faites ses journées, elle énumère : « De la lecture, beaucoup de lecture, des interviews de personnalités, de métiers, de profils très différents, des voyages, la participation à des expérimentations afin de récolter des données et de les analyser… » Bref, tout ce qui nourrit les scénarios qu’elle et son équipe élaborent et qui leur permet d’analyser leurs conséquences et leurs impacts.
Chez les employeurs, les normes associées à la « génération Y » et à la jeunesse sont plus puissantes en France qu’ailleurs en Europe, selon une étude.
Lorsqu’elle a débarqué sur le marché du travail, début août, avec son double master en ressources humaines et gestion sous le bras, Zoë Dravert était pleine de confiance, pleine d’enthousiasme. Mais sans doute un peu « trop » . « Quand j’ai dit au recruteur que j’avais plein d’idées pour l’entreprise, il m’a soupçonnée d’avoir un problème avec l’autorité, relate la jeune femme de 26 ans avec amertume. Je lui ai répondu qu’on pouvait être à la fois ambitieuse et respectueuse de la hiérarchie. Il m’a dit que je donnais l’impression de n’en faire qu’à ma tête, et que c’était symptomatique des gens de mon âge. » La suite de l’entrevue a été du même tonneau :
« Il m’a demandé si j’étais prête à vraiment m’engager pour l’entreprise, à ne pas compter mes heures. Je suis sûre qu’il n’aurait pas posé la question à quelqu’un de plus âgé. »
Les jeunes diplômés sont-ils prisonniers de stéréotypes qu’on accole à leur génération ? Comment échapper à ces images et ces associations, lorsqu’on ne s’y reconnaît pas ? Tel est l’objet d’une étude publiée en juillet 2019 par Jean Pralong, professeur de gestion des ressources humaines à l’EM Normandie. Le chercheur a suivi les carrières de titulaires de masters en gestion, et interrogé des managers et des cadres des ressources humaines sur leur perception des jeunes diplômés dans l’Hexagone et dans cinq pays européens (Royaume-Uni, Portugal, Suisse, Pays-Bas et Allemagne).
« Individualistes », « trop créatifs »…
Trois stéréotypes sur les « jeunes diplômés » sont ressortis : les jeunes débutant leur carrière aujourd’hui seraient très attachés à l’équilibre vie privée/vie professionnelle, auraient de fortes attentes sur le cadre de travail et seraient difficiles à fidéliser. Ils seraient très individualistes, auraient du mal à supporter l’autorité, ce qui complique leur intégration dans des équipes. Ils seraient très, voire trop créatifs. « Toutes ces croyances sont relativement partagées dans les six pays étudiés. Mais c’est en France qu’elles sont les plus fortes, d’après nos résultats », explique Jean Pralong.
Un des constats de départ de son étude : à compétences égales, selon Eurostat, les jeunes diplômés sont moins attractifs en France que dans les autres pays européens. Les bac + 5 tricolores sont 9,2 % à être au chômage un an après leur diplôme, contre seulement 3,7 % pour leurs homologues du reste de l’Union européenne.
Le chercheur y voit un effet direct des « images négatives » associées aux jeunes en France. « Les caractéristiques supposées des jeunes sont des handicaps à leur insertion. Elles font hésiter les entreprises avant de recruter un jeune diplômé et avant de créer des postes qui leur sont destinés. Elles expliqueraient le choix des CDD comme stratégie de pré-embauche, c’est-à-dire comme moyen de vérifier concrètement qu’un jeune candidat va se comporter de façon adéquate. »
Précarité, difficultés d’intégration, établissements plus gros qu’ailleurs : les directeurs du département sont souvent seuls, en première ligne. Après le suicide de l’une des leurs, à Montreuil, ils témoignent.
Il n’est que 11 heures, un mercredi matin, et Sophie (les prénoms ont été changés, à la demande des enseignants) est déjà débordée. En moins d’une heure de conversation, cette directrice d’école de Pantin (Seine-Saint-Denis) sera dérangée trois fois, d’abord par deux enfants, puis par une enseignante, et enfin par le directeur d’une école voisine. « Si vous ne m’aviez pas appelée, je ne me serais pas assise à mon bureau de toute la matinée », résume-t-elle. A 53 ans, cette enseignante déchargée « à plein temps » – elle ne fait plus la classe et se consacre à sa fonction de directrice – dirige seule une école primaire de quinze classes, soit 360 élèves.
C’est à quelques centaines de mètres de là, dans la même ville, que travaillait Christine Renon, la directrice de maternelle retrouvée morte le 26 septembre dans son établissement. Plusieurs milliers d’enseignants se sont donné rendez-vous, jeudi 3 octobre, pour exprimer leur tristesse et leur colère devant les services départementaux de l’éducation nationale (DSDEN) de Seine-Saint-Denis, à Bobigny, le jour de ses obsèques.
Avant son suicide, l’enseignante avait envoyé des lettres à ses collègues et à l’inspection d’académie, où elle dénonçait ses conditions de travail. Un mouvement de grève à l’appel de l’intersyndicale du premier degré a rassemblé jeudi 43 % de grévistes en Seine-Saint-Denis et 23 % sur l’académie de Créteil, selon le ministère de l’éducation nationale. Le SNUipp, syndicat majoritaire dans le premier degré, revendique 65 % de grévistes en Seine-Saint-Denis.
Département le plus pauvre de métropole
Si l’émotion s’est exprimée partout en France, la situation des écoles de Seine-Saint-Denis est particulière. Le département le plus pauvre de France métropolitaine compte 1,6 million d’habitants : 29 % d’entre eux vivent en dessous du seuil de pauvreté (pour 14 % de moyenne nationale), et 39 % dans des quartiers « politique de la ville » (QPV). A ce public spécifique s’ajoute la taille des établissements : 37 % des écoles de Seine-Saint-Denis ont plus de onze classes – soit plus de 250 enfants – alors que la moyenne nationale est à 9 %.
L’arrêt de la dernière usine française à Sarlat signe la fin d’une époque. La production de tabac souffre de la concurrence des géants chinois, brésilien et indien.
Le dernier atelier de transformation de tabac, installé à Sarlat-la-Canéda (Dordogne), dans le Périgord, ferme ses portes. Tout un symbole. Cet arrêt signe la fin de la filière tabac en France. Un projet de structuration de la tabaculture française avait pourtant été déposé en décembre 2017, à la demande du président Emmanuel Macron qui avait sollicité en ce sens l’ensemble des filières agricoles françaises. Il reste encore 670 agriculteurs planteurs de tabac sur le territoire. Combien seront-ils demain ?
« Leur nombre passera très vite à 400 voire 300 », pronostique François Vedel, président de la Fédération nationale des producteurs de tabac (FNPT). Il évoque l’irrésistible déclin de la culture de cette plante en France. Quelques chiffres illustrent cette évolution rapide. M. Vedel estime qu’au tournant des années 1970, lorsque les Français fumaient encore dans leur voiture, 41 000 agriculteurs produisaient du tabac sur 20 000 hectares. Ils en récoltaient près de 46 000 tonnes. En 2010, il ne restait plus que 2 000 exploitants sur 6 900 hectares et la production n’était plus que de 17 000 tonnes. Quant à la dernière récolte jaugée par l’institut public FranceAgrimer, celle de l’année 2018, elle n’était plus que de 7 000 tonnes sur une superficie cultivée de 2 700 hectares.
Beaucoup d’éléments concourent à expliquer cette attrition. Le coût de la main-d’œuvre tout d’abord. En effet, la culture du tabac nécessite beaucoup de travail. Même si la mécanisation a fait son œuvre, réduisant l’effort de moitié, « il faut encore compter près de trois cents heures de travail à l’hectare. A comparer aux cinq heures de travail par hectare pour le maïs », affirme M. Vedel. Cette demande de bras, en particulier lors des récoltes en juillet et août, a longtemps bénéficié du cercle familial élargi venant prêter main-forte à la ferme. Une forme de travail informel qui a quasiment disparu, alourdissant d’autant la facture.
Mondialisation
La culture, souvent vue comme un juteux apport financier pour les petites exploitations de polyculture-élevage, est devenue progressivement moins rentable. Cette perte d’intérêt économique a connu un coup d’accélérateur avec le changement de cap de la politique agricole commune (PAC) en 2010. L’aide spécifique à cette culture a disparu. Une décision en conformité avec la politique de santé publique européenne. La lutte contre le tabagisme est devenue une priorité des autorités sanitaires des pays de l’Union. Progressivement, l’aide à l’hectare que continue à toucher chaque agriculteur a tendance à converger vers un montant moyen défini à l’échelle européenne, le tabac perdant toute spécificité.
Le 23 septembre, Christine Renon, directrice d’une école maternelle en Seine-Saint-Denis, se donnait la mort. Elle expliquait son geste dans une lettre. Johanna C., directrice d’école en Seine-Maritime, raconte ce qu’elle a ressenti à la lecture de sa lettre.
Par Violaine MorinPublié aujourd’hui à 11h29, mis à jour à 11h31
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« Quand j’ai découvert le suicide de Christine Renon, sa lettre d’adieu était déjà en ligne. Je l’ai lue sur Twitter, mon principal canal d’information avec la radio. Ses premiers mots, j’aurais pu les écrire. La suite me correspond moins, car je ne suis pas dans une situation aussi grave. Mais je me suis retrouvée dans ce qu’elle dit sur l’accumulation de détails qui finissent par générer une terrible charge mentale.
Quand on est directeur d’école, on change de métier à mesure que les problèmes surviennent. Je deviens infirmière pour un enfant qui s’est blessé, gestionnaire pour un colis qui arrive ou pour un enseignant qui a un problème de photocopieuse… Heureusement, j’ai moins la casquette d’assistante sociale que des collègues comme Christine Renon : je ne rencontre ces problèmes-là que deux ou trois fois par an. Pour certains, c’est tous les jours qu’il faut gérer les signalements et les conflits avec les parents…
Moi, je voudrais juste qu’on me prête un escabeau pour remettre en place les rideaux occultants que j’ai dû déplacer en urgence pendant la canicule de juin et qu’on retrouve ma commande de matériel de soins qui a été perdue – ma pharmacie est vide à force d’attendre. Ce métier, c’est être pris en permanence dans des injonctions contradictoires. Je dois organiser les classes pour la canicule, mais le personnel censé intervenir ne pourra pas se déplacer avant le début des fortes chaleurs. Je dois assurer la sécurité des élèves, mais les gens entrent et sortent de l’école – malgré le plan Vigipirate – sans se signaler. Cela me met une épée de Damoclès au-dessus de la tête : le jour où il y aura un problème, ce sera de ma faute.
« Au fond, il y a une idée qui se dégage de la lettre de Christine pour nous tous, les directeurs : est-ce que ça vaut la peine de continuer ? On a choisi d’exercer cette fonction, mais on le paie très cher. »
Au fond, il y a une idée qui se dégage de la lettre de Christine pour nous tous, les directeurs : est-ce que ça vaut la peine de continuer ? On a choisi d’exercer cette fonction, mais on le paie très cher. Je ne suis déchargée de mes heures d’enseignement qu’une journée par semaine, mon école n’ayant que six classes. Et pourtant, je n’ai pas envie de renoncer à ma classe. Quand mes élèves de CP réalisent qu’ils savent lire, ils ont des étincelles dans le regard. Quand ils écrivent leur première phrase sans faute, qu’ils réussissent à se corriger seuls… J’ai la chance de les avoir à l’âge des premières fois ! Hier, j’ai passé ma journée à penser à Christine, en me disant, au fur et à mesure que ma journée s’envenimait, que je n’étais pas au point où elle en était.
On me répète souvent que mon école n’est pas à plaindre, car elle n’est pas en éducation prioritaire. Mais une chose est sûre : la boule dans la gorge que Christine évoque dans son courrier, je la connais. Le même jour, des collègues se sont disputées à propos du café. J’ai essayé de relativiser : si on se dispute à propos du café, c’est qu’on n’a pas de problème plus important… ou bien peut-être est-on tellement sous pression que même la pause-café devient un problème ? »
Gérard Houa, ancien actionnaire minoritaire d’Aigle Azur, propose de reprendre la compagnie placée en redressement judiciaire et d’y investir 30 millions d’euros.
Par Guy DutheilPublié hier à 11h12, mis à jour à 11h09
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Lueur d’espoir ou dernier sursis ? Une offre de reprise de la compagnie aérienne XL Airways, placée en redressement judiciaire le 23 septembre, a été déposée, mercredi 2 octobre, juste avant l’audience du tribunal de commerce de Bobigny. Elle émane de la société Lu Azur, fondée par Gérard Houa, l’un des actionnaires minoritaires d’Aigle Azur, placée en liquidation judiciaire le 27 septembre par le tribunal de commerce d’Evry.
M. Houa avait été l’un des candidats repreneurs déclarés d’Aigle Azur, avant que son projet soit écarté par le tribunal au motif qu’un actionnaire ne pouvait être candidat à la reprise de sa propre société. Lu Azur assure pouvoir apporter 30 millions d’euros pour relancer la compagnie, dont 15 millions d’euros de fonds propres et 15 millions sous forme d’un prêt d’actionnaire.
Il s’agit d’un montant proche des 35 millions d’euros recherchés par Laurent Magnin, PDG de XL Airways, pour financer son activité. Outre cet investissement, M. Houa se propose de reprendre 276 salariés, un peu moins de la moitié de l’effectif actuel de la compagnie. De même, il ne conserverait que deux des quatre appareils de la flotte. Le potentiel repreneur souhaite notamment fermer les lignes déficitaires vers la République dominicaine, les Antilles et La Réunion, pour ne conserver que les vols vers le Mexique. Le tribunal rendra sa décision vendredi.
Lancée dans sa quête d’un financement de la dernière chance, la direction de XL Airways avait auparavant cherché le soutien, mercredi, de la Banque publique d’investissement (Bpifrance). Interrogé, mardi, au micro de BFM Business, Nicolas Dufourcq, directeur général de Bpifrance, s’était étonné de ne pas avoir été sollicité par les dirigeants d’Aigle Azur ou de XL Airways. « Ces entrepreneurs ne sont jamais venus (…). Demandez-leur pourquoi ils ne sont jamais venus nous voir ? », s’était-il interrogé.
« Je tiens à vous informer que via votre autorité de tutelle [le Comité interministériel de restructuration industrielle (CIRI)], nous avons, à d’innombrables reprises, sollicité votre intervention pour accompagner XL Airways », lui a répondu M. Magnin. Le 30 septembre, XL Airways a arrêté tous ses vols, laissant sans solution quelques centaines de passagers. La mise en liquidation judiciaire de la compagnie pourrait peser sur les finances de nombre de tour-opérateurs.
D’après nos informations, XL Airways avait déjà vendu plus de 130 000 billets, dont une majorité par le biais des agences de voyages. A la différence des passagers qui ont acheté leur billet en passant par le site Internet de la compagnie – et ne seront pas remboursés –, ceux qui se sont adressés à un tour-opérateur pourraient l’être.